« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Quelle question ? Au plus offrant bien sûr ! Côté Lit: On n'y fait pas comme chez soi et certainement pas son mari ! Discours royal:
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Sujet: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 24.03.12 17:49
« Je donne un sourire sans savoir ou ça le mène s’il peut consoler pour qu’il me revienne Je donne un sourire et soudain on a le même, le temps d’essayer, tout vaut la peine »
- N’ayez crainte, mademoiselle de Gaumont, je prendrais soin de cette bien jolie enfant ! N’est ce pas belle ange, que nous allons bien nous entendre ?
La nourrice entortilla une des mèches brunes de Roxanne autour de son index pour que celle-ci boucle adorablement, et la fit sautiller dans ses bras. Il était curieux de mettre une enfant en nourrice, à un âge où au contraire ceux-ci repartaient chez leurs parents, pour une éducation digne de leur rang. Car Roxanne avait atteint ses quatre ans. La nourrice n’avait guère osé la questionner, mais la jeune écossaise lui avait servi une explication. Oui Rebecca avait une fois encore, usé du mensonge auprès de cette dame très recommandable. Elle n’avait fait appel à aucune des identités offertes par Nicolas de la Reynie, mais bien au contraire s’en était créé une quatrième pour l’occasion, ce pour plusieurs raisons.
Morgan était en France, il pouvait être mis hélas tôt ou tard au courant du marché conclu avec le lieutenant de police. Ce dernier s’il apprenait la vérité sur sa bien trop réelle union qu’elle niait bien haut, bien fort, n’hésiterait sans doute pas à offrir tous les renseignements nécessaires au cousin du roi d’Angleterre. Informé, il ne tarderait pas à suivre à la trace la petite fille. Qu’il la retrouve aussi aisément, il était absolument hors de question, jusqu’à ELLE en décide autrement. En outre, ne pouvant se présenter autrement que comme mère célibataire, et donc décriée publiquement bien entendu, il ne fallait pas que ça se répercute sur les trois rôles qu’elle était censée jouer. Pauline de Blaingirey, Aurélia Dantès et Gisèle de Brévailles avaient TOUTES leur réputation à tenir.
- Je vous sais gré de prendre soin de ma fille, vous percevrez bien entendu la somme dont nous venons de parler chaque fin de semaine, lorsque je vous rendrai visite. Si vous désirez me joindre, je vous demande que ce soit en cas d’extrême urgence, et de n’en jamais spécifier la raison par écrit, mettez-y le strict nécessaire, s’il vous plait. Voici l’adresse …
Rebecca tendit un papier à son interlocutrice où étaient tracées quelques lignes seulement. L’adresse était celle de la boutique où elle travaillait chaque soir en tant qu’Aurélia Dantès. Là également, il fallait prendre des précautions et ne même pas donner un prénom, ou un lieu où l’on pourrait tout découvrir d’elle avec une effrayante facilité.
- Vous n’aurez qu’à donner votre missive et préciser qu’il faut la remettre à la chapelière. - Bien mademoiselle. Il en sera fait selon vos désirs. - Je vous remercie. A présent, je souhaiterais être un instant seule avec ma fille … - Cela va de soi.
Et la nourrice partit dans la pièce attenante où une senteur de gâteau s’élevait jusqu’ici. Roxanne forgée presque dans le même acier que Rebecca contenait ses larmes. Son enfant l’étonnait par sa perspicacité. Elle n’avait jamais ignoré les problèmes entre ses parents, et avait même été gifflée par Morgan pour avoir désiré éviter une dispute cinglante entre eux. Après avoir été séparée de son père, voilà qu’elle ne verrait plus sa mère qu’une fois par semaine ! Elle en avait l’air parfaitement consciente et paraissait compter déjà les minutes, jusqu’à leur prochaine rencontre. Le cœur de Rebecca se serra, tandis qu’elle se mettait à genoux pour être à la hauteur de sa fille, elle lui caressa tendrement la joue avant de céder à l’impulsion de la prendre dans ses bras.
- My sweet darling, mum will come back you know, and soon ! - Is it dad’s fault, mum ? That's why, you're leaving ?
La duchesse ne voulait pas être de ses mères qui prennent les enfants en otage de leur propre haine. Elle ne voulait pas que Roxanne déteste son père, ce n’était absolument pas son but. Morgan était un mari insupportable mais un père aimant. Malgré cette gifle et sa conduite lors de son accouchement, elle ne pouvait l’ignorer. Mais avant qu’il ne puisse la revoir, il faudrait qu’ils négocient tous les deux. Ce n’est pas au fond d’un couvent, qu’elle pourrait l’élever! Dix sept d’heures d’accouchement, des années à combler toutes les absences de Morgan pour la politique de l’Angleterre ou bien pour ses frasques, elle ne l’entendait donc pas de cette oreille. Au cœur de ses pensées, sa fille, la tête posée sur son épaule laissait libre cours à sa tristesse et prit le silence de sa mère, comme un oui.
- I hate him !
Rebecca se détacha légèrement de Roxanne afin de pouvoir lui parler yeux dans les yeux.
- No ! You don’t ! He is YOUR father ! You have to love him ! Understood, my sweet ? - Yes mum … - Speak french my darling, I know you talk this language so well ! Try for me and for this charming lady ! - Je le ferai par amour pour vous, maman et pour que vous soyez fière de moi ! - C’est le cas mon ange et je le serai sans doute plus vendredi prochain. Au revoir.
Avant de succomber elle-même au torrent de larmes qui paraissait vouloir noyer ses yeux, elle lui embrassa longuement la joue, se redressa et rappela la nourrice.
- A la semaine prochaine. Bonne journée.
Ah ce chemin pour revenir à la maison louée sous le nom de Pauline de Blaingirey, fut sans doute à la hauteur du chemin de croix du Christ. Rebecca avait le cœur lourd et ses jambes tout autant, lui faisaient traîner des pieds. La tête renversée, son menton littéralement écrasé sur sa poitrine, elle marcha telle un automate. Mille fois, elle eut envie de revenir sur ses pas avant de se raisonner. Il ne lui restait plus qu’à attendre … sept longs jours.
Pénétrant chez elle, épuisée tant physiquement que moralement par une telle matinée, elle s’affaissa sur le fauteuil de satin blanc. Les pleurs contenus coulèrent sur ses joues jusqu’à ses lèvres, lentement, amèrement ! Elle fixait à travers les fenêtres le soleil et eut tout à coup une sorte de ricanement ironique. Il lui semblait qu’on lui avait arraché la seule lueur qui illuminait son existence et ce dernier osait briller, osait l’éblouir. L’astre du jour aurait dû se ranger à son humeur et être en berne sous de nombreux nuages obscurs …
Aveuglée par lui, la duchesse de Richmond ferma peu à peu les yeux ne prenant pas même soin d’essuyer les larmes humidifiant son visage. Sans doute son inconscient lui ordonna-t-il de dormir pour oublier cette séparation, ou la rendre moins douloureuse, et c’est qu’elle fit. Sa tête s’abaissa sur le côté et le sommeil la gagna entièrement et sûrement. Tout ceci lui avait fait sortir de l’esprit, qu’elle devait recevoir le jeune homme qui remplacerait le pauvre malheureux, que Cédric et elle-même s’étaient chargés de mettre à mal. L’heure du premier rendez-vous approchait pourtant …
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 26.04.12 13:52
« 18 Novembre 1666. Point sur les différentes tâches.
Accomplies : - Interrogé les invités de la fête d’anniversaire de Sa Majesté. Rien à signaler pour la plupart, mais Sola définitivement suspect, comme toujours. A creuser ? N’avait pourtant pas l’air d’y avoir trempé. Interrogé Racine sur le vers malheureux de sa pièce. Semblait désespéré et surtout innocent. - Entré en contact avec Eric de Froulay. Lui ai fait comprendre que je connaissais sa véritable identité. M’a opposé de la résistance, comme attendu. Elément prometteur, des capacités, et surtout loyal envers sa - Majesté. Sera probablement utile par la suite. Enquêté sur les messes noires du cimetière des Innocents. Vérification faite avec Colonna. Sauvetage improvisé d’une victime de ces satanistes. En sommes sortis sans dommages. Liste des noms identifiés envoyés à la Reynie.
Reste à faire : - Enquêter du côté de l’hôtel de Bourgogne. Fouiller le bâtiment, interroger les comédiens et les servants sous couvert d’une autre identité, si possible. Déterminer qui était où à quel instant et aurait pu avoir accès à la pièce. - Aller chez Mlle de Blaingirey. Déterminer ses besoins en matière de sécurité et de protection. Faire un rapport à la Reynie. »
Ferdinand apposa le point final à son compte-rendu avant de reposer sa plume. Puis il se leva, son papier à la main, et le relut en arpentant lentement sa chambre de long en large, comme un lion en cage ou un monsieur très concentré sur ce qu’il est en train de faire. Il alla à la fenêtre, s’adossa contre le mur afin que la lumière du jour l’éclaire au mieux, sourcils froncés comme s’il était absorbé dans une très grande réflexion. Ses lèvres remuaient à mesure qu’il relisait son texte à voix très basse, et finalement, quand il fut satisfait, il froissa la feuille dans sa main jusqu’à ce qu’elle ne soit plus qu’une boule et la jeta dans la cheminée où brûlait un feu de bois. Pensif, il la regarda se consumer, avant de tendre les mains vers les flammes pour les réchauffer avec un air satisfait. Ferdinand d’Anglerays était un homme trop prudent pour conserver des notes sur ses activités ; en revanche, les écrire et les apprendre par cœur avant de les détruire lui était très facile et bien plus profitable. Et puis, ça n’était là rien de très important, simplement un petit mémento sur ses activités des dernières semaines, afin de clarifier tout ça dans sa tête. Il avait toujours procédé ainsi, et il ne s’en portait pas plus mal : non seulement ça évitait de garder des preuves sur lesquelles des ennemis pourraient tomber, mais en plus cela lui permettait de faire travailler sa mémoire, qu’à force d’exercice il avait très aiguisée. Il eut un sourire amusé en repensant à l’air hébété de Molière lorsqu’une fois, après une représentation, Ferdinand était allé le congratuler et lui avait dit à quel point il avait aimé le Médecin malgré lui et lui avait récité, de tête en ne l’ayant entendu qu’une fois, l’un des monologues de la pièce. Avoir une bonne mémoire était décidément bien utile, que ce fusse pour un espion ou quelqu’un qui aime à surprendre son entourage !
S’éloignant du feu de cheminée, Ferdinand jeta un œil à sa montre en réfléchissant à son programme de la journée. Il était onze heures du matin : il avait donc largement le temps soit pour aller faire un tour à l’hôtel de Bourgogne, soit chez cette Pauline de Blaingirey. Après un court instant d’hésitation, il opta pour la deuxième solution. La Reynie lui avait demandé ce service quelques jours plus tôt, et le pauvre homme était tellement débordé par tous ses dossiers que Ferdinand n’avait pas eu le cœur à le lui refuser. Assurer la sécurité de cette demoiselle ? Voilà qui restait dans ses cordes et ne devrait, somme toute, ne pas être grand-chose de plus qu’une petite mission de routine. La rivalité espions-police ne lui était pas inconnue, mais on pouvait bien se rendre service de temps à autre non ? Surtout quand on a quelque chose à y gagner, comme c’était toujours le cas avec la Reynie. Celui-là avait beau rouspéter contre les espions, il n’économisait jamais son énergie lorsqu’il s’agissait de faire alliance avec eux pour le bien de Sa Majesté.
Après avoir enfilé son manteau, il sortit affronter le froid de l’hiver et fila tout droit aux écuries afin de récupérer son cheval et de bondir en selle.
« En avant Dédalus, à Paris ! Allez ! » lança-t-il à sa monture qui s’élança aussitôt sans même qu’il n’eut besoin de la talonner. La réceptivité de ce cheval l’étonnerait toujours.
Alors qu’il parcourait au galop la distance qui séparait Versailles de Paris, Ferdinand rassembla dans sa tête ils informations dont il disposait à propos de cette Pauline de Blaingirey. Il se revit dans le bureau de la Reynie, assis comme toujours en jouant avec un crayon qu’il avait comme toujours subtilisé sur son bureau, face à l’imperturbable policier qui lui expliquait la situation, ayant appris depuis longtemps que même s’il semblait distrait, le Fou n’en était pas moins toutes oreilles quand on parlait boulot.
« Une jeune femme obligée de se cacher pour échapper à un pauvre type… Un cinglé qui la harcèle apparemment… Il faut assurer sa sécurité… L’homme que j’avais mis sur le coup n’a pas fait long feu… Pourriez-vous vous en charger ? » Et bien entendu, il avait dit oui. Pourquoi aurait-il dit non ? Comme nous l’avons déjà dit, il ne s’agissait là que d’un travail de routine, pratiquement. Rien de très prenant ni de très dangereux. Il pouvait bien se permettre d’ajouter cela à son emploi du temps de ministre. Ah, qu’elle était chargée, la vie de Fou ! Toujours sollicité de partout ! Mais en même temps, qu’est-ce qu’il s’ennuierait sinon !
C’est donc d’excellente humeur et même en sifflotant que Ferdinand avala les dernières minutes de trajet avant d’arrêter sa monture devant la maison que la Reynie lui avait indiquée. Il sauta de selle et attacha l’animal en lui flattant l’encolure pour lui signifier qu’il était content de lui, ce à quoi l’équidé répondit par un hennissement satisfait, que quiconque parlant le cheval aurait pu traduire par « Allez compère, vas-y, je t’attends là ! ». Ferdinand engloba la maison du regard, curieux, avant d’aller frapper à la porte. Ne recevant pas de réponse, il hésita u instant avant de se souvenir que son collègue avait averti l’occupante des lieux de sa venue : elle devait donc être là. Il entra donc et referma la porte derrière lui. Observant l’intérieur de la maison, il commença son travail en mémorisant l’emplacement des pièces qu’il pouvait voir, notant dans un coin de sa tête qu’il lui faudrait demander à la locataire qu’il pouvait visiter plus avant pour avoir une vraie vue d’ensemble. Il appela une fois mademoiselle de Blaingirey, mais n’obtint pas de réponse. Intrigué, il alla vers une porte à double battant, soupçonnant là le salon, et ouvrit doucement avant de jeter un œil à l’intérieur. C’est alors qu’il discerna une silhouette allongée sur le sofa. Il entra tout à fait, en silence, et détailla l’endormie. Son examen lui arracha un sourire agréablement surpris : La Reynie lui avait parlé d’une « assez jolie femme », pour Ferdinand, il s’agissait là d’un bel euphémisme ! Pourquoi lui avoir caché qu’il aurait affaire à une très jolie femme ? Il se dit qu’il pourrait en faire le reproche à ce petit cachottier de policier. Mais en attendant, une autre question se posait : elle s’était endormie, fallait-il la réveiller ? En regardant son visage détendu, Ferdinand nota les traces de maquillage qui partaient de ses yeux et avaient laissé une trace jusqu’à ses joues. Avait-elle donc pleuré ? Se serait-il passé quelque chose juste avant qu’il n’arrive ? Ce fut cette interrogation qui le poussa à se décider. Maintenant qu’il était là de toute façon, il serait trop bête de repartir et risquer de la louper plus tard. Il s’éclaircit donc la gorge et lança d’une voix pour une fois dépourvue de tout sarcasme –autant épargner une femme qui semblait avoir pleuré :
« Mademoiselle de Blaingirey ? »
Il attendit patiemment qu’elle eut ouvert les yeux, le voie et ne se redresse avant de poursuivre :
« Je vous prie de pardonner mon intrusion, mais personne n’est venu lorsque j’ai frappé en bas. Etant donné les circonstances, j’ai craint quelque mauvais présage et me suis permis d’entrer pour m’assurer qu’il n’en était rien. Permettez-moi de me présenter : baron d’Anglerays, envoyé de monsieur de la Reynie. »
Pour accompagner ses paroles, il s’inclina avec toute la distinction d’un gentilhomme. Puis il se redressa, une lueur malicieuse dans le regard.
« Il paraîtrait que mon prédécesseur a rencontré quelques… Difficultés pendant qu’il était à votre service. Je suis venu prendre la relève, si vous avez toujours besoin de protection bien sûr. »
Rebecca Stuart
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 09.05.12 21:51
Tic tac … L’imposante horloge égrenait les secondes dans le salon. Ce qui aurait pu être un rappel de l’heure, concernant son rendez-vous, eut en fin de compte un effet berçant. Rebecca plongea donc dans un sommeil profond. Réparateur ? Oh non, il fut peuplé de cauchemars assez effrayants. Il ne s’agissait pas de bêtes poilues ou de monstres marins, rien de tout cela, mais ses rêves l’angoissaient davantage car demain peut-être ils se réaliseraient. En effet, aurait-elle pu s’étonner d’apercevoir Morgan, une arme en main lui ouvrir la gorge en éclatant d’un rire sadique. Aurait-elle pu ignorer cette autre vision de son mari où il prenait sa fille dans les bras, pour l’éloigner d’elle à tout jamais. La duchesse de Richmond ne se sentit donc pas même chuter sur le fauteuil où elle se tenait jusqu’alors assise.
Rien ne semblait pouvoir la tirer de ses tourments chimériques. Rien. Pas même la sueur qui commençait à perler sur son front, à ce défilement d’images insoutenables. Aussi comment aurait-elle pu entendre le bruit de la porte? Comment aurait-elle pu réaliser même que ce quelqu’un l’appelait par son faux nom ? Elle était réellement sourde à tout. Ce n’était pourtant pas le désir de s’éveiller qui lui manquait, mais son inconscient luttait à lui lancer à la face, toutes ses grandes peurs. Lourde erreur pourtant d’avoir laissé cette porte ouverte, lourde erreur de permettre peut-être à l’ennemi, c’est-à-dire à son cher mari de pouvoir pénétrer ici. Rebecca aurait pu s’en mordre les doigts. Fort heureusement, le destin paraissait vouloir lui épargner trop de frayeurs réelles malgré tout. Puisque la personne qui venait de faire irruption chez elle, n’avait strictement rien en commun avec Morgan of Richmond.
« Mademoiselle de Blaingirey ? »
La voix tout d’abord lointaine sembla résonner plus fort à ses oreilles, sous forme d’écho. Ne parlons même pas du raclement de gorge qui avait précédé cette interpellation. Cette voix, la jeune femme n’aurait su dire au premier abord si elle appartenait à un homme ou à une femme, tant Morphée la retenait à des milliers de lieues de cet appartement. Lorsque ses yeux s’ouvrirent, ce fut par conséquent dans une sorte de réflexe. Elle vit sous fond flouté des bottes, un fourreau d’épée, une poitrine creuse sous un pourpoint et le visage d’un homme … brun ? Oui c’était bien ça. Il lui souriait de ce genre de sourire qui ne semble mourir jamais sur un visage. Quel heureux homme ! En effet, ce n’était pas son mari, cet alcoolique dépressif ! Sans doute avaient-ils ce point en commun de sourire rarement. Le seul point commun en vérité.
La duchesse of Richmond se redressa, déplissa sa robe, essuya son front et ses joues avec un mouchoir de dentelle et tenta de prendre une contenance. Elle plissa les yeux, et fit appel à sa mémoire encore bien troublée par son cauchemar. Qui était cet homme ? Que venait-il faire ici ? Comment connaissait-il son nom d’emprunt ?
« Je vous prie de pardonner mon intrusion, mais personne n’est venu lorsque j’ai frappé en bas. Etant donné les circonstances, j’ai craint quelque mauvais présage et me suis permis d’entrer pour m’assurer qu’il n’en était rien. Permettez-moi de me présenter : baron d’Anglerays, envoyé de monsieur de la Reynie. »
Mon Dieu, mais bien sûr, le renfort du lieutenant de police ! L’homme qui devait assurer sa protection ! A divaguer de la sorte, voilà qu’elle avait oublié ce que le ciel lui envoyait justement contre son cher et tendre époux. En outre, ce baron d’Anglerays paraissait prendre sa tâche au sérieux. Le dernier venu n’était pas aussi zélé dans sa tâche, voilà bien pourquoi, Cédric son camarade de la Main de l’Ombre avait pu facilement le mettre hors d’état de nuire ! Mais celui-là semblait pouvoir faire l’affaire ! Certes, ses épaules n’étaient pas larges, ses bras pas bien musclés, sa taille très fine avait tout de celle d’une fille. Elle n’était pas bien convaincue de ses capacités en cas de dangers, cependant elle devait s’en contenter. Lui donner sa chance ! Il lui faisait déjà bonne impression par sa détermination et ses initiatives.
« Il paraîtrait que mon prédécesseur a rencontré quelques… Difficultés pendant qu’il était à votre service. Je suis venu prendre la relève, si vous avez toujours besoin de protection bien sûr. »
Elle devait cesser de le détailler de bas en haut comme une vulgaire bête de foire et sans mot dire qui plus est ! Ce n’était pas vraiment correct et encore moins poli. Il ne fallait pas vexer l’homme. Néanmoins lui-même la dévisageait. Était-ce pour juger de sa bonne foi ? Et cette réplique, était-elle sous entendue ? A la réflexion, Rebecca se serait giflée. Elle devenait réellement paranoïaque et voyait le mal partout, des suspicions de toute part. Conspiratrice et fugitive étaient deux états qui la conduisaient sur cette pente dangereuse de la méfiance perpétuelle. Elle devait se faire confiance, son mélodrame avait fonctionné auprès de la Reynie, pourquoi pas auprès de cette recrue ? En particulier lorsque le mélodrame a de nombreux accents de vérité.
- En effet, l’homme qui me pourchasse l’a rudoyé violemment lorsque nous rentrions à mon ancien domicile … Mais asseyez-vous baron je vous en prie.
Après lui avoir désigné un sofa de velours rouge où il pouvait prendre place, elle attrapa une petite clochette et la fit tinter. Quelques instants plus tard, une domestique panier à linge sous la main sortait tout droit de la blanchisserie, à l’étage inférieur.
- Oui mademoiselle ? - Apportez nous quelques biscuits et un peu de cette nouvelle liqueur … Du chocolat me semble-t-il.
Il fallait mettre le baron à l’aise. Elle allait tout lui expliquer dans les détails … L’homme avait-il remarqué ses larmes non feintes et cette sueur froide à son front. Elle n’avait pas à simuler la peur, elle avait peur. Voilà pourquoi ses propos seraient sans doute pris pour argent comptant. Il le fallait ! Il lui fallait cette protection ! Rebecca porta son mouchoir à nouveau à ses yeux, tandis que la servante amenait un plateau et le plaçait devant eux.
- Merci ma fille, vous pouvez rentrer chez vous à présent. Bonsoir. - Bonsoir mademoiselle, monsieur.
Ils étaient enfin seuls. L’acte II de l’apitoiement pouvait commencer. Le premier elle l’avait servi au grand chef.
- Je suppose que monsieur de la Reynie vous a tout expliqué, baron d’Anglerays … mais peut-être vous a-t-il épargné les détails, afin de préserver ma pudeur. Il est un homme d’honneur et je ne pense pas me tromper. Pourtant c’est réellement la terreur que je ressens au plus profond de moi, qui me pousse à devoir vous dire, ce que je lui ai dit … Vous devez je suppose avoir toutes les informations nécessaires pour la tâche qui vous revient.
Elle marqua une pause, le temps pour elle de remplir les deux tasses de la boisson demandée. Cela lui permettait également d’avoir la parfaite excuse, de fuir son regard en toute subtilité.
- Voilà … Pour m’être offerte stupidement à un homme au cours d’une seule nuit … Cet homme croit avoir des droits sur ma personne. Il me prétend sa femme, m’envoie des courriers anonymes menaçants, me traque depuis un an où que je vive, agresse tout homme qui s’approche de moi et votre collègue d’ailleurs en fit hélas parti … J’ai dû donc déménager à nouveau, il y a de cela quelques jours.
Elle but une gorgée de l’amère liqueur, trop sucrée à son goût. Jugeant qu’il était temps de planter ses yeux noisette dans ceux de son interlocuteur, elle arbora une mine désolée.
- J’ai donc demandé secours au lieutenant de police qui s’est montré avec moi d’une grande générosité. Je sais que … votre collègue mourrait d’ennui de faire le piquet devant chez moi. Je ne peux que le comprendre, sans doute êtes-vous habitué à plus d’actions dans la police. J’espère donc, baron, que ma compagnie ne vous sera point trop désagréable …
Yeux de biche toujours un peu mouillés par les pleurs et la phase « séduction - attendrissement » venait d’être officiellement lancée.
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 11.06.12 15:02
Qui était cette femme ? Maintenant qu’il se tenait en face d’elle, la question taraudait Ferdinand alors qu’ils se dévisageaient, elle avec ses yeux encore humides, lui avec son immuable sourire aux lèvres. C’était la première rencontre du chagrin et de la joie, de la froide et pluvieuse Ecosse et la chaude et impétueuse Gascogne. Bien sûr ils l’ignoraient ; puisqu’il ignorait sa nationalité, malgré un accent léger encore perceptible qu’il n’arrivait pas à situer. Et puis, comment deviner quelle tournure invraisemblable et complètement folle cette rencontre et leur relation somme toute professionnelle prendrait par la suite ? Ferdinand était venu avec dans l’idée de rencontrer une jeune femme craintive et toute éplorée, mais voilà qu’il faisait maintenant face à l’une des plus jolies femmes qu’il ait rencontrées, et loin d’être de ces femmes qui s’évanouissent à la moindre émotion, il lui semblait qu’elle faisait son possible pour reprendre contenance, et il y avait dans ce sursaut de dignité quelque chose de noble auquel il ne pouvait que rendre hommage. La peur oui, la tristesse oui, mais avec classe s’il vous plaît… Comment ne pas cautionner ? se disait-il sans chercher à se dérober aux yeux bruns qui le détaillaient sans se dissimuler.
- En effet, l’homme qui me pourchasse l’a rudoyé violemment lorsque nous rentrions à mon ancien domicile … Mais asseyez-vous baron je vous en prie.
Après s’être légèrement incliné, il alla jusqu’au fauteuil en face d’elle où il se laissa tomber avant de croiser ses longues jambes et détailla la pièce. Non pas que la décoration l’intéressât particulièrement, mais quand une femme était en danger dans sa propre maison, connaître les entrées et sorties ainsi que les fenêtres étaient toujours utiles. Et puis, il avait envie de tester « la méthode Benoît » et de voir s’il arrivait à deviner quoi que ce soit sur son interlocutrice en observant son environnement. Mais il se souvint que la Reynie était celui qui lui fournissait ses logements, et si elle était là depuis peu, il n’allait probablement pas voir grand-chose. Il arrêta donc très vite son inspection pour reporter son attention sur elle. Il remarqua la grâce à peine consciente qu’elle mettait dans ses gestes alors qu’elle faisait sonner la cloche pour appeler un domestique. Il avait toujours aimé la grâce chez une femme, caractéristique qui selon lui avait quelque chose d’apaisant impossible à trouver chez un homme.
- Oui mademoiselle ? - Apportez nous quelques biscuits et un peu de cette nouvelle liqueur … Du chocolat me semble-t-il.
Un court silence s’installa, durant lequel il reporta son attention vers la fenêtre, puis la porte, comme s’il continuait son inspection alors qu’il voulait juste lui laisser le temps de reprendre ses esprits. Avait-elle fait un cauchemar, puisqu’il l’avait trouvée endormie en arrivant ? Quel genre d’homme était celui qui la poursuivait pour ainsi arracher des larmes à une femme même dans son sommeil ? Métier oblige, Ferdinand ne se laissait pas facilement attendrir en temps normal, sans pour autant être insensible aux malheurs des autres, mais il fallait avouer que les tourments de cette mademoiselle de Blaingirey, visible sur son visage pâle et marqué par les épreuves, avaient quelque chose de touchant. Finalement la domestique reparut rapidement, et alors qu’elle posait le plateau sur la table il l’inspecta d’un coup d’œil interrogateur. Avait-elle été engagée par la Reynie ou bien mademoiselle de Blaingirey l’avait-elle engagée elle-même ? A moins qu’elle n’ait été à son service avant le début de ses ennuis ? Voilà un point à éclaircir pendant la discussion.
- Merci ma fille, vous pouvez rentrer chez vous à présent. Bonsoir. - Bonsoir mademoiselle, monsieur.
Il salua la jeune femme d’un signe de la tête et reporta de nouveau son attention sur la demoiselle qui reprenait le fil de son récit, ou plutôt le commençait.
- Je suppose que monsieur de la Reynie vous a tout expliqué, baron d’Anglerays … mais peut-être vous a-t-il épargné les détails, afin de préserver ma pudeur. - En effet, je ne sais pas grand-chose pour le moment, mais si vous acceptiez d’éclairer ma lanterne je vous en serais éternellement reconnaissant. Répondit-il avec un sourire en coin. -Pourtant c’est réellement la terreur que je ressens au plus profond de moi, qui me pousse à devoir vous dire, ce que je lui ai dit … Vous devez je suppose avoir toutes les informations nécessaires pour la tâche qui vous revient. -Je sais juste qu’un homme vous persécute et que vous avez réclamé la protection du lieutenant de police, qui vous l’a accordée. Je le connais suffisamment pour savoir qu’il ne prend jamais rien à la légère, surtout quand ça signifie mobiliser ses hommes. Vous pouvez nous faire confiance : nous prenons cette menace entièrement au sérieux et ferons tout ce que nous pouvons pour vous protéger. Déclara-t-il en s’asseyant en bord de son fauteuil, les mains croisées, un air sérieux revenu sur son visage. Il écoutait. - Voilà … Pour m’être offerte stupidement à un homme au cours d’une seule nuit … Cet homme croit avoir des droits sur ma personne. Il me prétend sa femme, m’envoie des courriers anonymes menaçants, me traque depuis un an où que je vive, agresse tout homme qui s’approche de moi et votre collègue d’ailleurs en fit hélas parti … J’ai dû donc déménager à nouveau, il y a de cela quelques jours. -Diable, voilà ce qui s’appelle une conquête encombrante. Se contenta-t-il de commenter en arborant un air songeur. Serait-il le prochain sur la liste des « victimes » de ce monsieur ? L’idée l’amusait. Une bonne petite dérouillée, et une livraison pour la Reynie, la perspective en devenait presque réjouissante ! Il connaissait l’homme qui l’avait précédé à la protection de cette femme, une espèce de mauviette paresseuse qui ne devait sa place dans la police qu’à de bonnes relations auxquelles même la Reynie n’avait pas pu dire non. En tout cas, le risque de se retrouver lui aussi en ligne de mire donnait une nouvelle dimension à cette histoire, et avouons-le, y ajoutait un peu de piquant. Risquer la bagarre en protégeant une demoiselle en détresse, il n’en fallait pas plus pour contenter un gascon comme lui !
- J’ai donc demandé secours au lieutenant de police qui s’est montré avec moi d’une grande générosité. Je sais que … votre collègue mourrait d’ennui de faire le piquet devant chez moi. Je ne peux que le comprendre, sans doute êtes-vous habitué à plus d’actions dans la police. J’espère donc, baron, que ma compagnie ne vous sera point trop désagréable …
Voilà donc le fin mot de l’histoire. Décidément, le charme d’une femme pouvait faire bien des dégâts dans l’esprit d’un homme ! D’accord, celle-ci était particulièrement charmante, mais de là à perdre la tête à ce point… Parbleu, il y en avait d’autres, des jolies femmes ! Ferdinand se contenta donc de hocher la tête en réfléchissant encore quelques instants, avant de bondir sur ses pieds et de commencer à arpenter lentement la pièce –il ne tenait jamais en place, même devant le roi, ce jour-là ne ferait pas exception. Puis il frappa ses paumes l’une contre l’autre avant de tourner un visage souriant vers la jeune femme.
« Mon collègue était un idiot, faire le piquet occupe la majeure partie de notre emploi du temps, s’il ne le sait pas, eh bien tant pis pour lui ! » s’exclama-t-il joyeusement en revenant vers elle, mais sans s’asseoir pour autant ni chercher à lui dire qu’il n’était pas policier. Qu’elle le croie était même plus simple pour la suite, il aurait au moins la crédibilité du titre. Pas sûr qu’elle soit ravie d’apprendre qu’on lui avait envoyé une simple connaissance de la Reynie, et hors de question de lui dire qu’il était espion bien entendu… Il tira de son pourpoint une feuille de papier vierge qu’il avait emportée afin de dresser un plan de la maison ainsi qu’une mine avec laquelle tracer son plan, et s’accroupit non loin d’elle en se servant de la table basse comme appui.
« Récapitulons ! Ce monsieur est quelqu’un de très déterminé qui ne recule devant pas grand-chose –pour ainsi dire rien- pour vous retrouver. Il va donc falloir au minimum s’assurer que vous êtes à l’abri dans la maison, même si je ne doute pas que la Reynie ait été prudent… » marmonnait-il en dessinant un plan selon ce qu’il avait vu lorsqu’il était entré, sans oublier portes et fenêtres. « N’hésitez pas à me dire si vous voyez une erreur sur mon petit dessin… Vos domestiques, vous les connaissez bien ? Depuis combien de temps sont-ils à votre service ? Est-ce que vous leur faites tous confiance ? Il me faudrait une liste de leurs noms, si cela ne vous importune pas… »
Ces étapes étaient pénibles, mais nécessaires. Délaissant son œuvre, il se leva de nouveau et fit le tour de la pièce les yeux levés vers le plafond et les murs, à l’affût d’un quelconque passage secret dont la demoiselle pourrait ne pas avoir connaissance mais qu’on lui avait appris à voir. Vu de l’extérieur, il avait probablement l’air un peu fantasque, à force de bouger dans tous les sens en regardant partout, mais baste ! Il fallait ce qu’il fallait, n’est-ce pas ? Finalement il s’immobilisa au milieu de la pièce, les poings sur les hanches, avant de se tourner vivement vers elle :
« Et bien sûr, il me faudra le nom et un descriptif de ce monsieur qui vous poursuit. Je me doute que c’est pénible de devoir nous le révéler, mais vous pouvez compter sur notre discrétion… Mais si nous devons l’empêcher d’approcher, ce sera plus facile si nous savons à quoi il ressemble, n’est-ce pas ? »
Enfin, il cessa de regarder partout autour de lui et regagna son fauteuil sans se départir de son air goguenard, celui du monsieur toujours content que rien ne pouvait contrarier, ajouta sur un ton rassurant et joyeux :
« Vous êtes entre de bonnes mains, mademoiselle de Blaingirey. Nous allons faire tout le nécessaire pour que tout se passe bien, alors… N’ayez plus peur ! Ne pleurez plus ! Et souriez en pensant à la tête que fera votre poursuivant lorsque nous mettrons la main dessus ! »
Sourire ? Il ne savait pas dans quoi il venait de s’embarquer !
Rebecca Stuart
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 30.07.12 17:27
Bien sûr Rebecca connaissait les effets qu’elle provoquait chez la gente masculine, bien sûr elle se donnait toutes les armes de la séduction lorsqu’elle le désirait … Si bien qu’elle était convaincue de devoir toujours minauder pour y parvenir. Comment se rendre compte par conséquent, qu’elle n’avait guère besoin de battre des cils cette fois-ci ? Que Ferdinand d’Anglerays était déjà mordu. Après tout, cet homme ne représentait aucun intérêt pour elle, si ce n’est celui d’être un bon gardien contre Morgan. Plutôt maigrichon, simple baron et sans doute sans le sou, comment aurait-elle pu être attirée comme un aimant par lui. L’heure de l’attirance et des sentiments n’étaient pas encore venue. Certes, il possédait un certain charme indéniable mais … ce sourire … Pourquoi l’avait-il toujours aux lèvres comme d’autres pouvaient avoir un de ces cigares affreux? Son récit de harcèlement moral le faisait-il rire ? Se moquait-il d’elle intérieurement ? Quel impertinent. Il lui donnait déjà une fine chair de poule, des frissons d’agacement, mais elle se devait ne pas le lui montrer ni de le vexer. Elle avait besoin de lui. Elle ne l’aimerait sans doute pas plus que ça, mais elle devait faire avec lui. Avait-elle le choix ? La Reynie ne mettrait pas constamment à sa disposition, des agents de sa police. Elle avait mis en échec le premier, elle n’allait pas rejeter le second, car il avait au final tous les airs d’un insupportable personnage. La duchesse préférait donc se concentrer sur le positif que dégageait cet élément de la Reynie. Efficacité, bonnes initiatives et professionnalisme !
Enfin du moins le croyait-elle depuis cinq bonnes minutes, mais apercevoir le baron bondir tout à coup sur ses pieds, la fit quelque peu douter. Qui était … ce … fou ? Quelle mouche venait de le piquer ? Avait-il été réellement envoyé par le lieutenant de police ou par le cirque qui se tenait non loin de là ? C’était à se le demander, tant il avait des allures de clown. Stupéfaite, elle fit d’ailleurs un mouvement de recul qui la fit s’adosser davantage sur le canapé, ses sourcils se dressèrent et elle le dévisagea. Il arpentait la pièce à présent, de quoi lui donner le tournis ! Non vraiment, qui était cet énergumène. Pour mettre de l’ambiance dans la maison, il en mettrait, il n’y avait point à en douter. Rien à voir avec son collègue !
« Mon collègue était un idiot, faire le piquet occupe la majeure partie de notre emploi du temps, s’il ne le sait pas, eh bien tant pis pour lui ! »
La jeune femme préféra ne rien répondre et se contenta d’un hochement de tête. Elle ne pouvait qu’agréer, s’il ne s’était pas si bien endormi en faisant le piquet, peut-être n’aurait-il pas été si simple à Cédric de le mettre hors d’état de nuire ! C’était entièrement de sa faute et peu de la leur en fin de compte ! Ils n’avaient eu qu’à profiter de l’aubaine qu’il leur avait si bien offerte !
Elle fut tirée de ses réflexions par un bruit de papier. L’homme avait tiré un morceau de parchemin de son pourpoint et après l’avoir déposé sur la table, s’accroupit à ses côtés. Sur le document était tracé un plan parfait de la maisonnette. Voilà qui la rassurait, le guignol ne l’était pas tout à fait. Un lunatique peut-être mais point un dément ! Elle s’habituerait à ses pitreries, ce n’était qu’une question d’acclimatation ! Il n’était pas si désagréable à le voir si empreint de sa mission … Elle pourrait sous peu lui donner son entière confiance. Il aurait à l’œil toutes les issues et elle n’aurait qu’à se tenir bien à l’écart afin de l’éviter, lui et son sourire ! Cela lui paraissait la meilleure méthode, mais c’était sans compter le baron …
« Récapitulons ! Ce monsieur est quelqu’un de très déterminé qui ne recule devant pas grand-chose –pour ainsi dire rien- pour vous retrouver. » - Tout à fait et " très déterminé " est encore un euphémisme, je dirai davantage "acharné" … « Et bien sûr, il me faudra le nom et un descriptif de ce monsieur qui vous poursuit. Je me doute que c’est pénible de devoir nous le révéler, mais vous pouvez compter sur notre discrétion… Mais si nous devons l’empêcher d’approcher, ce sera plus facile si nous savons à quoi il ressemble, n’est-ce pas ? »
A cette question qu’elle jugea très pertinente, elle réalisa que le prédécesseur du policier ne la lui avait même pas posée. Elle se mura malgré tout dans le silence, il en avait assez pour une bonne migraine et une belle bosse. Elle n’allait pas enfoncer le clou et provoquer son éventuel renvoi.
- Oui bien sûr … je vais tout vous dire sauf son nom … J’ai eu cette liaison en l’ignorant. Il ne s’agissait que d’une nuit comme je vous l’ai dit.
Elle s’éventa à l’aide de son mouchoir, pour cacher le rouge qui lui montait aux joues. Ce satané Morgan la faisait décidément passer pour une gourgandine de premier plan ! ELLE ! Voilà pourquoi elle rougissait de honte, car ce mensonge lui coûtait plus que d’autres. Mais pouvait-elle vraiment présenter son agresseur ? Cousin du roi d’Angleterre lui-même ? Qui la croirait ? Personne ! Rebecca préférait cette explication.
- Croyez bien que je me mords assez les doigts d’avoir été si sotte ! Enfin … l’homme est brun, grand, altier, les cheveux mi longs, les yeux noirs et possède un léger accent britannique. C’est un séducteur, je le sais pour avoir vu au petit matin lorsque je l’ai quitté, une jeune femme rentrer chez lui et agir en totale maîtresse de maison. Voilà tout ce dont je me souviens … Je sais que c’est bien maigre … Quant à mes domestiques, je n’ai que cette jeune fille que vous avez aperçue tout à l’heure. Je pense qu’elle est digne de confiance, je n’ai pas eu à me plaindre jusqu’à présent.
Dieu que ce visage taquin gâchait tout ! Le bonheur des autres est presque insultant lorsque vous n’avez qu’amertume au cœur ! Voilà pourquoi ce sourire agaçait la jeune femme autant. Elle ne connaissait pas tout l’art de paraître heureuse, un tel détachement lui était inconnu. Le baron lui rappelait peut-être un peu trop cette incapacité à sourire pour le seul plaisir de le faire.
« N’ayez plus peur ! Ne pleurez plus ! »
Facile à dire, difficile à faire …
« Et souriez en pensant à la tête que fera votre poursuivant lorsque nous mettrons la main dessus ! »
Impossible à faire ! L’ayant un instant fixer, les yeux écarquillés, comme s’il venait de lui demander de commettre un sacrilège, Rebecca se leva. Ses yeux durent flamboyer un instant, car sa voix trembla sous la dureté.
- Monsieur, je ne doute pas que vous me prônez ce détachement, afin de m’apaiser, je vous en remercie. Néanmoins je pense que vous devriez vous en tenir à la tâche que l’on vous a attribuée. Vous n’avez guère besoin de me consoler, ni de m’amuser … Vous ne parviendrez ni à l’une ni à l’autre de ces deux choses. Je crois deviner que c’est ce que vous désirez depuis que vous êtes apparu devant moi. Hélas, je ne le désire pas de mon côté. Je veux seulement un policier efficace pas une bonne épaule.
Elle lui tendit la main pour prendre congé de lui.
- Je vous souhaite une bonne garde, monsieur. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, le plan que vous avez en poche, vous conduira jusqu’au garde-manger, que je mets bien évidemment à votre disposition, ou la bibliothèque, je vous recommande d'ailleurs les ouvrages de la colonne de gauche. N'hésitez pas à vous servir de tout ce qui vous sera nécessaire pour une veille relativement agréable.
En tout état de choses, malgré sa politesse, la duchesse avait de la difficulté à être avenante, mais elle s’était sentie forcée de mettre des barrières entre eux. Elle l’invita par un geste du bras à prendre la sortie et une fois seule, se dirigea vers sa chambre, désireuse de passer une reposante nuit ! Cependant, ce jour là, il était écrit que ses vœux ne seraient décidemment pas exaucés !
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 31.08.12 20:29
Il ne faisait pas toujours bon aimer rire à la cour du roi Soleil. Pour une raison obscure qui restait bien mystérieuse aux yeux du fou en titre, il existait des personnes qui, par un mécanisme bizarre de la pensée, n’avaient le goût ni de rire ni de sourire, pas même pour faire semblant, pas même pour se remonter le moral, pas même juste pour le plaisir. Un concept qui échappait totalement à la conception du monde de Ferdinand d’Anglerays, dont le travail était justement… De faire rire. En d’autres termes, Pauline de Blaingirey n’aurait pas pu plus mal tomber que face à ce boute-en-train notoire pour qui le bon mot et la bonne humeur étaient devenus une seconde nature, parfois plus par habitude que réelle conviction personnelle. A moins que ce ne soit l’inverse. A la longue il avait un peu perdu le fil. Toujours était-il que si la demoiselle avait le cœur aussi triste qu’une pierre, ce n’était pas le cas de son interlocuteur, lequel comptait bien lui faire partager un peu de sa joie de vivre. En trente-six ans d’existence terrestre, tout n’avait pas toujours été rose ni très rigolo pour lui, mais à quoi servait-il de s’appesantir sur ses malheurs ? Vers l’âge de quinze ans, il avait compris la morale de l’histoire : mieux vaut en rire qu’en pleurer. Un vieil adage qui s’était maintes fois vérifié. Qu’il s’agisse d’une philosophie de vie comme il le pensait lui-même ou une forme de fuite en avant comme le disait parfois ce rabat-joie de Courtenvaux, il ne serait pas là où il était aujourd’hui sans sa légèreté ni son légendaire talent pour retourner les situations à son avantage par un bon mot ou un nouveau positionnement. Que cela ait été lorsqu’il tenait le foyer Anglarez à bout de bras enfant, ou bien quand il avait parcouru la France de long en large et en travers à la mort de son père, ou bien après avoir rejoint le service du roi, il avait toujours dégagé les soucis d’un haussement d’épaules, un sourire en coin. Comme si tout ça ne comptait pas. Comme si en profiter était tout ce qui comptait. Il se souvenait parfois des avertissements de ses amis, qu’il s’agisse de Benoît ou encore Catherine, qui lui affirmaient qu’un jour, sa légèreté lui retomberait sur le nez. Mais s’il s’en souvenait, il avait délibérément choisi de ne pas s’en faire, pas encore, pas pour le moment. Comme le dirait Voltaire des années plus tard, il avait choisi d’être heureux, au moins pour la plupart du temps puisqu’il lui arrivait –rarement certes, mais pas jamais- d’avoir des accès de doute. Mais à a face du monde il balançait sans pudeur sa bonne humeur et faisait son bonhomme de chemin avec son sourire en bandoulière. Parce que rire, c’est bien plus agréable que pleurer. Pas besoin de se moucher après, et on repart le cœur aussi léger qu’avant. Et parce que rire, c’était ce qu’il savait encore faire de mieux. Un savoir précieux qui n’était apparemment pas du goût de sa nouvelle protégée.
- Monsieur, je ne doute pas que vous me prônez ce détachement, afin de m’apaiser, je vous en remercie. Néanmoins je pense que vous devriez vous en tenir à la tâche que l’on vous a attribuée. Vous n’avez guère besoin de me consoler, ni de m’amuser … Vous ne parviendrez ni à l’une ni à l’autre de ces deux choses. Je crois deviner que c’est ce que vous désirez depuis que vous êtes apparu devant moi. Hélas, je ne le désire pas de mon côté. Je veux seulement un policier efficace pas une bonne épaule.
Diable, quelle froideur ! Considérant un instant la main tendue vers lui, hésitant entre son réflexe normal –répliquer- et un peu de diplomatie, il opta pour cette dernière option, jugeant bon de ne pas se mettre la Reynie à dos pour le moment. Le bougre serait capable de lui envoyer un dossier à la figure, au vu de son état de stress actuel. Adoptant de nouveau un air sérieux mais incapable d’effacer totalement cette lueur mi-moqueuse mi-amusée dans son regard, il accepta la main tendue et y déposa un bref baiser avant de se redresser. Ainsi il était mis KO, lui ? Comment, croyait-elle qu’un uppercut suffirait à le mettre à terre ? Il en avait vu d’autres ! Cette peste d’Alençon était encore moins conciliante que ça, et surtout moins polie quand elle s’adressait à lui. Non et non, il ne jetterait pas l’éponge, même s’il fallait battre en retraite pour le moment ! Il avait perdu une bataille mais pas la guerre ! Ferdinand était aussi entêté que tout bon Gascon était censé l’être, et s’il avait décidé de faire sourire ce joli minois, eh bien soit ! Il y arriverait, mordious ! Cela dusse-t-il lui prendre une heure, trois heures, deux mois, quatre ans… Il arriverait à faire rire cette femme, même s’il devait pour ça passer par une fenêtre ou se grimer en femme. Même s’il doutait sérieusement qu’il s’agisse de son genre d’humour.
- Je vous souhaite une bonne garde, monsieur. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, le plan que vous avez en poche, vous conduira jusqu’au garde-manger, que je mets bien évidemment à votre disposition, ou la bibliothèque, je vous recommande d'ailleurs les ouvrages de la colonne de gauche. N'hésitez pas à vous servir de tout ce qui vous sera nécessaire pour une veille relativement agréable. « Je vous remercie de votre sollicitude, madame. » répondit-il simplement en s’inclinant. Si ses changements d’humeur ne lui donnaient pas des migraines à cette jeune femme, il n’était plus ce qu’il était ! Entre le policier professionnel et le clown hyperactif, le pas était si facile à franchir que suivre le rythme n’était pas toujours simple pour les autres…
Il la salua de nouveau et, les mains jointes dans le dos, sortit de la pièce. Il n’était pas encore trop tard, même si le soleil était déjà couché, et même s’il faisait froid on voyait bien la Lune et c’était une nuit sans vent. Pourquoi ne pas aller se promener un peu à l’extérieur ? Aussitôt pensé, aussitôt fait : Ferdinand sortit de la maison et alla longer les murs extérieurs, contemplant les bois aux alentours et levant de temps à autre les yeux vers le ciel un brin nuageux. Auraient-ils bientôt de la neige ? Possible. Et même probable. Avec un peu de chance ils en auraient même pour le Nouvel An. Cette pensée arracha un sourire à cet éternel adolescent qui consulta sa montre. Resterait-il là toute la nuit afin de rassurer la demoiselle et lui prouver son professionnalisme ? Probablement. Il n’avait pas grand-chose à faire d’autre, de toute façon… A part dormir. Activité qui, ce soir, ne l’intéressait pas. Il en profiterait pour réfléchir, et dès le lendemain matin, quand mademoiselle de Blaingirey serait réveillée, il irait lui faire son rapport puis courrait faire de même chez la Reynie afin de lui demander quelques hommes supplémentaires. N’en déplaise à Pauline, ses fonctions lui interdisaient de faire le piquet chez elle toutes les nuits… Pas sûr que Louis accepte qu’il manque à ses devoirs pour les yeux d’une femme, aussi beaux soient-ils. Le froid aidant, il fut incapable évidemment de rester en place et fit une fois, deux fois, trois fois le tour de la maison, dans un sens, puis dans l’autre, puis en passant par l’intérieur. Puis il finit de nouveau dehors, et au moment où il franchissait la porte, il s’aperçut qu’effectivement, il avait vu juste. Il neigeait ! Il ouvrit des yeux étonnés, avant que son visage ne s’éclaire d’un grand sourire. Parfait, il aurait même un beau spectacle de chute de neige, ce soir ! Honnêtement, que demande le peuple ? Bien décidé à en profiter malgré le froid, il s’assit en tailleur sur l’herbe, sous un balcon afin d’être à peu près à l’abri et souffla sur ses mains pour les réchauffer. Il avait beau être un enfant du sud et ne pas supporter le froid très longtemps, il savait faire des concessions pour admirer un joli spectacle…
« Au ton coenh qu'as un riban blanc, blanc com nèu au sorelh lhevant, bèra hialaira, bèra hialaira… »
Les paroles lui étaient venues à l’esprit sans qu’il ne s’en aperçoive tout de suite. C’est en entendant le timbre de sa propre voix qu’il se rendit compte qu’il avait commencé à fredonner à voix haute cette comptine qu’il avait dû entendre déjà dans son enfance… Son père n’avait pas dû la lui chanter –son père ne chantait pas- mais peut-être Catherine ? Elle avait toujours chantonné, tout le temps, en permanence, même en parlant, même en dormant. Pour une fois, il décida donc de faire comme elle, encouragé par le silence du dehors qui lui faisait oublier qu’un étage plus haut, quelqu’un essayait de dormir.
« Qui hialas deu matin au ser, ditz-me perqué, vira, husèth, vira, vira… Deu matin au ser vira, vira, que cau ua pelha entà abilhar, la mainada qui vam batiar…. » entonna-t-il joyeusement, pas trop fort mais suffisamment pour être entendu, vu le silence de la nuit et de la neige. Il savait chanter, là n’était pas le problème, mais quand quelqu’un essaye de dormir, même les jolies chansons n’étaient probablement pas de bon goût… Ainsi que le lui indiqua une voix mécontente au-dessus de sa tête qui le coupa net dans sa cantate. Surpris, il leva les yeux mais n’aperçut sur le plancher du balcon. Bondissant sur ses pieds, il sortit de son abri, se retrouva sous la neige tombante, et surtout aperçut la silhouette de Pauline de Blaingirey enveloppée dans un châle et l’air bien mécontente ! Oups, la gaffe… Mais bon, autant en rire ! Aussi afficha-t-il un grand sourire en lui lançant :
« Ah, mademoiselle de Blaingirey ! Pardonnez-moi si je vous ai empêchée de dormir, je n’avais pas réalisé que vous dormiez juste là-haut… Si j’avais su je serais allé m’époumoner de l’autre côté ! Enfin, soyons positifs –même si je sais que cette habitude risque de vite vous agacer- et voyons le bon côté des choses : sans mon hymne, vous ne seriez pas sortie admirer cette splendide nuit enneigée ! Non mais regardez-moi ça, si ce n’est pas magnifique ! »
Pour appuyer ses dires, il étendit le bras et engloba tout le paysage d’un geste. Puis il se tourna de nouveau vers elle et eut une idée lumineuse. Enfin, selon lui.
« Tiens, et si je vous chantais quelque chose ? Une sérénade au clair de Lune et au clair de neige, par Ferdinand Anglarez, pour la belle demoiselle de Blaingirey du haut de son balcon, qui tente de l’écraser de son mépris mais finit par succomber à son charme gascon aussi irrésistible que son accent… Un charmant tableau, vous ne trouvez pas ? »
La plaisanterie s’entendait à des kilomètres dans sa voix, mais bizarrement elle ne semblait pas du goût de la jeune femme… Surtout quand il recommença à chanter à tue-tête, en accompagnant le tout de ce qui, de loin, pouvait ressembler à de la danse… Le bouffon dans toute sa splendeur ! Hélas, Pauline de Blaingirey ne lui connaissait pas cette fonction-là, et il n’allait pas tarder à en faire les frais…
Rebecca Stuart
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 07.09.12 23:24
Oublier ! A tout prix oublier cette journée, sa première tentative de sommeil ayant échoué, elle espérait que la seconde réussirait. Elle était parvenue déjà à se débarrasser du gêneur, c’était le principal. Une fois qu’il fut sorti, elle referma la porte d’entrée en la poussant d’un coup sec. Une fois qu’elle se serait glissée dans ses draps, ça ne serait qu’une question de minutes pour plonger dans le sommeil. Mais elle désirait avant tout se détendre sinon elle n’y parviendrait jamais, une infusion et un bain l’y aideraient. Elle alla elle-même récolter l’eau du puis se trouvant dans la cour et mit les seaux à chauffer près du feu. Vingt minutes plus tard, elle plongeait dans le liquide bouillant qui fit relâcher instantanément ses nerfs. Rebecca soupira ! Quelle semaine difficile ! Tenir la Reynie dans le creux de sa main et lui faire ses rapports en tant qu’Aurélia, Gisèle, et enfin dans la peau de Pauline n’étaient pas de tout repos. Quatre existences à mener de front, ce n’était pas rien ! Pourtant c’était le prix à payer pour être dans les petits papiers du lieutenant de police, elle ne regretterait rien mais il ne fallait pas manquer de dynamisme, lorsqu’on était une sorte d’agent. Rajoutons à cela, l’abandon de sa fille et la visite de cet énergumène et vous obtiendrez une duchesse à cran. Elle aspirait le calme ! Pauvre malheureuse, si elle avait su ce qui se préparait au dehors, elle aurait pris une chambre dans une quelconque auberge !
Lorsqu’elle ressortit de son semblant de baignoire, la duchesse of Richmond s’enveloppa d’un déshabillé en dentelle, cadeau de Morgan pour leur nuit de noces, quelle ironie n’est-ce pas ? Puis désirant chasser ce mauvais souvenir, elle le jeta à terre, se promettant de le mettre au feu bientôt ou de le donner aux pauvres. C’est par conséquent nue comme Eve au jardin d’Eden, qu’elle grimpa les escaliers jusqu’à sa chambre, elle était seule chez elle après tout. Là elle se vêtit d’une chemise de nuit de lin et s’élança dans le lit moëlleux. La tête bien enfoncée dans son oreiller, les couvertures montées jusqu’au cou, elle ferma enfin les yeux. Pour pas plus de dix minutes malheureusement car soudain …
« Qui hialas deu matin au ser, ditz-me perqué, vira, husèth, vira, vira… Deu matin au ser vira, vira, que cau ua pelha entà abilhar, la mainada qui vam batiar…. »
Rebecca entrouvrit un œil. Elle rejeta son corps sur le côté et plaqua le traversin sur ses oreilles pour ne plus entendre ce chanteur nocturne. Elle espérait de tout cœur qu’il ne s’agissait que d’un passant. Ça aurait été trop beau bien évidemment ! Non le baladin de pacotille était sous ses fenêtres. Qui était-ce ? Et qu’était-ce surtout cette langue étrange ? Elle n’avait séduit aucun homme dont elle ne puisse rien comprendre. S’agissait-il de son esprit encore embrumé et donc traître ? Pour s’en assurer, la duchesse redressa légèrement la tête. Non, définitivement non, ce langage lui était totalement inconnu. Elle s’accouda sur le matelas, les sourcils froncés et poussa un petit cri d’agacement avant de se lever. Le pays paisible des rêves venait de la quitter pour le restant de la nuit. Comble de tout, son pied heurta une malle. Il est vrai qu’elle n’avait pas encore fini de déménager tous ses effets, cette dernière était encore pleine de tout son service en porcelaine. C’est donc sautillante comme jamais et grimaçant sous la douleur, que Rebecca atteignit la fenêtre du balcon. Le plaisantin allait en prendre pour son grade à n’en pas douter ! Elle allait lui faire passer l’envie de chanter.
- Qui est là ? Qui ose brailler de la sorte ?
Parfois, mademoiselle of Rosyth retrouvait ses manières de miséreuse comtesse écossaise. N’avait-elle pas été davantage au contact des gueux de sa province que de la noblesse ? Puis, à cette heure et au vu des circonstances, elle n’avait vraiment pas goût aux civilités !
« Ah, mademoiselle de Blaingirey ! Pardonnez-moi si je vous ai empêchée de dormir, je n’avais pas réalisé que vous dormiez juste là-haut…»
INCROYABLE ! C’était ni plus ni moins le fou chargé de sa protection ! Ma foi, il effectuait bien son travail, celui-là ! Quelle efficacité dans le devoir ! Rebecca fut tellement stupéfaite, qu’elle en resta pantoise un instant. Que faire ? Elle désirait l’étrangler, l’étriper, le hacher menu ! Dire qu’il continuait son discours, ne comprenait-il pas qu’elle ne voulait qu’une seule chose : qu’il se taise enfin ! Pour simple consolation, elle serra la rambarde du balcon de toutes ses forces et imagina tenir son cou entre ses mains.
« Enfin, soyons positifs –même si je sais que cette habitude risque de vite vous agacer- et voyons le bon côté des choses : sans mon hymne, vous ne seriez pas sortie admirer cette splendide nuit enneigée ! Non mais regardez-moi ça, si ce n’est pas magnifique ! »
Penser positivement ? Rebecca ne connaissait pas ce terme-là. Il ne faisait guère parti de son vocabulaire. En outre, elle enrageait intérieurement de l’attitude de ce … guignol… ce dément … ce maroufle …
- Je suis glacée jusqu’aux os à cause du temps, je me moque bien de la beauté du paysage je me contentais de celle de mon lit avant que vous n’ouvriez votre bouche !
Mais l’autre continuait à déverser un flot de paroles. Elle qui était si habile couturière aurait tout donné à cet instant, pour prendre un fil et une aiguille pour les planter dans ses lèvres et faire un magnifique point de croix …
« Tiens, et si je vous chantais quelque chose ? Une sérénade au clair de Lune et au clair de neige, par Ferdinand Anglarez, pour la belle demoiselle de Blaingirey du haut de son balcon, qui tente de l’écraser de son mépris mais finit par succomber à son charme gascon aussi irrésistible que son accent… Un charmant tableau, vous ne trouvez pas ? »
Ça en était trop ! Hors d’elle, elle poussa un gémissement excédé et tandis que le baron débutait un nouveau chant, elle ôta le cadenas de la malle. Une fois ouverte, elle prit une pile d’assiettes, entre ses mains et revint au balcon. D’un revers de la main, elle en fit voleter une à ses côtés.
- CA SUFFIT ! SILENCE ! Vous allez ameuter le voisinage bougre d’imbécile ! Quel est votre problème ? Doit-on vous enfermer, vous attacher ou vous assommer pour vous calmer ? Je me propose d’y parvenir si c’est le cas !
Et une deuxième assiette et une troisième assiette sacrifiée ! Le bougre les évitait avec dextérité ! Mais la quatrième fit mouche ! Rebecca exulta et sa victoire fut retentissante. Tout le quartier dut l’entendre.
- En avez-vous assez ou dois-je continuer ? Il me reste encore des verres et quelques plats. Je puis ensuite passer aux couverts. Vous avez du coffre mais j’ai des munitions dans le mien.
Dire qu’elle faisait de l’humour par sa faute … Commençait-il à être contagieux ? Peut-être ! Mais il en faudrait beaucoup plus pour la dérider, c’était très loin d’être gagné !
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 04.10.12 20:15
Bon d’accord, chanter sous les fenêtres d’une jeune femme fatiguée et un tantinet sur les nerfs n’était peut-être pas l’idée la plus brillante qu’il ait eue de sa carrière, pourtant longue et semée de succès –selon lui bien entendu. Il fallait reconnaître à sa décharge qu’il ne s’était pas rendu compte de sous quelles fenêtres il s’était installé, et qu’il avait réellement une voix agréable. Deux arguments qui auraient suffi à certaines personnes mais qui, pour Pauline de Blaingirey, n’étaient probablement que des cailloux inutilement jetés dans un lac. Décidément, les meilleures idées étaient toujours incomprises. C’était pourtant vrai que la nuit était belle, toute de blanc vêtue… Mais la jeune femme avait l’air parfaitement insensible à ce charme hivernal, et les émotions qui semblaient l’agiter avaient l’air de relever plus des envies de meurtres que d’autre chose. Morbleu. Les demoiselles n’étaient plus ce qu’elles étaient. Dire qu’à l’époque elles se pâmaient toutes pour une sérénade sous leurs fenêtres, et pour une fois qu’il en faisait une –involontaire certes mais tout de même- il ne récoltait en récompense qu’une avalanche de reproches. Quel monde ! Aurait-il dû lui dire qu’il était le bouffon du roi, comme si cela pouvait expliquer et excuser sa conduite par la même occasion ? Peut-être. Peut-être pas. Plutôt pas d’ailleurs : s’il était possible d’éviter que tout le monde sache que le fou travaillait occasionnellement pour la Reynie, il ne s’en porterait que mieux, surtout avec la guerre qui arrivait. Une guerre où tous les coups bas seraient d’autant plus permis que les espions pourraient moins les voir venir. Une guerre à laquelle il préférait ne pas penser pour le moment. C’est pourquoi il continua de chanter, de danser, bref, de s’amuser comme le petit fou qu’il avait toujours été sans réellement se soucier de ce qu’il se passait au-dessus de sa tête. Grave erreur.
L’assiette avait-elle coupé un ou deux cheveux en rasant sa tête à quelques centimètres près ? La question méritait réflexion, mais le baron n’eut guère le temps de s’y arrêter en réalisant qu’il avait bien failli se prendre une assiette en pleine figure. Le temps de faire le lien entre le plat qui gisait maintenant dans la neige, sa tête qui ne s’était pas trouvé bien loin de l’angle de trajectoire, et l’origine de la ligne directionnelle suivie par l’objet, et il faisait volte-face en affichant une tête proprement stupéfaite. C’était lui, ou bien sa « protégée » venait d’essayer de l’assommer avec de la vaisselle ? CA c’était bien une première dans sa carrière. Certes, le proverbe disait qu’il fallait une première fois à tout mais… Tout de même. Il s’apprêtait à faire remarquer qu’il était encore moins correct de jeter des assiettes aux gens que de chanter sous des fenêtres lorsqu’un détail attira son attention. Non seulement une assiette venait de finir sa course dans la neige, mais elle en avait une pile supplémentaire sur les bras ! Commençant lentement à comprendre qu’il en était plus que probablement le destinataire, il fit un pas en arrière…
- CA SUFFIT ! SILENCE ! Vous allez ameuter le voisinage bougre d’imbécile ! Quel est votre problème ? Doit-on vous enfermer, vous attacher ou vous assommer pour vous calmer ? Je me propose d’y parvenir si c’est le cas !
Ferdinand, malgré toute la bonne volonté du monde, n’aurait même pas eu le temps de répondre s’il l’avait voulu : à peine avait-il ouvert la bouche qu’une assiette siffla à ses oreilles et il se baissa vivement pour l’éviter. Il se releva d’un bond en entendant le « crash » caractéristique derrière lui et s’exclama :
« Mademoiselle, je comprends PARFAITEMENT que mon attitude ait pu vous énerver mais je ne suis pas sûr que la violence soit… »
Il fut obligé de s’interrompre pour faire un bond de côté et éviter le troisième projectile. Ma parole, mais cette femme était une enragée ! Une expression carrément choquée peinte sur le visage, il commençait sérieusement à se demander les vraies raisons qui l’avaient conduites à venir ici. Si ça se trouvait, cette Pauline était une folle dangereuse et hystérique impossible à envoyer en hôpital. Ou alors c’était quelqu’un de la famille de la Reynie, que par conséquent il désirait protéger du scandale. Tiens, cette hypothèse, aussi farfelue soit-elle, avait au moins le mérite d’être plausible. Ou alors encore pire : cette femme était une ancienne amante de la Reynie qui la cachait pour ne pas révéler au grand jour qu’il avait eu une relation avec une cinglée. Ou encore pire : c’était la femme de la Reynie qu’il avait cachée dans ce manoir sous un faux nom pour éviter le scandale et les ragots du public ! Tout un tas d’hypothèses plus improbables les unes que les autres germaient dans son esprit –sauf celle, plus véridique sûrement, qu’il était effectivement insupportable quand il s’y mettait- si bien que son attention fut distraite un quart de seconde. Un quart de seconde de trop, probablement. Un quart de seconde pendant lequel il ne vit pas le bras armé se lever, ni l’assiette partir pour venir se briser, comme par miracle, sur son pied. SCHBLING !
« Aoutch ! » s’exclama-t-il en faisant un bond de surprise plus que de douleur et en grimaçant. - En avez-vous assez ou dois-je continuer ? Il me reste encore des verres et quelques plats. Je puis ensuite passer aux couverts. Vous avez du coffre mais j’ai des munitions dans le mien. « Pardious, c’est que vous en deviendriez presque drôle, dites-moi ! Devrait-on s’attendre à un miracle d’ici à ce que vous ayez épuisé tout votre mobilier sur ma pauvre personne ? » répliqua-t-il en s’assurant qu’une débris de porcelaine ne s’était planté dans sa cheville au passage.
Il songea un instant à la possibilité de répliquer avec des boules de neige, puisque le froid avait l’air de l’importuner, puis il jugea cette solution bien peu professionnelle et diplomatique. Il n’était pas sûr que la Reynie continue à lui fournir renseignements et de temps en temps missions amusantes s’il faisait tout capoter par pur esprit de contradiction et de réplique. Il se retint donc et, à la place, leva les mains en signe d’apaisement. Son immuable sourire toujours collé au visage.
« Allons mademoiselle, je vous propose de cesser les hostilités et d’enterrer la hache de guerre. Inutile de sacrifier toute votre vaisselle, je me rends ! Et promis, je ne chanterai plus sous vos fenêtres –de toute façon il ne s’agissait là que d’une méprise de ma part, j’ignorais que j’étais dessous. Mes excuses donc pour ce comportement, je le conçois, relativement agaçant. »
Voir Ferdinand s’excuser d’avoir ennuyé quelqu’un était un évènement suffisamment rare pour être remarqué. Un évènement qui ne pouvait avoir lieu probablement que parce que la demoiselle en question ignorait son rôle à la cour. S’il avait dû tenir son rôle, nul doute qu’il ne serait pas excusé et en aurait même rajouté une couche tout en évitant les assiettes, verres et tout le fatras qui aurait suivi. Au lieu de quoi, il faisait la paix. Un véritable évènement pour qui le connaissait, mais dont Pauline ne pouvait hélas pas saisir la préciosité ni la rareté. Tant pis pour elle. Une fois qu’il fut certain que plus d’assiettes ne voleraient, il baissa les bras et enfonça les mains dans ses poches, en proie lui aussi au froid maintenant qu’il ne se dépensait plus en dansant comme un beau diable ou en donnant du coffre.
« J’espère que vous me pardonnerez ma conduite, car après tout elle partait d’une bonne intention. C’est plus fort que moi, lorsque je vois un joli minois comme le vôtre triste ou renfrogné, je ne peux pas m’empêcher de vouloir lui redonner le sourire ! C’est une seconde nature chez les heureux caractères que de vouloir se faire contagieux, ça nous donne une raison de plus de continuer à sourire… » poursuivit-il sur le ton badin de la plaisanterie après que ses propos, au fond, étaient tout ce qu’il y avait de plus sérieux. Ce n’était certainement pas un hasard que cet adepte de la légèreté se soit fait un devoir et même une vocation de faire rire son souverain et, occasionnellement, le reste de son entourage lorsqu’il n’était pas sa victime de choix. Puis le sourire goguenard de Ferdinand disparut doucement de son visage pour laisser place à ce qu’il semblait être plus de la curiosité, et peut-être même un peu de compassion.
« Si seulement vous acceptiez de me laisser faire, je suis certain de parvenir à vous faire sourire, voire même rire tôt ou tard ! J’ignore ce qui amène sur votre visage ce voile de tristesse, mais j’ai appris une chose importante avec les années : malgré ce qui peut sembler, rien ne dure toute la vie. Pas même vos pires soucis ou vos plus grands chagrins ! » conclut-il en haussant les épaules avec bonhomie et en retrouvant un sourire cette fois enjoué et chaleureux. Encore une fois, la palette d’émotions qu’il était capable de montrer ferait peut-être mouche… Mais peut-être pas tout à fait comme il s’y attendait. Car les paroles, c’est bien joli mais… Les actes, voilà qui compte encore plus.
Rebecca Stuart
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Quelle question ? Au plus offrant bien sûr ! Côté Lit: On n'y fait pas comme chez soi et certainement pas son mari ! Discours royal:
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► Âge : 24 ans
► Titre : Comtesse of Rosyth, Duchesse of Richmond
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 22.10.12 23:05
Ainsi donc il comprenait parfaitement qu’elle réagisse de la sorte ? Mais encore heureux, n’est-ce pas ? Hélas pour le baron d’Anglerays, il réalisait bien trop tard que l’on ne réveille pas toute une maisonnée et, à en juger par les bougies qui éclairaient à cette heure le voisinage, peut-être même un quartier. Pour un homme de la Reynie, sa technique n’était pas vraiment probante, la protection autour de sa personne devait être discrète et par conséquent ameuter des inconnus qui ne tarderaient pas à se poser des questions, ne faisait pas de cet homme une lumière à ses yeux. L’ancien policier était un fainéant mais lui avait paru davantage capable. Elle espérait de tout cœur qu’il s’agissait d’une impression et qu’il la détromperait bien vite. Encore très énervée à son égard, la duchesse de Richmond tenait son assiette comme on peut aujourd’hui avoir empoigné un frisbee. Dans cette position très particulière et menaçante, Rebecca avait tout l’aspect d’un joueur olympique s’apprêtant à battre son score de lancer de poids. Pour peu, elle aurait pu prendre quelque peu d’élan. D’ailleurs elle se réjouissait intérieurement de l’avoir touché, malgré le fait qu’au moment de l’impact, elle n’avait pu contenir un petit cri de frayeur. Son but était de faire taire cet homme mais non pas pour toujours bien évidemment. Un instant, lorsque le fracas retentissant de l’assiette qui avait fait mouche, s’était produit elle avait craint de blesser l’énergumène. Ayant penché légèrement l’avant de son corps au-delà du balcon elle avait pu être rassurée, le têtu, le bouffon, le chanteur improvisé se portait apparemment à merveille.
Bien entendu, il tentait de l’apaiser, mais le baladin de sérénade se retrouvait quelques mètres plus bas d'un véritable taureau dans l’arène. Rebecca voyait toujours rouge. Cet état d’énervement ne lui ressemblait vraiment pas. L’épouse de Morgan était toujours posée, toujours calculatrice, toujours manipulatrice, jamais ses pulsions ne prenaient le dessus sur sa raison. Or, si Ferdinand ne parvenait pas à la faire sourire le moins du monde, il était parvenu à l’agacer terriblement. Ses allures de gamin lui étaient insupportables, il paraissait prendre l’existence non pas comme un chemin de croix mais comme un jeu où l’on sautille de case en case. Une telle désinvolture n’était pas tolérable. C’est alors qu’en le voyant tout à coup comme tel, un enfant dans un corps d’homme, qu’elle se pencha sur les raisons de cette sorte de rage qu’elle éprouvait. Rebecca n’avait pas eu le temps de profiter de sa prime jeunesse, tout au contraire … Et Ferdinand lui mettait sous les yeux, comme un gant en pleine face, ce qu’elle n’avait jamais vécu : la légèreté et l’optimisme. Loin d’elle, l’idée de philosopher sur sa propre psychologie, mais à cet instant à le voir avec ses yeux de biche quasi suppliants quoiqu’il arrive, cela lui parut évident. Ce sourire permanent sur ses lèvres était presque une provocation pour ceux qui ne parvenaient à en avoir un seul. Même le jour de son mariage, si elle avait ri car triomphante, Rebecca n’avait jamais connu le bonheur naturel, seulement la satisfaction. Et elle ne comprenait pas qu’on puisse garder un sourire autant de temps à moins d’un maquillage comme en ont les clowns, mais celui-ci, celui qui lui faisait face était naturel.
« Pardious, c’est que vous en deviendriez presque drôle, dites-moi ! Devrait-on s’attendre à un miracle d’ici à ce que vous ayez épuisé tout votre mobilier sur ma pauvre personne ? » - Le jour où je deviendrais comique, vous aurez perdu votre langue monsieur. Autrement dit nous serons déjà six pieds sous terre, avant que cela n’arrive.
Mais c’est que ses propres répliques même déguisées en sarcasmes se métamorphosaient en petites piques sympathiques au contact du baron ! A vrai dire, à cette minute Rebecca avait vu sa colère redescendre en flèches, même si son visage restait de marbre, il avait réussi à l’amuser. Depuis qu’elle vivait en France, tous les jours se succédaient aux autres et une routine déprimante paraissait s’être installée dans son existence. Elle cousait en tant qu’Aurélia Dantès, elle écrivait des lettres pour la belle fille du Grand Condé et elle faisait ses œuvres de charité dans la peau de la Rosière de Paris. Une journée divisée en trois où Rebecca semblait être l’ombre d’elle-même avec autant de personnalités à interpréter pour le compte de la police. Malgré le fait que le drôle crut depuis le premier instant s’adresser à Pauline de Blaingirey, c’était bel et bien Rebecca of Rosyth qu’il avait su dérider au plus profond.
« Allons mademoiselle, je vous propose de cesser les hostilités et d’enterrer la hache de guerre. Inutile de sacrifier toute votre vaisselle, je me rends ! Et promis, je ne chanterai plus sous vos fenêtres –de toute façon il ne s’agissait là que d’une méprise de ma part, j’ignorais que j’étais dessous. Mes excuses donc pour ce comportement, je le conçois, relativement agaçant. »
Après cette "reddition", aussitôt La duchesse baissa ses armes faites de porcelaine et rangea la pile d’assiettes dans le coffre encore grand ouvert.
- Quant à moi, je vous supplie de me pardonner si je vous ai blessé à la cheville … Je vous prie de croire que je ne suis pas folle, j’ai passé une journée très difficile. Vous avez été agaçant mais je n’avais pas à vous agresser de la sorte.
« J’espère que vous me pardonnerez ma conduite, car après tout elle partait d’une bonne intention. C’est plus fort que moi, lorsque je vois un joli minois comme le vôtre triste ou renfrogné, je ne peux pas m’empêcher de vouloir lui redonner le sourire ! »
L’intention était honorable et assez adorable de la part d’un inconnu en effet. Elle ne pouvait lui en tenir rigueur, bien au contraire. Mais le malheureux aurait eu plus de succès à partir à la quête du Grâal sans doute, parvenir à effacer cette mélancolie de ses traits serait un miracle.
« Si seulement vous acceptiez de me laisser faire, je suis certain de parvenir à vous faire sourire, voire même rire tôt ou tard ! J’ignore ce qui amène sur votre visage ce voile de tristesse, mais j’ai appris une chose importante avec les années : malgré ce qui peut sembler, rien ne dure toute la vie. Pas même vos pires soucis ou vos plus grands chagrins ! »
Pourquoi pas ? Rebecca était bonne joueuse et le défi car il en s’agissait d’un, la tentait. L’énergumène n’était pas ce genre d’hommes passe partout, il l’avait déjà marquée au bout de quelques heures. Si elle lui laissait prendre une certaine importance dans son existence, non seulement l’ennui s’éloignerait mais peut-être également connaîtrait-elle l’amusement. Le primaire, le brut, celui que l’on ressent en courant dans l’herbe lorsqu’on est encore haut comme trois pommes, mais que le destin lui avait refusé. Elle réfléchit encore quelques secondes, puis l’invita à pénétrer à nouveau dans la maison.
- Rentrez monsieur puisque vous avez les clefs. Je suis certaine que vous avez fait bon nombre de bonhommes de neige à cours de votre vie mais je m’en voudrais terriblement si celui que je retrouvais demain dans mon jardin, ce soit vous.
Attrapant au vol son déshabillé pour être plus convenable, elle descendit de sa chambre pour le retrouver dans le salon. Rebecca servit de ce breuvage chocolaté tant prisé à la cour avant de s’asseoir un quart d’heure plus tard sur son fauteuil. Ferdinand lui faisait face. Elle allait pouvoir lui exposer les règles du jeu, puisqu’ils étaient censés s’amuser.
- Baron, nous allons passer beaucoup de temps l’un avec l’autre, je pense que nous devons donc bien nous entendre. Oublions par conséquent l’épisode fâcheux de cette nuit. Votre intention pour moi est fort louable, j’irai même jusqu’à dire qu’elle me touche, mais sachez que cette mine renfrognée est due à un passé très lourd. En votre compagnie, puisque vous semblez un expert en la matière, je veux bien essayer de paraître moins rigide. Vous voulez me distraire, soit, mais attention je déteste les langues trop pendues qui en disent plus qu’ils n’en font. Je veux faire ce que font les enfants de tous pays même si ça vous parait farfelu. Il faudra me supporter capricieuse. Nous devrons tuer le temps, donc trêve de paroles, ce que je vous demande seront des actes. Mettez votre imagination débordante en œuvre et proposez-moi des attractions surprenantes. Je ne demande pas mieux que de m’amuser.
Les choses étant dites, elle se releva constatant à son imposante horloge, que l’heure tournait de plus en plus et qu’elle n’avait pas encore fermé l’œil une seule minute.
- Si vous êtes d’accord avec ce principe, je vous donne rendez-vous dès demain. A présent je vais me coucher, inutile de retourner à l’extérieur, profitez du bon feu de la cheminée. Si je vous sais dans le salon avec la porte d’entrée, celle du salon et celle de ma chambre closes, je sais que je ne crains rien. Comme je vous le disais, le garde-manger et la bibliothèque sont à votre disposition. Bonne nuit.
Allait-il accepter ce grand bavard ? Dieu seul le savait mais lui en revanche ne l’était pas, bavard.
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca } 18.11.12 1:34
Ouf, il était toujours en vie au final. C’était plutôt mal parti vu la colère de la jeune femme quelques instants plus tôt, mais il fallait croire que le Dieu des bouffons veillait quand même un peu sur lui quelque part là-haut. Il ne savait pas encore que c’était pour mieux le duper et le plonger dans des ennuis bien plus tordus par la suite, auxquels le nom de Pauline de Blaingirey –ou Rebecca of Richmond comme il l’ignorait encore- serait étroitement lié. Voire même indissociable. Mais pour l’instant l’heure semblait plutôt être au drapeau blanc, aux pourparlers, et à l’enterrement de la hache de guerre. Tant mieux, Ferdinand n’avait jamais aimé se disputer longtemps avec une jolie femme –Elisabeth d’Alençon faisant là figure d’exception. Quoi, il n’était pas gascon pour rien ! Inutile de le regarder comme ça ! En tout cas, il était bien agréable de constater que la demoiselle enragée semblait avoir renoncé à lui balancer tout son mobilier à la figure, si la vaisselle pouvait facilement être évitée, il préférait ne pas en venir à éviter des chaises ou des tables, restons raisonnables. Et puis cette courte mais providentielle trêve lui permettait d’engager les négociations nécessaires à sa survie et à l’apaiser. Peut-être était-il encore temps de rattraper les dégâts et se faire pardonner, qui sait ?
- Quant à moi, je vous supplie de me pardonner si je vous ai blessé à la cheville … Je vous prie de croire que je ne suis pas folle, j’ai passé une journée très difficile. Vous avez été agaçant mais je n’avais pas à vous agresser de la sorte.
Un nouveau sourire vint illuminer le visage du fou qui oublia un instant qu’il était en train de geler sur place. Il allait peut-être un peu vite en besogne mais il prenait ces excuses pour une paix signée et définitive qui signifiait qu’il pouvait repartir du bon pied avec mademoiselle de Blaingirey. Et c’était tout ce qu’il demandait ! Après tout, la demoiselle n’avait pas l’air méchante, et il était convaincu –ou plutôt il avait décidé- qu’ils pouvaient très bien joindre l’utile à l’agréable et devenir bons amis. Qu’est-ce qui les en empêchait après tout, sinon un faux départ ? Tout avait bien commencé tout à l’heure, avant qu’il se mette en tête de chanter sous ses fenêtres. Il était encore temps de recommencer. Il réitéra donc ses excuses, peu désireux de se brouiller avec une femme dont il était censé assurer la protection et qui avait assez de caractère pour lui jeter des assiettes à la figure. En un sens, c’était plutôt bon signe : il ne s’ennuierait pas avec elle, s’il parvenait un tant soit peu à la dérider ! Et comme disait le proverbe, à cœur vaillant rien d’impossible… Surtout quand on s’appelait Ferdinand d’Anglerays et que l’on était dans une de ces périodes où l’on ne doute de rien, et encore moins de soi-même. Une fois de temps en temps, il en avait bien le droit, non ?
- Rentrez monsieur puisque vous avez les clefs. Je suis certaine que vous avez fait bon nombre de bonhommes de neige à cours de votre vie mais je m’en voudrais terriblement si celui que je retrouvais demain dans mon jardin, ce soit vous.
Il se souvint alors qu’effectivement, il neigeait à gros flocons, et qu’il faisait froid, et qu’en plus il était frileux. Contrairement à ce que pensait Pauline de Blaingirey, il n’avait pas fait beaucoup de bonhommes de neige dans sa vie : en Gascogne, la neige ne tombait jamais assez pour cela… Avec un demi-sourire aux lèvres, il se garda néanmoins de la détromper et, obtempérant, fila vers la porte d’entrée. Il la referma à clé derrière lui, ébouriffa ses cheveux pleins de neige, et regagna le salon où il frissonna à cause de la différence de température entre le jardin polaire et le feu de cheminée qui brûlait en les attendant. Il se laissa tomber sur le canapé en se débarrassant de son manteau humide et tendit les mains vers le feu pour les réchauffer. Ca par contre, c’était bien un souvenir d’enfance. Combien de fois en hiver, après avoir affronté la pluie ou quelques flocons de neige qui fondaient tellement vite, étaient-ils rentrés en courant se réchauffer près du feu, avec la petite Delphine ? Brièvement, un coin de son sourire s’affaissa. Dire qu’il serait à la guerre le jour de l’anniversaire… Mais peut-être pourrait-il se débrouiller pour obtenir une permission ce jour-là. Il aviserait. Il tressaillit lorsque Pauline, ayant congédié sa domestique, lui tendit elle-même un bol de chocolat chaud, ignorant alors qu’elle venait d’accomplir exactement le même geste que la mère de Delphine lorsque les deux gosses rentraient de leurs aventures dans le froid. L’espace d’un instant il fut déstabilisé mais en levant les yeux et reconnaissant le joli visage de sa nouvelle protégée, il retrouva aussitôt contenance et la remercia en retrouvant sa bonne humeur. Elle alla s’asseoir sur le fauteuil en face de lui, et à voir l’expression de son visage, elle avait l’intention de lui parler de quelque chose d’important. Il fut donc toute ouïe lorsqu’elle ouvrit la bouche.
- Baron, nous allons passer beaucoup de temps l’un avec l’autre, je pense que nous devons donc bien nous entendre. Oublions par conséquent l’épisode fâcheux de cette nuit. Votre intention pour moi est fort louable, j’irai même jusqu’à dire qu’elle me touche, mais sachez que cette mine renfrognée est due à un passé très lourd.
Face à quelqu’un d’autre, peut-être, Ferdinand aurait-il ri. Il y avait trop de gens à la cour qui se targuaient d’un passé « lourd » sans rien connaître des malheurs de la vie. Mais ce soir il n’était pas le fou et n’avait donc pas besoin de se moquer ; et surtout il y avait quelque chose chez elle, peut-être la commissure amère au coin des lèvres, le pli soucieux entre les sourcils, ou un éclat dur dans le regard, qui lui soufflait qu’elle ne mentait pas ni n’exagérait. Elle avait souffert. Et il n’avait pas envie de s’en moquer.
En votre compagnie, puisque vous semblez un expert en la matière, je veux bien essayer de paraître moins rigide. Vous voulez me distraire, soit, mais attention je déteste les langues trop pendues qui en disent plus qu’ils n’en font. Je veux faire ce que font les enfants de tous pays même si ça vous parait farfelu. Il faudra me supporter capricieuse. Nous devrons tuer le temps, donc trêve de paroles, ce que je vous demande seront des actes. Mettez votre imagination débordante en œuvre et proposez-moi des attractions surprenantes. Je ne demande pas mieux que de m’amuser.
A mesure qu’elle parlait, les sourcils de Ferdinand se levaient de surprise, d’abord le droit, puis le gauche –une manie qui avait souvent fait rire Delphine puis Catherine, d’ailleurs. Il s’attendait à tout sauf à ça ! Alors qu’il était justement en dehors de son rôle de bouffon, voilà qu’on lui demandait de nouveau d’amuser la galerie ! Décidément, il fallait croire qu’il y était prédestiné, le pauvre garçon ! Mais il y avait quelque chose dans ce défi qui l’interpellait. Pour faire rire Pauline, il ne fallait pas qu’il se moque des autres : il fallait qu’il la fasse retomber en enfance. Pas des paroles, avait-elle dit, des actes. Voilà un défi nouveau pour le fou de la cour ! Et un défi qui le séduisit dans la seconde : à part quand il était avec Blandine ou Luigi, il n’avait guère l’occasion de s’amuser comme il le voulait ! Et voilà qu’on lui demander de débrider son imagination ? Mon Dieu, mais il ne demandait pas mieux, lui non plus !
« Ma chère comtesse, je préfère vous mettre en garde immédiatement : vous ne savez pas encore dans quoi vous vous engagez ! » répondit-il avec pourtant dans l’œil une lueur qui indiquait qu’il avait déjà accepté le défi. « Vous dites vouloir faire ce que font les enfants de tout pays : vous avez devant vous le plus grand enfant qui ait jamais vécu sur cette terre, et je manque cruellement de partenaire de jeux à la cour ! Rien n’est assez farfelu pour moi, je me demande plutôt si vous réussirez à tenir le rythme ! » - Si vous êtes d’accord avec ce principe, je vous donne rendez-vous dès demain. « Vos désirs sont des ordres, mademoiselle, et votre désormais fidèle serviteur sera au rendez-vous. » accepta-t-il aussitôt avec un geste gracieux de la tête et une expression exagérément pompeuse. Mais il était incapable de dissimuler l’impatience qui le gagnait déjà. -A présent je vais me coucher, inutile de retourner à l’extérieur, profitez du bon feu de la cheminée. Si je vous sais dans le salon avec la porte d’entrée, celle du salon et celle de ma chambre closes, je sais que je ne crains rien. Comme je vous le disais, le garde-manger et la bibliothèque sont à votre disposition. Bonne nuit. Conclut-elle en se levant.
Il se leva à son tour et baisa –normalement cette fois- la main fine et douce qu’elle lui tendit.
« Bonne nuit mademoiselle. Reposez-vous bien, car dès demain j’aurai des idées et il ne sera plus temps de faire demi-tour. » conclut-il sur un sourire amusé. Puis il la relâcha, et pensivement, la regarda s’éloigner et disparaître au bout du couloir. Il resta immobile quelques instant, puis s’avança à pas lents vers la cheminée où le feu crépitait toujours, jetant sur son visage, ses vêtements et ses bottes de cavalier des reflets rougeoyants. Il tendit la main, comme pour attraper une étincelle, et la referma dans le vide. Mélancolique, Ferdinand ? Voilà une idée qui en aurait fait rire plus d’un. A commencer par lui-même. Et c’est justement parce que cette pensée lui avait traversé l’esprit qu’il esquissa un sourire incrédule, semblant se réveiller d’une rêverie un peu trop prenante, et il regarda autour de lui presque avec surprise. Puis, se trouvant bien stupide d’être soudainement si sérieux, il se dirigea vers la bibliothèque. Autant s’occuper l’esprit, en attendant demain et le retour du jour, du soleil, de la vie – et de mademoiselle de Blaingirey.
FIN DU TOPIC (sauf si tu voulais répondre, tu me diras )
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Sujet: Re: Défi pour un sourire ... {Ferdinand & Rebecca }