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| [Dunkerque] On garde le cap ? [Simon - Vivonne] | |
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| Sujet: [Dunkerque] On garde le cap ? [Simon - Vivonne] 27.02.14 15:00 | |
| -COMBIEN?-une cinquantaine, monsieur.Face au jeune officier qui observait ses réactions d'un œil inquiet, Louis pivota sur les talons, tournant le dos au jeune homme pour que celui-ci ne voit rien de la colère qui l'agita. Une cinquantaine de mutins...cinquante! Le chiffre était bien trop énorme et demain, ça ne serait plus cinquante, mais cent hommes révoltés! Le temps était exécrable, la dernière bataille, soldée par un échec, avait démoralisée les marins qui, bien souvent, avaient rejoint la mer par dépit. Que dire de la solde? Elle n'arrivait pas, comme toujours; et lorsque celle-ci pointait enfin, elle était si maigre qu'elle ne pouvait satisfaire ceux qui donnaient leurs vies pour une guerre dont ils n'en voyaient le bout. Que faire? Il connaissait assez l'intimité des ministères pour savoir que l'argent du Trésor s'envolait. Colbert avait du augmenter des impôts, lui-même avait du piocher dans ses finances personnelles - bien loin du monticule d'or que l'on imaginait! - afin de pourvoir à une flotte à peu près équipée. La situation n'engageait rien de bon, et seule la nouvelle de prochaines négociations étaient un maigre rayon de soleil au travers des épais nuages qui s'amoncelaient au-dessus de Dunkerque. Jetant un œil à la carte marine qui s'étalait sur sa table de mesures, il repoussa le compas qui masquant le nom de la Manche et releva enfin les yeux vers l'officier. -Avez-vous d'autres nouvelles de ces humeurs, demanda-t-il au garçon une fois la silencieuse colère passée? -Non, monsieur. Que devons-nous faire avec les mutins? -Je ne veux pas de sang. La justice du roi tranchera là-dessus après la guerre. Passez-les aux fers, laissez-les à terre, qu'il n'aille pas mettre ces idées dans le crâne des autres. Au moins remous sur les bâtiments, arrêtez les fauteurs de trouble. -Bien, monsieur. -Autre chose?-On dit que le peuple de Paris rechigne aux impôts.Louis leva un sourcil perplexe. Il y avait bien longtemps que les parisiens n'avaient pesté contre des impôts, mais le conflit rendait l'affaire prévisible. -Et le Parlement, que fait-il?-Aux dernières nouvelles, il appelait au calme. Il se tournait vers le président Molé.-Evidemment, lâcha Louis en levant les yeux au ciel. Mais le fils n'est pas le père...il faut espérer que ces grondements se tairont rapidement...enfin cette fois-ci, nous avons un véritable roi, à défaut d'un ministre apprécié. Y-a-t-il eu d'autres nouvelles? De la duchesse? -Ce pli est arrivé pour vous, mais je doute qu'il s'agisse de la duchesse, monsieur.Oubliant les grognements des parisiens, Louis reconnu aisément le sceau royal sur l'enveloppe cachetée et même s'il savait pertinemment que la lettre avait été rédigée par Louvois, il ne pu que s'en satisfaire. Congédiant l'officier, il parcouru rapidement les quelques lignes tracées par le ministre et au fil de sa lecture, un mince sourire apparu sur son visage, chassant les mauvaises nouvelles récemment apportées. Enfin l'orgueilleuse Angleterre se décidait à ouvrir les négociations! Cette guerre lasse allait peut-être prendre un nouveau tournant et Louis espérait que la paix serait à la clef. La France, depuis le traité des Pyrénées, n'avait connu que six ans de paix, ce conflit contre la Lorraine ne pouvait s'éterniser plus longtemps. Mais ce qui élargissait le sourire du duc était la demande du roi qui l'envoyait en Angleterre apporter son soutien aux discussions maritimes. Il n'y avait pas de reconnaissance plus gratifiante que cette confiance de celui qui avait partagé ses jeux d'enfants! Mais les négociations maritimes, Louis le savait, allaient devoir être menées avec plus d'âpreté. Si l'armée terrestre s'illustrait à Verdun ou Epinal, la mer était le terrain de prédilection de la flotte anglaise et de son alliée, celle qu'il nommait encore l'Invincible Armada. Espagnols et anglais étaient bien plus redoutables que la France, et les Provinces Unies ne pouvaient faire le poids. Dans ce jeun diplomatique, il convenait d'en ressortir avec une paix qui profite à tous et la situation actuelle ne présageait rien d'agréable à la France. Il fallait à tout prix préparer ce traité pour éviter d'en sortir dépouillés. Perdre les Trois Evêchés serait un terrible camouflet pour le roi! Il songea à Lévi. L'officier était brillant, jeune, prêt à servir son pays comme le voulait sa famille. Il ferait un excellent intermédiaire pour tâter le terrain de leurs ennemis. La chose était inévitable, s'il voulait préparer une paix qui convienne à la France. L'espionnage était une pratique pour laquelle il avait réellement peu de scrupules et envoyer le jeune Lévi dans la gueule du loup en était la suite logique. L'imposante horloge de la maison du gouverneur du port sonna ses neuf coups nocturnes. L'heure était trop tardive pour convoquer l'état-major et rien ne pressait, nul ne partirait en Angleterre avant plusieurs jours. Lévi devait certainement s'amouracher de quelques jeunes femmes et il n'eut pas de cœur à l'en déloger...toutefois….une si heureuse nouvelle ne pouvait se partager seul et ouvrant sa porte à la volée, il cria après le jeune officier. -Envoyez quelqu'un chez le duc de Brabant! Que ce vieil hollandais vienne goûter à ce cru de Bordeaux que l'on m'a envoyé avant mon départ!L'officier déguerpi aussitôt et rejoignant l'un des salons de la demeure, Louis s'affala dans l'un des épais fauteuils, un verre de liqueur à la main. Un jour, les mutinés, la solde, la paix, l'Angleterre et l'Espagne seraient traités...mais pas ce soir. Ce soir, il y avait Brabant. |
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| Sujet: Re: [Dunkerque] On garde le cap ? [Simon - Vivonne] 22.03.14 17:07 | |
| “Des mutineries côté français, il ne manquait plus que ça.” Le duc de Brabant se laissa tomber sur une chaise, profondément ennuyé par cette nouvelle. Les traits tirés de son visage témoignaient de la fatigue qui s'était emparé de lui. Il ne dormait pas, passait des heures allongé, les yeux fermés, à supplier le sommeil de venir mais rien n'y faisait. Les mille pensées qui l'assaillaient l'empêchaient de s'endormir. L'issue de la guerre semblait toujours loin. La coalition ennemie représentait un terrible adversaire, et même si les Français et les Néerlandais semblaient avoir le dessus sur terre, leurs opposants ne baissaient pas les bras. Une bataille navale serait extrêmement difficile à gagner, et même si Simon ne rechignait jamais à partir en mer, il ne souhaitait pas vraiment affronter ne serait-ce que les Anglais.
“Et de notre côté, comment se présentent les choses ?” Il ferma les yeux quelques secondes, ayant presque peur de la réponse de l'officier. “Pour le moment, nous n'avons pas de risque de mutinerie. Nos hommes ne semblent pas vouloir se rebeller. Mais si la mutinerie des Français se poursuit, nous pourrions en subir les conséquences. -Bien. Je vais voir avec l'amiral Ruyter ce que nous allons faire. Je vous remercie.”.
Le duc de Brabant détestait l'amiral Ruyter, mais celui-ci étant son supérieur, il était bien obligé de travailler avec lui. Aux yeux de Simon, l'amiral n'était qu'une créature de Jean de Witt, un de ces hommes qui espéraient construire leur fortune sur la déchéance des Orange-Nassau. Mais Simon et sa famille n'étaient pas de ceux qu'on détruisait facilement et ils étaient toujours là, préparant le jour où enfin ils prendraient le pouvoir à nouveau. Aux yeux de l'amiral Michiel de Ruyter, Simon n'était là que grâce à sa famille et n'avait aucun mérite, si ce n'est d'être bien né. C'était là une critique qui blessait le duc de Brabant qui estimait avoir fait ses preuves. Personne ne l'avait épargné lors de ses premiers voyages en mer mais à force de persévérance, il avait montré qu'on pouvait lui faire confiance et il savait mériter aujourd'hui son titre de capitaine. C'était ainsi un mépris réciproque qui régnait entre les deux hommes et ils ne se le cachaient guère.
“Ah Brabant, vous venez me voir pour les mutins français ?” L'amiral recevait Brabant dans la bibliothèque du manoir où il résidait. Face à Ruyter, Simon avait toujours l'impression d'être jugé, quoi qu'il puisse dire ou faire. Il savait que jamais il n'obtiendrait la confiance ou ne serait-ce que le respect de cet homme. “Oui, amiral. La situation n'est guère au beau fixe chez les Français. La rébellion risque de contaminer nos hommes si nous n'y prenons pas garde. -Que proposez vous ?” Il testait Simon. Le duc retint un soupir d'agacement. Pourquoi, après tant de temps, l'amiral tenait toujours à le tester ? Michiel de Ruyter avait bien une idée de ce qu'il fallait faire mais il semblait vouloir connaître l'avis de Simon avant. “Je pense qu'il faut prévenir plutôt que guérir. Faisons savoir à nos homme que toute rébellion sera sévèrement réprimée et que nous n'accepterons en aucun cas que des rumeurs de mutinerie circulent parmi nos rangs. -Et pourquoi n'attendrions-nous pas tout simplement pour voir si nos hommes sont tentés par une mutinerie ? S'il n'y a aucune rébellion, cela nous évitera de proférer des menaces. Simon ne put réprimer un sourire. Le vieux loup de mer attendait une argumentation en bonne et due forme même si de toute évidence, il penchait lui aussi pour la solution proposée par Simon. -Attendre serait trop dangereux. Nos hommes auraient moins peur des représailles et n'hésiteraient pas à parler entre eux de rébellion. En se sachant nombreux à vouloir faire une mutinerie, ils se sentiront plus forts que nous. Ils savent que nous avons besoin d'eux. Il faut que nous leur fassions peur tout de suite. Et je pense qu'il faudrait faire en sorte qu'ils ne se fassent pas confiance entre eux. On pourrait par exemple sous-entendre que certains d'entre eux sont nos informateurs. Ils ne se feront pas confiance et n'oseront plus se plaindre à personne. Sûr de lui, Simon observait l'amiral, attendant sa réaction. Michiel de Ruyter n'avait pas envie d'approuver le duc de Brabant, ça se lisait dans son regard. Simon brisa le silence en poursuivant. “Je disais que nos hommes savent que nous avons besoin d'eux. Nous devrions leur faire comprendre qu'ils ont besoin de nous. -Et comment ? -Augmentons leur paie, par exemple. Et si vous m'approuvez, je vais préparer leur retour aux Provinces-Unies. Si nous gagnons cette guerre, ils seront reçus en héros. Faisons-leur savoir que les Néerlandais comptent sur eux. -Vous me proposez de leur faire des promesses qui ne seront pas tenues. -Non, amiral. Je vous propose de faire des promesses qui seront tenues. Soyons sévères avec eux, mais bons. -Bien, Brabant. Je vais en discuter avec le Grand Pensionnaire.”
Il faudrait un miracle pour que Jean de Witt approuve les idées proposées par le duc de Brabant, mais Simon savait qu'il n'y avait pas d'autres solutions. Il fallait que les vieilles rancunes disparaissent pour mener à bien cette guerre mais Simon était le premier à savoir que mettre de côté ses ressentiments n'était pas une mince affaire. Qu'importe. Il savait qu'il avait raison, et de Witt et de Ruyter seraient obligés de le reconnaître.
Après cette discussion, Simon de Brabant n'avait qu'une envie : dormir. Ce n'était certes que le milieu de l'après-midi mais il n'y a pas d'heure pour quelqu'un qui n'a pas dormi depuis plusieurs jours. A peine rentré dans son bureau, un valet vint lui apporter une lettre “Une lettre de votre épouse, Monsieur.”. Simon leva les yeux au ciel et ne daigna pas ouvrir la lettre. “Rhof, de quoi se plaint-elle encore ?”. Le duc s'installa dans un fauteuil et ferma les yeux. Au diable Bianca, il avait bien d'autres soucis en tête en ce moment pour rajouter celui d'une femme détestable. Simon laissa Morphée s'emparer de lui sans résistance.
“Hum, euh. Monsieur ?” Mais qui donc osait sortir le duc de Brabant de son sommeil ? Simon ouvrit les yeux, s'apprêtant à renvoyer l'imprudent mais celui-ci ne lui laissa pas le temps de lui répondre. “Un officier vous demande. Le duc de Mortemart souhaite vous voir.” Puis, sans demander son reste, le valet disparut. Simon jeta un oeil sur l'horloge : 21h30. Il avait dormi cinq heures, ce qui était un miracle. Sans Mortemart il aurait sans doute dormi toute la nuit mais il n'était pas mécontent d'aller rejoindre son vieil ami. Quand rien n'allait, il y avait toujours Vivonne, et lui ne changeait pas !
“Mortemart, mon ami ! J'espère que vous avez une bonne raison pour m'avoir réveillé !” Une fois installés devant une bonne bouteille, les amis discutèrent des affaires qui les occupaient en ce moment, c'est-à-dire la guerre. Il fallait bien soulever les sujets épineux, parfois. Et puis la nuit serait longue, ils pourraient discuter de tout et de rien dans quelques heures, en espérant que Vivonne ait plusieurs bouteilles à offrir, mais sur ce point Simon n'avait aucun doute. “Alors, cette mutinerie. Qu'allez-vous faire ? Figurez-vous que le vieil amiral m'a demandé mon avis. Il va en discuter avec de Witt, la blague. Ils seront bien obligés de se ranger à mes propositions, de toute façon.” Simon but une gorgée de vin. “Des nouvelles du front ? De vous à moi, Vivonne, j'espère que cette guerre sera bientôt finie. J'aime beaucoup Dunkerque, mais de là à y rester longtemps. Enfin, le point positif, c'est que ma femme ne risque pas de me suivre jusqu'ici !” Le duc eut un éclat de rire. Mortemart avait eu raison de le faire venir ! |
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