Alaina of Cork - Par le Talent et Par le Courage [complet]

Alaina of Cork


alias
Aline d’Argouges

(Emma Watson)

« Adorable sorcière, aimes-tu les damnés ? » Beaudelaire

► 23 ans
► Comtesse-héritière de Cork (espion du Roi)
► Irlandaise
► Célibataire
► Hétérosexuelle

♕ PROTOCOLE ♕

► VERSAILLES : PARADIS OU ENFER ?

Petite comtesse de campagne irlandaise ou espionne à l’ombre du Roi Soleil, le choix est vite fait. Versailles sera plus qu’un paradis, ce sera sa renaissance. Sous les dorures des salons, elle se sent vivante. Forte d’un passé lourd qui n’a pas su la mettre à terre, elle se jette avec passion dans les intrigues, vouant une allégeance sans faille à ce Roi de France qui a promit de la protéger. Dans ce Palais de tout les dangers la vie est excitante : les fêtes, les complots, les amis, les hommes, … tout y est tellement plus brillant que n’importe où ailleurs. A Versailles, Alaina à retrouver une famille, une place. Elle y a surtout trouvé un homme …

► COMPLOT : VÉRITÉ OU FANTASME PUR ?

La vanité des hommes, Alaina en sait quelque chose. N’est-elle pas née dans le pays qui s’est vue ravagé par un maître comploteur ? Le complot, elle fait plus qu’y croire, elle en a l’intime conviction. Elle sait aussi qu’elle a un rôle important, celui de protéger celui qui la protège. Une question d’honneur aussi, envers celui qui l’a recueillis. Et pour faire cela, elle est prête à tout, même se mettre à nue devant l’homme qu’elle aime.

► COLOMBE OU VIPÈRE ?

Les ragots, Alaina à l’âme trop haute pour en répandre. Mais les écouter …cela fait un peu parti de son rôle non ? En toute franchise, cela l’amuse beaucoup. Sauf quand ces ragots parle de amant. Et quand en plus cela inclus d’autres femmes, Alaina ne rit plus du tout.



► DES LOISIRS, DES ENVIES A CONFIER ?

Ce qu’elle aime faire par-dessus tout, c’est retrouver les bras de Ruzé. Mais en dehors de ça, elle adore amuser la galerie par des plaisanteries puis se faire toute petite et écouter ce que le vent de Paris raconte. Conscience professionnelle !

♕ HOP, RÉVÉRENCE ! ♕

► Val
► 25 ans
► Autant que je peux
► Code bon by Lisa
► les hasards de Google
► le BBC pour les nulles les boulets ! (non je déconne!)

Une enfance

sur la lande

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Alaina nait dans le paisible comté de Cork, dans le sud de l’Irlande. Elle passe son enfance à courir les landes qui borde la mer. Enfant unique et adoré du Comte et de la Comtesse de Cork, elle fût choyée sans pour autant devenir capricieuse.
Son univers s’assombrit lorsque Cromwell entend mater cette Irlande catholique et rebelle. A l’abri dans le château parental de Cork, elle n’entend que les coups de canon et les récits des vaisseaux de son père, sans que cela ennui véritablement l’enfant qu’elle était.
Jusqu’à cette sombre journée de janvier 1650.

Comté de Cork, matin de Janvier 1650

-Aidan ! Aidan, attend. Aidan ! cria la petite fille.
Occupée à détacher sa robe accrochée dans un buisson de genets, elle avait pris du retard sur son camarde de jeu, qui lui, filait sur la lande qu’il connaissait comme sa poche. Sans faire trop de dégâts sur le tissu, elle se libéra et se remit aussitôt à courir pour rejoindre le fils du capitaine de la garde de son père. Celui-ci s’était arrêté au sommet de la colline qu’ils affectionnaient tant parce qu’elle offrait une vue imprenable sur le bleu profond de la mer et le vert irréaliste de la plaine.
-Aidan … l’interpella-t-elle.
Le regard fixé sur l’horizon, il ne répondit pas. Âgé de huit ans, le jeune garçon se sentait déjà le devoir de protéger celle qui serait amenée à devenir un jour la comtesse de Cork, c’est pourquoi malgré les moqueries de ses autres compagnons de jeux, il trouvait toujours du temps pour parcourir la campagne avec la petite fille. Cette dernière n’avait d’ailleurs guère d’autres camarades, pas plus que de sœurs, ni de frères avec qui jouer.
Le voyant insensible à ses appels, elle termina sa course en se jetant sur son ami. Mais étonnamment, celui-ci n’entama aucune des pitreries dont il était coutumier. Elle tourna alors la tête dans la direction qu’il regardait. La plaine, ordinairement déserte, était agitée par des mouvements de troupe. Au loin, des colonnes de fumées s’élevaient dans les airs.
Si la jeune Alaina ne comprit pas ce qu’il se passait, elle saisit néanmoins la gravité de la situation. Elle avait entendu son père parler des attaques anglaises et du terrible siège de Drogheda. Elle savait que son pays était en guerre, même si elle ne comprenait pas exactement ce que cela signifiait.
Apeurée, elle prit la main d’Aidan, qui sembla alors réaliser sa présence. Sans perdre une seconde, il fît demi-tour et se mit à courir entraînant la petite fille qui avait du mal à suivre.

Quand ils débarquèrent dans la cour du château, ils tombèrent au milieu d’une agitation fiévreuse. Les hommes courraient dans tout les sens, armes de fortune à la main, prêt à en découdre. Les femmes fermaient les volets des maisons et appelaient leurs enfants. Au milieu de cette pagaille, leurs deux pères, en tenu de combat, discutaient. Manquant de se faire renverser trois fois, ils les rejoignirent.
-Père !
-Aidan, rentre à la maison et veille sur ta mère et tes sœurs, intima le capitaine à son fils.
Pendant ce temps, le Comte saisie sa fille unique dans ses bras et la serra tellement fort, qu’elle prit réellement la mesure de la gravité de la situation. Alors qu’elle se mettait à pleurer, il la confia dans les bras de Mary, sa gouvernante. Son regard croisa celui de sa femme, qui devait se tenir à la porte pour ne pas tomber tant elle craignait pour la vie de celui qu’elle avait appris à aimer.
-Richard …, murmura-t-elle la voix serrée par l’émotion.
-Mettez-vous à l’abri, Louise.
Ce fut tout ce qu’il trouva à dire. Après quoi, il tourna les talons et sauta sur son cheval rejoindre le reste des troupes. Le Comte de Cork n’est pas de ces hommes qui laissent ses soldats se battre sans être à leur côté.
C’est ce qui allait lui couter la vie.

Dans l’ambiance étouffée du petit salon de la Comtesse, l’air était irrespirable sans que l’on sache si cela était dû aux bougies mourantes ou à l’angoisse des trois femmes. Les bruits des combats leur parvenaient : chocs des épées, cris des blessés, râles des mourants. Alaina s’installa sur le rebord de la fenêtre, pour tenter de voir son père, mais bien vite sa mère la ramena au centre de la pièce, en lui fourrant un chapelet dans les mains et en lui intimant l’ordre de prier.
-Mère, pourquoi sommes-nous attaqué ? demanda-t-elle innocemment après deux ou trois pater noster.
La Comtesse et la gouvernante se regardèrent. Comment expliquer à une petite fille de six ans qu’un dénommé Cromwell a chassé du pouvoir le Roi Charles Ier, l’a fait décapiter et entend à présent mater les velléités d’indépendance de ce peuple qui n’acceptent pas l’occupation anglaise.
-Prie ma fille, préféra répondre Louise de Cork. Prie pour ton père et prie pour tous les hommes qui se battent.
Cette réponse ne satisfait guère la petite fille qui se garde bien de prier pour ceux qui combattaient son père. Mais obéissante, elle ne dit rien.
Quand en fin de journée les bruits de bataille se calmèrent, leurs nerfs étaient tendus à l’extrême.
La porte s’ouvrit sur le capitaine Lenihan, qui semblait avoir vieillis de dix ans en une journée. Le fait que ce ne soit pas le Comte qui se présente était un mauvais présage, la Comtesse le savait.
-Madame, salua-t-il à genoux. Le siège a été rapide et nous n’avons rien pu faire, la ville a été dévastée, mais le château est sauf.
-Et le Comte ? Réussit-elle à articuler
Le silence lui répondit et la renseigna de la pire façon.
-Il est … mort, Madame, en héros.
Elle porta vivement la main à sa bouche comme pour empêcher une plainte douloureuse de sortir.
-Où est-il ?
-Les hommes l’ont conduit à la garnison, mais …
Il n’eut pas le loisir de terminer sa phrase, la Comtesse était déjà partie pleurer celui qui était devenu, malgré un mariage de convenance, un époux tendrement aimé. La gouvernante sortie à sa suite, craignant que la douleur ne l’amène à quelque extrémité. Ainsi le soldat se retrouva seul avec Alaina.
-Je vous présente toutes mes condoléances pour la perte de votre père, Mademoiselle, déclara le capitaine.
La petite fille le regarda d’un œil circonspect. Son père n’était pas mort, c’était impossible. Il était l’homme le plus fort et le plus vaillant de tout le comté, Alaina ne pouvait croire à pareil nouvelle. Elle préféra questionner le soldat.
-Qui sont ces gens ?
Interloqué, il mit quelques temps à comprendre de qui elle parlait.
-Ce sont des Anglais, Mademoiselle.
-Et pourquoi nous attaquent-ils ?
-Et bien, c’est compliqué, mais ils désirent s’approprier l’Irlande.
-Ah bon ? Et pourquoi ?
Malgré les circonstances, le capitaine sourit sous le flot de question.
-Cela, Mademoiselle, il faudrait le leur demander.
-Et pourquoi nous ne la leur laissons pas ?
Le sourire disparu tout à fait.
-Parce que cette terre coule dans nos veines Mademoiselle et que chaque irlandais est fier de son pays et de son peuple. Nous sommes ici chez nous et personne ne nous imposera une religion ou un souverain. Tous les hommes qui se sont battus défendent cette idée là, c’est à cause de cela que votre père est mort. Ne l’oubliez jamais, Mademoiselle, n’oubliez jamais que vous êtes irlandaise et votre père ne sera pas mort pour rien.
Il regretta bien vite ses paroles un peu dures et le ton un peu sec qu’il avait employé lorsque le visage de la petite fille se froissa et qu’elle se mit à pleurer. Pourtant, il ne savait pas qu’il venait de marquer le caractère de la jeune fille qu’elle allait devenir, de manière irrémédiable.

Les jours, les semaines puis les mois passèrent, s’étirant comme le brouillard s’accroche parfois sur la bruyère. Satisfait de cette écrasante victoire, les troupes anglaises avaient reporté leur attaque sur d’autres villes et d’autres comtés, s’installant cependant dans une oppressante occupation, alternant période de calme et pillage.
L’atmosphère au Château ne fut plus jamais la même. Terrassée par la douleur, la comtesse ne cessait de pleurer un époux qu’elle avait éperdument aimé. L’ambiance au château était devenue irrespirable, tant le souvenir du Comte semblait hanter chaque recoin de chaque pièce. La jeune comtesse héritière s’échappait autant qu’elle le pouvait malgré la menace anglaise et les recommandations maternelles.
Cette période, Alaina la vécut comme une attente. Bien que toute jeune fille, elle avait cette gravité propre aux enfants qui ont connu trop tôt les tourments de leurs aînés.

Landes aux environ de Cork, Matin de l'été 1656

Droite comme une statue, Alaina fixait le campement sans détourner le regard. Les hommes vivaient leur quotidien sans se douter qu’une étrange cavalière les observait. A les voir si inoffensif, il était difficile d’imaginer que la semaine précédente, ils avaient menés une expédition sur un village proche, tuant les hommes, violant les femmes et pillant les réserves. Olivier Cromwell étant à son apogée, ses soldats anglais se sentaient invulnérables.
En ayant assez vu, elle fit tourner la bride de sa jument et la lança au galop. Il s’agissait en réalité de la jument de son père, que la jeune fille s’obstinait à monter à la garçonne malgré les protestations de Mary. Mais il n’y avait que lorsque ses cheveux flottaient au vent, alors qu’elle avalait la lande, qu’Alaina se sentait réellement vivante.
Arrivée à l’écurie, elle entreprit de desseller et de bouchonner son cheval elle-même, le palefrenier étant mort dans une bataille, ainsi que son successeur et le successeur de son successeur. Les temps étaient rudes, tous accusaient le manque de nourriture, les pillages rendant tout approvisionnement difficile et périlleux.
-Alaina, appela sa mère depuis le seuil de l’écurie.
-Je suis là, mère.
La comtesse apparus devant le box de la jument et le cœur d’Alaina se serra. Louise de Cork n’était plus que l’ombre d’elle-même. Pâle, amaigrie autant par le manque que par le chagrin, ses cheveux pendaient dans son dos et ses yeux étaient éteints. Elle serrait autour d’elle une vieille cape élimée qui avait appartenu à son époux.
-Tu es encore sortie ?
C’était plus une constatation qu’une question ou un reproche. Elle n’avait plus la force pour cela.
-Oui, mère, il faut bien faire sortir Fraoch, sinon elle s’agite, justifia Alaina en fermant la porte.
-Tu me promets d’être prudente ?
-Oui, Mère. Rentrons à présent, proposa-t-elle en passant son bras sous celui de la Comtesse.

Pour tromper l’ennui, elle grattait une guitare, tandis que sa mère rêvassait et que Mary reprisait une robe. Le temps s’étirait, élastique, comme pendant toutes ces soirées, qu’elles soient glaciales ou étouffantes. La rumeur d’une nouvelle attaque se fit entendre, ce qui n’était malheureusement pas exceptionnel et les femmes ne s’en émurent pas immédiatement. Mais les bruits se rapprochèrent rapidement, jusque dans la cour du château. Alaina se pencha par la fenêtre et vit des soldats anglais pénétrer dans l’enceinte.
-Ils sont dans la cour, annonça-t-elle d’une voix blanche en essayant de contenir son angoisse. Il faut se cacher, vite.
-Oh non, la petite Cáit est dans la cuisine, s’exclama Mary, les mains devant la bouche.
Les trois femmes se regardèrent. Toutes savaient pertinemment le sort qui lui serait réservé si les anglais la trouvaient.
-Je vais aller la chercher, décida la jeune femme.
-Non, c’est beaucoup trop dangereux, protesta la gouvernante en l’attrapant par le bras.
-Aller vous cacher, je vous rejoins tout de suite, répondit Alaina d’une voix qu’elle voulu apaisante.

Le cœur battant à tout rompre, elle parcourut les couloirs à toutes vitesses, inquiète de tomber sur un envahisseur. Mais les défenses semblaient tenir et les soldats contenaient le combat dans la cour. Arrivée aux cuisines, celles-ci étaient vides. Dépitée, elle s’apprêta à faire demi-tour quand elle entendit du bruit en provenance du couloir. Piégée, elle se réfugia dans la remise attenante. Un homme, apparemment seul, avait réussit à pénétrer dans le château. A la recherche de vivres, il se mit à fouiller la cuisine. Inévitablement, il viendrait dans la remise à un moment ou à un autre. Alaina tenta de reculer autant qu’elle pouvait au fond du réduit, mais sa robe accrocha un pot en terre qui vacilla. Elle ferma les yeux en retenant son souffle, comme si cela pouvait en étouffer le bruit.

Lorsque la porte s’ouvrit à la volée, l’anglais ne pu la louper. Surpris mais pas mécontent de son butin, il l’attrapa par les cheveux et la plaqua contre la table, une main de fer la maintenant, l’autre fouillant déjà sous ses jupes. Terrorisée, la jeune fille se débattait encore, n’arrivant pas à croire qu’une telle chose puisse lui arriver. Alors que ses bras battaient l’air, ils rencontrèrent une providentielle lampe à huile dont elle se saisit. Dans un dernier sursaut, avant de subit l’irréparable et alors qu’elle sentait déjà le membre de son assaillant contre elle, elle l’abatis de toute ses forces sur le crâne du soldat. Sous l’effet de la douleur et de la surprise, il recula et elle en profita pour lui assener d’autres coups jusqu’à ce que l’homme fût à terre, inconscient. Entendant un bruit derrière elle, elle se retourna vivement, son arme de fortune toujours à la main. C’était fort heureusement, Aidan Lenihan. Lorsqu’il vît la jeune fille tremblante et défaite ainsi que le soldat déboutonné et gisant dans une flaque de sang, il comprit aussitôt.

Il la prit par la main et la cacha dans les dépendances du château. Alaina resta plusieurs heures, prenant conscience de son geste. Ce n’est que lorsque la nuit fut tombée qu’Aidan vient la chercher à nouveau, pour l’emmener au château. Elle tomba dans les bras de sa mère, alors que le Capitaine se tenait à ses côtés.
-Mademoiselle, il faut que vous sachiez que le soldat qui vous a attaquez était un lord anglais, annonça-t-il sans préambule.
Un froid s’insinua en elle, elle avait remarqué l’emploi du passé.
-Est-il … ?
L’irrémissible n’arrivait pas à franchir ses lèvres.
-Oui, confirma l’homme dans un souffle.
Choquée, elle se laissa tomber sur une chaise.
-Ce n’était que de la légitime défense, je peux en témoigner, s’écria Aidan pour la défendre.
-Les anglais ont d’ors et déjà demandés à ce que vous soyez traduit en justice, continua le Capitaine, implacable, pour meurtre.
-Que nous conseillez-vous ? demanda la Comtesse.
-Fuyez !

Quelques jours plus tard, port de Cork

Sur le quai face à la mer qui allait la porter jusqu’en France, Alaina se sentait l’âme d’une déracinée. Elle n’était plus la bienvenue chez elle et elle avait l’impression qu’elle ne serait jamais plus chez elle nulle part. Le voyage depuis Cork avait été long et périlleux. Accompagné d’Aidan, ils avaient dû partir de nuit et éviter les chemins trop emprunté. Mais jusqu’à ce qu’ils arrivent au port, elle n’avait pas l’impression que cette chevauché différait de celles qu’ils avaient l’habitude de faire. Pour l’heure, le jeune homme négociait sa traversée sur l’un des rafiots qui ralliait l’Irlande à la France. Les yeux perdus dans le vague, elle sentait contre sa peau le médaillon ayant appartenu à sa grand-mère que sa mère lui avait remise. Elle partait donc, vers cette France qui disait-on recueillait les exilés irlandais. Le frère de sa grand-mère s’y était installé, bien avant sa naissance et y menait parait-il une vie d’excentrique partagée entre son petit manoir de Bretagne et son hôtel parisien.
Aidan revint, apparemment, il avait réussit à lui trouver un place. L’embarcation partait dans quelques minutes.
-Merci, Aidan, souffla la jeune fille, en posant une main sur le bras de son ami.
-Il est injuste que vous soyez forcée de fuir votre propre pays, répondit-il troublé.
-Je pars pour accomplir quelque chose et je reviendrais ici, la tête haute, ajouta-t-elle.
Un silence flotta. Puis sans prévenir, Aidan se pencha et l’embrassa.
-Il aurait été trop dommage que votre premier baiser soit français. Emportez donc un morceau d’Irlande.
Bouleversée plus qu’elle ne saurait le dire, elle prit place dans le bateau, prête à faire de ce coup du sort, la chance de sa vie.

Comme un phoenix

Renaître

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Dans la nuit claire, Alaina ne fît guère attention aux autres personnes qui l’entouraient, ses pensées s’égarant dans ses souvenirs. Une première secousse la jeta contre le rebord du bateau et peu à peu elle aperçue que la panique commençait à se répandre sur le bateau au fur et à mesure que les vagues grossissaient. Certains se mirent à prier, d’autres, cramponnés à leurs bagages écarquillaient les yeux devant cette mer qui se déchainait.
Alors que les côtes françaises étaient enfin en vue et que tous se virent sauvé, une vague plus forte que les autres souleva la fragile embarcation et la retourna. Projeté en l’air, Alaina crut sa dernière heure arrivée. Elle retomba lourdement dans l’eau où le froid la glaça à lui faire éclater les tympans. Ne sachant pas nager, elle se débattait tant qu’elle pouvait, crachant, toussant l’eau salée qui la submergeait. Les vagues toujours plus nombreuses se succédaient usant les forces de la jeune fille. Accrochée à un morceau de l’épave elle dérivait, presque résigné sur le sort qui l’attendait
Mais il était écrit que la jeune fille avait un autre destin que celui de sombrer au fond de la Manche. Un navire de pêcheurs qui passait par là porta secours à la jeune naufragée. Trempée, gelée à bout de force elle s’évanouit sur le pont.

Lorsqu’elle reprit connaissance, elle se trouvait dans une chambre claire. Ses vêtements séchaient près d’un feu et un pansement enserrait son bras blessé. Une porte s’ouvrit sur un homme d’une quarantaine d’année.
-Vous voici enfin réveillée, jeune fille ! Il était temps, voilà deux jours que vous vous obstiniez à dormir. Comment vous appelez vous ?
Avec lenteur, la voix rendue rauque par l’eau salée, elle articula :
-Alaina.
-Alaina comment ?
Mais sans lui répondre, elle détourna le regard vers la fenêtre. Décontenancé, l’homme qui était le patron du bateau de pêche, insista.
-D’après votre accent vous devez être anglaise, non ?
Alaina lui lança un regard noir, mais ne répondit toujours pas.
-Puis-je au moins prévenir quelqu’un ?
-Le marquis d’Arcices.
Surpris, l’homme se méfia.
-Enfin je ne vais pas aller chez le marquis pour lui dire qu’une anglaise échoué cherche à le voir. Je ne suis même pas sur qu’il soit sur ses terres.
Pour toute réponse, elle détacha la médaille que lui avait donnée sa mère et la lui remit. Et l’homme s’exécuta.

-Je vous préviens, elle n’a pratiquement rien dit depuis plus d’un mois qu’elle est ici. Le chirurgien dit que sa voix a peut-être été altérée par l’eau de mer. Enfin, vous verrez par vous-même.
Impressionné par la présence du marquis chez lui, l’homme n’arrêtait pas de parler comme pour compenser le silence de sa rescapée. Il avait surtout peur que le marquis la lui laisse sur les bras. Qu’aurait-il fait d’une fille muette.
Le marquis de son côté avait été fort secoué quand un pêcheur breton était venu agiter sous son nez la médaille de baptême de sa défunte sœur. Quand il lui dit qu’une jeune fille échouée la lui avait remise, il avait décidé de venir voir par lui-même.
Le spectacle qu’il découvrit le laissa sans voix. Assise sur une chaise près de la cheminée, la jeune fille en question paraissait très maigre, le teint pâle presque maladif, ses cheveux n’était pas peignés et ses yeux fixaient le vide.
-Je l’emmène avec moi, déclara-t-il sèchement.

Il eut fort à faire. Traumatisée par la fuite de son pays natale, Alaina s’enfonça dans une léthargie morbide. Elle ne parlait pas, s’alimentait peu et passait d’interminables heures les yeux dans le vague, pensant à sa chère Irlande. Elle avait surtout développé la phobie de l’eau, entrant dans de véritable crise de panique chaque fois que l’on s’approchait d’une pièce d’eau.
Pour la sortir de cette langueur, il entreprit de lui faire découvrir Paris et ses salons. Pour cela, Alaina of Cork étant toujours recherchée, il dût faire naître Lady Aline d’Argouges, demoiselle irlandaise orpheline, fille d’un ami très cher, dont il était le parrain.
Le contact avec cette société brillante révéla une jeune fille gaie, souriante et espiègle, enjôleuse à ses heures mais dont la principale qualité était de se faire oublier pour entendre tout ce qu’on pouvait laisser échapper en sa présence. Et qui serait allé se méfier d’un visage aux traits délicats, encadré par une mousseuse cascade de cheveux couleur d’automne ? Qui saurait lire dans ces prunelles noisette l’intelligence et la perspicacité quand elle ne laissait paraître que candeur et innocence ? Enfin qui pourrait penser qu’en plus de chanter et danser aussi gracieusement qu’un cygne, cette jeune fille possédait des talents d’espion de sa majesté ?
Le Marquis, espion de la couronne, décela un vrai potentiel et fît de la jeune fille son élève. Celle-ci se révéla particulièrement douée. Mieux, elle y prit un malin plaisir.

C’est ainsi qu’elle se retrouva sous la protection des rayons du Soleil.

Abimée dans la plus profonde révérence qu’elle n’ait jamais faite, Alaina tremblait un peu. Elle savait qu’elle joua un peu sa vie.
« Arcises, résonna enfin la voix du Roi des rois, vous nous présentez enfin, cette filleule dont vous avez tant vantez les mérites. Relevez-vous, mon enfant, dit-il d’une voix plus douce.
-Votre Altesse sait qu’elle a en moi l’un de ses plus fidèles serviteurs. Malheureusement, ma santé se dégrade et je sais qu’un jour viendra où il sera temps pour moi de me retirer sur mes terres.
-Allons Arcises, vous avez la santé d’un jouvenceau !
-Votre Altesse est trop aimable. Néanmoins, elle trouvera chez cette jeune fille un sujet aussi fidèle, aussi doué sinon plus que ma personne.
-C’est parce qu’un air aussi angélique n’éveilles aucun soupçon. Comment vous appelez vous ?
-Lady Aline d’Argouges, votre Altesse. Du moins, c’est sous ce nom que je parais. Si son Altesse veut bien m’accorder la grâce de la servir, elle doit savoir qu’il ne s’agit pas de ma véritable identité. Je me nomme en réalité Comtesse Alaina de Cork.
Elle avait débité sa diatribe sans reprendre son souffle, de la manière la plus passionnée qu’elle pouvait. Car si le Louis XIV décidait de la livrer à ses bourreaux, s’en était fini d’elle.
Le Roi Soleil garda un visage impassible devant ces révélations.
-Pourquoi vous cachez vous ?
-J’ai été contrainte de fuir mon Comté natal après avoir tué accidentellement un lord anglais, qui tentait d’abuser de moi.
Il y eu quelques instants de silence, durant lesquels les deux irlandais retirent leurs souffles.
-Ce maudit anglais ne méritait pas mieux pour avoir tenté une telle atteinte à la beauté. Soyez assuré de ma protection, Lady d’Argouges et servez moi avec honneur.

De sa lande au château du Roi Soleil, la petite irlandaise avait fait du chemin. Et quand elle parut pour la première fois au milieu de cette cour qui était le centre de l’Europe, elle sut qu’en réalité c’était cela qu’elle attendait. Cette vie trépidante, passionnante, où l’on ne s’ennuyait jamais, où l’on vivait comme si chaque jour était le dernier. Très vite elle rencontra la Princesse Anna de Russie et si elle fût émerveillée de sa beauté, elle le fût encore plus quand cette dernière lui accorda une amitié sincère. Elle voyait en elle une protectrice, comme une… sœur.

Alaina effectua deux tours sur elle-même, faisant voler ses jupons et s’immobilisa dans une gracieuse arabesque alors que les dernières notes égrainées par le clavecin mourraient dans l’air. Aussitôt un tonnerre raisonna et elle ne pu s’empêcher d’afficher un éclatant sourire. La Princesse Anna se leva, les yeux légèrement embués et s’approcha de la jeune danseuse. Celle-ci lui offrit une révérence
-Joyeux anniversaire, Madame ! s’écria-t-elle.
-Merci, Lady Aline pour ce charmant pas de danse.
Alaina accepta le compliment avec un hochement de tête et s’éloigna pendant que d’autres invités saluaient la princesse. A peine avait-elle fait deux pas, qu’une main lui tendait une coupe de champagne. Elle l’accepta, reconnaissant Morgan of Richmond
-Vous étiez merveilleuse, Mademoiselle. So georgeous ! Où avez-vous appris à danser comme cela ?
Elle ne pu réprimer un sourire espiègle.
-Je pourrais vous le dire, Lord Richmond, mais ensuite je serais obligée de vous tuer, fit-elle d’une voix flutée, en buvant une gorgée.
-Quérida ! Vous êtes un ange tombé du ciel, coupa Paolo de Murcia, en prenant sa main pour y déposer un baiser tout à fait latin.
Alaina rosit légèrement et rit sous le compliment. Entourée de ces deux hommes, elle avait l’impression d’être la muse de la danse en personne.
-Allons, Messieurs, ce soir, Lady d’Argouges est là rien que pour moi, s’écria Anna de Russie en prenant son amie par le coude.
Les deux jeunes femmes s’éloignèrent en gloussant.
-Je crois qu’on vous fait la cour, chantonna la princesse russe.
Alaina pouffa :
-Oui, je crois bien aussi, mais je me méfie avec ces deux là. D’autant plus qu’ils sont mariés.
-Et bien, profitez donc de la soirée pour rencontrer d’autres jeunes hommes célibataires, tenez, voilà …
-Anna, coupa la jeune femme, vous savez bien que mon cœur n’est pas libre, coupa Alaina subitement plus grave.
-Oh oui, ce … Ruzé, qui vous tourmente ? Elle avait craché le nom sans dissimuler son mépris.
-Cela vous pose un problème apparemment ? Le ton était sec et sans appel. Peu importait qu’elle soit une princesse.
-Non, non, bien sûr que non. Mais ce jeune homme m’a l’air mal sain. Des rumeurs courent sur lui. On le dit voleur, volage et même cruel.
-Et tout le monde sait que les rumeurs sont parfaitement fondées, répliqua Alaina sarcastique.
Désespéré par le ton que prenait la conversation, la princesse Anna pris les mains de sa jeune amie.
-Pardon de vous avoir blessé, mais quand je vous vois vous perdre avec ce rustre alors que deux gentilshommes délicieux tel que Paolo de Murcia ou Morgan of Richmond vous entourent de tant de charmantes attentions, je me dis qu’un avenir plus heureux vous attends.
Alaina tourna la tête.
-[/b]Je crois que vous devriez aller ouvrir vos cadeaux Madame, ne faites pas attendre vos invités.[/b]
La Princesse contempla le visage de son amie quelques instants puis résignée se dirigea vers le tableau caché d’un drap que l’on venait d’apporter.
-Madame, tonna un homme à la barbe grise, je souhaitais vous faire pour votre anniversaire un présent, qui pourra je l’espère, apporter un peu de réconfort à votre cœur de Princesse exilée.
D’un geste théâtrale, il découvrit une peinture représentant sa famille. On y voyait son Père et sa Mère, ainsi qu’elle-même, plus jeune, au milieu de ses frères et sœurs.
Le choc fût immense et l’heureux donateur, mis cela sur le compte de son présent. Ce qu’il ne savait pas, c’est qu’une autre personne avait été surprise par la peinture. Alaina voyait au milieu de cette famille russe, son propre visage, du moins celui d’une jeune fille lui ressemblant à s’y méprendre.
La Princesse chercha des yeux son amie parmi la foule, mais elle ne vit qu’un mouvement de jupon qui quittait le salon en courant.

Devinez

Qui je suis ?

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Le soleil avait beau brillé en ce jour radieux du mois de mai, Alaina ne pouvait s’empêcher de frissonner dans sa jolie robe vert tendre, assortie aux jeunes pousses. L’après-midi avait pourtant tellement bien commencé. Un petit groupe de femmes s’était réunit dans les appartements de Mademoiselle de Chinon et elle avait été conviée, parmi d’autres « curiosités » à chanter quelques airs, comme cela lui arrivait de plus en plus souvent. Elle appréciait beaucoup ce statut de nouvelle petite coqueluche. D’une part, parce qu’il est toujours agréable d’être admiré, même si Alaina était suffisamment intelligente pour prendre les compliments avec recul, d’autre part, parce que cela lui permettait de rencontrer de nouvelles têtes et d’écouter en toute innocence, ce qu’il s’y racontait.
Pourtant, à l’instant, elle aurait tout donné pour être à des kilomètres d’ici. En effet, la Comtesse de Barre avait insisté pour que la compagnie sorte profiter du beau temps dans les jardins. C’est ainsi que la petite troupe s’était retrouvée à longer le grand canal. Devant, les femmes devisaient gaiement aussi la jeune femme restait en arrière, bien incapable de tenir une conversation. En effet, la présence de cette étendue d’eau provoquait en elle une peur sourde qui la glaçait. Le visage fermé, les yeux jetant de rapide coup d’œil en direction de la surface miroitante, elle priait pour que la balade se termine vite, ou bien qu’un orage éclate, qu’un tremblement de terre les fasse fuir …
Elle se rendit compte d’une présence à ses côtés. L’autre « attraction » de ces dames, Christian de Sudermanie, s’était détachée du groupe pour se joindre à elle. Le jeune homme avait déclenché des exclamations aux récits de ses théories, bien qu’Alaina soupçonne la plupart des convives de n’avoir rien compris.
Elle fît un effort pour tourner sa tête vers son voisin, afin de lui offrir un aimable sourire et ainsi ne pas passer pour une sauvage. Mais la tentative fût avortée. Ne regardant plus où elle posait les pieds, l’une de ses bottines dérapa sur une motte d’herbe et elle glissa. Pas de beaucoup, certes, mais en direction de l’eau. Son cœur battit si fort qu’elle crût qu’il allait jaillir de sa poitrine. Surprise, elle se saisit de la main de son compagnon pour retrouver à la fois équilibre et contenance. Rétablie, elle ferma les yeux de soulagement, tout en restant solidement accroché au jeune homme, le temps que son cœur retrouve un rythme normal.
Ce n’est donc que lorsqu’elle les rouvrit qu’elle se rendit compte de la situation : la voilà qui tenait par la main, un homme qu’elle venait de rencontrer. Quelles idées allait-il se faire ?
-Vous vous sentez bien ? demanda-t-il sincère.
Alaina jeta un coup d’œil au cours d’eau sournois et dégluti péniblement.
-Oui, … mon pied a dérapé, … et …
Elle soupira, fatiguée et incapable d’aller plus loin dans ses explications, qui engendreraient d’autres explications qu’elle ne pouvait pas donner.
-Prenez mon bras, proposa-t-il. Vous serez plus stable.
Avec une attention des plus délicates, ce fût le bras opposé à la rivière qu’il lui tendit. Pour un peu, Alaina aurait pu fondre en larmes de reconnaissance et accepta avec soulagement. Ils firent ainsi quelques pas, liant par l’occasion connaissance.
Mais déjà, Mademoiselle de Chinon, probablement agacée de ne pas être l’objet des attentions de son invité, stoppa la promenade et proposa une partie de colin-maillard.
-tenez, dit-elle à Alaina en lui tendant un foulard, avec un drôle de sourire.
La perspective d’avoir les yeux bandés à proximité du canal emplissait la jeune fille d’un mal aise qui était amplifié par la réputation un peu peste de son hôte et de ses amies.
Réticente, elle se prêta tout de même au jeu, étant chargée de garder un œil sur les fréquentations de la dite demoiselle, il aurait été inopportun de la froisser.
Comme le veut la règle, une fois les yeux bandés, on lui fît faire trois tours sur elle-même. Puis elle fût ballottée dans tout les sens. Privée de repère, elle sentit qu’on la faisait se déplacer sur une grande longueur, ce qui était assez inhabituel. Au moment où elle allait retirer son bandeau, elle entendit crier « Attention ». Puis le sol se déroba sous ses pieds, et elle chuta dans l’eau.
Paniquée, elle se débattit comme elle le pu, encombrée par sa robe, appelant au secours. Mais au dessus d’elle, seuls les rires lui répondaient. Finalement, ce furent les chaperons, ayant pitié d’elle, qui virent la tirer sur la terre ferme. Cependant, même à pied sec, la crise provoquée par le souvenir de sa noyade continua un moment. Elle ne parvint à se calmer que lorsqu’elle sentit sur son dos une veste. C’était Christian, qui lui apportait son soutien, non pas par pitié, mais par sincère intérêt. Le début d’une singulière amitié.

Derrière le paravent, Alaina contemplait la robe simple que lui avait prêté son amie Charlotte, elle n’était pas si différente de celles qu’elle avait pu porter en Irlande. Secouant la tête pour chasser toutes pensées nostalgiques, elle se montra. Faisant quelques pas, elle affecta une pose théâtrale volontairement exagérée et récita, une main sur le front :
Où suis-je? Qu'ai-je fait ? Que dois-je faire encore?
Quel transport me saisit ! Quel chagrin me dévore !
Errante et sans dessein, je cours dans ce palais :
Ah ! Ne puis-je savoir si j'aime ou si je hais?
Charlotte, amusée entra dans son jeu et lui répondit :
Qu'il périsse! aussi bien il ne vit plus pour nous.
Puis les deux jeunes filles rirent ensemble.
-Tu es parfaite, moi-même si je ne t’avais vu arrivé en Demoiselle d’Argouges, je pourrais me demander qui est cette nouvelle occupante de l’hôtel de Bourgogne !
Elle lui saisit la main et l’entraîna.
-Viens, allons tester nos talents. Je connais une taverne où j’ai mes habitudes. Nous allons faire des prouesses !
Avec un sourire de façade, Alaina suivit sa compagne. Non pas que la perspective d’une taverne ne la rebute ou lui fasse peur. Mais elle avait l’impression de trahir son amie. Lorsqu’elle lui avait proposé de lui prêter une de ses robes et de la faire passer pour comédienne afin d’aller courir Paris, Alaina avait immédiatement envisagé les perspectives que cela lui ouvrait. Seulement, Charlotte ignorait tout de ses activités et elle avait le sentiment d’utiliser son amie.
Malheureusement, on ne choisit pas toujours ses armes.

Les joues rougies par le vent vif, Alaina rentra avec plaisir de sa promenade. Laissant Marie et Jeanne à leur occupation, elle grimpa seule dans sa chambre. Elle retirait ses gants, quand elle aperçue la silhouète qu’elle avait manqué dans la pénombre de la pièce. Elle eut d’abords un sursaut, puis un frisson en reconnaissant l’invité mystère.
Nicolas de Ruzé
Que dire de lui ? Qu’il était son paradis et son enfer. Sa perte et son sauveur.
Maintes fois elle s’était demandé ce que dirait sa mère chérie en la voyant céder aux avances de ce mousquetaire et se vautrer dans la luxure.
Maintes fois elle s’était juré de ne plus le voir, ne plus lui céder.
Mais il suffisait qu’il pose les yeux sur elle, qu’il lui murmure quelques mots de sa voix grave et elle ne répondait plus d’elle-même. Et chaque fois qu’il venait gratter à la fenêtre de sa chambre elle le laissait entrer dans son intimité. A tel point qu’il est le seul à connaître sa véritable identité, mais Alaina ne pouvait concevoir de ne pas se donner entièrement et à visage découvert dans son besoin irrépressible d’être aimé.
Dos à elle, regardant par la fenêtre il ne se retourna pas. Il attendrait qu’elle vienne à lui. Elle observa ses épaules qui se détachaient dans la lumière et anticipa les prochaines minutes avec délices. Il la prendrait dans ses bras, lui dirait qu’elle est belle, qu’il ne peut vivre sans elle. Puis après le temps des mots viendraient celui des gestes. De ses mains si habiles, il la ferait frissonner et par magie gommerait, pour un temps, le souvenir d’un autre corps se pressant contre le sien. Il était le seul qui savait guérir toutes ses blessures.
Alors doucement, elle s’approcha, se colla contre lui et entoura son corps robuste de ses bras, la tête nichée dans sa nuque, elle le respira. Il sentait l’odeur du camp des mousquetaires, un mélange de feu de bois, de cheval et de foin. Ainsi que quelque chose d’indéfinissable, qu’Alaina appelait l’odeur de la nuit et qu’elle ne se lassait pas sentir.
Enfin, il lui fit face, plantant son regard perçant dans le sien, comme s’il voulait sonder son âme. Perdue, éperdue, amoureuse, elle murmura :
« tu m’as manqué »

Alaina of Cork a écrit:

Du bon côté, c'est sur, compétent ... faut voir !

Ferdinand d'Anglerays a écrit:

Ah, et si tu ne veux pas finir dans la catégorie des pas doués, évite du Perche et Evangeline, ils sont un peu dans la mouise en ce moment