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 Le complot est partout chez lui et comme Dieu, il ne connait pas de frontières.

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MessageSujet: Le complot est partout chez lui et comme Dieu, il ne connait pas de frontières.   Le complot est partout chez lui et comme Dieu, il ne connait pas de frontières. Icon_minitime15.02.14 15:35

Printemps 1666, Versailles, galerie des glaces

Les yeux fermés, récitant son petit discours soigneusement écrit par monsieur Colbert, Haydée attendait. Elle faisait d'ailleurs ceci avec une patience qui n'était pas innée chez elle, bien au contraire. Mais dans ces moments cruciaux, elle n'était plus vraiment la jeune femme rêvant de liberté, mais bien la diplomate que l'on avait envoyée. Soit, Haydée voulait se débarrasser de son engagement matrimonial, rien n'aurait pu lui faire plus plaisir, mais pour l'heure, il fallait absolument faire bonne impression. Et puisqu'elle ne pensait plus revoir Arthur de Roberval de si tôt, puisqu'elle était encore loin de se douter qu'elle fuguerait dans seulement quelques heures, elle mettait son devoir avant toute autre considération. Sa seule ligne de conduite serait de plaire à ses hôtes par les nombreux présents, qu'elle amenait. En effet, le roi, la famille royale et sa cour allaient bientôt la recevoir en grandes pompes. Elle ne devait pas faire un seul écart, même si sans doute une maladresse lui aurait été pardonnée. Durant ces quelques heures, rien ne lui avait été épargné donc concernant quelques règles élémentaires de protocole. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que dans l'un de ces salons luxueux attenant à cette fameuse  galerie des glaces, son appréhension grimpait à vue d'œil. Était-ce donc pour cela, qu'elle avait aussi froid ? Ou était-ce le climat de France, auquel elle n'était pas du tout habituée ?  Il était vrai que son nez la chatouillait depuis qu'elle avait accosté à Saint Malo et sa gorge semblait bien irritée. Elle ne cessait donc de se la racler. Diable de rhume ! Ce n'était pourtant pas le meilleur moment pour éternuer ... Et néanmoins, ce ne fut pas elle qui se fit entendre et remarquer. Un ministre, un certain monsieur de Louvois qui se trouvait également à ses côtés, se mit à se moucher, la mine fort confuse. La reine du Siam tout à coup empourprée, comprit qu'elle était sans le moindre doute, contagieuse.  

- Tous mes pardons, monsieur.  Je ai dû prendre froid en arrivant dans beau pays qui est vôtre, beau mais trop humide pour moi encore.

Le ministre, le nez encore rougi, salua bien bas Haydée.

- Ce n'est rien Altesse, de votre part même ce virus est un honneur.


La siamoise habituée à l'hypocrisie et aux ronds de jambes de toute sorte, qui ne changeaient guère de cour en cour et ce à travers le monde, hocha simplement la tête. Puis elle se concentra de nouveau, sur le texte qu'elle apprenait grâce à la seule phonétique. Elle le maîtrisait plutôt bien, lorsque le chambellan pénétra dans le salon et lui fit savoir que le moment était venu. La jeune femme claquant aussitôt des mains, des serviteurs se pressèrent en rang derrière elle, portant coffres précieux, statuettes ornées de joyaux, ou même animaux exotiques au bout d'une chaîne. A la vue d'un de ses singes si chers ainsi tenus en laisse, le cœur de la jeune siamoise se serra, mais elle ne pouvait guère se permettre un incident diplomatique en les relâchant. Bouddah seul savait ce qu'ils auraient bien pu faire dans ce merveilleux Versailles et à quel point, ils auraient pu y faire des dégâts.

Tout à coup, le bâton du chambellan retentit et elle fut annoncée d'une voix forte. Les deux battants du salon s'ouvrirent et droite, altière, elle s'avança vers le monarque français qui assis sur son trône, méritait amplement son surnom de soleil. Elle ne le voyait encore que de loin, mais il resplendissait de majesté de la tête aux pieds. Rien n'aurait pu détourner son regard légèrement bridé de l'estrade où il se trouvait, mais le bruit de plusieurs pièces chutant sur le sol marbré, l’interpella. Sans doute l'un des coffres avait-il souffert au cours de la traversée, on n'avait guère vu un des trous qui y avait été fait. Mais cette façon d'égrener l'argent de son époux, comme l'aurait fait le petit Poucet dans le conte de Perrault, aurait peut-être du bon. On pourrait prendre tout ceci, pour une mise en scène. La jeune femme était-elle donc si riche pour se permettre cela ? Pour faire comme un filet d'or tout au long de la prestigieuse galerie ? Aussi, se détourna t-elle légèrement pour signifier à l'esclave de continuer à marcher et non pas de s'arrêter pour ramasser l'or.

Lançant des petits coups d'œil à l'assemblée qui se tenait sur ses deux cotés, elle tentait de juger de leur réaction. Serait-elle une bête de foire considérée malgré tout comme inférieure de par ses origines, ou bien serait-elle accueillie comme elle l'espérait ? Pour l'heure, elle ne voyait peinte sur les visages qu'une curiosité qui voulait être assouvie.  Elle était bel et bien l'attraction du moment, mais elle ne pouvait pas s'en formaliser aussi vite, n'était-elle pas après tout une étrangère venue de bien loin ?

Parvenue devant le trône du roi, elle joignit ses deux mains et le salua typiquement à l'orientale.  Monsieur Colbert lui avait plus que jamais rappelé, qu'elle ne devait pas prendre la parole en premier, elle patienta donc que Louis XIV lui eût souhaité la bienvenue en son royaume, pour ce faire.

- Sire, je suis très heureuse et honorée d'être aujourd'hui accueillie par la plus belle cour du monde. Je vous en remercie et vous prie d'accepter ces modestes présents.

Cette phrase était courte et elle l'avait débitée lentement pour en détacher toutes les syllabes. La phonétique, toujours la phonétique, mais tout au moins son exécrable français, n'était-il pas ressorti à ce moment crucial ! C'était le principal.  Mais hélas, d'autres devaient encore suivre, d'autres apprises également sur le bout des doigts, car elle ne devait pas plaire qu'au roi mais aussi à son entourage. Derrière elle, monsieur Colbert et son interprète avaient d'ailleurs encore des sueurs froides, allait-elle être à la hauteur de leur enseignement de dernière heure ?

- Permettez que parmi tous ces cadeaux, j'en fasse des plus personnels, car les ambassadeurs m'ont confié les goûts de votre famille. Pour vous Sire, ces animaux pour venir compléter votre ménagerie. Prince, acceptez je vous prie, ce vêtement brodé d'or et de diamants.  Pour vous reine Marie Thérèse, recevez cette Bible enluminée datant du XVème siècle, mon mari collectionneur passionné, vous l'offre de bon cœur. Et enfin pour vous Madame, voici une rivière de jade et de lapis-lazuli.  

Les merci, les ébahissements devant les somptueuses richesses du Siam, et les invitations à se rafraîchir se succédèrent. Les soulagements de ses maîtres d'un jour également. Mais fort heureusement, une demi heure plus tard, la musique prit enfin place pour que s'ouvre le bal. Invitée par le roi par pure diplomatie, elle ne put s'asseoir sur un trône réservé en estrade que quelques minutes plus tard, et ce fut d'ailleurs avec délice, elle qui était restée debout durant très longtemps. Se trouvait à ses côtés la duchesse Orléans, tenant entre ses doigts, le collier qu'elle lui avait offert. Elles se sourirent. Cette princesse dégageait à la fois quelque chose de frivole, de grave et d'intelligent. En somme, elle ne ressemblait pas à ces dindes de harem trop longtemps supportées. Chose qui plut d'emblée à la siamoise.

- Vous ne pas aller danser avec votre mari ?

Revenant à son français précaire puisqu'elle n'était plus sous les projecteurs, et ignorant encore tout ce qui se passait à la cour de France, Haydée venait de poser la question qui pouvait mettre l'une de ses hôtes très mal à l'aise. Ou bien qui pourrait conduire à certaines confidences et complots, qui sait ?

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MessageSujet: Re: Le complot est partout chez lui et comme Dieu, il ne connait pas de frontières.   Le complot est partout chez lui et comme Dieu, il ne connait pas de frontières. Icon_minitime18.02.14 21:32

Plusieurs personnes s'affairaient autour d'Henriette tandis que celle-ci, impassible se faisait coiffer. Observant son reflet à travers le miroir, la princesse était encore loin d'imaginer le deuil qu'elle porterait d'ici peu.
La raison de tout l'engouement qui régnait dans Versailles depuis le début de la journée était une réception donnée en l'honneur de la reine Siamoise, une femme que Henriette ne connaissait d'ailleurs pas. Et comme chaque personne importante reçue au sein de la Cour de France, rien n'était laissé au hasard et tout était mis en place pour que la toute puissante cour de France soit mise en avant.
Dans l'intimité de sa chambre, quoique envahie de nombreuses personnes présentes pour la préparer, la Princesse se leva pour se faire vêtir d'une somptueuse robe ocre parée de nombreuses broderies. L'affaire prit quelque temps avant que Henriette soit fin prête. Coiffée, maquillée et habillée, cette dernière était comme à son habitude des plus élégantes. Bien que n'étant pas la femme la plus importante de la cour, elle savait que de nombreux regards seront braqués sur elle.

Aux côtés de son époux, Henriette entra dans la galerie des glaces, là où avait lieu la réception. Après avoir observé le protocole d'usage, on finit par annoncer l'entrée de la reine de Siam. L'allure de celle-ci plut tout de suite à la Princesse qui la trouvait très élégante et aimait voir un peu d'exotisme au sein de cette cour. A sa suite, de nombreux présents suivaient. Il était clair que le royaume du Siam n'avait pas lésiné sur les moyens et faisait part de ses nombreuses richesses. On entendit quelques pièces glisser sur le sol de la galerie mais la Siamoise semblait rester impassible.
Après ces présents, d'autres étaient personnellement destinés à la famille royale. Henriette observa d'un œil envieux la parure offerte à son mari mais fut rapidement éblouie par le cadeau qui lui était adressé à elle-même. Celle-ci reçut le magnifique bijoux entre ses mains et accorda un hochement de tête en guise de remerciement. Elle aurait tout le loisir de la remercier personnellement plus tard. Elle aurait bien remplacé ses bijoux actuel par ce somptueux collier mais les bleus et verts de celui-ci ne s'accordaient pas avec sa tenue actuelle.

Les festivités commençaient enfin, et de nombreuses personnes envahirent le centre de la galerie afin de se prêter au bal qui était alors donné. La Princesse observa tout ceci d'un œil lointain et distrait. C'est alors que la reine de Siam s'assit à ses côtés et Henriette accueillit ceci avec reconnaissante, elle qui sombrait peu à peu dans l'ennui.
La première chose qui surprit Henriette quand la Siamoise s'adressa à elle fut la précarité de son français, elle qui avait offert un discours des mieux formés. La seconde fut la nature de sa question, qui peut être tout à fait justifié pour quelqu'un qui ne connait pas les relations qu'entretiennent les deux époux princiers. En effet, il était bien loin le temps où les deux époux partagés des plaisirs comme ceux de la danse. La jalousie avait rapidement prit place. Un rapide coup d'œil à son époux alors occupé dans une grande discussion et Henriette reporta son attention à son invité. Elle ne lui en voulait pas d'avoir été aussi indiscrète, chose qu'elle n'aurait pas forcément laissé passer si cette question était sortie d'une autre bouche.

-Cela fait longtemps que mon mari et moi n'avons pas partagé une danse. Pour être honnête avec vous, nous ne partageons plus grand chose. Une fois passé les premières années, le mariage s'essouffle. Enfin vous devez sans doute savoir de quoi je parle, à moins qu'au Siam on s'aime d'un amour unique et éternel ?

La Princesse échangea avec sa voisine un brève sourire complice. Elle ne connaissait pas vraiment les pratiques qui s'exerçaient dans son pays mais elle n'était pas dupe et savait que beaucoup de femmes ne se mariaient pas souvent par amour mais plus pour satisfaire des alliances ou pour des raisons d'argent, encore plus lorsqu'on côtoie la royauté.

-Avant que je n'oublies, veuillez recevoir mes remerciements pour ce somptueux bijoux, les pierres qui l'ornent sont vraiment magnifiques.
Henriette aimait les cadeaux et savait se montrer reconnaissante envers celui ou celle qui lui faisait ces présents, encore plus lorsque celle-ci était une invitée de marque.
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