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 Le prince, la mort et le messager [François]

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Philippe d'Orléans


Philippe d'Orléans

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Il a été brisé, piétiné et maintenant celui qui était à mes côtés est devenu mon ennemi. Quelle cruelle destinée !
Côté Lit: Le lit de mon palais est si confortable et accueillant !
Discours royal:



ADMIN TRAVESTIE
Monsieur fait très Madame

Âge : 27 ans
Titre : Prince de France, Monsieur le frère du Roi, Duc d'Orléans, de Chartres, d'Anjou, seigneur de Montargis
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MessageSujet: Le prince, la mort et le messager [François]   Le prince, la mort et le messager [François] Icon_minitime10.06.12 18:59

Le prince, la mort et le messager [François] Tumblr_lrdcf7nMWN1qkj4q6o1_500
« Pour honorer les morts, les uns portent leur deuil, les autres leurs bijoux. »
En ce mercredi huit décembre 1666, le Palais-Royal s'agitait. Philippe-Charles, le petit duc de Chartres allait au plus mal. Il fallait avouer que depuis mai, ce charmant bambin de deux ans posait quelques soucis de santé, passait son temps entre l'alitement et courir dans les jardins de Saint-Cloud. Mais depuis cette nuit, le cas du petit garçon s'aggravait et tous les médecins se sentaient impuissants face à cette situation. Si Henriette était au chevet de son garçon, Monsieur n'était pas là. La princesse n'avait pas pris la peine de faire appeler son mari qui dormait à Saint-Cloud, jugeant que le cas n'était grave, puis elle n'y pensa plus. Pourtant, la fièvre montait au fil des minutes, le petit Philippe-Charles geignait, se plaignait d'avoir mal à la tête, d'avoir chaud, pleurait à grosses larmes. Personne ne dormit cette nuit là, sauf Monsieur qui se trouvait à quelques kilomètres de là.

Au matin de ce mercredi, tous avaient les yeux tirés et les médecins, toujours impuissants, se tournèrent vers Henriette pour que l'on donne à ce petit les derniers sacrements. C'est seulement à ce moment là que la princesse pensa enfin à faire prévenir son mari, envoyant le premier garde sur son passage. Garde qui s'avéra être François de Froulay partant désormais vers Saint-Cloud. Pendant ce temps, Philippe d'Orléans menait sa vie habituelle dans son château qu'il appelait sa délicieuse demeure. Pas trop éloigné de Paris, pas trop grand ni trop petit, bien aménagé et avec des jardins à faire pâlir Versailles, en particulier cette cascade gigantesque créée par Le Vau, le prince aimait y passer son temps, quand la Cour le lassait. Levé pourtant tôt, le voilà à flâner dans ses lieux habillé d'un magnifique peignoir de soie bleue, traînant dans ses cabinets de curiosité avec toujours quelques mignons non loin de lui, prêts à réagir à la moindre demande princière. Il sonna dix heures sur la magnifique horloge en or quand un mignon se présenta devant lui, dans une révérence bien mal faite, exécutée dans l'urgence. Il s'agissait de Gauthier-Charles, un garçon bien mal-aimé par ses camarades à cause de son sale caractère et sa manie de cracher sur tout le monde, sauf Monsieur. Mais ici point de bon mot, il était bien sérieux pour une fois.

Hé bien parlez. Vous avez magistralement raté votre révérence, tentez au moins de vous rattraper sur votre discours.
Monsieur de Froulay, votre capitaine des gardes, vient d'arriver. Il demande de venir avec lui au Palais-Royal.
Et pourquoi donc ?
Votre fils, Monsieur.


Le ton dédaigneux de Monsieur s'arrêta net lorsque le mot « fils » fut prononcé. De toutes les grossesses d'Henriette, seuls Marie-Louise et Philippe-Charles avaient survécu, mais le petit garçon était un enfant faible et souvent malade, particulièrement ces derniers mois. Il ne fallait jamais prendre cela à la légère. Interdit l'espace d'un instant, Philippe fit demi-tour en direction de ses appartements pour se vêtir. Il ne prenait pas vraiment le temps de choisir, s'habilla simplement, bien que son pourpoint gris soit rehausser d'or et de perles. Il s'était habillé bien plus vite que d'habitude et ne pensant même pas à s'installer à sa coiffeuse où on l'attendait pour le coiffer. Pas de coiffure, perruque, maquillage ou mouche, il n'y pensa même pas et ressortit aussi vite de ses appartements qu'il y était entré, ne pensant qu'à son fils. S'il était un bon père ? Philippe aimait ses enfants, les comblait de cadeaux, voulait pour eux le meilleur. Il ne le montrait pas toujours très bien, n'était pas le père le plus présent, mais portait ses deux petits dans son cœur, personne ne pouvait dire le contraire. Il adulait son aînée, la trouvant tellement jolie, gracieuse et intelligente, il portait Marie-Louise en adulation et avait toujours un bon mot à raconter sur elle quand il était à la Cour. Quant à Philippe-Charles, il trouvait que c'était son portrait craché au point de vue physique, mais d'un naturel bien plus calme que son père. Il avait fait peindre le portrait de son petit à nombreuses reprises, père et fils devaient bientôt poser ensemble pour souligner un peu plus leur ressemblance.

Pendant ce temps, Philippe avait dévalé les marches quatre à quatre pour se retrouver devant le château où se tenait Froulay et un carrosse pour l'emmener à Paris. Le temps était trop frais pour y aller à cheval et à la vue du temps gris, il ne fallait pas que le prince tombe aussi malade.

Montez avec moi, Froulay.

Tandis que les deux hommes montèrent et le véhicule partit pour Paris. Le prince était anxieux, inquiet, cela se voyait à son visage mais surtout à ses grands yeux, il retenait ses larmes, espérant que cela n'était qu'une fausse alerte mais voulut demander confirmation à son capitaine des gardes.

Depuis quand est-il malade ? Qu'ont dit les médecins ? Dites moi que ce n'est pas grave.

Puis il passa le reste du voyage à murmurer des prières et des supplications, les yeux dans le vide, son pied tapotait nerveusement contre le sol du carrosse. Il n'arrivait pas à tenir en place, espérant ne pas arriver à temps, même s'il roulait à bonne vitesse, mais le Palais-Royal paraissait si loin en cet instant ! Il ne cessait de faire tourner l'unique bague qu'il avait au doigt, se gratta la nuque, toucha les perles de son pourpoint, il était incapable de rester sans bouger jusqu'à l'arrivée. Quand enfin ils entrèrent dans le palais, Philippe sortit sans aucune cérémonie et entra dans le bâtiment, Froulay sur ses talons. Il monta au premier étage, là où se trouvait les appartements de son fils. Puis il s'arrêta, tremblant comme une feuille, il restait comme bloqué dans ce couloir, incapable de faire un pas supplémentaire. Il se tourna vers François, un air désespéré dans la voix et sur la face.

Allez y pour moi. Et faites que Dieu vous donne une bonne nouvelle.

Il fallait encore attendre, mais c'était peut être déjà trop tard …

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François de Froulay


François de Froulay

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Côté Coeur: Il a été brisé, il va falloir le recoller
Côté Lit: vide, au désespoir des mignons de Monsieur
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MessageSujet: Re: Le prince, la mort et le messager [François]   Le prince, la mort et le messager [François] Icon_minitime18.06.12 14:03

La nuit avait été longue. Très longue. Quelques jours plus tôt, j’avais reçu pour mission d’aller à Versailles porter un pli de confiance du Prince à son royal frère, et mes instructions m’avaient ensuite envoyées au Palais Royal, me mettre au service de la Duchesse Henriette, ce que j’avais bien évidemment faire sans songer un seul instant à faire autre chose. Je m’étais juste autorisé un passage chez Claire pour l’embrasser et lui assurer que quand le printemps reviendrait, les fêtes recommenceraient à Versailles et j’y serais bien plus présent, cela omettant sciemment les rumeurs de cette fichue guerre qui se faisait plus proche chaque jour. Et c’est en arrivant au Palais Royal que j’avais immédiatement compris que quelque chose n’allait pas. Je n’étais au service de Monseigneur que depuis quelques semaines et pourtant je savais bien que le petit garçon du Duc était de santé fragile. L’enfant tombait souvent malade. A force, on ne s’en formalisait plus outre mesure, prenant toujours les mêmes précautions… Sauf aujourd’hui. Je sentais dans les couloirs l’ambiance lourde et inquiète. Il se disait dans les couloirs que la Princesse n’avait pas quitté le chevet de son enfant. Pourtant, on n’en avait pas encore informé Monseigneur. Ce n’était pas étonnant, le petit duc de Chartres était parfois si malade qu’on avait souvent alerté la cour entière d’un possible trépas, et il avait toujours survécut. Pourtant, il semblait bien que cette fois-ci, c’était différent. Bien que mes fonctions ne me lient en rien à l’enfant, je l’avais souvent vu à Saint Cloud et ici, et il s’intéressait toujours, curieux malgré son jeune âge, au port des armes. Un futur général à n’en pas douter.

La tension palpable dans le palais m’empêcha de dormir, à l’instar de beaucoup. Je n’étais pas de garde et pourtant, au bout d’une heure et demi à tourner et retourner dans mon lit, dans cette petite chambre qui m’était allouée ici – et que je préférai à celle de Saint Cloud pour ne pas avoir à y côtoyer les mignons de Monseigneur dès que j’en ouvrais la porte – je finis par me lever, et m’habiller pour descendre à l’étage des appartements de la famille du Duc. Plusieurs personnes étaient massées autour de la porte de l’appartement du petit duc, la mine sombre, les traits tirés, surtout des serviteurs et quelques courtisans. Je m’approchais à mon tour, un peu inquiet. L’enfant ne méritait pas ça… Mais la mortalité infantile frappait toutes les familles, des plus puissants aux plus pauvres. D’un ordre, je dissipais le petit agglomérat de curieux qui n’avaient rien à faire là à cette heure, mais y restais… Cela ne servait à rien de rester ici à attendre dans la nuit, glaciale dans ces couloirs mal isolés, mais ici on en saurait toujours plus et plus vite que dans sa chambre, non ? Un des gardes, me reconnaissant, m’approcha une chaise, que je refusais tout d’abord, avant de m’y installer. Je m’assoupis par intermittence, ne dormant que quelques minutes à chaque fois, quand la porte de l’appartement s’ouvrit, et me fit sursauter, je me dressais d’un bond, et un des médecins me fit entrer dans l’antichambre de l’appartement.

La duchesse était très pâle. Quand on avait l’habitude de l’entendre se disputer avec son époux et n’en faire qu’à sa tête, la voir si désespérée me fit mal. Je m’inclinais comme le voulait l’usage, mais elle ne semblait pas en avoir grand-chose à faire. Par la porte qui menait à la petite chambre qui avait été prestement refermée, j’avais aperçu l’enfant qui était aussi pâle que ses draps.

-Capitaine de Froulay… sa voix était éraillée, et il n’y avait pas besoin de plus d’éclairage que les bougies pour savoir qu’elle avait beaucoup pleuré.

-Madame ?

-Veui… Veuillez aller prévenir mon mari. Son fils a besoin de lui.

Elle essayait de garder sa dignité royale mais la détresse de la mère était parfaitement visible. Sachant qu’elle n’allait pas en dire plus, j’allais me retirer quand elle ajouta :

-Faites au plus vite !

Après un dernier salut protocolaire, je sortis de l’appartement et me mis à courir à travers les couloirs du palais. Une fois dans la cour, je n’attendis même pas que Soraya soit sellée, prenant l’un de ces chevaux prêts en permanence en cas d’urgence. Et pour une urgence, s’en était bien une. Je crois que je n’avais jamais fait le trajet aussi vite entre Paris et Saint-Cloud. L’arrivée à l’aube au château du prince me paraissait bien morne, mais je ne pris pas le temps de m’attarder. Ici, personne ne savait rien, et tout était encore endormi. Je sautais à bas de mon cheval et gravis les marches quatre à quatre vers les appartements du Prince dans lesquels je pénétrai sans prendre le temps de me faire annoncer, à la recherche du Duc, soudain coupé dans ma progression par un Gauthier-Charles peu avenant et toujours aussi insupportable, avec qui je n’avais pourtant pas le temps de me chamailler aujourd’hui.

-Eh bien Froulay… Vous voilà bien pressé, me lança-t-il, avec un regard peu sympathique.

Mais je n’avais pas le temps de me disputer avec lui à ce moment précis.

-Où est le duc ? J’ai un message important de la part de la duchesse…

-Voyez-vous ça, vraiment ? L’ironie était plus que palpable.

-Le duc de Chartres se meurt, le duc… la duchesse aimerait qu’il revienne à Paris avec moi, lâchai-je soudain, me disant que c’était la seule façon pour qu’il me laisse faire ce pour quoi j’étais là.

Et son visage chafouin pâlit soudain, se faisant plus sérieux.

-Attendez ici...

Je m’exécutais. Il revint presque immédiatement, la mine défaite :

-Il faut donner des ordres pour le carrosse du duc.

-Je m’en charge, répondis-je, trop heureux d’avoir quelque chose à faire à ce moment où l’heure était grave.

Dévalant les escaliers aussi vite que je les avais montés, je retournais dans la cour où je donnais les ordres adéquats. Il ne fallut pas longtemps pour que le duc paraisse, habillé bien simplement, contrairement à ses habitudes. On en disait beaucoup sur lui, mais il était avant tout un père attentionné. J’avais repris la bride de ma monture, prêt à me mettre en selle pour escorter le carrosse, ma livrée totalement chiffonnée par la nuit passée, quand le prince m’interpella :

-Montez avec moi, Froulay.

Hésitant un instant au vu de ma mise poussiéreuse et fatiguée, je m’exécutais tout de même, et à peine fus-je installé que le carrosse se mit en route, n’osant rien faire ni rien dire au vu de l’état du prince. Ce fut lui qui brisa le silence :

-Depuis quand est-il malade ? Qu'ont dit les médecins ? Dites-moi que ce n'est pas grave.

Je me mordis la lèvre avant de répondre :

-Son état n’est pas brillant, monseigneur. On avait fait venir l’aumônier de Madame au moment où je partais à l’aube.

Je baissais les yeux avant d’ajouter :

-Je suis désolé, Monseigneur.


Le reste du voyage se fit en prières, et en silence. Je ne dis rien, ne voulant pas troubler les supplications du Duc au Seigneur. L’arrivée fut rapide et le duc sauta presque du carrosse, je le suivis, prenant directement la direction des appartements du petit duc de Chartres. Au moment de passer la porte, il s’arrêta si vite que je manquais de lui rentrer dedans.

-Allez-y pour moi. Et faites que Dieu vous donne une bonne nouvelle.

J’acquiesçai, avant de passer la porte, mais pour avoir passé la nuit ici, je savais qu’il était sans doute trop tard. Retirant mon feutre, je passais la porte, le plus discrètement possible, mais en traversant l’antichambre, je commençais à entendre des pleurs, des sanglots. L’ambiance bien lourde me préparait à ce que j’allais découvrir. L’enfant était là, allongé sur son lit, on aurait presque pu croire qu’il dormait, s’il n’avait pas été aussi pâle que ses draps. Je me signais, une larme coulant le long de ma joue, que j’essuyais. Avisant la duchesse, en prière, je marchais jusqu’à elle et m’accroupie à son côté.

-Madame, votre époux est là.


Elle hocha la tête, mais je ne su pas si elle avait compris ce que je lui disais. Le plus respectueusement possible, je me relevais et reculais jusqu’à la porte, retrouvant le duc. Les yeux baissés, je ne savais comment le lui dire.

-Monseigneur je… Je suis désolé. Il est trop tard…
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Philippe d'Orléans


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MessageSujet: Re: Le prince, la mort et le messager [François]   Le prince, la mort et le messager [François] Icon_minitime04.07.12 13:56

Son état n’est pas brillant, monseigneur. On avait fait venir l’aumônier de Madame au moment où je partais à l’aube. Je suis désolé, Monseigneur.
Vous n'avez pas à l'être …
murmura le prince.

Philippe avait le regard vide, le paysage défilait devant lui sans qu'il ne le voit vraiment. Pourtant, il connaissait par cœur ce paysage à mi-chemin entre Paris et la campagne, entre Saint-Cloud et le Palais Royal. En général, il adorait observer ce qui bordait le chemin entre sa délicieuse maison et son habitat de la capitale. Si les bâtiments et arbres ne bougeaient pas, les couleurs changeaient au gré du temps, les personnes n'étaient jamais les mêmes. Certains le saluaient, reconnaissant les armoires des Orléans avec les trois fleurs de lys. Mais là, comme si tout le monde comprenait que l'heure était grave, il n'y avait personne. Même Monsieur ne semblait plus habiter son propre corps, prit dans ses prières à espérer que son fils s'en sorte. Ce petit duc était son héritier, son petit ange et il était hors de question qu'on le lui retire, bien qu'il n'ait aucun pouvoir sur les décisions de Dieu.

En cette époque, il n'était pas rare de voir des enfants mourir en bas âge et à cette mortelle loterie, personne n'était à l'abri, ni les gueux ni les princes, ils étaient tous logés à la même enseigne face à la mortalité infantile, la maladie de ces petits bouts de chou si fragile. L'argent, le pouvoir ne servaient à rien dans ces cas là, on ne pouvait acheter ni Dieu ni la Faucheuse, il fallait juste espérer que cela ne soit qu'un mauvais moment et que l'enfant s'en sorte comme ce qu'il faisait depuis début de mai. Oui, il s'en sortirait, Philippe tentait de se convaincre intérieurement et le chemin semblait interminable, laissant le temps de souffrir un peu plus, de retenir un peu plus ses larmes et d'espérer un peu. Diable, le chemin jusqu'au Palais Royal n'était pas si long d'habitude. Le troisième homme du royaume ne cessait de gigoter, incapable de rester plus de trente secondes sur son siège sans remuer un pied, main, la tête, toucher nerveusement ses vêtements ou ses cheveux, triturer son chapelet comme si sa vie en dépendait, ce qui n'était pas totalement faux.

La Palais Royal, si beau et accueillant en temps normal – loin de ce sinistre Louvre – ressemblait à un tombeau à ciel ouvert, il semblait plus gris, plus morne qu'à son habitude, comme si l'aura de la mort y habitait déjà. Le prince retint un hoquet en ayant cette vision mais secoua la tête pour se ressaisir, l'espoir serait toujours là tant que le petit duc n'avait pas fermé les yeux. Mais le courage manquait à Philippe d'affronter la vision de son petit garçon, il préféra envoyer Froulay en éclaireur. Dans ce couloir vide, les pas princiers résonnaient de façon assourdissante, il faisait les cent pas nerveusement et lorsqu'il levait ses yeux, personne à l'horizon, comme si tout le monde respectait ce moment familial, cette peur et cette nervosité croissante à chaque pas posé sur le sol. Pas un serviteur, garde ou mignon, tout le monde se trouvait dans d'autres pièces, il ne fallait pas intervenir dans ce moment familial, cette intimité royale et ce chagrin qui allait exploser. D'autres pas se mêlèrent aux siens, Froulay revint vers lui, l'air grave et les yeux rivés sur le sol. Avec toute son attitude, Philippe savait …

Monseigneur je… Je suis désolé. Il est trop tard…

Un hoquet violent s'empara du prince, pourtant presque préparé par toute l'attitude du mousquetaire. Puis ce fut comme un coup de massue sur la tête, en parallèle avec une armada de flèches plantées dans son cœur. La douleur était indescriptible tant elle faisait mal, tellement que la mort serait une libération. Philippe porta une main à son cœur, serra le tissu par-dessus, l'air totalement interdit, presque assommé par la nouvelle. Ses yeux se perdirent dans le vide de la galerie et tout devint flou, ses yeux s'embuèrent puis les larmes salées s'écoulèrent sur ses joues. Une, puis deux et ce fut une cascade de larmes qui s’échappèrent de ses yeux, certains vinrent mourir au niveau de sa bouche, d'autres se rendaient jusqu'à la mâchoire pour se laisser tomber et s'écraser sur le sol glacial. Avec ces pleurs s'accompagnèrent un cri de désespoir, déchirant les cœurs alentours. Le cri d'un homme désespéré, d'un père inconsolable face à la perte de son enfant.

Les jambes flanchèrent tout à coup et le prince se retrouva à genoux sur le sol de marbre, une main au sol s'imprégnant de la morbide fraîcheur, l'autre toujours sur son cœur où le tissu était déformée tellement il le serrait. Le hoquet se fit sans fin, entrecoupés de deux mots :

Non … Pourquoi ? …

C'était tout ce qu'il était capable d'articuler dans sa tristesse infinie de cette affreuse nouvelle en cette matinée de décembre. Perdre un enfant était la plus grande des horreurs, un père ne devrait pas voir ses enfants mourir, ce n'était pas dans l'ordre des choses, puis le petit Duc avait tellement à vivre, l'unique fils Orléans aurai pu avoir une grande destinée, tout était brisé, jusque les cœurs de ses parents. Cette scène dura de longues minutes, incapable de bouger, d’exécuter un simple mouvement, seulement des spasmes parcouraient son corps tremblant. Après de longues minutes, les yeux toujours rivés dans le vide et le sol, la main qui touchait le sol se tendit, toute tremblante et de façon molle, en direction de Froulay pour que ce dernier l'aide à se relever, il s'en sentait incapable tout seul. Ses jambes ne pouvaient pas le soutenir tout seul, il lui fallait de l'aide pour enfin se remettre debout et tenter de faire un pas en direction de la chambre.

Mon fils …

François de Froulay devait aider le prince à se rendre dans cette chambre, voir ce petit garçon qui n'était plus de ce monde. Après une hésitation devant la porte, finalement ils la passèrent. Hoquetant toujours, les larmes roulant toujours sur ses joues dans un chemin immuable, ce désespoir allait de concert avec l'autre personne de la pièce, Henriette, priant auprès du petit garçon, tristement pâle, l'air endormi. S'appuyant sur une colonne du lit, Philippe fixait ce petit corps sans vie, fruit de son existence qu'il ne verrait plus jouer ni sourire. En guise de soutien, il tourna la tête vers son capitaine des gardes, fit un léger signe de tête en guise de remerciement puis se rendit tant bien que mal vers son épouse, posa sa main sur l'épaule de celle qui priait à genoux.

Un triste jour pour les Orléans …
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François de Froulay


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MessageSujet: Re: Le prince, la mort et le messager [François]   Le prince, la mort et le messager [François] Icon_minitime03.08.12 9:22

La souffrance atteint tout le monde, même le prince. L’inquiétude du Duc était parfaitement visible. Venant d’un homme qui était habitué à cacher ses émotions les plus vives depuis l’enfance – tout pour la galerie, n’est ce pas ? – c’était pour le moins étonnant, cela montrait à quel point la peur de perdre son fils le rendait vulnérable, la peur était viscérale. Etre témoin de cela me mettait mal à l’aise. Cela ne faisait pourtant pas partie de mes fonctions de base. Et pourtant beaucoup de choses avaient changées dans ma vie ces derniers mois, mais cela ne me rassurait pas pour autant. La nuit passée m’avait épuisé, et pourtant j’aurais été totalement incapable de dormir. Je ne cessais de penser au petit Duc de Chartres, enfant fragile, mais curieux, qui n’attendait qu’une chose, parader lui aussi en uniforme devant tout le monde. Il aurait sans problème le commandement d’un régiment dans les chevau-légers. Il suffisait de le voir s’intéresser à tous les uniformes pour savoir qu’il avait l’armée dans le sang. Et le voir alité, presque aussi blanc que ses draps, en sueur, délirant un peu, m’avait brisé le cœur. Les suppliques de Madame n’avaient pas été nécessaires pour que je prenne un cheval et cours ventre à terre jusqu’à Saint Cloud où Monseigneur était ce soir là. L’enfant avait besoin de son père, ne serait-ce que pour ses derniers instants. Les pronostiques des médecins n’étaient pas bons, la Duchesse avait elle-même perdue tout espoir, alors qu’elle était la première à croire en la santé de son fils.

Je ne savais pas comment la nuit se terminerait, mais l’aube me paraissait peu propice à une fin heureuse. Même si je ne savais pas au départ ce qui m’avait valut l’insigne honneur – ô ironie… - d’être celui qui s’était retrouvé au poste de nouveau capitaine des gardes de Monsieur, bien loin de ce que j’avais l’habitude de faire et d’être au sein des mousquetaires, j’avais appris à aimer ma charge, et les nouveautés qu’elle imposait dans ma vie. Plus de responsabilités, mais aussi plus de simplicité. J’étais soldat et pas courtisan. Je n’avais jamais sus me comporter correctement en société, ou du moins, si je ne faisais honte à personne, ne m’y sentais-je pas à l’aise. Mais l’on apprenait à vivre dans l’un des lieux les plus à la mode de la cour actuelle, chez Monseigneur le Duc d’Orléans, frère du roi qui lui savait très bien recevoir et dont les soirées n’avaient rien à envier à celles de son frère le roi. Aussi, voir le palais royal plongé dans une telle détresse avait quelque chose de perturbant, d’inhabituel et d’incroyable. Pourtant tout semblait soudain plus grave et la légèreté avait disparue des traits de tous. La peur prédominait. On sentait bien que si le petit duc n’y survivait pas, cela changerait beaucoup de choses dans la vie de la maison du deuxième couple de France. S’il y avait bien un sujet qui mettait à peu près d’accord le duc et la duchesse, c’était leurs enfants. Le seul moyen de mettre un peu de paix dans leurs disputes incessantes.

Et c’était tout aussi certainement le seul sujet qui ferait accourir Monsieur ventre à terre depuis son château de Saint Cloud au Palais Royal. Enfin, si on me laissait passer. A croire que Gauthier-Charles avait véritablement décidé de me rendre la vie impossible, même lors des sujets d’importance. Il n’était pas du genre à laisser filer ses prérogatives et les bontés du Duc à mon égard – dont je me serai bien passé – semblaient le faire mourir de jalousie. Qu’il ne s’en fasse pas, ce n’était pas le genre de postes que je recherchai. Heureusement, il sembla perdre de sa superbe quand je lui annonçai le but de ma visite, se décidant enfin à se rendre utile, courant chercher le duc, alors que je redescendais pour apprêter le carrosse. Le duc ne s’était surement jamais préparé aussi vite, il dévalait les marches du perron juste au moment où la voiture arrivait, et je m’apprêtais à remonter à cheval pour le suivre quand il m’intima de monter à son côté. Sans réfléchir plus avant, ni rechigner sur les convenances, vue la gravité de l’heure, je m’exécutai sans rien dire, quoi que ma tenue pleine de poussière de ce froid hiver ne seyait guerre à la splendeur de l’équipage. A peine la voiture partie, le duc s’enquerrait de l’état de son fils, ce à quoi je fus en peine de répondre, n’étant pas de la faculté, mais me basant uniquement sur ce que j’avais vu et entendu. Quand je présentais mes regrets au duc, celui-ci répondit d’une voix éteinte et lointaine :

-Vous n'avez pas à l'être …

Et pourtant, je l’étais. La mortalité infantile n’épargnait aucune couche de la population. Certes, les riches avaient plus de chances de s’en sortir, mais il n’y avait qu’à voir le couple royal pour savoir que malgré plusieurs grossesses, seul le dauphin avait pour le moment survécut. La route jusqu’à Paris me parut interminable malgré le fait que le carrosse du duc avait ses entrées partout et sans la moindre question ni hésitation. Sur un ordre du duc, j’entrai dans les appartements du petit duc pour m’inquiéter de son état, et le choc fut brutal, glacial… L’enfant avait cessé de souffrir, Dieu l’avait rappelé à lui… Après avoir manifesté ma présence au près de Madame, toute à son chagrin, je sortis prévenir le duc de son infortune. Ma charge ne préparait certes pas à l’annonce de si tristes nouvelles… La réaction du duc fut à la mesure de sa souffrance. Il blêmit d’un coup, ses jambes flanchèrent, et avant que j’ai eus le temps de le retenir, il était à terre, prostré, en larme. Je contenais moi-même ma peine derrière un masque de circonstance. Un cri déchirant fendit l’air du Palais.

-Non … Pourquoi ? … Mon fils …

Je respectais la douleur de cet homme, égal aux autres, qui venait de perdre son enfant. Dieu ne fait pas de choix et fait subir la même peine à tous. Puis, finalement, je m’accroupis à côté du duc, et lui présentai mon bras pour l’aider à se relever. Il était temps pour lui d’entrer dans cette chambre morbide. Le soutenant du mieux que je pus, je lui fis passer la porte de l’appartement, et l’antichambre, avant de le laisser s’avancer seul vers le lit, mon feutre à la main, et après un dernier signe de Monsieur, je me retirais, les laissant lui et la duchesse à leurs peines respectives où personne d’autre n’avait sa place, sans oser regarder le visage sans vie de l’enfant. La Mort est cruelle.

[FIN DU RP]
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MessageSujet: Re: Le prince, la mort et le messager [François]   Le prince, la mort et le messager [François] Icon_minitime

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