« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Libre comme les cieux : il brûle comme l'enfer ! Côté Lit: Tous les anges et les démons de cette terre s'y étendent pour mon plus grand plaisir... Discours royal:
ANDROGYNE l'Allure stupéfiante.
► Âge : 23 ans
► Titre : Abbé de Saint-Seine - Comtesse des Barres - les yeux et les oreilles de la Cour...
► Missives : 382
► Date d'inscription : 02/08/2011
Sujet: Madame la Comtesse vous invite... [Topic commun] 17.01.14 0:05
Madame
la Comtesse
vous invite...
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Allons allons ! Versaillaises et versaillais, trêve d'inquiétudes et d'heures sombres ! Comme on dit au mois de mai : fais ce qu'il te plait ! Et la Comtesse Olympe des Barres (aka Thimoléon de Choisy) en personnalité incontournable (et peu discrète) de la cour l'a bien comprit. C'est donc avec une débauche de moyens que la dame (très moustachue...) se fait un immense plaisir de vous inviter pour une "garden party" nocturne au, si bien nommé, Temple du Goût, son hôtel particulier. Avec la complicité de Christian de Sudernamie, cette fête sera l'occasion pour le scientifique de dévoiler une de ces fantastiques innovations ! Cette soirée vous réserve quelques surprises et autres rebondissements en tout genre ! Pour ce qui est du dress code : n'ayez crainte, la comtesse n'a qu'une seule exigence : l'élégance ! Préparez vos plus beaux atours et venez profitez de l'intimité du Temple du Goût...
LISTE DES INVITES :
-Christian de Sudernamie -Jean de Baignes -Isabelle de Saint-Amand -Aliénor de Wittelsbach -Alaina of Cork -Adélaïde de Vogüé -Benoît de Courtenvaux
LISTE DES PNJS :
-Olympe Mancini : la sœur de notre chère Marie Anne (notre Gossip Girl ATVienne), surintendante de la maison de la Reine et aussi ex de Loulou...Allez donc échanger quelques ragots en sa compagnie... -Marie Charron accompagnée de son époux Colbert -Bontemps -Les Mignons de Mister : les larbins officiels de votre soirée !
LIEUX DE LA RÉCEPTION :
-Le grand salon -Le petit salon -La salle de bal -Le jardin
HAVE FUN !
Dernière édition par Thimoléon de Choisy le 17.01.14 0:23, édité 4 fois
Thimoléon de Choisy
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Libre comme les cieux : il brûle comme l'enfer ! Côté Lit: Tous les anges et les démons de cette terre s'y étendent pour mon plus grand plaisir... Discours royal:
ANDROGYNE l'Allure stupéfiante.
► Âge : 23 ans
► Titre : Abbé de Saint-Seine - Comtesse des Barres - les yeux et les oreilles de la Cour...
Dans l’hôtel particulier de la comtesse des Barres, c’était l’effervescence. Voilà un an que la dame n’avait point donné salon ou soirée chez elle. La nouvelle parmi les courtisans présents à Versailles et à Paris s’était rependue comme une trainée de poudre ! Tout le monde voulait être vu chez l’une des courtisanes qui savait le mieux recevoir (à part Sa Majesté le Roi, bien évidemment !) et qui était à la pointe du bon goût. Oui justement en parlant de goût, c’est bien le nom de cet endroit huppé. Le Temple du Goût s’il vous plait. Lorsqu’on regardait cet endroit, on sentait la quiétude, le confort et la douceur émaner de la façade même de l’hôtel. Lieu raffiné à taille humaine, chaque visiteur se sent immédiatement comme chez lui, près à être reçu avec sympathie, générosité et…
« Merde Joséphine ! Combien de fois vous ai-je dis que le rose était à bannir définitivement de vos idées de garde robe ? -Mais monsieur, je…
-MADAME ! Madame la Comtesse, je vous prie ! Scanda Thimoléon qui avait décidé qu’aujourd’hui il serait Olympe et personne d’autre.
Mais il était quelque peu difficile que les mignons parviennent à y croire pour l’instant puisque l’abbé se baladait encore en robe de chambre et en bonnet nuit en plein après-midi. Autant dire qu’en matière de « madame », ils avaient vu mieux. Réuni dans la chambre du propriétaire des lieux, les mignons ainsi que Lazare essayaient de proposer des tenues de soirée pour la comtesse. Mais jusque-là elle n’était pas tellement convaincue après avoir eu à subir la présentation d’une robe verte immonde, une autre mauve surchargée de dentelles ainsi qu’une robe beaucoup trop simple…rose pâle. Olympe, en grande tragédienne de sa propre vie, se massait les tempes de lassitude pendant que les mignons continuaient de s’affairer avec les différents vêtements qui s’accumulaient peu à peu dans la chambre.
-Mais pourquoi personne n’est prêt ? soupira la comtesse. Vous avez eu des heures ! Des heures pour vous préparer… J’avoue que je ne comprends pas très bien ! Moi qui aie rêvé toute la nuit que le Vert Galant me poursuivait pour… me chatouiller… Raaah quelle horreur ! Je n’avais vraiment pas besoin d’en subir davantage… Qu’allez-vous donc faire lorsque le Prince de France rentrera, hein ?
-Peut-être celle-ci ? proposa alors son valet Lazare, imperturbable, en dénichant une grande robe jaune vif dans une boîte qui venait d’être envoyé le matin même de chez le tailleur.
-Ha ! s’exclama la jeune femme/homme, le visage s’éclairant finalement de joie. Enfin quelqu’un qui est venu avec une idée aujourd’hui ! Merci Lazare, fit Olympe en faisant une petite moue à son valet.
La dame se leva de son fauteuil et vint admirer la robe devant elle pour voir ce que cela pouvait rendre. Faisant tournoyer le tissu comme une princesse, la comtesse semblait enchantée. Elle se tourna de nouveau vers son valet en faisant comme si les Mignons n’étaient pas dans la chambre :
« Mais que vais-je bien pouvoir faire de tout ces cafards, Lazare ? Tu ne crois pas que je devrais les abandonner en rase campagne ? demanda-t-elle l’air de rien avec un petit sourire sadique sur le visage.
-Madame, vous êtes infâme, fit le valet nègre avec un sourire tout aussi diabolique.
-Mais je ne suis pas infâme, Lazarre, répliqua la comtesse en lui faisant face. Je suis une femme !
Face à tant de convictions, Lazare et les mignons ne purent s’empêcher de lever les yeux au ciel. Mais la dame n’en prenait pas note, trop absorbée à penser à sa tenue du soir. Quelle perruque ? Quelle parure ? Quel éventail ? Tant de questions… Quand soudain, elle se rappela qu’il lui restait les cloportes qu’elle avait en garde depuis plusieurs mois encore dans sa chambre. Un petit sourire vicieux se dessina sur son visage tandis qu’elle s’approchait de la bande d’avortons qui se demandait à quelle sauce ils allaient manger, encore.
« Dites-moi Bernadette, fit Olympe en interpellant l’un des mignons (elle n’avait pas envie de savoir leurs prénoms). Puis-je savoir ce que vous avez fait de votre bon goût ? N’est ce pas pour cela que le prince vous a à ses côtés ?
-C’est-à-dire… que je… euh…, commença à bafouiller le jeune homme.
-Oh non ! fit soudainement la dame en l’arrêtant d’un geste. Je sais ce que vous en avez fait…N’en dites pas plus ! J’ai vu cette expression plus d’une fois dans le regard d’un homme et je sais ce que vous allez me dire… Elle a étranglée une autruche ?...Elle s’est fait kidnappée ? Elle s’est fait kidnappée par une autruche ?...Elle a mauvaise haleine ? …Elle triche au bridge ? Elle est allergique aux produits laitiers ?
Un silence de mort s’abattit sur la chambre, les mignons scrutant avec crainte le regard de furie de la comtesse. Jusqu’à ce que celle-ci soupir d’exaspération :
« Mais sortez enfin ! Vous voyez bien que je dois me préparer ! fit-elle en faisant des moulinets avec ses mains comme pour chasser des mouches. Aller donc vous occuper de finaliser la décoration dans le jardin… Oh ! Et n’oubliez pas les coupes de champagnes et le buffet aussi…
Puis, lançant son bonnet de nuit d’un grand geste théâtrale, Thimoléon admira de nouveau sa tenue dans le miroir avec un sourire radieux aux lèvres :
« Cette soirée sera FA-BU-LEUSE ! »
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Peu à peu, le salon, la salle de bal ainsi que le jardin se remplissaient de ses invités. Le cadre était enchanteur : des petits buffets disséminés un peu partout pour que personne ne meurt de faim, un petit orchestre à l’intérieur du l’hôtel, un autre à l’extérieur, encadrés par des artistes, danseurs, jongleurs venus d’Orient et enfin les mignons de Monsieur qui assuraient le service d’alcool et autres requêtes (non, pas ce à quoi tu penses : je t’ai vu ! Shame on you ! Olympe n’autoriserai pas cela !). Pleins de petits lampions avaient été disposés dans le jardin pour que l’assemblée puisse profiter de l’espace et donner une ambiance intimiste, loin du clinquant de la cour. En parlant de la comtesse d’ailleurs : où est-elle ? Ah si ! La voici qui fait son apparition au milieu de ses invités, tout sourire. Au meilleur de sa forme, Olympe déambulait parmi tout ce beau monde, arborant fièrement sa robe jaune éclatante avec une belle perruque auburn et une parure en diamants. Ce qui était agréable avec la comtesse : c’était que tout le monde était à ses yeux ses amis. Elle n’hésitait donc pas à envoyer des baisers, des clins d’œil et des petits coucous à tous ceux qu’elle croisait. Olympe voulait qu’en cette période trouble, tout le monde se sente à l’aise, loin des soucis de la guerre.
Elle saisit au passage de deux coupes de champagne qu’un mignon (qu’elle insulta) transportait sur un plateau et se rendit dans le jardin où elle salua de nouveaux invités, indiqua à l’orchestre du jardin de commencer à jouer quelques airs endiablés pour mettre du monde sur la piste de danse, avant de rejoindre son ami Christian de Sudernamie. Elle l’avait invitée tout spécialement pour faire découvrir aux courtisans les nouvelles inventions du suédois. A coup sûr, la comtesse voulait impressionner ses invités.
« Alors, monsieur de Sudernamie ? fit l’hôtesse de son plus beau sourire en lui offrant une coupe de champagne. Vous et votre matériel êtes bien installés ? Que nous réservez-vous pour ce soir ? demanda-t-elle avec un sourire d’enfant.J’ose croire que vous allez tous nous épater avec vos expériences ! La comtesse des Barres était connue pour vouloir toujours s’amuser. Et cette soirée ne dérogerait point à la règle !
-Encore une fois : je vous remercie infiniment d’avoir accepté cette invitation, dit-elle en lui serrant la main avant de prendre un air faussement solennel. Je vous propose que nous trinquions, mon ami ! Que nous trinquons à une soirée inoubliable ! s’exclama la dame avant de faire tinter les coupes en cristal.
Benoît de Courtenvaux
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Une fois offert et mis à lambeaux, il est pour l'heure tout entier à son roi. Côté Lit: Je n'y tiens pas une collection ! Mais il n'est pas glacé non plus. Discours royal:
ϟ La Main au collet ϟ
► Âge : 32 ans et des poussiè... (Non pas ce mot maudit)
► Titre : Marquis de Courtenvaux, Magistrat parlementaire et avocat
Benoît chantonnait gaiement devant son psyché lui reflétant l'apparence d'un homme impeccable et raffiné. ENFIN ! Il en avait tant rêvé ! Après ses excursions dans ces bois affreux en Roussillon pour une mission d'espion, il avait été plus que ravi de retrouver ses pénates ! Cela faisait à présent plusieurs jours, qu'il laissait cicatriser beaucoup d'écorchures, en ne bougeant plus de son hôtel particulier parisien. A son arrivée, il n'avait rien trouvé de plus agréable que de l'eau et du savon, avant même de goûter au moelleux de son lit ! Mais pour se remettre tout à fait, il avait tenu à ce qu'on le mette au courant de la première soirée qu'organiserait un membre de la cour. Soit ! Le roi et la plupart des courtisans étaient à la guerre et on priait chaque jour pour eux et pour leur victoire ... cependant leur vie à tous devait-elle être entre parenthèses, sans aucune réjouissance ? Le marquis aurait donné son sang et l'avait d'ailleurs déjà fait, au service du monarque, mais quelques plaisirs de temps à autre n'étaient pas de refus ! Par conséquent, à peine Nicéphore lui avait-il appris qu'une fête allait avoir lieu chez la comtesse des Barres, qu'il avait sauté sur l'occasion ! Il ne connaissait pas vraiment cette dame, ne l'avait croisée que peu de fois, mais son rang et son argent lui permettaient d'ouvrir quelques portes. C'est donc sans de réelles difficultés que deux cartons d'invitation lui étaient parvenus la veille.
Oui deux cartons ! Puisqu'il tenait à y aller, pourquoi s'y serait-il rendu tout seul ? Accompagné par la charmante et délicieuse Adélaïde de Vogüe, il était certain de passer une excellente soirée. Ce visage ingénu, ces yeux si purs avaient jusque là, et pour encore quelques temps réussi à tromper Benoît sur le véritable caractère de la belle blonde. Il était loin de se douter de son appartenance à la Main de l'Ombre, il ne voyait en elle que l'adorable rejeton d'une vieille famille parlementaire et puisqu'ils se connaissaient depuis de nombreuses années, il voyait surtout l'amie. L'amie et non la potentielle promise ! En effet, la tante du parlementaire et le père d'Adélaïde s'étaient mis en tête de les marier ! Quelle idée ! Cette perspective n'enchantait guère notre célibataire endurci depuis que la Corlay lui avait offert le spectacle d'avec son amant. Alors pour se venger de tous ces complots de mariage, il sortait au bras de son amie leur laissant espérer, tout en ne faisant jamais aucune demande. Cela l'amusait beaucoup de mettre sa tante sur des charbons ardents et cela semblait plaire à Adélaïde. Alors pourquoi s'en priver ? La jeune sudiste avait d'ailleurs accepté cette sortie ensemble, et il était convenu qu'ils se rejoindraient devant le Temple du goût à neuf heures précises ! Il pourrait lui apprendre encore quelques secrets pour ne pas se laisser dévorer par toutes ces vipères ! Etant provinciale récemment installée à Versailles, elle ne connaissait pas encore toutes les stratégies à adopter, ou les méthodes pour louvoyer. La cour pouvait être un véritable champ de bataille, bien plus féroce qu'en Lorraine même. Il fallait être armé pour pouvoir y circuler et ne pas s'y faire écraser sans la moindre pitié. S'il avait su ...
Lorsque sonnèrent les huit heures un quart, le marquis se mit donc en route en chaise à porteur pour ne pas prendre le risque de froisser son magnifique habit. Il était fait de brocart et de velours des plus soyeux. Lui qui allait se présenter au temple du goût ne pourrait pas être de meilleur goût, et ce jusqu'au bout des ongles ! Après avoir été brinquebalé durant un kilomètre dans cette sorte de boîte où l'on était très mal installé, il paya les porteurs et se dirigea vers l'entrée. Sa canne d'apparat résonnait sur les pavés autant que ses souliers. On ne pouvait que le remarquer, et c'est ainsi que plusieurs invités le saluèrent sans plus attendre. Les Colbert étaient là, Benoît aurait préféré ne pas les croiser ! Il n'oubliait pas que Louvois était son oncle par alliance, il avait choisi son camp et le surintendant des finances ne l'ignorait pas. Ils s'évitaient pour l'heure plutôt que de se battre et ce à cause de sa charge d'espion, mais cela n'empêchait point les piques acides entre eux.
- Monsieur le marquis. Vous ici ? Je pensais, je l'avoue, que la comtesse n'avait invité que des personnes de qualité, mais je constate qu'il n'en est rien. Je n'aurai donc pas eu seul, le bonheur et le mérite de lui plaire, pourtant son sourire si avenant ...
Benoît lui coupa la parole, sans le moindre savoir-vivre, lui qui pourtant respirait la politesse.
- Il est vrai qu'un esprit qui se laisse flatter s'imagine aisément un bonheur qu'il pense mériter ! Est-ce à vous que je dois apprendre que les visages souvent sont de doux imposteurs ? Que de défauts d'esprit se couvrent de leur grâce ! Et que de beaux semblants cachent des âmes basses ! Espérons pour vous, que la comtesse n'en soit pas une ! Bonsoir !
Le plantant là, il grimpa les escaliers en marbre et balaya du regard les alentours de l'hôtel. Adélaïde se trouvait à quelques mètres de là, et Benoît n'aurait su dire si elle était plongée dans ses pensées ou si elle admirait l'édifice. Il s'avança à pas de loup pour ne pas la surprendre et attendit qu'elle le voit. Il lui fit son plus beau sourire avant de lui baiser la main. Sa toilette était magnifique.
- Vous êtes ravissante ! Si bien que pour ce soir je me ferais volontiers Barbe Bleue et ne verrais aucun inconvénient à passer au fil de mon épée, tous ceux qui oseraient vous ravir à moi ! Ce n'est pas mes femmes que vous retrouveriez dans mes armoires, mais bien vos soupirants !
Toujours très galant, Benoît ne pouvait retenir ses élans de jolies formules, surtout devant une belle femme ! Amie ou non !
- Mais rassurez-vous, ceci n'est toujours pas une demande en mariage ! Nous avons un contrat de non épousailles tous les deux, et il faut s'y tenir !
Il lui adressa un clin d'oeil complice et rit légèrement avant de lui tendre le bras. Les brises étaient légères en ce printemps 1667, mais tout de même fraîches le soir, il fallait se presser d'entrer. Passées les premières dorures, des salons splendides et dégoulinant de luxe s'ouvrirent droit devant eux. Un page en sortit et tendit la main après les avoir salués, pour qu'il lui remette les cartons d'invitation. Ce qu'il fit.
- Le buffet se trouve dans ce salon, le champagne vous sera servi dans les jardins pour mieux profiter de l'extérieur et si vous voulez davantage vous restaurer, des desserts tels que des macarons vous seront également servis.
Le valet leur montrait déjà du doigt trois directions différentes, mais Benoît n'était pas là vraiment pour la bonne chair mais bien pour danser !
- Mais dis donc on n’est quand même pas venu pour beurrer des sandwichs ! Enfin vous êtes bien aimable, mon brave ! Bon courage pour les services !
Il lui tapota l'épaule, puis fit véritablement son entrée avec la belle Adélaïde à son bras. Il était temps ! Qu'est ce que cette soirée allait lui réserver ? Bien des surprises, il l'espérait bien !
« Est-ce que tout est prêt, Hugues ? » « Il ne reste plus qu’à charger la dernière caisse monsieur le duc, et nous serons prêts à partir. » « Merveilleux, occupe-t’en, je vais prévenir Mrs McKenna que nous sommes sur le départ. »
Laissant les dernières formalités à Hugues, ce tout jeune comte qu’il avait rencontré à l’Académie et avait exprimé tant d’admiration pour lui qu’il avait accepté de le prendre comme aide et assistant de manière occasionnelle, Christian remonta les marches du perron pour rentrer récupérer son manteau et son carton d’invitation. Sa fidèle gouvernante l’attendait à l’intérieur, lui tendant déjà les deux objets avec un regard réprobateur lui rappelant qu’il était déjà légèrement en retard sur l’heure prévue. Regard auquel Christian ne répondit que par l’un de ses célèbres grands sourires qui endormirait même la colère du ministre Colbert envers Monsieur un jour où celui-ci aurait dévalisé la moitié du trésor de France pour des parures.
« Allons ma chère, ne boudez pas. Nous arriverons pile à l’heure chez la comtesse, et nous serons de retour avant le petit matin, je vous le promets. » jura-t-il, une main sur le cœur. « Tâchez donc de ne pas faire sauter la maison de la comtesse, messire, c’est tout ce que je vous demande ! » rétorqua la vieille femme sans pouvoir réprimer un sourire.
Radieux, Christian lui plaqua un baiser sur la joue et se hâta de faire demi-tour pour sauter dans le carrosse apprêté pour l’occasion. Hugues l’attendait à l’intérieur, visiblement plus excité encore que son nouveau mentor. Il fallait dire que le jeune homme avait toujours fait preuve d’un enthousiasme remarquable pour les expériences de Christian, et cette occasion-là faisait partie de celles qui ne se manquaient pas ! Alors qu’Hugues commençait déjà à disserter sur les mérites de ce genre de présentations publiques, Christian pensait à la comtesse des Barres qui avait eu la gentillesse de l’inviter et sa généreuse proposition de faire ces petites démonstrations devant ses invités. Une femme absolument remarquable à tout point de vue, selon le suédois qui l’avait croisée à plusieurs reprises lors de soirées mondaines et de salons. De plus, elle avait le mérite de beaucoup l’amuser, avec son inépuisable bagout et son humour décapant. Non vraiment, cette petite fête s’annonçait des plus réjouissantes. Le carrosse parcourut la distance qui les séparait de chez la comtesse sans encombre, si ce n’est un petit incident pendant lequel une des roues passa dans une flaque d’eau et éclaboussa trois pauvres femmes en haillons au bord de la route qui répliquèrent en les insultant copieusement. Christian avait voulu leur présenter ses excuses, mais Hugues l’en avait empêché, lui rappelant que l’heure tournait.
« De toute façon ne vous excusez pas. Ce sont les pauvres qui s’excusent. Quand on est riche, on est désagréable ! » s’était exclamé le jeune homme, au grand dam de Christian qui se dit que ce garçon avait une éthique quelque peu différente de la sienne, finalement.
Quelques minutes plus tard, après être arrivé et avoir procédé aux premières installations avec Hugues, Christian faisait son entrée dans le jardin d’Olympe, où de nombreuses personnes étaient déjà présentes et discutaient avec animation, riaient, et buvaient dans l’insouciance. Quelques-unes se retournèrent sur son passage pour le saluer, et en les observant Christian constata que comme lui, tout le monde s’était mis sur son trente-et-un ; on ne plaisantait pas avec la comtesse en termes d’élégance. Le suédois avait, une fois de plus, fait confiance au goût sûr de sa gouvernante (dont on était en droit de se demander parfois s’il était capable de se passer, puisqu’il ne pouvait pratiquement rien faire sans elle et ses conseils) et revêtu un habit bleu brodé de doré, ni trop extravagant ni trop discret, qui seyait aussi bien à la simplicité naturelle du duc qu’à la distinction qu’il avait héritée d’une éducation royale, à la manière d'Elizabeth I qui ne versait jamais dans l'excès malgré son goût pour l'élégance. Satisfait de lui-même, Christian n’avait plus qu’à trouver son hôtesse afin de lui faire des compliments, mais ce fut elle qui le trouva en premier.
« Alors, monsieur de Sudermanie ? » s’exclama Olympe d’une voix claironnante en lui tendant une coupe de champagne, qu’il accepta bien volontiers. « Vous et votre matériel êtes bien installés ? Que nous réservez-vous pour ce soir ? J’ose croire que vous allez tous nous épater avec vos expériences ! » « Mon nouvel assistant est en ce moment même en train de finaliser les installations, tout se passe pour le mieux. Mais ma chère, permettez-moi de vous complimenter, cette réception est tout bonnement superbe. Quant à vous, vous êtes plus rayonnante encore que la dernière fois que je vous ai vue. Quel peut être votre secret ? » répondit Christian tout sourire en lui faisant un baisemain des plus courtois. -Encore une fois : je vous remercie infiniment d’avoir accepté cette invitation. Je vous propose que nous trinquions, mon ami ! Que nous trinquons à une soirée inoubliable ! « Trinquons comtesse : à cette soirée inoubliable, et à son inoubliable hôtesse ! »
Oui Christian savait que la comtesse aimait les compliments, et comme lui-même n’en était pas avare, rien ne l’amusait plus que de voir Olympe rayonner de bonheur sous cette avalanche d’amabilités. Parcourant rapidement les invités du regard, Christian aperçut non loin de là le marquis de Courtenvaux, cet homme qu’il avait rencontré à quelques occasions notamment chez Mme de Sablé. Un type pour le moins intéressant, avec qui Christian était toujours sûr d’avoir des échanges pour le moins… vivants. Avec un sourire au coin des lèvres, le suédois attendit d’attraper son regard pour le saluer en levant discrètement sa coupe vers lui. Il aurait certainement l’occasion de le voir un peu plus tard. Rien ne pressait, n’est-ce pas ?
« Pour répondre à votre question de tout à l’heure comtesse, j’ai prévu deux ou trois petites expériences très divertissantes pour ce soir. J’ai amené avec moi des feux d’artifices d’un genre tout à fait particulier, inspirés d’une technique chinoise que j’ai améliorée à ma façon afin de leur faire prendre des formes très originales, encore jamais vues à Versailles ! » reprit Christian avec enthousiasme en proposant son bras à sa compagne de la soirée. « Mais je vous propose de garder cela pour la fin, quand il fera vraiment nuit noire, nous y verrons bien mieux. J’ai également songé qu’un peu de prestidigitation pourrait amuser nos amis, aussi ai-je préparé un petit tour de mon cru… Me croirez-vous si je vous affirme que je peux faire voler une carte de jeu par la seule force de la pensée ? »
Bien sûr que non elle n’allait pas le croire, et pourtant ! Mais Christian n’était pas prêt de révéler son petit secret ; du moins, pas avant de l’avoir réalisé devant une foule béate. Oui, Christian s'amusait toujours énormément du visage ébahi de son public après une expérience réussie, et ne s'en cachait absolument pas !
« J’ai également prévu de petits amusements de chimie, comme par exemple créer des nuages de couleur rouge qui flotteront avant de se dissoudre dans l’air. Qu’en pensez-vous ? J’ai d’autres tours dans mon sac bien entendu, mais pour commencer, cela devrait faire l’affaire ? »
Puis, baissant d'un ton, il ajouta :
« Ah, aussi, ne le dites à personne mais... J'ai amené avec moi l'une de mes toutes dernières innovations. Elle est encore secrète, mais j'ai l'intention de la révéler au public ce soir... Si vous m'y autorisez, bien entendu. »
Et si la comtesse refusait l'exclusivité d'une révélation pareille, c'était que quelque chose ne tournait vraiment pas rond sur cette planète !
“La guerre des trois Evêchés”...Debout face à la fenêtre d’où il observait les allées et venues des passants, Jean songeait au résultat de ces conflits d'orgueil et de territoires, mais au jeu du plus orgueilleux, bien qu’il s’en récriait, il n’en n’était pas en reste. Les portraits des cardinaux de Richelieu et Mazarin ne trônaient pas au dessus de son bureau sans raison valable et jetant un regard en coin aux illustres ministres, un sourire apparu sur ses lèvres. Tête du pouvoir? Il n’en n’avait ni l’envie ni l’éducation, mais déternir du pouvoir avait effleuré ses projets plus d’une fois et quoi de plus intéressant qu’une guerre pour se distinguer…..et quoi de mieux qu’une guerre pour reprendre des évêchés? Il savait d’expérience que gravir les marches jusqu’au pouvoir était une lente et incertaine ascension et il préférait se mouvoir au gré des évènements. D’abord le confesseur. Puis l’évêché. Il se prenait à rêver à ses futurs vêtements violets lorsque la tête agaçante de Vaulry apparu par l’entrebâillement de la porte. Jezabel, couchée près de la cheminé éteinte, leva d’instinct la tête en grognant vers l’importun. -Quoi donc, lâcha Jean dans un soupir, voyant sa vision s’évanouir? Est-ce encore cet italien espagnol? -Non non mons...mon père, répondit Vaulry en jetant un regard inquiet au chien qui s’était levé sur ses pattes, les oreilles basses ! C’est que Catherine demande à quelle heure vous rentrerez cette nuit, pour savoir si elle doit faire du feu dans votre chambre. Euh… et votre chien… -Rentrer cette nuit? Quelle question, je n’ai pas…
A l’instant où il prononçait ses mots et que Jezabel approchait un peu plus de Vaulry pour l’intimider, Jean se frappa le front de son poing. La peste! Il avait oublié qu’il avait donné sa parole à Choisy! Quelle idée d’avoir accepté ! Et qu’allait-il lui dire s’il ne venait pas ? “J’ai accepté par erreur ton invitation, j’ai du m’gourer dans l’heure, j’ai du m’planter dans la saison?” Impossible… -Mon père, marmotta Vaulry d’une voix pâle alors que Jean lui avait tourné le dos pour réfléchir… -Un moment. -Non mais… -Un moment, j’ai dis. -Votre chien… Jean se retourna, aperçevant enfin Jezabel aux pieds du gamin, sentant ses chaussures avec intérêt. Il l’appela d’un sifflement et congédiant silencieusement le jeune valet, il gratta pensivement la tête de Jezabel tout en songeant à de plus en plus piètres excuses pour éviter de se retrouver dans les salons mondains de la comtesse des Barres, chez qui Choisy avait organisé sa soirée.
***
-Vous savez j’apprécie beaucoup l’abbé de Choisy, on m’a souvent demandé ce qui pouvait nous rapprocher tous deux...Figurez-vous que je me suis surpris à parler théologie avec lui, c’est un homme très cultivé. J’espère que sa petite...euh...sauterie, sera sous un signe culturel. Ca n’est pas aisé de subir les regards de la cour lorsque notre naissance ne nous anobli pas par nature, mais vous savez, je pense à cette Françoise d’Aubigné, eh bien Scarron aussi est un gueux, ça l'empêche pas d'être un mari sympa ! Seul dans l’un des salons des Wittelsbach, Jean faisait les cent pas et la conversation en attendant la jeune Aliénor qu’il avait promis d’emmener ce soir-là. Elle devait d’ailleurs remercier Catherine de l’avoir rappelé à l’aumônier. Sans parler d’Eléonore Sobieska pour qui il avait une affection particulière, Jean appréciait Aliénor de Wittelsbach, certainement l’une des jeunes filles la plus raisonnable, de la Maison de la Reine. Toute cette petite cour était une véritable basse-cours et Sofia di Parma n’en n’était pas la plus sage! Sans parler des duègnes... Il observa un moment sa silhouette dans le miroir, ôtant une petite poussière nichée sur sa soutane neuve. Une coquetterie imposée par Catherine, de nouveau, qui s’inquiétait de le voir chuter à la cour à cause d’une simple tenue. -Ah, vous êtes absolument parfaite, mademoiselle, fit-il à la jeune fille lorsqu’elle apparu enfin! Ne tardons pas, si vous êtes prête, je ne voudrai faire attendre notre hôte, il me semble l’avoir entendu prononcer les mots de “expérience scientifique” et “merveille”, je ne voudrai pas rater ça, fit-il, avec un très léger mauvais esprit!
Lorsque tous deux arrivèrent enfin à ce que l’on nommait alors le Temple du goût, haut lieu dont la réputation s’était construite sur l’image de la comtesse des Barres, Jean donna les dernières recommandations à Vaulry qui les avait accompagné afin de faire une course au retour, et lui accorda quelques instants de répit avant de repartir. Il aida Aliénor à descendre et alors que celle-ci entrait dans l’hôtel particulier, il chercha des yeux son jeune valet. -Ah, Lazare, interpella Jean! Vous n’avez pas vu un jeune garçon un peu dépenaillé...Vaulry? Le gamin apparu soudainement derrière un bosquet, et aperçevant le valet de Thimoléon de Choisy, ouvrit de grands yeux et attrapa Jean par la manche. -Messire, messire,lança-t-il! Un sarrasin! -Bougre d’imbécile, grogna Jean en le poussant vers la voiture! File et que je ne te revois plus par ici pour ce soir!
Il n’eut pas à s’excuser auprès de Lazare qui contenait difficilement son rire, et entra enfin pour passer une soirée des plus culturelles, dans l’un des salons les plus prisés de Paris, disait-on. Il salua quelques convives bien connus, mais se ravisa d’aller vers le buffet lorsqu’il aperçu au loin le marquis de Courtenvaux et…..mais que faisait Adélaïde de Vogüé avec ce prétentieux?! Certes, il n’était son oncle que depuis quelques semaines, mais l’instinct familial fut assez fort pour qu’il en soit piqué, et se promis d’aller rappeler à Courtenvaux qu’avant d’attaquer le texte d’un écclésisatique, il valait mieux connaître soi-même le sujet. Les retours qu’il avait eu de la critique du marquis concernant ses écrits avaient blessé son orgueil et ne pouvant prendre l’épée, il songeait à le faire d’une autre manière.
Mais la jeune Wittelsbach le détourna de cette vision lorsqu’elle l’appela pour aller saluer Choisy. -L’avez-vous vu? Il n’est peut-être pas encore arrivé...Mais tenez, voilà la comtesse des Barres, nous pouvons peut-être aller la saluer en attendant, il s’agit de l’hôte de ces lieux, après tout. Elle saura bien nous dire où est Choisy!
Si vous voulez dire à Jean qu’il est bien habillé, ne vous gênez pas, il a des vêtements neufs
Comme la plupart des jeunes filles de son âge, Adélaïde était coquette. Oh, c’était un bien petit défaut, et si courant qu’on pouvait à peine l’appeler péché. Et puis après tout, lorsqu’on était invité au si bien nommé Temple du Goût, il ne fallait tout de même pas jouer la vertu et s’attifer de quelques vieilleries sans éclat. Sans toutefois s’habiller de façon exubérante et beaucoup, beaucoup trop voyante, Adélaïde avait du goût, et avait appris à choisir des couleurs et des ornements simples, mais qui mettaient bien en valeur sa jeunesse et sa fraîcheur. Oui, la demoiselle de Vogüé avait beau être une dangereuse comploteuse au service de la Main de l’Ombre, doublée d’une apprentie empoisonneuse qui pourrait éventuellement devenir redoutable, elle était consciente que sa meilleure arme était son petit minois encore ingénu. Avec l’aide de Lucette, la camériste affectée à son service, Adélaïde avait passé toute la matinée et une bonne partie de l’après-midi de la veille, encore en robe de chambre et en bonnet de nuit, à choisir la robe et la coiffure, quitte à rire parfois avec elle devant tel agencement ridicule, brisant pour un temps le rempart habituel qui existait entre maîtresse et servante. Enfin, Adélaïde s’était décidée pour une tenue dans des teintes de mauve et de lilas, des couleurs qui lui allaient plutôt bien, avec quelques perles ici et là. Tout préparer pour la soirée à venir avait permis à Adélaïde d’oublier les événements qui s’étaient déroulés il y avait tout de même déjà quelques semaines, en l’occurrence, la découverte qu’elle était apparentée à un prêtre papiste, et pas n’importe lequel : Jean de Baignes, un des aumôniers de la Reine. Ce soir, en compagnie de Benoît de Courtenvaux, elle pourrait aisément ôter tout souci d’elle-même, que ce soit complots de la Main de l’Ombre (avec la révolte populaire qui venait à grands pas, d’ailleurs), ligues protestantes, ou encore cousins tombés du Ciel en apparence, mais sûrement sortis tout droit de l’Enfer, en fait.
Il ne fallait pas croire que Benoît courtisait Adélaïde et que le fait qu’il ait réussi à se procurer pour eux deux cartons d’invitation montre qu’il avait l’intention de le faire un jour. Bien que la demoiselle de Vogüé connût plus ou moins les raisons qui le poussaient à refuser absolument de se marier, il lui avait un jour proposé ce petit jeu, sachant que sa propre tante et le père d’Adélaïde s’étaient mis en tête de les unir un jour. Benoît avait beau être un très bon ami de sa famile, et que la jeune fille s’entendît à merveille avec lui, elle n’était pas vraiment intéressée à se marier tout de suite. La vie était bien trop passionnante en ce moment! Ceci mis au clair, les deux avaient donc décidé de s’afficher ensemble le plus souvent possible, histoire de faire espérer leur parenté, mais sans que Benoît ne se déclare jamais! Et Adélaïde, de nature espiègle, n’avait pu qu’entrer dans son petit jeu. Après tout, le marquis était plutôt bel homme, et galant en plus, et la demoiselle prenait plaisir à faire mine de rougir comme il se le devait devant ses compliments. Et de plus, le vieux loup de Cour (et non pas de mer) qu’était Benoît s’était même improvisé de l’instruire sur les quelques us et coutumes de Versailles dont elle ne pouvait pas être au courant. Si, parfois, Adélaïde, réellement ignorante de certains usages, lui était réellement reconnaissante, elle ne pouvait s’empêcher de sourire parfois devant la crédulité de Benoît sur sa dite naïveté. Même si elle ne souhaitait absolument pas que cela arrive, Adélaïde aurait réellement été curieuse de voir sa tête s’il venait à apprendre qu’elle avait les deux pieds dans un complot pas très propre et qu’un jour, elle avait même tué une servante qui en savait un peu trop sur son compte…
Enfin, vers les huit heures, Adélaïde s’était mise en route sans plus attendre, optant pour une chaise à porteurs plutôt qu’un carrosse, un transport de ce genre prenant beaucoup moins de place et lui permettant d’arriver plus vite et de descendre plus facilement. Cela lui permit, d’ailleurs, d’arriver avant Benoît et de pouvoir contempler le Temple du Goût à sa guise. On pouvait dire en tout cas que le bâtiment méritait son nom! Et les lampions disposés un peu partout, les jongleurs venus d’Orient, qui semblaient tout droit sortis des contes pas si lointains de son enfance, le petit orchestre qu’elle pouvait entendre de l’extérieur, tout cela acheva de la séduire pour de bon. Oui, elle allait bien s’amuser ce soir!
Benoît, enfin arrivé, s’approcha d’elle à pas de loup et la fit même sursauter. Riant légèrement, pendant que le marquis lui baisait la main, elle lui dit, en guise de bienvenue, taquine :
- Toujours aussi délicat, à ce que je vois!
- Vous êtes ravissante! Si bien que pour ce soir je me ferais volontiers Barbe-Bleue et ne verrais aucun inconvénient à passer au fil de mon épée tous ceux qui oseraient vous ravir à moi! Ce n’est pas mes femmes que vous retrouveriez dans mes armoires, mais bien vos soupirants!
Adélaïde prit un air mi-effrayé, mi-suspicieux, mais l’ombre d’un sourire ironique resta sur son visage, histoire de montrer que, bien évidemment, elle ne prenait pas au pied de la lettre les quelques compliments de Benoît. Ah, qu’est-ce qu’il n’allait pas inventer pour la faire rougir, celui-là!
- Mais rassurez-vous, ceci n’est toujours pas une demande en mariage! Nous avons un contrat de non épousailles tous les deux, et il faut s’y tenir!
Benoît lui fit un petit clin d’œil complice, et les deux rirent de bon cœur pendant qu’Adélaïde prit le bras du marquis. Enfin, ils se dirigèrent tous les deux vers l’intérieur, où un page s’occupa des cartons d’invitation et leur expliqua en quelques phrases le fonctionnement de la soirée. Mais la demoiselle de Vogüé écoutait à peine, car elle venait d’apercevoir un visage qu’elle aurait mieux aimé ne pas voir avant un bon moment. C’était Jean de Baignes, accompagnée d’une jeune femme blonde, Aliénor de Wittelsbach. Adélaïde savait d’elle que c’était une cousine de la Reine et qu’elle était d’ailleurs l’une des dames de sa Maison, mais c’était tout. Et de voir son tout nouveau cousin accompagnée de cette jeune femme lui fit hausser le sourcil, et croiser les doigts pour qu’une rencontre assez importune n’ait pas lieu entre eux. Elle n’avait pas besoin de cela, surtout pas ce soir! Et déjà, Benoît l’entraînait en direction de l’orchestre, où plusieurs personnes s’étaient mises à danser. Adélaïde sentait déjà ses petits pieds frétiller d’avance. Elle qui était excellente danseuse, ce n’était pas pour lui déplaire, et un tel début de soirée ne pouvait être que de bon augure!
Aliénor de Wittelsbach
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Il est libre de battre mais n'a pas trouvé qui serait digne de lui. Côté Lit: Il n'y a que moi et parfois ma fille. Pas d'homme, pour cause d'absence de coeur qui bat. Discours royal:
♣FEMME D'AUJOURD'HUI♣ elle flotte, elle hésite ...
► Âge : 24 ans
► Titre : Archiduchesse d'Autriche, duchesse douairière de Saxe-Zeitz et de l'Autriche inférieure
« Les choses les plus attendues arrivent souvent par surprise. »
Assise dans un large fauteuil, Aliénor lisait son courrier du jour, attendant toujours des nouvelles de Maximilien, savoir comment il allait et comment il supportait la vie à Nancy, l'ambiance guerrière et ce qu'il faisait. Mais un frère en chassant un autre, c'était aujourd'hui Ferdinand-Marie qui lui fit l'honneur d'une missive. Quelle drôle d'idée ! La lettre était un peu plus aimable que d'habitude, courte mais polie, mais à peine mentionna t'il Maximilien. Soupirant, la jeune femme posa la lettre sur la table basse, et quitta son confortable fauteuil, prête à se préparer pour la soirée de ce soir. Dans sa robe de chambre immaculée et le bonnet assorti, l'archiduchesse ressemblait à un ange passant de son cabinet à sa chambre, sa peau cachée habituellement du soleil se confondait presque avec le doux tissu.
Se préparer, pour une dame, était toujours un grand casse-tête : il y avait tout d'abord la chemise et les bas à enfiler, mettre le corset et bien le serrer, avant de se ceinturer un panier pour gonfler la robe. Puis mettre la dite robe, Aliénor avait confectionné elle-même sa robe, d'un magnifique taffetas bleu, dont quelques arabesques blanches surpiquées venaient mettre en valeur la dentelle aux manches et au décolleté. C'est à ce moment là qu'Igor, le domestique de Maximilien faisant office de maître d'hôtel pour la jeune femme, vint se présenter et annoncer l'arrivée de l'aumônier de la Reine, l'abbé de Baignes. Aliénor demanda à faire patienter le père Jean dans le salon le temps qu'elle finisse de se préparer, et passa devant sa coiffeuse. Le maquillage était comme toujours sophistiqué, et ses cheveux blonds bouclés remontés en chignon, si à la mode en ce temps. Le choix des bijoux fut rapide : contrairement à ce que l'on pourrait penser, la Wittelsbach n'en possédait pas tant que cela, juste quelques héritages de sa mère, et des présents de ses anciens maris. Elle se décida pour une parure en diamants, cadeau de son premier mariage, comprenant un beau collier, deux pendants d'oreilles et une bague. Enfin, elle quitta ses appartements pour rejoindre le père Jean.
« Ah, vous êtes absolument parfaite, mademoiselle, s'exclama l'abbé lorsqu'elle apparut dans le salon. Je vous remercie mon père, vous êtes aussi très élégant. » répondit-elle poliment. Ne tardons pas, si vous êtes prête, je ne voudrai faire attendre notre hôte, il me semble l’avoir entendu prononcer les mots de “expérience scientifique” et “merveille”, je ne voudrai pas rater ça. Si j'ai bien entendu et que monsieur de Sudermanie est bel et bien invité, nous ne pouvons rater cela ! »
Prenant une cape pour couvrir ses épaules à moitié dénudées, l'abbé et l'archiduchesse montèrent dans le carrosse en direction du Temple du Goût, lieu de réception de la fête. L'abbé de Choisy était depuis quelques temps, le confesseur d'Aliénor, elle ne pouvait manquer les mondanités de celui-ci. Quand on est ami du frère du roi, abbé ou pas, on a forcément le sens de la fête. Il y avait déjà du monde lorsqu'ils passèrent la porte de l'hôtel particulier et qu'un domestique débarrassa la jeune femme de son manteau. Comme toujours, les mondanités d'usage exigèrent de saluer les connaissances, de dire un mot aimable, mais de chercher aussi l'hôte de la soirée pour le féliciter de cette belle soirée. Cherchant alors le père Jean du regard, celui-ci revint à elle :
L’avez-vous vu? Il n’est peut-être pas encore arrivé ... Mais tenez, voilà la comtesse des Barres, nous pouvons peut-être aller la saluer en attendant, il s’agit de l’hôte de ces lieux, après tout. Elle saura bien nous dire où est Choisy ! Il paraît que c'est une femme de bon goût, nous avons la même couturière d'ailleurs, elle sourit d'ailleurs en voyant son œuvre au loin sur elle, allons la saluer, en effet. »
La comtesse parlait, leur faisant dos quand ils arrivèrent jusqu'à elle. Aliénor ne l'avait jamais vue, la comtesse ne venait jamais elle-même pour ses robes, la maison avait ses mensurations, et c'était toujours son domestiques qui venait et repartait avec les commandes, ce serait l'occasion de mettre un visage sur cette personne si mystérieuse ! Mais quand elle se tourna en riant et saluant ses deux convives avec enthousiasme, la jeune femme pâlit et s'arrêta dans sa légère révérence, fixant la fameuse comtesse, choquée. Personne n'avait l'air de se demander pourquoi elle faisait cette tête, la comtesse bavardait avec le père Jean, toujours avec le grand sourire et avec sa gestuelle si féminine, Aliénor dut poser la question qui lui brûlait les lèvres en s'approchant d'elle :
« Mon père, que faites vous en robe ? » murmura t'elle non loin de l'oreille de l'hôte.
Le père Jean avait-il entendu ? Et personne n'avait-il remarqué que la comtesse des Barres était aussi l'abbé de Choisy ? Certes, il était une parfaite femme dans cette tenue, on pouvait s'y méprendre quand on ne le connaissait pas, mais il y avait bien des gens qui connaissaient ces deux personnalités, à commencer par le père Jean ! La soirée commençait bien …
Isabelle de Saint-Amand
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Fermé à double tour depuis qu'un ex-mousquetaire l'a brisé Côté Lit: Amants de passages aussi rapidement oubliés Discours royal:
Coeur à vif ϟ On promet beaucoup pour se dispenser de donner peu
► Âge : 29 ans
► Titre : dame de Louvel, chevalier de Saint-Amand
Montée sur Topaze, son étalon gris, habillée d'une veste en velours violet foncée, d'un haut de chausse noir et de cuissardes de la même couleur, Isabelle se demandait encore pourquoi elle avait accepté. Tout remontait à un peu plus loin, une plaisanterie, de mauvais goût certes, mais une plaisanterie tout de même, faites lors d'un après-midi d'ennui dans une église. Plaisanterie qui aurait pu très mal se terminer d'ailleurs, si le prêtre en question n'avait pas été aussi libre d'esprit. Bien plus que ce à quoi elle s'attendait d'ailleurs et qui avait fait rater sa blague. Pour de meilleures augures ? Elle ne le savait pas encore. Mais comme il le lui avait dit, quelques semaines plus tôt – promesse qu'elle avait fini par oublier et qui lui avait été vivement rappelée par l'arrivée d'un carton d'invitation quelques jours plus tôt – elle aurait bientôt de ses nouvelles. Pour se rendre chez la Comtesse des Barres... Elle avait entendu parler de cette femme. Ou plutôt de cette « femme », dans certains cercles choisis qu'Etienne de Louvel fréquentait. Ceux où les pires rumeurs courraient, parce qu'elles étaient vraies la majorité du temps. Isabelle était donc bien curieuse de savoir à quoi elle allait se frotter.
Arrivée à destination, elle mit pied à terre et laissa les rennes de son cheval avant d'entrer chez Olympe. La guerre ? Elle n'y pensait pas une seconde, ou du moins le moins possible. Elle n'avait personne là bas, à part le portefeuille qui lui servait d'amant et sans qui les journées lui paraissaient bien mornes et longues, parce qu'il n'y avait pas grand chose à faire. On s'ennuyait encore plus chez la reine, si c'était possible. Le seul petit moment de remous avait été le renvoi de Sofia Farnèse. Isabelle n'avait pas vraiment comprit pourquoi elle plutôt qu'une autre, presque chacune des dames de la reine avait un amant – certaines en avaient même plusieurs. Sans doute le côté amoral de l'exhibition... La jeune femme en avait haussé les épaules. Arrivée chez la comtesse, on l'annonça :
-Chevalier Etienne de Louvel.
La jeune femme entra, et jaugea rapidement la soirée. Il y avait peu de monde, mais elle manqua de s'étrangler – ce qui se mit à lui donner le hoquet d'ailleurs – il n'y avait que des gens qu'elle connaissait. Vraiment. Jean de Bagnes et Aliénor de Wittelsbach de chez la reine, sans parler d'Olympe Mancini. Pire encore, il y avait Colbert, s'il était au courant que Louvel était recherché, elle était fichue. Elle savait bien qu'il y avait moyen de faire illusion entre sa personnalité féminine très tape à l'oeil et son côté masculin beaucoup plus discret, mais à moins d'un pied de distance il y avait bien peu de chance que le stratagème fonctionne. Elle saisit une coupe de champagne et la plaça devant son visage.
-Allons ma fille, soit courageuse, se dit-elle, tu dois admettre qu'il est possible que dieu ne t'aime pas du tout, surtout après tout ce que tu lui as fais. Un comble dans la maison d'un prêtre...
Elle ne pouvait pourtant pas se défiler à peine arrivée. Non seulement ça aurait été impoli (enfin, la politesse, Isabelle n'en avait pas grand chose à faire) mais en plus, ça aurait attiré l'attention, ce qu'elle préférait éviter. Elle avisa un fauteuil dans un endroit dissimulé, et s'y installa. C'était sans compter l'oeil de lynx de Marie Charron, qui parlait dans son dos avec Olympe Mancini – ces deux là n'avaient vraiment rien à faire ensemble.
-Louvel... ? Louvel. Mais pourquoi n'est-il pas au front celui-là ?
Bonne question à la vérité. Pas assez riche pour s'acheter une charge d'officier, cela suffirait-il comme excuse ? En attendant, Isabelle cherchait Choisi des yeux, ayant vraiment envie de l'étrangler pour l'avoir entrainé dans ce traquenard. Et ce hoquet qui n'en finissait pas et qui était loin d'être discret...
Thimoléon de Choisy
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Libre comme les cieux : il brûle comme l'enfer ! Côté Lit: Tous les anges et les démons de cette terre s'y étendent pour mon plus grand plaisir... Discours royal:
ANDROGYNE l'Allure stupéfiante.
► Âge : 23 ans
► Titre : Abbé de Saint-Seine - Comtesse des Barres - les yeux et les oreilles de la Cour...
« Mon nouvel assistant est en ce moment même en train de finaliser les installations, précisa Christian, tout sourire à la comtesse, en acceptant sa coupe de champagne. [b]Tout se passe pour le mieux. Mais ma chère, permettez-moi de vous complimenter, cette réception est tout bonnement superbe. Quant à vous, vous êtes plus rayonnante encore que la dernière fois que je vous ai vue. Quel peut être votre secret ? » lança-t-il avant de faire un baise main à la dame qui était déjà en train de rire comme un rossignol et de rougir.
-Hohoho ! Monsieur le duc ! Cessez vos flatteries ! fit Olympe avant de donner une petite tape à son ami avec son éventail.Une dame ne révèle jamais ses secrets, voyons, murmura-t-elle pleine de mystères.
Si seulement Monsieur de Sudernamie savait devant qui il se trouvait vraiment… Là était tout le secret… Sous les jupes de Madame…
« Trinquons comtesse : à cette soirée inoubliable, et à son inoubliable hôtesse ! »
Olympe n’était jamais contre les compliments. Toute la cour connaissait son goût pour l’art subtile (ou pas) de la flatterie et des compliments en tout genre. Mais gare à vous ! Ce comportement était mieux fait pour endormir tout les soupçons à son égard. Comment pouvait-on soupçonner qu’une femme si extravagante et féminine… Alors qu’en réalité elle était un homme et, qui plus est, à tendance espion du dimanche. Car malgré la frivolité du feu follet qu’était la comtesse, elle n’en restait pas moins observatrice. Thimoléon n’oubliait pas le serment fait à son ami Guillaume : celui de toujours garder un œil à la cour de France. Quoi de mieux qu’une fête pour observer les autres ? Le regard d’Olympe glissait furtivement sur ses invités avant que Christian de l’interpelle de nouveau :
« Pour répondre à votre question de tout à l’heure comtesse, j’ai prévu deux ou trois petites expériences très divertissantes pour ce soir. J’ai amené avec moi des feux d’artifices d’un genre tout à fait particulier, inspirés d’une technique chinoise que j’ai améliorée à ma façon afin de leur faire prendre des formes très originales, encore jamais vues à Versailles ! décrivait Christian avec enthousiasme avant de proposer son bras au jeune travesti.
-Oh ! Comme j’ai hâte ! Trépignait la comtesse en passant son bras dans celui de son ami. Cela a l’air formidable !
-Mais je vous propose de garder cela pour la fin, quand il fera vraiment nuit noire, nous y verrons bien mieux.
-Oui bien évidemment , acquiesça Olympe. Vous avez toute ma confiance, dit-elle toujours plus enjouée.
-J’ai également songé qu’un peu de prestidigitation pourrait amuser nos amis, aussi ai-je préparé un petit tour de mon cru… Me croirez-vous si je vous affirme que je peux faire voler une carte de jeu par la seule force de la pensée ?
Olympe lui jeta des yeux ronds :
-Oh ! S’exclama-t-elle. Vous feriez cela ? demanda la comtesse avec des yeux pleins d’étincelles avant de redonner un petit coup d’éventail sur la main de son ami. Vous me faites beaucoup trop languir ! C’est intolérable ! dit-elle en riant, sans le moindre vrai reproche.
Poursuivant leur petit tour à travers les jardins du Temple du Goût, Christian continuait de révéler ce qu’il allait sortir de ses poches pour épater le Tout-Versailles :
-J’ai également prévu de petits amusements de chimie, comme par exemple créer des nuages de couleur rouge qui flotteront avant de se dissoudre dans l’air. Qu’en pensez-vous ? J’ai d’autres tours dans mon sac bien entendu, mais pour commencer, cela devrait faire l’affaire ?
Olympe jeta à son ami un regard étonné :
-Vous osez demander mon avis, monsieur le duc ? Voyons : une telle débauche de surprises va laisser bouche bée quiconque pourrait douter de mon sens de la fête et de votre génie ! Cela fera PAR-FAITEMENT l’affaire : vous verrez », fit Olympe, aux anges.
Comment peut-il se demander si leur entreprise fonctionnera ? La comtesse trépignait de pouvoir voir ces surprises ! C’est alors que son complice du soir se pencha près d’elle et baissa d’un ton :
« Ah, aussi, ne le dites à personne mais... J'ai amené avec moi l'une de mes toutes dernières innovations. Elle est encore secrète, mais j'ai l'intention de la révéler au public ce soir... Si vous m'y autorisez, bien entendu. »
Il venait à peine de prononcer ses mots qu’Olympe lui jeta des yeux de chat tout en se mordant la lèvre inférieure avec un sourire charmant. S’il y avait bien une chose qu’elle pouvait constater dans l’immédiat : c’est que Sudernamie savait très bien se faire désirer.
« Faire tant de mystère devrait être interdit mon ami ! s’exclama la jeune femme en tapant du pied, faussement énervée. Vite ! Vite ! Dites moi tout, ajoutait Olympe en l’invitant à murmurer ses secrets près de son oreille afin d’éviter quelques fuites parmi les invités.
Une fois l’expérience révélée, Olympe s’écarta de Christian avec un petit sourire en coin qui en disait long. Subjuguée, elle agita son éventail en plumes d’autruche sous le nez de son complice :
« Vous êtes démoniaque ! riait l’hôtesse en frémissant de plaisir avant de prendre congé de lui. Je m’éclipse pour accueillir les autres invités. Faites moi signe dès que tout cela sera en place ! Je ferai une annonce… » dit-elle avec un clin d’œil.
Alors qu’elle s’éloignait de Christian en fendant la foule, la comtesse poursuivait de saluer machinalement l’ensemble de ses invités en jetant des sourires étincelants par-ci, des gestes de la main par-là, le tout en marchant droit(e) et fièr(e) comme un paon. Elle se sentait, incontestablement, la Reine de la Nuit ! N’en déplaise aux vraies têtes couronnées que l’abbé de Choiy avait coutume de fréquenter… Ce n’était qu’un jeu !
Il n’avait pas envie de bouder son plaisir en temps de crise. Et l’absence de ses meilleurs amis pesait sur sa conscience le reste du temps… Olympe avait le don de chasser les idées noires de son alter ego masculin. Quoi de plus pratique ? La jeune femme se sentait d’autant plus resplendissante que sa robe était l’ouvrage des doigts de fée de sa toute nouvelle amie, l’archiduchesse de Wittelsbach…
Alors qu’elle était toute heureuse de s’amuser, voilà que Colbert lui barre la route avec un petit sourire forcé. Diantre ! Elle aurait préférée l’éviter celui-là ! Que lui voulait-il donc ?
« Madame, cette fête est… charmante, fit le sinistre personnage, à peine courtois, en la saluant.
-Nous faire l’honneur de votre présence nous ravi tous, Monsieur, répliqua-t-elle froidement. Je vois qu’en dépit des festivités vous persister à porter votre costume de… notaire.
Olympe aurait préférer utiliser le mot « croque-mitaine » mais elle essayait de rester polie. Malgré tout la remarque fit se pincer davantage les lèvres sévères de son invité. Grand(e) ami(e) de Monsieur, il/elle ne pouvait s’empêcher de prendre sa défense et de rejeter avec véhémence l’austérité à face humaine qu’était Colbert. Forçant encore son sourire face à lui, Olympe posa une main délicate sur l’épaule de celui-ci :
« Heureusement que vous êtes parmi nous pour nous rappeler notre triste situation. Les fêtes sont faites pour pleurer : c’est bien connu. »
Il s’apprêtait à lui répondre avec un air furibond quand deux personnes vinrent à leur rencontre. C’était l’archiduchesse de Wittelsbach et son ami Jean de Baignes. Trouvant un prétexte parfait, l’hôtesse des lieux tourna délibérément le dos à Colbert, mettant définitivement fin à cette conversation désagréable.
« Mes amis !!! S’exclama-t-elle d’une voix chantante. Vous êtes venus ! Quelle joie !... Oh Jean ! Ce costume est tout à fait superbe ! fit le travesti avec un sourire réjouit. Vous venez à mon secours : Monsieur Colbert est à mourir d’ennui. Voulez-vous du champagne ? demanda-t-elle avant d’arrêter d’un geste sec le chemin d’un mignon qui passait près d’elle en portant un plateau.
Olympe attendait une réponse de ses deux amis et invités qui restaient pourtant bien silencieux. Jusqu’à ce qu’Aliénor se penche vers elle en murmurant, l’air gênée :
« Mon père, que faites vous en robe ? »
L’intéressé(e) resta parfaitement stupéfait devant une telle réaction. Thimoléon resta interdit quelques instants en jetant tour à tour un regard à Jean puis à Aliénor avant de retrouver son sourire éclatant et ses yeux rieurs :
« Fichtre ! Vous êtes un agneau bien surprenant, Madame, fit le travesti démasqué.
Il avait de quoi être surpris, en effet. Jusqu’à présent les seuls personnes qui parvenaient véritablement à reconnaitre Thimoléon en Olympe et inversement (en dehors de sa famille) ne se comptaient que sur les doigts d’une seule main : Monsieur, la Montespan, Ferdinand d’Anglerays, Guillaume du Perch et Elodie de Froulay. Aliénor venait compléter, avec un talent fou, ce cercle très restreint d’observateurs. Évidemment cela ne dérangeait pas le moins du monde monsieur de Choisy qui adorait jouer les attractions quand il en avait l’occasion.
« Allons, soupira d’aise Olympe/Thimoléon avec un petit sourire. Bas les masques ! dit-il/elle avant de se saisir de sa perruque et de la soulever légèrement pour laisser apparaitre sa vraie chevelure. Coucou ! » s’exclama l’abbé travesti avant de remettre bien vite son postiche en place pour ne pas trop se faire remarquer.
Thimoléon remarqua immédiatement le regard incomparable que lui jetait son ami dévot, l’aumônier de la Reine.
« Ne me regardez donc pas comme cela, mon cher Jean, fit le jeune homme en jupons avec un air malicieux. Vous connaissiez mon goût pour les déguisements !... Mais j’apprécie tout de même le fait d’avoir fait mouche de la sorte, ajouta-t-il en riant. Vous faites une de ces têtes !... Une robe en vaut bien une autre après tout, non ? »
Puis il se tourna ensuite vers celle qu’il confessait chaque semaine depuis quelques mois.
« Sachez, mon enfant, que l’évêque est au courant, confia Choisy avant de répliquer plus guilleret : Il me trouve d’ailleurs très mignonne ! »
C’était désormais officiel : une soirée chez la comtesse et/ou l’abbé n’était jamais une soirée ordinaire…
En effet, la comtesse pouvait parfaitement dire où était Choisy, mais Jean était encore à quelques minutes du dénouement, jouissant alors encore de cette douce plénitude qu’était l’innocence. Ne refusant jamais un verre de vin pour, prétextait-il, essayer de nouveaux vins de messe, il avait pris une coupe que lui tendait un petit valet, et sirotait la boisson d’un air distrait, hochant vaguement la tête lorsque la jeune Wittelsbach lui parlait couture. Il ne releva les yeux que pour saluer celle qui devait certainement être la pire des pénitentes d’un prêtre quel qu’il soit. Jean refusait d’ailleurs en général ces âmes trop frivoles pour n’être pardonnées qu’une fois par semaine. Il préférait essayer les indulgences plénières, mais depuis quelques siècles, les ventes d’icônes avaient étonnament baissé, à son plus grand désarroi lorsque ses oreilles entendaient parler de courtisans lutinant les servantes dans les cuisines. Mais Olympe des Barres aurait pu ne pas être l’hôte de Jean si elle ne connaissait pas Choisy. Intimement, le jeune homme avait-il laissé entendre, faisant frissonner l’aumônier sous son collet. Il avait décidé de ne pas se laisser aller à son instinct d’homme ferme et avait poliment haussé le sourcil d’un “Ah” faussement convaincant.
-Mes amiiiis!! Le cri strident failli faire sursauter Jean, et oubliant sa mine désappointée, il salua la comtesse d’un large sourire. L’évêque de Poitiers et la proximité de la reine lui avaient appris une chose: il ne fallait pas cracher dans la soupe et la comtesse des Barres était hélas parfaitement indiquée pour aider Jean à s’introduire dans la cour...au sens littéral du terme, entendons-nous. -Vous êtes venus ! Quelle joie !... Oh Jean ! Ce costume est tout à fait superbe ! -Certainement, comtesse, on a du batailler pour me le faire porter, répondit-il d’un air poli en prenant courtoisement la main de la “jeune femme”. J’ai entendu murmurer un bruit de science par ici, mes oreilles m’ont-elles dupé? Et ce bon Choisy, où se cache-t-il donc? S’il n’avait insisté, je serais resté à prier sur ce monde païen qui est le vôtre, pour que le vin soit assez doux ce soir, continua-t-il sur un ton badin! Il allait poursuivre sur les âfres de la Maison de la Reine, mais Aliénor de Wittesbach se pencha vers l’oreille de la comtesse, et ce qu’entendit Jean devait le faire frémir durant de longues années durant, à lui en faire palpiter le coeur. -Mon père, que faites vous en robe ? -Pardon, mademoiselle, mais vous offensez notre si agréa… Jean s’arrêta soudainement, pris d’un odieux malaise alors qu’il observait les traits d’Olympe des Barres. “Mon père?”...Pardon?! -Allons, Bas les masques ! , lança alors la comtesse des Barres d’un regard pétillant! -Comtesse…Jean hésita entre se cacher les yeux et se signer devant l’odieuse vérité. Ne me dites pas que… -Coucou !
Il l’avait fait! Jean manqua de s’étouffer, renversant toutefois son champagne sur sa soutane neuve, les yeux écarquillés devant Thimoléon de Choisy redevenu Olympe des Barres. Aucun mot ne pouvait sortir de sa gorge, bien plus coincés par le champagne que par le choc. -Enfin, Choi...comtesse, ça n’est plus un déguisement! Vous servez l’Eglise, que diable, jura-t-il en marmonnant, s’essuyant brièvement! -Mais j’apprécie tout de même le fait d’avoir fait mouche de la sorte, continua le garçon en riant sans répondre à l’aumônier! Vous faites une de ces têtes ! -Je voudrais vous y voir! Et moi qui essaye de vous inculquer quelques valeurs! -... Une robe en vaut bien une autre après tout, non ? -Bah, lâcha notre pauvre abbé qui découvrait son pire élève en la personne de Choisy. Ca n’est pas grâce à celà que vous ferez un bon cardinal! Il le réprimanda sur un ton professoral, levant les yeux au ciel. Il comprenait à présent parfaitement le terme “intimement”, mais eu presque préféré qu’il s’agisse d’une nature biblique. Après tout, l’Eglise avait déjà un Bouillon en son sein!
Mais Thimoléon ignora les critiques de celui qui s’employait à faire de lui un homme d’Eglise à peu près correct et tourna son visage radieux vers Aliénor. -Sachez, mon enfant, que l’évêque est au courant, il me trouve d’ailleurs très mignonne ! -Bon et bien si l’évêque donne sa bénédiction, qu’y puis-je, soupira Jean! Ma chère enfant, reprit-il dans un soupir en reprenant les termes de Choisy et en se tournant vers la jeune fille, je crois que je vais rendre mon petit collet et me faire moine ou courtisan! Vous n’avez plus besoin de moi, comtesse, à moins que vous ne vouliez entendre ces derniers écrits que l’on m’a aidé à composer? Ou peut-être devrais-je aller retrouver cet homme de science..Du moins, je dis homme, mais en est-il vraiment?
Jean était passé de la stupeur au tremblement puis avait atteint cette phase de total déni, refusant d’assumer le fait que le jeune Choisy lui avait été officieusement confié. La partie suivante aurait été la colère, mais l’homme d’Eglise se savait bien trop au-dessus de ce péché pour y succomber, tout comme celui de l’orgueil, d’ailleurs. C’est dans ce grand élan de bonté forcée qu’il accorda une mince bénédiction aux folies de Choisy. -Je vous laisse donc, et puisque monseigneur l’évêque vous trouve adorable, qui serais-je pour refuser les talents d’hôte de la comtesse des Barres, fit-il d’une voix toutefois encore blanchâtre? Amusez-vous, je ne veux pas être la fourmi qui vous empêche de chanter!
Il salua la comtesse et d’un petit geste de la main signifiant “ne me suivez pas, je n’en vaut pas la peine”, il s’éloigna vers le génie du soir, espérant y trouver enfin un esprit qui saurait nourrir le sien. Il fallait éviter la gourmandise, mais celle de la science n’en n’était pas vraiment, n’est-ce pas?
Tout sourire, Christian ne pouvait être plus satisfait de la réaction de la comtesse, qui paraissait ravie à l’écoute du petit programme qu’il avait concocté. Il n’en attendait pas moins d’elle : d’expérience il savait qu’elle aimait ce qui était à la vois élégant et époustouflant, et il avait agi en conséquence. Des couleurs, des lumières, de la prestidigitation, que demander de mieux pour une fête destinée à entre mettre plein les mirettes à son public ? Christian n’était ni magicien ni homme de spectacle, mais l’exercice l’amusait, et bien que tout ça ne soit que de la poudre aux yeux, l’alchimiste avait un petit faible pour cet instant particulier où il pouvait capter l’émerveillement dans le regard de son public. Et vu l’enthousiasme de cette chère comtesse, l’entreprise était pour le moment réussi. Et avec l’assistance d’Hugues, il n’avait aucun doute sur le succès de ses petites expériences. Des années à trafiquer produits et mécanismes en tout genre lui avaient donné une certaine assurance quand il s’agissait de s’amuser avec d’inoffensives petites expériences que même un enfant averti serait capable de réaliser. « Vous êtes démoniaque ! » s’exclama la comtesse en riant, tirant un sourire à Christian qui s’inclina pour saluer le compliment. « Je m’éclipse pour accueillir les autres invités. Faites moi signe dès que tout cela sera en place ! Je ferai une annonce… » « Qu’il en soit fait selon vos souhaits, ma chère amie. Je vous laisse à vos obligations, je vous enverrai mon assistant lorsque tout sera prêt. »
Les mains dans le dos, un air de franc amusement sur le visage, le duc suivit son amie du regard jusqu’à la voir aborder la duchesse de Wittelsbach et se détourna enfin pour rediriger son attention vers ses installations. Il traversa la pelouse des jardins pour aller retrouver Hugues, qu’il trouva très concentré et occupé à installer les diverses fioles qui allaient servir à créer ces nuages de soufre dont il avait parlé à la comtesse. Distraitement, il laissa courir ses doigts sur les conteneurs de verre et hocha la tête avec approbation. Parfait parfait parfait, tout semblait se mettre en place à merveille.
« Par quoi commencerons-nous, monsieur le duc ? » demanda le jeune assistant en recomptant une à une les petites fioles. « Par les nuages, mon cher Hugues. Ca aura au moins le mérite d’attirer l’attention de notre public d’aujourd’hui, avant de passer à d’autres petits tours peut-être moins tape-à-l’œil. » répondit-il en calant sous la table de démonstration une malle scellée d’un verrou et qui contenant le clou du spectacle. Ses yeux bleus brillants d’un éclat terriblement malicieux. Ah ça, il en était fier de cette petite chose là. Oh rien de bien révolutionnaire, mais une sacrée petite innovation dans son domaine. Une petite perle, en un sens. Et c’était bien connu, la comtesse aimait les perles, surtout les plus rares, à l’image de la plus grande reine d’Angleterre Elizabeth I. Le duc se redressa et allait aider son assistant à terminer les installations lorsqu’un silhouette s’approchant d’eux attira son attention. Aussitôt, un sourire illumina son visage et une étincelle d’intérêt éclaira son regard.
« Tiens donc. Père Jean, je ne m’attendais pas à vous rencontrer ici. Quel plaisir de vous compter dans notre public ce soir. » lança-t-il en s’approchant de l’abbé, tout en sourire et en courtoisie. Un personnage fascinant que cet abbé. Et un allié aussi surprenant qu’inattendu à la cour du roi Soleil, où ses recherches n’étaient pas toujours les mieux vues auprès des personnalités les plus pieuses de la cour. Dans ce monde où il marchait sur un fil tel un funambule, Jean de Baignes faisait office de point de repère et appui particulièrement précieux. Mais ce soir-là, l’abbé ne semblait pas avoir le cœur à la fête, et en voyant la tête qu’il tirait, l’expression de Christian passa du contentement à l’étonnement. « Eh bien mon ami ? Que vous arrive-t-il donc ? On dirait que vous venez de croiser le Diable en personne. Voulez-vous vous asseoir un instant ? » interrogea-t-il non sans curiosité, échangeant un regard perplexe avec Hugues qui jugea sage de ne pas intervenir. Gentiment, Christian effleura le bras de son complice pour l’inviter à rejoindre leur petit groupe. « Je viens de vous voir discuter avec la comtesse, ne me dites pas que c’est elle qui vous a fait cette frayeur ! »
Aliénor de Wittelsbach
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Il est libre de battre mais n'a pas trouvé qui serait digne de lui. Côté Lit: Il n'y a que moi et parfois ma fille. Pas d'homme, pour cause d'absence de coeur qui bat. Discours royal:
♣FEMME D'AUJOURD'HUI♣ elle flotte, elle hésite ...
► Âge : 24 ans
► Titre : Archiduchesse d'Autriche, duchesse douairière de Saxe-Zeitz et de l'Autriche inférieure
Le début de cette soirée était sympathique, il est toujours plaisant d'aller à une fête pour s'amuser dans Paris. Si Aliénor ne connaissait pas personnellement la Comtesse des Barres, elle avait son ami Thimoléon de Choisy comme nouveau confesseur. Il lui avait été recommandé par certaines duègnes de la Maison de la Reine, et les deux s'étaient bien entendus jusqu'alors. Ce serait donc amusant de le croiser dans un contexte bien moins catholique, si elle pouvait bien sûr s'exprimer ainsi. La demeure était délicieuse, on sentait que la dame avait du goût, après tout le nom de l'hôtel exprimait bien ce qu'il y avait à l'intérieur, sans vraiment de modestie certes, mais avec justesse. Aliénor se voulait être une femme de goût, et vu le peu d'espace qu'une femme peut occuper, elle s'était évertuée durant ses mariages à donner un aspect positif, et cela passait par la tenue de la maison. Bien que veuve aujourd’hui, l'archiduchesse se sentait obligée d'avoir une maison bien tenue et bien décorée, et son hôtel particulier témoignait de ses achats, son mécénat et cette envie de bien faire. Et ici, rien ne trahissait le mauvais goût, peut être à la rigueur un peu trop de m'as tu vu, mais c'était selon le caractère de chacun et un peu d'excentricité ne pouvait guère faire de mal.
Elle parlait sobrement avec le père Jean quand une voix stridente se fit entendre, voici donc la fameuse comtesse … Enfin … le choc d'Aliénor fut total. Le père Jean ne semblait pas l'avoir reconnu mais derrière cette magnifique perruque, toute cette poudre et ses manières si féminines, elle reconnut de suite son confesseur. Quel choc ! A tel point qu'elle ne put retenir sa question, qui pouvait paraître si impoli. D'ailleurs le père Jean la reprit.
« Pardon, mademoiselle, mais vous offensez notre si agréa… “Mon père?”...Pardon?! Allons, Bas les masques ! Coucou ! Oh mon dieu ! » murmura t'elle tout bas, faisant un signe de croix.
Elle aurait tellement voulu se tromper mais non, il s'agissait bien de Choisy et elle partageait la (mauvaise) surprise avec Jean de Baigne qui ne s'en remettait pas. Et puis Comtesse/Choisy enfonca le clou en se tournant vers elle :
« « Sachez, mon enfant, que l’évêque est au courant : Il me trouve d’ailleurs très mignonne ! »
Aliénor le regarda, toujours abasourdie, et se tourna vers le père Jean. Les deux ne s'attendaient clairement pas à cette confession ce soir là. D'ailleurs, l’aumônier de la reine décida de quitter la conversation, il lui fallait se remettre de ses émotions, et laissa donc l'autrichienne en compagnie de son confesseur travesti. Jamais elle ne s'en serait doutée, rien ne laissait paraître. Il était certes un abbé coquet, ami du Prince de France mais ce ne sont pas des raisons suffisantes pour deviner qu'il avait une double identité. Quelques secondes après le départ du père Jean, face à cette madame-monsieur dont elle ne savait plus comment le/la nommer, il fallait reprendre la conversation, un peu mal à l'aise.
« Sachez que … si l'évêque approuve, je ne peux guère aller contre cela et … elle cherchait ses mots … Y a t'il d'autres personnes au courant ? »
Elle pensait à lui, mais égoïstement, Aliénor pensait à ce qu'on dirait si on apprenait qu'elle, si pieuse, se confessait à un travesti !
Thimoléon de Choisy
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Libre comme les cieux : il brûle comme l'enfer ! Côté Lit: Tous les anges et les démons de cette terre s'y étendent pour mon plus grand plaisir... Discours royal:
ANDROGYNE l'Allure stupéfiante.
► Âge : 23 ans
► Titre : Abbé de Saint-Seine - Comtesse des Barres - les yeux et les oreilles de la Cour...
Devant la révélation de sa véritable identité, Choisy pût voir les mines défaites qui se composaient sous ses yeux. Jean de Baignes virait presque au vert tandis que le rouge montait aux joues de la Wittelsbach.
-Sachez, mon enfant, que l’évêque est au courant, il me trouve d’ailleurs très mignonne !
-Bon et bien si l’évêque donne sa bénédiction, qu’y puis-je, soupira Jean.
-Allons ! Ce n’est pas si grave ! poursuivit le jeune travesti avec son éternel sourire d’ange.
Mais son professeur de théologie l’ignora parfaitement, préférant se tourner vers la jeune femme. Un frisson d’effroi couru dans le dos de Thimoléon qui se sentit soudain bien triste.
-Ma chère enfant, fit Jean avec un air pincé à Aliénor, je crois que je vais rendre mon petit collet et me faire moine ou courtisan!
-N’exagérez donc pas mon ami, je…
-Vous n’avez plus besoin de moi, comtesse, à moins que vous ne vouliez entendre ces derniers écrits que l’on m’a aidé à composer ?
-Et bien, peut être plus tard si vous le voulez bien, fit Choisy, décontenancé.
Il n’y avait plus l’once d’une coquetterie dans l’attitude de la comtesse/abbé. Voilà longtemps que Thimoléon n’avait été autant gêné par une telle situation… En fait, c’était plus terrible encore parce qu’il avait une véritable estime pour Jean de Baignes. Celui-ci préféra d’ailleurs s’éclipser :
-Je vous laisse donc, et puisque monseigneur l’évêque vous trouve adorable, qui serais-je pour refuser les talents d’hôte de la comtesse des Barres, fit-il d’une voix toutefois encore blanchâtre. Amusez-vous, je ne veux pas être la fourmi qui vous empêche de chanter !
Il salua la comtesse et l’archiduchesse puis s’éloigna sans un mot de plus. La vue de son dos s’éloignant dans la foule fendit le cœur du jeune homme/femme. Il reposa ses yeux sur sa nouvelle protégée et sa tristesse s’envola aussitôt de son visage comme si elle n’avait jamais été. Olympe était de retour !
« Laissons donc bouder, ce vilain garçon. Il faudra que je lui apprenne davantage à s’amuser ! Le pauvre…
Mais la Wittelsbach ne prononçait pas un mot, semblant toujours stupéfaite de sa découverte. Cela fit rire la Comtesse qui cacha coquettement sa bouche avec son éventail :
-Allons allons ! Je ne pensais vraiment pas vous faire une telle frayeur ! Ma parole… Ça m’apprendra ! Je ne vous savais point si observatrice en tout cas. Voulez-vous prendre un verre ? demanda-t-elle en attrapant une coupe sur un plateau.
-Sachez que … si l'évêque approuve, je ne peux guère aller contre cela…
-Oooh ! s’exclama Olympe avec un air attendrit. Vous êtes si mignonne, Aliénor ! Cela me va droit au cœur.
-Et…Y a-t-il d'autres personnes au courant ? osa demander la jeune femme (pas la travestie, l’autre !)
-Oh oui oui oui ! chantonna la comtesse en dissipant le malaise d’un revers de la main. Ma famille m’a élevé ainsi vous savez et mes plus proches amis connaissent mon amour pour les jolies robes !... D’ailleurs aimez-vous ma tenue ? demanda-t-elle avec des airs de poupée. La vôtre est exquise en tout cas ! Je suis fascinée par les broderies de votre corsage ! Je veux votre adresse : votre couturière a bien du talent. Et puis…. DIABLE ! s’exclama soudainement la comtesse en portant une main sur son cœur.
Parmi la foule de ses invités son regard s’était arrêté sur un visage qui hantait ses fantasmes depuis quelques mois. Une pâle brune aux yeux de glace rencontrée au détour d’une église de Paris… Il ne l’avait pas revu depuis. Et voilà qu’elle était là, en chair (surtout) et en os dans un joli costume d’homme, plus séduisante que jamais. Aaah ! Son sang était bouillant ! Thimoléon apercevant alors le regard inquiet de son interlocutrice, il essaya de retrouver un peu de contenance est dépliant vivement son éventail et de se donner un peu d’air.
-Ah Dieu ! Il fait si chaud en cette saison, fit la comtesse l’air de rien, tout en jetant des petits regards en direction de celui qui se faisait appeler le Chevalier de Louvel.
Durant ces quelques instants d’espionnage à peine furtif, Thimoléon ne savait absolument pas ce qu’était en train de lui raconter Aliénor d’ailleurs il la coupa en plein milieu d’une phrase sans la moindre gêne :
-Comment vous trouvez ma tenue ? Vraiment ? demanda-t-il, extrêmement préoccupé en agitant nerveusement son éventail. Et ma coiffure ? Mon fard n’a pas coulé ? Tout va bien ?
Puis il jeta encore un œil sur la travestie de son cœur, au loin, avant de revenir brusquement à Aliénor :
-Bon j’avoue tout : vous voyez cette délicieuse personne là-bas ? Superbe n’est-ce pas ? On dirait un ange tombé des cieux, non ? demandait-il sans même attendre de réponse. Il faut absolument que je lui parle : vous le connaissez ?... Non ?...Non, bien sûr que non…
L’abbé coquet se mordit la lèvre inférieure en trépignant presque sur place, faisant danser joyeusement les boucles de sa perruque auburn. Il avala ensuite d’un trait, et sans la moindre délicatesse, sa coupe de champagne avant de la reposer, l’air déterminé. Le jeune homme prit le bras d’Aliénor et l’emmena à sa suite.
-Diable ! Allons-y ! C’est qui la maitresse de maison ici, hein ? C’est moi ou ce n’est pas moi ? Je vais vous présenter. »
Les deux femmes (enfin une femme et demi plutôt…) fendirent alors la foule jusqu’à arriver à la hauteur du chevalier. Olympe lui adressa son plus beau sourire :
« Chevalier de Louvel ! s’exclama-t-elle en lui lançant des yeux de biche. Quelle joie de vous voir parmi mes convives ! Ma soirée vous plait-elle ?... Oh quelle sotte ! Je manque à tous mes devoirs : Chevalier, je vous présente l’Archiduchesse de Wittelsbach, une très bonne amie à moi », dit-elle en serrant fort les épaules de celle-ci.
C’était d’une indélicatesse sans nom d’entrainer sa toute nouvelle protégée dans ses frasques mais quand il était question de passion : Thimoléon n’écoutait plus personne !
Isabelle de Saint-Amand
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Fermé à double tour depuis qu'un ex-mousquetaire l'a brisé Côté Lit: Amants de passages aussi rapidement oubliés Discours royal:
Coeur à vif ϟ On promet beaucoup pour se dispenser de donner peu
► Âge : 29 ans
► Titre : dame de Louvel, chevalier de Saint-Amand
Isabelle, ou plutôt Etienne de Louvel, hésitait sérieusement à partir, et vite, aussi discrètement qu’elle était arrivée. Son hoquet avait finit par passer, heureusement, bien que cette idiote de Charron ne semblait pas la quitter des yeux. Si Olympe la reconnaissait, elle était finie. Il y avait trop de personnes qui, s’ils ne la reconnaissaient pas – bien que cela puisse arriver – pouvaient reconnaître le nom de Louvel. Et la Bastille ne la tentait pas vraiment pour le moment, elle avait bien d’autres choses à faire, comme par exemple assister à la toilette de la Reine demain après son lever. Son absence aurait bien trop surprit à la cour d’ailleurs. Elle risquait gros, et le savait, à se travestir en homme, mais elle n’avait pas imaginé que ce prêtre insolite avec lequel elle avait joué un petit jeu amusant quelques mois plus tôt, ait autant de … relations dans les arcanes de Versailles. Aussi, dissimulée dans le grand fauteuil, la jeune femme commençait à se dire qu’elle allait attendre que la soirée soit à son paroxysme pour slalomer discrètement entre les invités et quitter cet endroit qui risquait tout simplement de lui coûter la vie. Rien de bien méchant en somme… Elle savait se montrer discrète, pour peu qu’on ne l’intercepte pas dans sa lancée, cela ne devrait pas poser trop de problèmes. Il faudrait juste un peu de patience, ce que la belle avait difficilement dans certaines situations.
Elle décida de rester sobre pour éviter tout malentendu possible, reposant la coupe dont elle s’était servie pour dissimuler son visage et tout manquement à son plan d’évasion. C’était bien sûr sans compter les verres qui se baladaient autour d’elle et un petit n’aurait pas été sans calmer ses nerfs, mais elle devait rester en contrôle d’elle-même. Ne pas se faire remarquer… Elle était plutôt du genre à se faire remarquer justement, même si Etienne savait rester discret et sur la défensive. Le temps semblait s’amuser à passer de plus en plus lentement, et Isabelle se promit que si jamais elle s’en sortait sans dommage, elle irait à cette église et apprendrait à ce petit prêtre ce qu’il en était de jouer un jeu pareil. Il ne savait certainement pas, mais cela la défoulerait un peu. Elle avait peu de tolérance aux situations stressantes dont elle n’avait pas le contrôle. Elle se préparait d’ailleurs à filer à l’anglaise, se levant de son fauteuil, le champ étant plus ou moins libre, prête à slalomer rapidement mais discrètement entre les convives, quitte à en bousculer légèrement un ou deux sur son passage, quand deux jeunes femmes qui la regardaient intensément semblaient se préparer à faire mouvement vers elle. C’était bien le moment… Une brune, une blonde, bras dessus, bras dessous. Et la blonde n’était autre qu’Aliénor de Wittelsbach qu’elle côtoyait tous les jours chez la reine. Ca n’aurait presque pas pu être pire.
-Chevalier de Louvel ! Quelle joie de vous voir parmi mes convives ! Ma soirée vous plait-elle ?... Oh quelle sotte ! Je manque à tous mes devoirs : Chevalier, je vous présente l’Archiduchesse de Wittelsbach, une très bonne amie à moi.
Isabelle regarda la « comtesse » et, professionnelle du travestissement elle-même, finit par reconnaître le jeune prêtre. Eh bien, quel retournement de situation inattendu. Il fallut quelques secondes à Isabelle pour revenir à la réalité après cette découverte. Hélas, l’angoisse n’avait pas disparue. Elle se tourna pourtant vers Aliénor, tout sourire : -Madame, c’est un honneur de vous rencontrer enfin ! J’ai tant entendu parler de vous.
Et par des sources bien plus directes qu’on aurait pu l’imaginer… En tant que parfait gentilhomme sous cette tenue, elle se pencha vers elle pour lui baiser la main. Isabelle jeta un coup d’œil à l’organisatrice de la soirée, décidant de jouer le chaud et le froid histoire de prendre une petite revanche :
-Quelle charmante soirée, comtesse. Je n’en attendais pas moins de vous. Pourtant, il y a beaucoup plus de monde que je l’aurais imaginé. Je m’attendais à quelque chose de plus… intime. J’en serai presque déçu… Seulement presque, évidemment.
Elle saisit deux coupes de champagnes sur un plateau et les tendit aux deux jeunes « femmes ».
-On ne peut décemment pas laisser deux jeunes femmes les mains vides ! Je ne saurais le souffrir.
Isabelle songea que tous ces froufrous devant elle seraient la meilleure couverture possible pour détourner l’attention.
Aliénor de Wittelsbach
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Il est libre de battre mais n'a pas trouvé qui serait digne de lui. Côté Lit: Il n'y a que moi et parfois ma fille. Pas d'homme, pour cause d'absence de coeur qui bat. Discours royal:
♣FEMME D'AUJOURD'HUI♣ elle flotte, elle hésite ...
► Âge : 24 ans
► Titre : Archiduchesse d'Autriche, duchesse douairière de Saxe-Zeitz et de l'Autriche inférieure
Aliénor ne se remettait pas de sa découverte, et n’espérait pas en faire d’autres d’aussi … triviales dirons non. En tout cas l’abbé de Choisy, ou la comtesse pour être plus précis, s’en amusait fortement. Quand elle était en Aline, elle avait déjà des robes pour cette fameuse comtesse, sans savoir que c’était un homme qui les porterait, qui plus est un homme d’église ! Mais que faire contre cela ? Elle ne voulait juste pas que tout le monde le sache, il était tout de même le confesseur d’une dame de la reine, cela ferait mauvais genre si on l’apprenait … Mais le travesti s’en moquait et parlait déjà d’un autre sujet.
« Ma famille m’a élevé ainsi vous savez et mes plus proches amis connaissent mon amour pour les jolies robes !... D’ailleurs aimez-vous ma tenue ? Vous êtes très élégante, à n’en pas douter. Mais Aliénor fut coupée, ne pouvant continuer plus. La vôtre est exquise en tout cas ! Je suis fascinée par les broderies de votre corsage ! Je veux votre adresse : votre couturière a bien du talent. Et puis…. DIABLE ! Qu’avez-vous à mentionner le diable ? se demanda la jeune femme, tournant la tête pour essayer de comprendre.
Il y avait déjà assez de diableries ainsi ! D’un coup, la comtesse semblait toute bouleversée et à s’éventer à tout va. Aliénor reprit la parole sur la couture, puisqu’elles en parlaient jusque là, mentionnait quelques détails technique de sa robe, quand elle la coupa en pleine phrase.
« Comment vous trouvez ma tenue ? Vraiment ? Et ma coiffure ? Mon fard n’a pas coulé ? Tout va bien ? Tout va s’envoler si vous continuez de vous éventer avec tant de force. Respirez un grand coup et expliquez moi calmement plutôt. » Le ton maternel mais ferme eut sans doute raison de la comtesse, qui ne savait décidément pas caché son trouble.
En fait, suite aux révélations de son confesseur travesti, Aliénor put découvrir un jeune homme, à l'allure un peu androgyne, élégant se distinguer de la foule. Elle aurait préféré ne pas savoir finalement ce qui le/la troublait, voici qu'un abbé habillé en femme se consumait de désir pour un homme … sans savoir qu'il s'agissait d'une femme. Heureusement, sinon l'archiduchesse n'aurait pas su où donner de la tête ! L'homme face aux deux femmes (enfin presque) ressemblait pour beaucoup à une personne qu'elle connaissait, sans pouvoir mettre un nom dessus. Et comme un travestissement suffisait, Aliénor pensa seulement que ce chevalier devait avoir un parent à la Cour, ou qu'elle l'avait croisé. En tout cas, il était des plus polis !
« Madame, c’est un honneur de vous rencontrer enfin ! J’ai tant entendu parler de vous. Monsieur, je suis ravie de vous rencontrer, madame la comtesse, elle eut du mal à dire ces mots en jetant un œil à sa voisine, voulait tant nous présenter. »
Tout d'un coup, elle se demandait ce qu'elle faisait là, voici que le gentilhomme semblait courtiser la maîtresse de maison. Et si Aliénor n'était sans doute pas la plus habile dans les jeux de l'amour et du hasard, elle n'était pas la dernière des imbéciles non plus. Tout ceci était dérangeant et elle aurait bien aimé s’éclipser, mais la coupe de champagne proposée devait la retenir quelques minutes. Et comme il fallait faire bonne figure, d'une part parce qu'elle était polie, et aussi pour ne pas froisser l'hôtesse.
« On ne peut décemment pas laisser deux jeunes femmes les mains vides ! Je ne saurais le souffrir. Oh monsieur est bien aimable. »
Elle allait fait tapisserie, la cinquième roue du carrosse, bref, tenir la chandelle, alors une coupe de champagne ne pouvait pas faire de mal, cela lui donnerait une certaine contenance par rapport à ce qui se tenait devant elle. Tout en continuant de sourire et répondre poliment quand on lui parlait, Aliénor prit l'initiative de poser des questions à ce jeune homme dont son confesseur travesti semblait s'éprendre.
« Pardonnez mon audace, mais avez vous un parent à la Cour ? Vous ressemblez à quelqu'un, mais je ne saurais pas dire qui … sans doute la faute au champagne ! »
C'était le genre de question assez innocente pour le commun des mortels, mais elle ne pensait pas déclencher de la panique chez ses camarades de conversation. Et elle était à mille lieues de la vérité, et cela valait mieux …
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