« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Il est libre de battre mais n'a pas trouvé qui serait digne de lui. Côté Lit: Il n'y a que moi et parfois ma fille. Pas d'homme, pour cause d'absence de coeur qui bat. Discours royal:
♣FEMME D'AUJOURD'HUI♣ elle flotte, elle hésite ...
► Âge : 24 ans
► Titre : Archiduchesse d'Autriche, duchesse douairière de Saxe-Zeitz et de l'Autriche inférieure
► Missives : 645
► Date d'inscription : 13/09/2012
Sujet: Quand les animaux mettent l'animation. 22.05.13 0:10
« Le pigeon est un peu le rat du ciel, un rat auquel on aurait greffé des ailes avant de le repeindre en gris. »
Le mois de mars 1667 était d'un calme à faire peur à Versailles, après la valse des départs qui eurent lieu des hommes français, et des familles qui partaient à Nancy en février. Il ne restait à Versailles que les femmes, les vieux, les réformés, les gens neutres, ce qui était tout de même assez conséquent mais le château était vidé de son roi, celui qui réglait la Cour à la minute près. Depuis son départ, il y avait un certain relâchement du protocole, même si les journées étaient toujours rythmées par les messes du matin et de fin de journée. Mais les courtisans pouvaient retrouver une certaine liberté de mouvement, ce n'était pas la Reine qui allait maintenir l'étiquette à la lettre, ni Madame. Mais une liberté trop calme n'était pas forcément le plus intéressant non plus, cela était même source d'ennui ! Et Aliénor le confirmait, bien qu'elle n'était pas non plus une grande courtisane. Bien sûr, ses matinées, et parfois journées, auprès de la reine, l'occupaient une partie du temps, mais que faire le reste ? Il y avait bien sa fille mais la jeune Marie Anne avait ses leçons, les salons ne cessaient de parler de la guerre comme sujet principal, où les français saluaient le courage des leurs alors qu'Aliénor, bien qu'adoratrice de la France, était avant tout une autrichienne et espérait la victoire des siens. Et la plupart des artistes voulaient glorifier le roi en vue de gagner une pension, ce qui n'était pas ce que la jeune femme voulait mettre en avant dans son mécénat. Même les commandes de robes étaient en baisse, vu que peu de monde donnaient des fêtes, il était encore trop tôt pour les mondanités. En résumé, Versailles en ce mois de mars était un peu tristoune.
En cette journée, l'archiduchesse avait quitté Versailles, où elle s'était installée dans ses petits appartements, pour se rendre à son hotel particulier, rendre visite à sa fille et voir comment allait sa demeure qu'elle avait quitté, trop grand depuis le départ de son frère. Ses modestes appartements versaillais lui servaient à être plus près de la Reine qui avait davantage besoin de compagnie en ces temps de guerre, sauf en cette matinée. Tout était à son habitude calme, Marie Anne était à sa leçon de latin, on vint accueillir la jeune femme en lui donnant les dernières missives, Néron vint aussi saluer sa maîtresse avec ses habituels mots tendres, il était le gardien, ou plutôt le tyran de la demeure en son absence.
« Madame a reçu aussi un paquet venant de Vienne. Un paquet ? s'étonna la jeune femme. Je soupçonne que cela est un tableau, je l'ai déposé dans vos appartements.
Un tableau de Vienne ? Ce n'était certainement pas Léopold, il était trop occupé à préparer les stratégies de la prochaine bataille. Et si c'était lui, Aliénor espérait que ce n'était pas un portrait de lui dans un costume douteux, elle avait assez des deux croûtes du couple impérial. En effet l'attendait dans son boudoir un paquet volumineux recouvert, une missive accrochée. Ce n'était pas un sceau Habsbourg, cela était déjà une grande nouvelle. Elle ouvrit et put découvrir que Jan Thomas, celui-là même qui avait peint son cousin en costume ridicule, lui faisait cadeau de sa dernière œuvre, qu'elle en fut la grande inspiratrice. Voilà un artiste qui savait amadouer les mécènes. Anxieuse, elle découvrit la peinture avant de reculer d'un pas en poussant un petit cri surpris, et un peu horrifié. Dans un décor qui devait être un intérieur d'inspiration ottomane avec vue sur un désert (drôle de désert puisque dans le sable était planté ce qui ressemblait à des chênes), Aliénor trônait au milieu, de dos ... et nue. Ses longues cheveux blonds tombaient en cascade sur son dos mais ses fesses étaient clairement apparentes et une expression malicieuse se dessinait sur son visage. Pire qu'un costume de théâtre, c'était la totale absence de costume. Presque honteuse de se voir dénudée de la sorte, elle recouvrit la peinture et demanda qu'on la mette a rez de chaussée, à côté des autres horreurs. Clairement refroidie par cet ignoble cadeau, Aliénor décida de quitter l'hôtel après avoir embrassé sa fille et mis Néron dans une cage pour l'emmener à Versailles car il ne cessait d'attaquer Igor qui en avait les bras couverts de bleus. Autant dire que le voyage de la capitale au château fut rythmé d'insulte joyeusement hurlées.
C'était bien plus calme à Versailles. Enfin les appartements de la Reine n'étaient pas réputés pour être d'un amusement sans borne avec fou rire à la clé et feux d'artifices. Loin de là, même ! Cela ne dérangeait pas vraiment Aliénor qui n'était pas un bout-en-train proclamé, bien qu'elle ne soit pas non plus une de ses rabats-joie qui ne savent pas s'amuser. Juste que, dans la Maison de la Reine, ce n'était pas là où l'on s'amusait le plus. Autour d'elle, Eléonore Sobieska n'arrivait pas à tenir en place, Sofia Farnèse dessinait et avait une duègne qui regardait par-dessus son épaule, la vieille Gundred, aussi âgée que l'époque où son prénom était à la mode. La Wittelsbach brodait tranquillement, faisant la conversation ici ou là pour passer le temps. Mais le destin est parfois sympathique et apporte son lot de surprise. Un jeune homme dont le costume était légèrement élimé par le temps – vu son jeune âge et son costume démodé, cela devait appartenir à son frère ou son père – portant deux énormes paquets. L'un étant au pied de Sofia, elle dut comprendre de quoi il s'agissait, elle se leva, bousculant la duègne curieuse sur son passage.
« J'ai oublié que mon cher frère m'a sans doute envoyée une missive. Je ne m'eclipse que pour peu de temps, juste de me rendre à mon hôtel et je reviens. » lança t'elle malicieuse.
Personne ne comprit vraiment l'attitude de la princesse Farnèse, alors que le jeune home, intimidé de voir des dames de la Cour le fixer, et surtout avoir peur des vieilles en noir au regard aussi inquisiteur que leur pays, balbutia qu'il portait des présents pour la Reine. Celle-ci était partie passer un peu de temps avec sa fille. Aliénor se leva pour lire la lettre que tendait le jeune homme tandis qu'Olympe Mancini, plus énorme que jamais pour cause de grossesse avancée, peina tant bien que mal à avancer vers les paquets, en compagnie d'une duègne. La lettre était bien écrite, le style simple mais enjoué, mais au moment de lire voir qui envoyait cette lettre et ces cadeaux, la jeune femme paniqua et se tourna vers les deux qui ouvraient les paquets.
« Non ! N'ouvrez pas ! Ne soyez pas sotte, madame ! coupa la Mancini en défaisant les nœuds. Non mais il s'agit d'un présent de … Et cette fois elle fut coupée par l'ouverture des paquets et les hurlements des dames. …monsieur Beaufort. » termina t'elle dans un murmure.
En effet, dans les paquets se tenaient respectivement des rats et des pigeons ''apprivoisés'' par Geoffroy Beaufort, ce garçon fantasque qui avait intenté un faux attentat contre la Reine, avait passé ses dernières années entre prisons et évasions, et ne manquaient jamais d'envoyer à Marie-Thérèse ces animaux qu'il tentait de domestiquer pour les lui offrir. Et voici que maintenant des rats envahissait le sol du salon et les pigeons volaient partout. Tout le monde se mit à hurler et à se recroqueviller sur sa chaise ou monter sur les meubles pour échapper aux rats tout en se protégeant la tête des pigeons. Autant dire qu'avec les habits féminins de l'époque, ce n'était pas bien pratique. Olympe Mancini grimpa tant bien que mal sur un canapé en maugréant.
« Ah , il n'est pas toujours bon d'avoir un haut Emploi. gémit la surintendante. Ce ne sont que des rats et des pigeons, madame. Pas de quoi en faire une tragédie ! » souffla Aliénor en levant les yeux en l'air.
Dans la pièce, parmi les dames apeurées, une seule personne mis à part Aliénor ne semblait pas avoir peur de ces bêtes là. Cela n'étonna même pas l'autrichienne de voir que son amie Eléonore semblait presque s'en amuser, et mieux cela la fit sourire. Les deux femmes allaient devoir faire équipe, puisque personne ne semblait se porter volontaire.
« Je vois que vous n'avez pas peur de ces bêtes là ! Et je ne pense pas que la reine apprécierait de voir son salon dans cet état … il est temps d'agir, ne pensez vous pas ? »
Pour une fois qu'il y avait un peu d'animation chez Marie-Thérèse d'Autriche, il fallait en profiter, les autres ne savaient pas ce qu'elles rataient en se cachant ou, pire, passaient dans les pièces d'à côté. Les autres restantes, ne cessèrent de hurler dés qu'un animal s'approchait d'elles, comme si cela était le diable en personne !
« Cela me rappelle Munich, certaines ailes de la Résidence étaient de vraies volières ! Quant aux rats … qui n'en a jamais vu ? » se moqua gentiment la jeune femme.
Dans un premier temps, elle courut ouvrir la fenêtre, dans l'espoir que certains volatiles trouvent la sortie et reprennent leur liberté. C'était sans compter que les pigeons n'étaient pas les animaux les plus intelligents de la Terre et peu d'entre eux trouvèrent la bonne fenêtre, se tapant dans les autres, ou volant simplement à travers la pièce. Au moins, cela allait les divertir pour quelques temps !
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Sujet: Re: Quand les animaux mettent l'animation. 02.06.13 19:26
Pour la vingtième fois de la journée, au moins, Éléonore Sobieska poussa un profond soupir au grand déplaisir de Gundred qui lui jeta un regard noir avant de s'éloigner à petits pas vers la princesse Farnèse qui dessinait sagement dans un carnet à croquis, dans un grand bruissement de tissu d'un noir profond, signe qu'elle portait le deuil d'un époux probablement mort au siècle précédent. Malgré l'agacement que le visage de la vieille duègne exprimait, comme un défi, la Polonaise ne se mit pas moins à tapoter sur la table dans un rythme connu d'elle seule, tout en se trémoussant sur son siège comme si elle était prête à bondir au moindre événement – ce qui ne paraissait guère être sur le point d'arriver dans un après-midi aussi calme (et soporifique) que celui passé dans la maison de Marie-Thérèse. Le plus incroyable était peut-être que toutes les dames de la reine avaient réussi à se trouver une occupation digne de leur rang et qu’Éléonore n'avait personne pour partager son ennui. Sofia occupait désormais cette brave Gundred tandis qu'aux côtés de la Polonaise, Aliénor de Bavière cousait tout aussi sagement avec une dextérité qu’Éléonore qui n'avait jamais réussi à comprendre où et comment il fallait enfoncer l'aiguille (elle avait pour objectif, gamine, de manipuler des armes légèrement plus encombrantes au grand dam de sa belle-mère) admira, pendant environ deux minutes ce qui constituait déjà un record. Son ami Jean de Baignes, l'aumônier de Sa Majesté, jouait les abonnés absents ce qu'elle se promit de lui reprocher la prochaine fois qu'elle le verrait tout comme de lui demander comment il se débrouillait pour avoir le droit de jouer les filles de l'air sans attirer les soupçons ou le courroux de la sourcilleuse Olympe Mancini, la surintendante de la maison. Laquelle Olympe Mancini semblait désormais sur le point d'accoucher d'une minute à l'autre ce qui constituait un désagrément supplémentaire pour Éléonore car après le fouillis indescriptible qu'avait été la naissance de la petite Madame, elle n'avait guère envie de revivre ça une nouvelle fois. Encore que, cela aurait le mérite de les distraire pendant quelques heures, la Polonaise était certaine que la princesse Farnèse aurait été ravie de tenir les paris sur le temps que cela pouvait durer (on s'occupait bien comme on pouvait). Sa victime favorite, Isabelle de Saint-Amand était partie s'occuper des chiens de la reine et probablement de ses nombreux amants, Felipe de Palma quant à lui avait dû quitter la cour pour aller combattre sur les mers et même Marie-Thérèse s'était absentée, Dieu seul (et Olympe Mancini aussi sans doute) savaient où – et Éléonore espérait que ce n'était pas pour prier le ciel d'accorder la vie sauve à Louis XIV car on risquait d'en avoir pour des heures. En résumé, après le départ de la plupart des membres de la cour pour le front versaillais ou lorrains et notamment ceux du comte de Froulay et du duc de Richmond, non seulement Éléonore s'ennuyait à mourir mais en plus elle se sentait seule.
Heureusement, elle avait la chance (c'était les propres termes de la surintendante de la maison quand elle lui avait présenté sa mission) de pouvoir sortir hors de la cour pour se charger des petites affaires de la reine. La Polonaise se devait donc de visiter les établissements religieux de Paris pour juger s'ils étaient aptes à recevoir les dons voire la visite de la souveraine. Et étrangement, après s'être rappelée de sa visite du matin, elle était nettement moins pressée de faire son rapport à Marie-Thérèse – tout en étant encore plus pressée de bouger et inattentive à ce qui l'entourait. Il fallait dire que le couvent de sœur Nicole l'avait laissée perplexe. Si la vieille femme lui avait semblé sympathique au première abord sous son voile noir, la première question qui était « vous avez quel genre de budget ? » avait désarçonné Éléonore (et il en fallait beaucoup pour surprendre la Polonaise !) qui lui avait raconté quelles étaient ses fonctions : - Ah vraiment, je suis flattée que l'intérêt de Sa Majesté se porte sur notre établissement, avait répliqué sœur Nicole en ouvrant la porte à un jeune homme mal apprêté sous le regard médusé de son interlocutrice, nous avons à cœur d'apporter à tous nos fidèles ce qu'ils recherchent. Regardez cette âme perdue qui avait trouvé refuge chez nous. Mes filles ont été à ses petits soins. Éléonore Sobieska n'était peut-être pas au courant des coutumes françaises mais bout du troisième jeune homme, tout cela ne lui avait pas semblé très catholique. Depuis le terme de la conversation qu'elle avait eu avec sœur Nicole, bonne sœur et maquerelle, elle se demandait bien ce qu'elle allait pouvoir raconter à Marie-Thérèse. Il semblait néanmoins que par un coup du sort, la question n'allait pas se poser ce jour-là car un garçon, présent du Ciel sans doute, avait eu l'autorisation de pénétrer dans les appartements de la reine pour apporter des paquets bien emballés et car son chargement avait de quoi distraire une petite troupe de dames en un bel après-midi de mars. Ce fut malheureusement à ce moment-là que la pauvre Sofia se souvint qu'elle avait des obligations épistolaires et dut quitter l'assemblée. - J'ai oublié que mon cher frère m'a sans doute envoyé une missive. Je ne m'éclipse que pour peu de temps, juste de me rendre à mon hôtel, et je reviens, lança la princesse Farnèse d'un ton qu’Éléonore jugea déçu. - La pauvre, compatit la Polonaise en s'adressant à sa voisine immédiate qui se trouvait être Aliénor et qui récupérait la lettre associés aux deux paquets, pile au moment où nous allons peut-être avoir un peu d'occupation, elle joue de malchance ! Mais loin de prêter attention à la jeune femme rousse qui fixait avec curiosité les cadeaux qu'Olympe Mancini essayait d'ouvrir ce qui n'était pas facile avec un ventre aussi énorme, les événements se précipitèrent. Seule Aliénor tenta de tout stopper en un cri « Non ! N'ouvrez pas » mais elle fut ignorée par la surintendante. - Non mais il s'agit d'un présent de... Monsieur Beaufort, termina Aliénor, seulement entendue d’Éléonore qui s'écria en joignant les mains comme en extase : - Enfin une bonne nouvelle en cette journée ! Loué soit monsieur Beaufort !
Il ne fallut que quelques secondes pour que la pièce calme et besogneuse se transforme en un chaos indescriptible. Les hurlements des dames couvraient les appels au calme et affolaient encore plus ce qui sortait en courant ou en volant des paquet. En un instant, rats et pigeons s'éparpillèrent dans tout le salon, se dissimulant sous les meubles sur lesquels avaient grimpé des courtisanes gémissantes ou battant des ailes à une hauteur inaccessible pour le commun des mortels. Gundred hurlait (comme si quelqu'un était sourd, franchement) qu'une bête féroce s'était introduite sous sa robe et se faufilait entre ses pieds. Au centre de la pièce, Éléonore Sobieska n'avait pas bougé et s'était juste contentée de se lever dans sa chaise, une mine réjouie au visage, admirant le fouillis autour d'elle comme si cela avait été son chef d’œuvre. - Je vois que vous n'avez pas peur de ces bêtes là ! Et je ne pense pas que la reine apprécierait de voir son salon dans cet état… il est temps d'agir, ne pensez vous pas ? Éléonore adressa un large sourire ravi à la Bavaroise qui était la seule à avoir gardé son sang-froid – mais après tout, elle était bien placée pour connaître le courage d'Aliénor – et répliqua joyeusement : - Vous ai-je déjà dit que j'étais une excellente chasseuse, madame ? Généralement, je préfère les plus grosses proies mais on se contente de ce qu'on a sous la main et il me semble que ces bêtes sauvages soient dignes de notre duo. - Cela me rappelle Munich, certaines ailes de la résidence étaient de vraies volières ! Quant aux rats... Qui n'en a jamais vu ? - Ne cherchez pas, ces dames n'ont jamais dû vivre dans de véritables châteaux, j'ignore bien d'où elles peuvent bien sortir. Seriez-vous assez aimable pour vous occuper des fenêtres ? Je gère les portes, il faudrait canaliser cette invasion et éviter qu'ils ne s'éparpillent dans tout le château, je n'ai guère envie d'aller chercher un rat dans le bureau de monsieur Colbert avec tout le respect que je lui dois, il ne doit guère faire un bon compagnon de chasse ! Aussitôt dit, aussitôt fait, Éléonore courut jusqu'aux portes des appartements pour les claquer et éviter que les animaux « apprivoisés » de Beaufort ne se décident à explorer de nouveaux horizons. Elle faillit en être empêché par une dame qui avait accompagné la reine et qui voulait rentrer dans le petit salon : - Mais enfin, Madame, que faites-vous ? La Reine arrive ! - Non, répliqua Éléonore d'un ton sans réplique, croyez-moi, il vaut mieux que la Reine reste là où elle est, je ne tiens pas à devoir gérer un évanouissement royal en plus des rats et des pigeons. - Des quoi ? Demanda son interlocutrice éberluée mais il était trop tard, Éléonore lui avait refermé le battant sur le nez. De l'autre côté de la pièce, après avoir évité à grand peine un pigeon qui fonçait droit sur la vitre de la fenêtre et s'y écrasait dans un bruit sourd avant de tomber sur le sol, Éléonore passa sa tête rescapée par l'ouverture avant de la refermer pour s'adresser au garde en faction. - Bonjour, jeune homme ! Seriez-vous assez aimable pour nous prêter main forte ? Nous aurions besoin de votre pique. - Pardon ? Bégaya le jeune garçon qui paraissait avoir à peine dix-sept ans et qui ne se retrouvait probablement là que parce la garde royale avait choisi d'aller protéger le roi des boulets de canons plutôt que la reine de l'attaque des rats – quel sens déplorable des priorités ! - Venez donc, vous allez comprendre tous les cris que vous entendez depuis tout à l'heure et vous avez la chance de vous distinguer. Comment vous appelez-vous ? - Clodulf, mada... Mais il ne termina pas sa phrase, trop abasourdi (il fallait le comprendre, ce n'était pas tous les jours qu'on voyait les dames de la reine jouer à chat perché), tandis qu’Éléonore claquait la porte derrière lui, bloquant toute envie de fuite. - Vous voyez le problème, Clodulf ? Je compte sur vous ! Sur ces bonnes paroles, la Polonaise décida d'aller prêter main forte à son amie Aliénor qui semblait aux prises avec des pigeons récalcitrants. Il était temps de montrer son habilité à la chasse !
Sur son chemin, elle renversa malencontreusement une cage recouverte d'un drap, réveillant par la même occasion son occupant. De quoi s'agissait-il ? Éléonore souleva le drap uniquement pour voir sortir un éclair rouge et bleu qui la mordit au passage et qui s'envola à tire d'aile, profitant que le choc eut ouvert sa cage. Le perroquet, tout en hurlant des « à mort » ou « pendu » tout à fait dans le ton, se mit à poursuivre des pigeons dans des bruissements d'aile affolés, tandis que des plumes colorées volaient dans toute la pièce. Éléonore se suça un instant l'index pour faire partir la douleur avant de décider qu'elle avait d'autre priorité que de pourchasser le perroquet de l'archiduchesse car il s'agissait bien de lui. En quelques pas, elle fut auprès d'Aliénor : - Vous voyez l'énorme rat noir qui se faufile là, il est tout déboussolé, nous pouvons l'avoir. Je prends par la droite. Et un instant plus tard, elles se mirent en quête de l'animal désigné par la Polonaise, faisant un large cercle autour de lui pour le prendre en tenailles et éviter qu'il ne s'affole. Peine perdue, la chose se réfugia sous les jupes de Gundred trop occupée à hurler pour s'en rendre compte. Éléonore se redressa vers Aliénor pour faire un décompte avec ses doigts. A zéro, elles foncèrent toute droit vers Gundred, Éléonore souleva les jupes d'un geste brusque, dévoilant les jambes peu gracieuses de la duègne tandis qu'Aliénor plongeait sur l'animal. - Bravo madame ! La félicita Éléonore ravie, en battant des mains, nous formons un duo de choc ! Il nous faudrait peut-être trouver des armes comme celle qu'a ce petit Clodulf, non ? Ne serait-ce que pour assommer toutes ces dames ! L'après-midi était encore loin d'être fini.
Aliénor de Wittelsbach
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Il est libre de battre mais n'a pas trouvé qui serait digne de lui. Côté Lit: Il n'y a que moi et parfois ma fille. Pas d'homme, pour cause d'absence de coeur qui bat. Discours royal:
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Sujet: Re: Quand les animaux mettent l'animation. 24.06.13 18:59
Quel pagaille en l'espace de quelques instants ! Il y avait des pigeons volant autour des lustres de cristal et des rats au sol, à courir sur des magnifiques tapis. Ce n'était clairement pas leur place et il fallait les sortir au plus vite ! Mais seule contre tous, Aliénor ne pouvait pas faire grand chose alors qu'elle constatait les dégâts. Heureusement, une seule personne semblait s'amuser de cette situation, ce qui n'étonna guère l'autrichienne, connaissant assez bien Eléonore pour savoir qu'elle ne rechignait jamais contre un peu d'aventure ! Bon, courir après des pigeons et des rats venus de la Bastille n'était pas une bonne partie de chasse dans les bois, mais c'était déjà bien assez exceptionnel dans la Maison de la Reine. Et il n'y avait qu'elles qui s'en amusaient. Les duègnes hurlaient et montaient sur les meubles, la comtesse de Soissons restait comme une baleine sur le canapé, à se cacher sous quelques petits coussins comme si cela cachait quoi que ce soit.
« Ne cherchez pas, ces dames n'ont jamais dû vivre dans de véritables châteaux, j'ignore bien d'où elles peuvent bien sortir. Seriez-vous assez aimable pour vous occuper des fenêtres ? Je gère les portes, il faudrait canaliser cette invasion et éviter qu'ils ne s'éparpillent dans tout le château, je n'ai guère envie d'aller chercher un rat dans le bureau de monsieur Colbert avec tout le respect que je lui dois, il ne doit guère faire un bon compagnon de chasse ! Il ne faut pas en demander trop à monsieur Colbert, il doit être bien trop occupé à jouer les justiciers nocturnes ! Je m'occupe donc des pigeons ! » lança-t-elle joyeusement en se dirigeant vers les fenêtres.
Et voici comment ce tandem un peu particulier se sépara pour essayer de virer ces animaux qui n'avaient pas leur place à Versailles. Aliénor dut se dépêcher pour rejoindre les grandes fenêtres mais les vêtements féminins avaient la particularité d'entraver le corps pour que la femme fasse le moins de mouvement possible. Entre la lourdeur des tissus, le corset qui empêchait la respiration et les multiples jupons limitaient la course. Sans compter qu'il ne fallait pas marcher sur les rats ! Autant dire que la jeune Wittelsbach faisait un véritable parcours du combattant pour rejoindre les fenêtres donnant sur les jardins conçus par monsieur Le Nôtre (comme tous les jardins à cette époque, à croire qu'il y avait un seul jardinier pour le royaume entier). Mais un volatile fut plus rapide, il vola à toute allure vers la fenêtre et s'y écrasa de toute sa petite force avant de tomber lourdement au sol. Un peu décontenancée l'espace d'un instant, l'autrichienne se pencha vers l'oiseau inconscient et crut qu'il était mort durant quelques instants. Bien heureusement, son petit cœur battait encore. Aliénor ouvrit la fenêtre et le prit entre ses mains alors que déjà, l'animal s'agitait à nouveau. En voici un qui recouvrait la liberté. Puis elle ouvrit les deux battants de fenêtres pour laisser davantage à ces stupides oiseaux de sortir. Certains ne comprenaient rien et s'obstinaient à voler autour du lustre comme s'ils se trouvaient dans un manège. Aliénor tenta de les faire dévier de leur trajectoire en lançant les coussins sur les pigeons mais tous n'avaient cure de cette attaque de soierie. Cela eut pour effet de retomber sur une duègne qui, prenant le coussin pour un oiseau, hurla de plus belle et tomba à la renverse et cassa un vase qui se trouvait là ! Les cris, le bruit du vase, les rats et les pigeons, tout cela faisait un raffut d'enfer. Et quand l'archiduchesse entendit son perroquet et vit Néron poursuivre les volatiles, cela était le pompon ! Mais en tout cas, les pigeons avaient en partie compris où se trouvait finalement la sortie. Il fallait maintenant s'occuper des rats. D'ailleurs Éléonore arriva à ses côtés et lui en montra un :
« Vous voyez l'énorme rat noir qui se faufile là, il est tout déboussolé, nous pouvons l'avoir. Je prends par la droite. »
L'autrichienne hocha de la tête et partit donc par la gauche. Mais voici que le rat eut la mauvaise idée de se réfugier sous les jupes de la vieille duègne qui n'avait rien remarqué, trop occupée à hurler sur les trois pigeons restants comme s'ils étaient des menaces. Il n'y avait pas trente six solutions, les deux femmes durent bien le reconnaître mais leur plan était simple : une fois le décompte de la polonaise terminée, celle-ci souleva les jupes de Gundred et Aliénor se saisit à pleines mains du rat alors que la duègne se retourna et se trouva nez à nez avec l'animal et hurla de plus belle avant de s'enfuir. Aliénor riait toujours de bon coeur face à cette drôle de situation.
« Bravo madame ! Nous formons un duo de choc ! Il nous faudrait peut-être trouver des armes comme celle qu'a ce petit Clodulf, non ? Ne serait-ce que pour assommer toutes ces dames ! plaisanta la jolie rousse. Bien, nous en avons un. Qu'en faisons-nous ? Elle se tourna vers le jeune garde, toujours hagard face à cette situation. Apportez nous une caisse ou quoi que ce soit pour enfermer ces bêtes, je ne vais pas la jeter par la fenêtre ! »
Il secoua vivement la tête et se mit à courir à toute vitesse, jusqu'aux cuisines où il se souvenait avoir vu des petites cages où les poulets étaient emmenés pour les repas du roi. Mais point besoin d'aller jusqu'aux grands communs, les cages étaient dehors. Le jeune Clodulf en prit deux et revint en moins de deux, essoufflé et tout rouge mais content d'avoir pu accomplir quelque chose aujourd'hui. Le premier rat était dans la boîte.
« Et d'un ! Où sont les autres ? Oh regardez, il y en a sous le canapé où se trouve madame de Soissons ! » s'exclama Aliénor, voyant deux queues dépasser.
La jeune femme tira le jeune Clodulf avec elle, il avait toujours la cage à la main, pour mettre les rats en boîte. Avec une infinie douceur pour ne brusquer personne, la jeune Wittelsbach se mit à genoux et se pencha pour regarder en dessous, voir le nombre de rats qui s'y cachait. La comtesse de Soissons, toujours allongée avec son tas de coussins sur elle pour faire croire à ces animaux qu'elle n'était pas là, n'était pas bien rassurée.
« Vous n'allez quand même pas les attraper à la main, ce n'est pas digne de votre rang. s'indigna Olympe. Vous voulez le faire à ma place ? demanda la Wittelsbach sur un ton plus sec. Oh que non ! Je n'ai jamais appris à attraper les rats, on m'a davantage appris à chanter ! Vous chantiez ? j'en suis fort aise. Eh bien ! dansez maintenant. Ou remuez vous au lieu de vous plaindre ! »
Mais l'agitation d'Olympe Mancini sur son canapé avait fait fuir les animaux. Et voici qu’Éléonore, Aliénor et Clodulf coururent après les deux bêtes jusqu'à un recoin. Le jeune homme, peut être un peu enhardi de voir qu'il n'y avait pas que de vieilles espagnoles aux jambes moches dans cette pièce, voulut en choper un et avoir des remerciements de ses dames. Mais Eléonore en attrapa un avant lui, elle était sans doute plus habituée à chasser. Mais il attrapa le second et le plaça dans la cage que tenait l'autrichienne. Trois rats, c'était un bon début. Quelques uns avaient du s'échapper avant que les portes se referment, il ne devait en rester que deux ou trois dans les parages. Mais aucun à première vue ne daignait montrer le bout de sa queue. C'est à ce moment là qu'Aliénor constata que beaucoup des dames avaient fui la pièce sans demander leurs restes. Il ne restait qu'Olympe Mancini dans son canapé et trois duègnes sur divers meubles pour se protéger des rats. Mais au-delà des rats, il restait aussi des pigeons. Un tournait toujours autour du lustre, à croire qu'il n'avait appris qu'à tourner à gauche ; un était perché sur une lampe ; et enfin un troisième se trouvait à côté de Néron. Ce dernier avait gonflé ses plumes et ne cessait de répéter « à mort », ce qui pouvait passer, pour les oreilles chastes des duègnes, pour une déclaration d'amour, ou d'amor donc.
« Regardez le donc à se pâmer près d'un pigeon. Je me sens presque mal de le troubler dans sa séduction, mais quand il faut y aller … »
Elle se dirigea vers son perroquet et voulut faire fuir le volatile à plumes gris loin de Néron et espérer que le pigeon prenne son envol. Peine perdue, à croire que la pigeonne se sentait en protection avec le perroquet coloré. Donc puisque le pigeon ne bougeait pas, ce serait Néron qui bougerait. Elle lui caressa la tête doucement, et alors qu'elle voulu le prendre pour le remettre dans sa cage, Néron pinça le doigt de sa maîtresse sans ménagement. Retirant son doigt rougi aussitôt, l'archiduchesse ne se laissa pas démonter, prit son oiseau entre ses mains avec fermeté et le mit à nouveau de sa cage. Pas content, il hurlait ses menaces habituelles de sa voix stridente, si bien qu'on devait l'entendre depuis la Galerie des Glaces. Tant pis, s'il fallait cela pour qu'il comprenne qu'il ne fallait jamais mordre la main qui le nourrit. En tout cas, la pigeonne à ses côté n'avait pas demandé son reste quand Éléonore la chasse, l'oiseau gris abandonna son nouvel amour pour voler au-dessus des jardins et retrouver sa liberté.
« Nous avons presque fini, je crois. Il nous reste le pigeon qui tourne sans relâche et … Mais y a t'il encore des rats ? » demanda Aliénor à son amie rousse.
Dans ce salon où régnait à présent le désordre, les meubles poussés et quelques coussins déchiquetés avec des plumes volantes, difficile d'y voir clair ! Les deux amies scrutaient les coins et dessous les meubles à la recherche d'une nouvelle chasse à mener. C'est à ce moment là que Gundred-aux-mollets-laids se remit à hurler en pointant son doigt vers une console, hurlant que le diable se trouvait là. Si le diable était un rat, cela ne serait pas bien impressionnant, surtout avec Eléonore et Aliénor dans les parages ! L'autrichienne jeta un regard malicieux vers son amie et lui fit aussi un large sourire :
« Vos talents de chasseuse ne seront pas de trop pour cette nouvelle proie. Attraperez vous el diablo, comme le hurla si bien la señora ? »
Elle s'en amusait, en riait même. Cela faisait du bien d'avoir un peu d'animation en cette journée qui s'annonçait tellement ennuyeuse. Finalement, il fallait remercier monsieur Beaufort de son présent !
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Sujet: Re: Quand les animaux mettent l'animation. 11.07.13 3:02
Éléonore Sobieska, croyez-le ou non, ne se sentait jamais autant à l'aise que dans le désordre et la pagaille la plus totale surtout si la pagaille en question impliquait une chasse impromptue, des proies tout aussi improbables et plutôt malignes (bon d'accord ce n'était pas le cas des pigeons mais on pouvait reconnaître aux rats la faculté de se glisser partout, notamment sous les jupes de ces dames), de courtisanes stupides à effrayer et dont on pouvait se moquer (mention spéciale dans cette catégorie à Olympe Mancini qui essayait de se cacher, elle et son énorme ventre, derrière des coussins, c'était mission impossible) et surtout une camarade de jeux aussi douée et vive qu'Aliénor de Wittelsbach. Après un instant d'hésitation, les deux jeunes femmes avaient pris la situation en main ou du moins autant qu'elles le pouvaient car les autres dames de la maison ne les aidaient pas à se contenter de hurler de manière stridente comme si cela allait empêcher les animaux de s'intéresser à elles. A moins que ce ne fut la piété toute particulière des Espagnoles qui les faisaient invoquer Dieu de cette manière ? Même si l'image de nonnes hurlantes dans les couvents ibériques amusait beaucoup Éléonore, il n'était pas le moment de se poser cette question alors que pigeons, rats et coussins volaient à travers la pièce sans aucune logique. Un peu plus et c'était les rats qui allaient se retrouver sur les meubles, les pigeons à courir par-terre et les duègnes à sauter par la fenêtre ! Dommage, les dames de compagnie de Marie-Thérèse avaient la peau plus dure que cela – après tout, elles étaient du siècle dernier –, de telle sorte que les deux amies se contentèrent de s'occuper des animaux silencieux, laissant là les dames à leurs angoisses. Elles avaient déjà à leur actif attrapé un rat noir et assez répugnant qui courait sous les jupes de Gundred, laquelle dévoila sans le vouloir ses mollets tout rabougris aux yeux du monde entier ce qui provoqua un énorme fou-rire, fort peu bienséant et mature du côté d'Aliénor et d’Éléonore, laquelle avait l'impression de retrouver sa jeunesse. Heureusement pour le cours des événements, alors qu’Éléonore scrutait déjà la pièce à la recherche d'une nouvelle proie, ce fut Aliénor qui se chargea du sort des petites bêtes, car la Polonaise aurait bien été capable de suggérer de les jeter par la fenêtre, de les faire manger aux gardes ou d'aller les abandonner dans la chambre d'un de ses ennemis tant les questions pratiques ne la concernaient pas. Le petit garde, Clodulf, semblait tout aussi perdu que la jeune femme rousse mais sur la demande de l'archiduchesse, il sembla être pris d'une illumination et après avoir disparu quelques instants pendant lesquels Éléonore en vint à espérer qu'il reviendrait avec une arme (ce serait un jeu intéressant que de viser les rats ou les pigeons dans une telle pagaille et en essayant d'éviter les duègnes), il rapporta quelques cages à poulets servant pour les repas du roi dont l'une d'elle servit à renfermer le premier rat qui se mit à gratter furieusement pour réclamer sa libération.
- Et d'un ! Où sont les autres ? Demanda Aliénor en regardant vivement autour d'elle puis sans lancer le temps à Éléonore de répliquer qu'elle en avait aperçu un se glisser sous une console, elle désigna Olympe Mancini ce qui laissa un instant la Polonaise perplexe : oh regardez, il y en a sous le canapé où se trouve madame de Soissons ! En effet, deux queues dépassaient et Éléonore aurait volontiers tiré dessus si elle ne craignait pas que les sales bêtes ne se retournent contre elle. Alors que la Bavaroise et le petit garde, enhardi par sa première réussite et qui espérait peut-être monter en échelons après une telle chasse au trésor dans les appartements de la reine passaient d'un côté du canapé, Éléonore fit le tour afin d'effrayer les rats et de les faire se diriger tout droit vers la gueule du loup, à savoir les cages à poulet. Malheureusement, la comtesse de Soissons prouva de nouveau son inefficacité criante – Éléonore ne cessait de le répéter, on s'ennuyait beaucoup trop dans cette maison – et à force d'entretenir Aliénor de son éducation soignée (ce n'était pourtant pas ce qu'on disait sur les Mancini), les rats en profitèrent pour s'échapper. Éléonore, vexée de s'être laissée berner par deux rats de pacotille ne put s'empêcher de lancer en direction de la femme informe sous ses coussins avant de suivre l'archiduchesse : - Navrée de vous le dire aussi brutalement, madame, mais votre chant est particulièrement inefficace, les pauvres bêtes ne fuient pas. Nous devons donc faire tout le travail à votre place et vous nous le reprochez encore ! - Mais je ne chantais pas, madame, je hurlais ! S'insurgea Olympe. - Ah mais vous devriez peut-être tenter alors, vous avez une voix tellement stridente qu'elle pourrait peut-être tuer ces pauvres pigeons sur le coup. Sur ces paroles aimables qui lui voudraient sans doute une remontrance (mais après tout ce qu'elle avait accompli pour défendre le salon de la reine, ce serait tout de même bien ingrat), elle se retrouva dans un coin après avoir coursé deux malheureux rats totalement affolés. En un bond, sans l'ombre d'une hésitation, la Polonaise fut sur l'un d'eux et le tint fermement même s'il se débattait et cherchait à la mordre. Héroïquement, Clodulf fit de même à ses côtés et attrapa le deuxième du premier coup ce qui revêtait une allure d'exploit. - J'ai réussi, j'ai réussi ! S'exclama-t-il justement. - Bravo, mon petit, le félicita Éléonore en glissant son rat dans la boîte d'Aliénor, même si celui-ci ne voulait plus la quitter, nous allons faire de vous un grand chasseur de rats, c'est toujours utile dans la vie. Je vous promets que nous parlerons en votre faveur pour dire à quel point vous avez protégé les dames de la reine. Il en fallait peu pour faire rayonner un gosse de dix-sept ans et pendant qu'il se rengorgeait, les deux femmes se retournèrent vers le reste de la pièce d'où la pagaille commençait à se calmer, au grand déplaisir d’Éléonore. La plupart des dames avaient fui et les dernières survivantes se contentaient de trembler sur leurs meubles tandis que la comtesse de Soissons jouait à la morte sur son canapé. Seules traces de ce moment, le désordre de la pièce avec les ouvrages des unes et des autres à terre, les coussins éventrés et les battements d'ailes d'un des derniers pigeons qui tournaient obstinément autour du lustre comme un poisson tourne en rond autour de son bocal, jusqu'à en devenir fou.
- Ces animaux-là ne sont pas censés être domestiqués ? Demanda Éléonore d'un ton perplexe mais elle n'eut pas le temps de chercher davantage de réponses, Aliénor avait déjà repris la situation sous contrôle et voulait s'occuper des rares oiseaux gris qui restaient et en l'occurrence de celui qui fricotait avec l'espèce de diablotin rouge et bleu qui avait pincé Éléonore, laquelle jeta un regard noir à la bestiole qui lui répondu par un « Pendu ! ». La Polonaise constata qu'il y avait un troisième pigeon, posé tranquillement sur une lampe, lequel semblait un peu plus domestiqué que les autres. Dans une vague de courage, elle ramassa ses jupes, bien trop encombrantes pour les parties de chasse, elle veillerait désormais à s'habiller plus confortablement pour aller chez la reine, et s'élança à travers la pièce. Le pigeon la regarda arriver avec un œil torve mais quand il fut à portée de bras, il s'envola pour se poser un peu plus loin. Il recommença ce petit manège plusieurs fois au grand agacement d’Éléonore avec les nerfs de laquelle il jouait. Finalement, n'en tenant plus, la jeune femme ordonna à Clodulf de lui passer une grande aiguille à tricoter et avec un rugissement digne d'un Cosaque, alors même que l'affreux perroquet d'Aliénor réveillait tout le château avec ses cris stridents, elle chargea – mais pas à poil. Avec un roucoulement indigné, le pigeon daigna enfin quitter la pièce pour se poser sur les toits du château quelques mètres plus loin pour toujours surveiller ce qui se passait à l'intérieur. Éléonore lui jeta un coup d’œil mauvais mais après tout, elle avait réussi, il était dehors. - Nous avons presque fini, je crois, constata la jeune dame de Wittelsbach, il nous reste le pigeon qui tourne sans relâche et… Mais y a-t-il encore des rats ? - J'en ai bien l'impression, répliqua Éléonore qui se sentait l'âme d'un chef de guerre, à moins qu'ils n'aient fui sous les boiseries et les dorures. Mais quand est-ce que ce pigeon cessera de tourner à la fin ? Grommela-t-elle en lui jetant un coussin – qu'il évita en faisant une courbe gracieuse. L'affaire aurait pu s'arrêter là si la fameuse duègne qui lui avait fait grâce de leur montrer ses mollets ne s'était pas mise à hurler en désignant une console que le diable se trouvait là. Un sourire illumina le visage d’Éléonore et elle échangea un regard avec Aliénor en se retenant de pouffer. Finalement ces cris invoqueraient-ils plus les démons ? Il n'y avait plus qu'à aller inspecter la chose en question pour en avoir le cœur net. - Vos talents de chasseuse ne seront pas de trop pour cette nouvelle proie. Attraperez vous el diablo, comme le hurla si bien la señora ? - Allons il ne sera pas dit que nous nous serons fait duper par le diable ! Répondit la Polonaise en éclatant de rire, en voilà une proie intéressante, j'ai toujours rêvé de savoir à quoi il ressemblait, pas vous ?
Ni une ni deux, elle se retrouvèrent à faire le tour de la console pour débusquer le diable. Éléonore se mit à genoux dans un grand bruissement de robes pour regarder sous le meuble et de fait, une forme sombre patientait, les yeux luisants. - J'ai comme l'impression que le diable est terrifié, dit-elle à Aliénor en relevant la tête vers la jeune femme, il nous faudrait quelque chose pour l'attirer... Mais enfin Clodulf, faites attention avec les cages, marchez sur la pointe des pieds pour ne pas lui faire peur. Sous les yeux fascinés de Gundred qui semblait être trop abasourdie pour même songer à tourner les talons, Éléonore se releva et se saisit d'un bout de biscuit qu'une des duègnes était en train de grignoter au moment du drame et qui n'avait pas été dévoré pendant l'affolement général. Olympe Mancini releva la tête pour lancer une protestation mais songeant que pour cela, il lui fallait élever la voix et donc être repérable, elle disparut de nouveau sous ses coussins. Tout doucement, ce qui ne lui ressemblait guère mais après tout, Éléonore était prête à tous les sacrifices pour remplir à bien sa mission, elle déposa le biscuit edevant la console et attendit. Heureusement pour elle (car la patience n'était pas à proprement parler sa première qualité), le rat se décida assez vite et au moment où il sortait le bout du nez pour voir ce qu'on lui offrait, Éléonore bondit pour attraper son petit corps remuant. C'était sans doute le plus gros rat du lot, une énorme bête toute noire et aux énormes moustaches que la jeune Polonaise tenait à bout de bras pour la faire admirer à tous. - Mais regardez, madame, ce n'est pas le diable, il est tout adorable ! Le diable ne peut être aussi mignon, n'est-ce pas ? Gundred n'eut pas l'air convaincue et se signa tout de même mais Éléonore s'était déjà détournée : - Vous savez ce que je suis en train de me dire, Aliénor ? Nous devrions l'appeler « Big Moustache », c'est un nom qui lui irait parfaitement, et l'offrit à cette pauvre Sofia di Parma qui a eu la malchance de ne pouvoir participer à la chasse avec nous... Quelque chose me dit qu'elle adorerait ce présent ! Elle apprécie les cadeaux en tout genre et cela la consolera de son absence. Éléonore n'entendit pas très bien ce que chercha à lui répondre la Bavaroise car on frappa soudain avec obstination sur la porte qui donnait sur les appartements privés de la souveraine, là où quelques temps auparavant, la Polonaise avait fermé les battants au nez des suivantes. Sans hésiter et malgré le geste d'Aliénor pour l'en empêcher, elle se dirigea vers la porte qu'elle entrouvrit juste assez pour que puissent passer sa tête et celle du rat, tout frétillant. - Mais enfin, quel est ce remue-ménage ? L'interrogea une dame, avec dédain, nous avons cru que vous vous livriez à une chasse en plein dans le salon de Sa Majesté. Laissez-nous entrer et.... Elle s'interrompit pour pousser un hurlement qui fit s'effacer son air méprisant, à la plus grande satisfaction d’Éléonore. - Mais qu'est-ce que c'est que... ça ?! - Oh lui ? C'est Big Moustache, je viens de l'attraper sous la console, c'est un cadeau pour... - Cette fois-ci, madame Sobieska, vous avez passé les bornes ! S'écria la dame en face d'elle. - Vous avez tort, je n'utilise les bornes que pour monter à cheval, répliqua la rousse au tac au tac tout en claquant de nouveau la porte sur le nez de son interlocutrice.
En voyant l'expression d'Aliénor qui l'attendait au milieu du salon, elle se renfrogna mais admit que sa réaction n'avait pas été très mature avant de se résigner à faire rentrer Big Moustache dans l'une de ces cages où le pauvre allait se sentir bien seul. - Je pense que nous avons rempli notre tâche, s'écria-t-elle plus joyeusement, cela fait, bon certes, il ne reste que ce pigeon mais voilà qui est original au moins comme animal de compagnie... Croyez-vous qu'il finira par se poser ou attend-il de mourir en plein vol ? Auquel cas, nous pouvons peut-être l'aider... Elle adressa un sourire rayonnant à Aliénor qui semblait réfléchir à une solution puis se mit à guetter d'éventuelles apparitions de rats, non sans penser que cela ferait bien les pieds de toutes ces dames si jamais l'un d'entre eux sortaient du néant quelques temps plus tard. - Mais au fait, lança-t-elle en direction de son alliée, qui est donc ce monsieur Beaufort qui envoie tant de présents à la reine ? Est-il amoureux d'elle ? Les Français sont donc bien étranges dans leurs coutumes, j'avais entendu dire qu'on faisait parfois des lâchers de pigeons blancs pour les mariages mais jamais qu'on en offrait pour déclarer sa flamme. Apprivoise-t-il réellement ces animaux ? S'il a dressé les pigeons à revenir jusqu'aux appartements de la reine, nous n'en sommes pas débarrassés, ce serait une bonne idée de sa part !... J'aimerais bien le rencontrer tout de même, ne serait-ce que pour le remercier... Il n'y avait pas besoin de voir son sourire éclatant et ses yeux pétillants pour savoir qu'elle en était tout à fait capable.
Aliénor de Wittelsbach
« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Il est libre de battre mais n'a pas trouvé qui serait digne de lui. Côté Lit: Il n'y a que moi et parfois ma fille. Pas d'homme, pour cause d'absence de coeur qui bat. Discours royal:
♣FEMME D'AUJOURD'HUI♣ elle flotte, elle hésite ...
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► Titre : Archiduchesse d'Autriche, duchesse douairière de Saxe-Zeitz et de l'Autriche inférieure
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Sujet: Re: Quand les animaux mettent l'animation. 09.09.13 17:48
« Ces animaux-là ne sont pas censés être domestiqués ? Il faudrait que monsieur Beaufort revoie ses méthodes de dressage à mon sens. Puis n'oublions pas que tout cela vient de la Bastille, même les animaux doivent avoir un côté frondeur » répondit avec amusement Aliénor avant de reprendre son combat contre les pigeons restants.
Quelle pagaille dans cette pièce ! Il ne restait plus grand monde dans la pièce mis à part Olympe de Soissons dans son canapé, incapable de se relever, deux duègnes perchées qui n'osait pas descendre, tout comme une dame de compagnie espagnole sur une chaise, et bien sûr nos trois chasseurs en herbe. Il ne devait plus rester grand chose des animaux, les pigeons ayant été chassés sans ménagement par la fenêtre, parfois même à coup de coussins, et les rats avaient malheureusement eu le temps de se disperser dans le château avant qu'on ait l'idée intelligente de fermer les portes. Pas sûr que la reine apprécie de retrouver des rats dans d'autres pièces de ses appartements, ni même qu'on en retrouve tout court dans le château ! Aliénor et Eléonore ne pouvaient pas s'occuper de tout le monde, il y avait bien assez à faire dans la pièce, devenue un véritable champ de bataille, avec Néron en fond sonore continuant à hurler incessamment les deux seuls mots de son vocabulaire. L'autrichienne se disait que cet oiseau avait un sacré caractère, n'ayant pas supporté qu'on le dérange dans sa séduction ! Autant dire que le salon ne ressemblait en rien à ce qu'on connaissait en temps normal.
Il devait rester deux ou trois rats et deux pigeons, dont un au-dessus de leur tête, elles avaient presque accompli leur mission, et il fallait faire vite car Sa Majesté attendait derrière la porte et on ne pouvait pas la laisser entrer avec ces animaux encore en place. Rien que le nom de Beaufort faisait frémir l'espagnole, on n'allait pas lui imposer la vue de ses "cadeaux" pas franchement sympathiques, même s'ils mettaient l'animation au sein de la maison royale. L'autrichienne vit son amie polonaise courir après l'avant-dernier pigeon qui semblait prendre un malin plaisir à s'envoler pour se poser juste quelques mètres plus loin. Pendant ce temps, Aliénor partait à la recherche des derniers rats, se penchant pour essayer de trouver les derniers résistants, mais ils semblaient bien cacher, et le cri de charge de son amie polonaise n'allait pas les faire sortir. Alors que le pigeon daigna enfin sortir. Les deux jeunes femmes purent faire le point un instant sur la situation, et les rats restants.
« J'en ai bien l'impression, à moins qu'ils n'aient fui sous les boiseries et les dorures. Mais quand est-ce que ce pigeon cessera de tourner à la fin ? Éléonore lança un coussin sur le volatile, Superbe esquive. » commenta simplement l'archiduchesse.
Mais le diable était dans la pièce, du moins selon Gundred. Et il n'avait pas de corne, ni de fourche, il avait une queue, petit et gris. Si le diable était un rat, les chrétiens n'avaient pas grand chose à craindre de l'enfer ! Mais il devait s'en faire des deux jeunes femmes voulant mener à bien sa mission et qui l'attraperont coûte que coûte ! Et voici comment, dans la plus grande discrétion possible, ce qui est difficile à avec des robes en taffetas et une multitudes de jupons, elles arrivèrent à la console que les deux jeunes femmes encadrèrent, prêtes à attraper le diable gris quand il montrerait le bout de son nez.
« J'ai comme l'impression que le diable est terrifié, il nous faudrait quelque chose pour l'attirer... Mais enfin Clodulf, faites attention avec les cages, marchez sur la pointe des pieds pour ne pas lui faire peur. »
La scène qui suivit se passa dans le plus grand silence, tout le monde avait les yeux rivés sur cette scène de chasse au ralenti, où Éléonore décida de la jouer finement en appâtant le rat avec un biscuit, pour l'attraper plus facilement. Aliénor ne bougeait pas, appuyée à la console, Clodulf avait suspendu son pas, Gundred était perchée sur son meuble, tous avaient les yeux rivés vers le biscuit et la sortie probable du rat d'un moment à un autre, et surtout essayer de l'attraper. Sans douta affamé, l'animal sortit de son trou, mais à peine ses quenottes eurent croqué le biscuit, qu'il fut attraper par la rousse flamboyante, ravie d'avoir mené sa mission à bien. Un peu plus, et l'assistance aurait applaudi !
« Mais regardez, madame, ce n'est pas le diable, il est tout adorable ! Le diable ne peut être aussi mignon, n'est-ce pas ? Vous savez ce que je suis en train de me dire, Aliénor ? Nous devrions l'appeler « Big Moustache », c'est un nom qui lui irait parfaitement, et l'offrit à cette pauvre Sofia di Parma qui a eu la malchance de ne pouvoir participer à la chasse avec nous ... Quelque chose me dit qu'elle adorerait ce présent ! Elle apprécie les cadeaux en tout genre et cela la consolera de son absence. Hum ... je ne pense pas que la princesse apprécie ce genre de présent ... répondit la bavaroise, gênée. Mais … »
Elle n'eut pas le temps de continuer, heureusement car Aliénor aurait pu dire à Eléonore qu'elle aurait pu le garder si elle le voulait. Mais ce n'était pas mieux, on cognait à la porte, et il était certain que certaines suivantes ne voulaient plus attendre alors qu'on leur avait fermé la porte. Si la polonaise y serait allée seule, cela se serait sans doute mieux passé, mais avec Big Moustache en main, ces dames n'allaient certainement pas apprécier. Elle voulut la retenir mais son amie était plus rapide et là voici déjà à entrouvrir la porte pour discuter, du moins refouler ces dames. Derrière elle, Aliénor lui fit des gestes pour qu'elle se calme et surtout ne mouche pas la suivante. Raté. Au milieu du salon, elle lui lança un regard résigné, il était temps que le rat rejoigne ses compagnons dans la cage que tenait Clodulf. Mais ce n'était pas cela qui allait entâcher la bonne humeur de la polonaise !
« Je pense que nous avons rempli notre tâche, bon certes, il ne reste que ce pigeon mais voilà qui est original au moins comme animal de compagnie... Croyez-vous qu'il finira par se poser ou attend-il de mourir en plein vol ? Auquel cas, nous pouvons peut-être l'aider... Je pense qu'il faudra notre aide. J'ai peut être une idée ... elle resta songeuse un instant alors que la conversation rebondit sur tout autre chose. Mais au fait, qui est donc ce monsieur Beaufort qui envoie tant de présents à la reine ? Oh, un excentrique ... Est-il amoureux d'elle ? Les Français sont donc bien étranges dans leurs coutumes, j'avais entendu dire qu'on faisait parfois des lâchers de pigeons blancs pour les mariages mais jamais qu'on en offrait pour déclarer sa flamme. Apprivoise-t-il réellement ces animaux ? S'il a dressé les pigeons à revenir jusqu'aux appartements de la reine, nous n'en sommes pas débarrassés, ce serait une bonne idée de sa part !... J'aimerais bien le rencontrer tout de même, ne serait-ce que pour le remercier... Monsieur de Beaufort cherche à attirer l'attention de la famille royale sur son cas. Et il n'a rien trouvé de mieux qu'organiser un faux attentat sur la reine pour pouvoir le déjouer. Au lieu de cela, on l'a cru coupable et il passe son temps entre la Bastille et ses évasions. Pour s'occuper, il apprivoise ces animaux. La jeune femme se mit à rire. J'avoue que je n'ai jamais vu de cadeaux pareils, il a le mérite d'être original ! Mais son précédent colis, les pigeons étaient plus dociles ! »
Puis elle releva la tête vers le pigeon au-dessus d'elles, il tourna inlassablement, toujours dans le même sens, imperturbable. Si un coussin ne fonctionnait pas, il fallait quelque chose de plus dissuasif. Et l'idée d'Aliénor, pas bien sûre ni bien adaptée à sa condition, se révélait davantage amusante que sensée. Elle s'excusa auprès d'Eléonore un instant, elle avait sans doute la solution pour ce satané pigeon, et s'éclipsa. La suivante se trouvait toujours là, raide comme un piquet, et aussi aimable qu'une porte de prison.
« Madame, quel est donc ce cirque ? Et d'où sortait ce rat ? Des paquets de monsieur Beaufort, il s'agirait à présent de contrôler les présents amenés à la reine ! Mais … Excusez moi, je dois chercher quelque chose pour éradiquer les derniers récalcitrants ! »
Si Aliénor tentait de faire bonne figure dans la Galerie des Glaces, elle découvrit que sa coupe était en partie défaite et que quelques plumes de pigeons s'y logeaient. De quoi faire parler les courtisans qui se demandaient ce qu'il se passait. Au retour, la jeune femme se promit de passer par l'autre escalier, il serait mieux avec ce qu'elle allait ramener. Une fois dans les escaliers, elle se mit à courir jusqu'à ses petits appartements et partit à la recherche de l'objet convoité. N'ayant jamais fini de s'installer, ni ici ni à Paris, une partie des pièces était un enchevêtrement d'objets en tout genre, mais elle finit par les sortir, triomphante ! Dans sa main gauche, son carquois avec quelques flèches, et son arc dans la main droite. C'est exactement ce qu'il lui fallait ! Redescendant aussi vite qu'elle était montée, elle passa par la salle des gardes où deux hommes la regardèrent passer, arc à la main et ne surent l'espace d'un instant s'il fallait passer la jeune femme, qu'ils connaissaient à force de la voir passer en compagnie de la reine, ou non. Aliénor prit un air de défi contre ses hommes de tenter de l'empêcher, et passa la porte, retrouvant son amie qui mettait un rat dans une caisse.
« Encore un ? S'il en reste d'autres, cela donnera l'occasion de nouvelles réjouissances ! Puis elle montra ses objets, l'air ravie. J'ai de quoi éradiquer le pigeon. Vous n'allez quand même pas le tuer ! s'écria Olympe dans son canapé ! Cela salirait le plafond ! Mais non je ne vais pas le tuer, je ne suis pas cruelle. Et je ne le fais pas pour le plafond, voyons. Je veux juste lui faire peur ! » s'indigna Aliénor.
Décochant une flèche, elle tira non loin de l'animal qui s'écarta du lustre et de la flèche encastrée, et fut frôlé par une autre, ce qui l'acheva de voler vers la fenêtre et ... s'écraser sur la seule qui était fermée. Pendant ce temps, la flèche avait, quant à elle, trouvée la fenêtre de sortie. Il y eut un silence un instant dans la pièce, puis tous se précipitèrent vers la fenêtre pour regarder en bas, sait on jamais s'il y avait une victime. Non, heureusement, il n'y avait personne, c'était cela de gagné. Quant au volatile idiot, il n'était pas encore mort juste sonné. L'autrichienne le ramassa et lui caressa la tête, jusqu'à ce qu'il réagisse. Elle le relâcha et il s'envola sans demander son reste. Les deux jeunes femmes se regardèrent, satisfaites de leur mission.
« On pourra dire que nous avons eu une après-midi mouvementée ! Je ne m'étais pas amusée de la sorte depuis longtemps ! Son sourire radieux le prouvait bien. Je suis contente d'avoir fait équipe avec vous, Éléonore. »
S'il n'y avait plus de pigeons, et apparemment plus de rats, il restait un grand désordre et une flèche plantée dans le plafond, mais aussi des coussins jetés n'importe où, des meubles poussés, il y avait même une chaussure abandonnée par sa propriétaire ! Ah oui, il y avait aussi Clodulf et ses cages, qui ne savaient plus trop quoi faire, regardant les deux jeunes femmes avec un air gêné, mais son regard trahissait son amusement.
« Mon cher Clodulf, relâchez les mais assez loin du château. Nous parlerons de vous à sa Majesté, de votre aide et votre courage. La reine saura vous remercier. »
Alors qu'il passa la porte après une dizaine de merci, la suivante pénétra dans la pièce et poussa un cri d'horreur, suivi de Sofia Farnèse qui ouvrit des grands yeux ronds !
« Mais que s'est-il passé ici ? s'écria t'elle, estomaquée. Oh mademoiselle Farnèse, vous avez raté quelque chose de follement amusant ! Madame Sobieska vous racontera tout cela en détail, il me faut retourner dans mes appartements. Puis elle se tourna vers Eléonore, l'air complice. Il faudra que nous envoyons une lettre à monsieur Beaufort, le remercier de ce divertissement ! »
Elle prit son arc, son carquois et sa cage à perroquet et quitta la pièce tandis que la suivant pestait sur le désordre. Il était temps de ramener Néron dans ses appartements, de ranger son arc, et aussi de se recoiffer car des mèches de cheveux tombaient autour de son visage. Les gardes la regardèrent à nouveau et elle leur fit son plus beau sourire :
« L'un de vous serait-il assez aimable pour décrocher la flèche au plafond ? Et un autre de chercher l'autre passée par la fenêtre ? Je tiens beaucoup à ces flèches » demanda t'elle, mielleuse.
Aussitôt dit, aussitôt fait, les deux se séparèrent pour venir en aide à l'archiduchesse. Pendant ce temps-là, elle retourna à ses appartements et, une fois passée la porte, eut un fou rire qu'il était difficile de réprimer. Qui a dit qu'on s'ennuyait dans la Maison de la Reine ?
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Sujet: Re: Quand les animaux mettent l'animation. 07.10.13 16:14
Décidément, les Français avaient des mœurs étranges en plus d'être particulièrement arrogants – et de ne pas savoir courir derrière trois malheureux rats sous prétexte qu'ils dévoraient probablement les mollets des dames bien nées, Éléonore Sobieska en avait chaque jour de nouveaux exemples. Pour leur défense, les hurleuses qui invoquaient Dieu de les protéger contre les bêtes à pattes ou à ailes comme si le diable s'était brusquement introduit dans les appartements de la reine pour se cacher sous les canapés et grignoter des biscuits (les caractéristiques de tout bon diablotin, évidemment) tout comme cette chère comtesse de Soissons qui tentait de cacher son énorme ventre derrière des coussins n'étaient pas à proprement parler françaises mais venaient de contrées encore plus exotiques pour la Polonaise qu'était Éléonore. Mais monsieur Beaufort n'avait aucune excuse de son côté car son nom indiquait assez qu'il n'avait pas grand chose à voir avec les dévotes espagnoles, les folles italiennes et encore avec quelqu'un comme le grand Monomotapa. Dresser des pigeons et des rats pour tant soit peu que ceux-ci soient réellement dressés ce qui était difficile à constater dans de telles conditions, encore que le pigeon autour du lustre pouvait avoir très bien compris l'ordre de tourner en rond à la limite, pour les envoyer à quelqu'un comme la reine était certainement l'idée la plus étrange du siècle, Marie-Thérèse au contraire de certaines de ses dames de compagnie n'était pas réputée être une grande chasseuse ou une amoureuse des roucoulements. Sans compter que ce n'était certainement pas les animaux les plus agréables du monde – catégorie dans laquelle Éléonore rangea également les perroquets puisqu'elle s'était faite méchamment pincer par le Néron de la Wittelsbach et que ce dernier chantonnait quelques airs de son cru, ce qui ajoutait une tension fort dramatique à la scène, il fallait bien le reconnaître. - Monsieur de Beaufort cherche à attirer l'attention de la famille royale sur son cas, expliquait Aliénor alors que les deux jeunes femmes regardaient tournoyer le dernier oiseau, et il n'a rien trouvé de mieux qu'organiser un faux attentat sur la reine pour pouvoir le déjouer. Au lieu de cela, on l'a cru coupable et il passe son temps entre la Bastille et ses évasions. Éléonore fut tentée de se prendre la tête entre les mains devant une si grande stupidité, même si elle ignorait s'il valait mieux l'imputer à ce Beaufort lui-même, à ceux qui l'avaient cru coupable d'un attentat contre la reine (qui pourrait donc bien vouloir attenter à la vie de cette pauvre Marie-Thérèse ?) ou aux gardes qui permettaient ses évasions de la Bastille qui, si elle avait été remplie de fleurs et de petits lapins, aurait davantage plu à la reine probablement ou en tout cas à Michelle de Bergogne. - Pour s'occuper, il apprivoise ces animaux, poursuivit la Bavaroise, j'avoue que je n'ai jamais vu de cadeaux pareils, il a le mérite d'être original ! Mais dans son précédent colis, les pigeons étaient plus dociles ! - A défaut d'attirer l'attention de la reine, ils plaisent au moins à ses dames de compagnie... Enfin à certaines d'entre elles, corrigea la Polonaise en voyant une duègne tenter en tremblotant et avec de nombreuses hésitations de poser le pied à terre après avoir grimpé, on ne savait comment car il lui avait fallu une souplesse peu digne d'une femme du siècle précédent, sur une console.
Mais la jeune femme blonde ne l'écoutait plus, visiblement frappée par une idée pour les débarrasser de l'intrus qui ne se lassait toujours pas de ses rondes, vainquant d'ailleurs au passage la patience déjà bien limitée de la jeune femme rousse qui se détourna pour voir Aliénor s'excuser auprès d'elle et s'éloigner à grands pas vers la porte dans le but d'aller chercher, fort probablement, un piège à pigeons fous, ce que toute dame digne de ce nom devait avoir chez elle quand elle était accoutumée aux mœurs des Français, sans doute. Éléonore après avoir jeté un dernier regard noir au déplaisant volatile qui semblait la narguer regretta de ne pas avoir de pistolet sur elle – alors que le petit que lui avait offert son ami Morgan aurait été de plus bel effet dans les appartements de la reine mais on était plus sévère avec ce genre d'objet à l'heure actuelle à Versailles qu'à Saint-Germain au temps de l'exil du roi Charles, puis d'un geste rageur, envoya voler un coussin qui rata le pigeon mais percuta le lustre pour retomber tout droit sur Olympe Mancini qui ne s'y attendait pas. - A moi ! À moi, je suis attaquée ! Cria-t-elle d'une voix stridente qui sembla tout figer dans la pièce, exceptés l'oiseau que même de telles alarmes ne dérangeaient pas et Éléonore qui lâcha d'un ton méprisant que ce n'était là qu'un coussin, ce qui coupa toute velléité du petit Clodulf d'aller secourir la surintendante, il ne valait mieux pas en effet, il avait encore les cages pleines de rats à la main. - Un coussin, répéta la Polonaise en levant les yeux au ciel, ne me remerciez pas, c'est un cadeau, vous sembliez en manquer. Fort heureusement pour la jeune femme rousse, un imprévu vint empêcher Olympe Mancini de laisser libre cours à sa colère car un nouveau cri strident – à croire que ces dames ne savaient faire que cela – retentit dans la pièce et tout le monde se retourna pour voir d'où il provenait et surtout quelle mouche avait piqué la duègne car elles étaient les seules à avoir une aussi bonne voix. En fait de mouche, la vieille femme qui avait tenté une sortie digne quelques instants auparavant faisait face à un autre représentant du complot diabolique qui s'était abattu sur les appartement de la reine et Éléonore se demanda un instant lequel des deux êtres tout de noir revêtu avait le plus peur, tant le rat qui s'était décidé à traverser la pièce, semblait effrayé face à l'apparition qui s'était dressée devant lui, ce qui était fort compréhensible. Gundred était bien capable de terrifier les moins recommandables prisonniers de la Bastille ! - Mais faites quelque chose, madame Sobieska, s'écria la duègne en l'avisant à quelques pas, et vous là, le garde ! Plein de bonne volonté Clodulf se mit à courir sur l'animal après avoir déposé ses caisses grouillantes de rats mais celui qui demeurait en liberté n'était pas totalement fou et entre deux maux choisit le moins dangereux a priori mais le plus strident. Éléonore vit nettement Gundred pâlir et hésiter sur la marche à suivre mais voyant que la petite bête fonçait à toutes pattes vers elle, sans doute pour se réfugier sous ses jupons, elle poussa (encore) un hurlement et fit volte-face pour fuir. Et c'est ainsi qu'une scène proprement ahurissante eut lieu dans le salon de Marie-Thérèse, la fille de celui qu'on avait décrit comme la maître du monde, l'épouse du plus puissant roi d'Europe, la reine la plus respectable que la France n'eut jamais connue : une vieille femme corsetée dans d'épaisses étoffes noires courait en sautant par-dessus les poufs et les coussins qui avaient été jetés à terre, poursuivie de près par un énorme rat noir qui gagnait du terrain sur elle (il avait probablement la jeunesse pour lui), lequel avait le petit Clodulf sur ses traces qui ahanait à cause de l'effort. Un instant, la Polonaise observa la course-poursuite comme si elle n'était qu'une spectatrice devant une farce de Molière, tellement perplexe que le rire resta coincée dans sa gorge, tandis qu'Olympe Mancini ordonnait, sans succès, que cela cesse immédiatement, tout en gémissant qu'on cherchait à la tuer et que le monde devenait fou.
Cela aurait pu durer longtemps si la pauvre Gundred n'avait pas glissé sur un ouvrage de broderie qui traînait sur le sol et ne s'était effondrée dans un craquement tel que l'on crut qu'elle s'était brisé tous les os. Éléonore s'inquiéta environ une seconde pour son état de santé – qui allait fort bien si l'on en croyait les plaintes qu'elle lançait, le temps de voir le rat tenter de ralentir pour ne pas foncer sur l'énorme forme devant lui, en vain, suivi de Clodulf qui s'effondra sur les genoux de la duègne. Dans cet entremêlement de jambes, de bras, de corps et d'éclats de voix, Éléonore n'eut qu'à s'approcher pour recueillir le rat, avant qu'il ne tente une autre fuite, dans sa main alors qu'il se débattait de toutes ses forces. Avec l'aide de quelques autres dames de compagnie hésitantes, Gundred fut remise sur pieds et le jeune garde, honteux, s'empressa d'aller ouvrir une caisse pour permettre à Éléonore d'y déposer le présent de monsieur Beaufort, refermant de justesse avant que les camarades de celui-ci ne s'échappent à nouveau. - Encore un ? S'il en reste d'autres, cela donnera l'occasion de nouvelles réjouissances, s'exclama la voix d'Aliénor de Wittelsbach derrière la Polonaise, ignorant sans doute les regards mauvais qu'elle venait de s'attirer dans le reste de la pièce puisque la dernière course avait bel et bien failli tourner au drame (même si on se demandait pour qui). - En effet, approuva Éléonore en se retournant, ces rats sont décidément bien indisciplinés... Elle s'interrompit en voyant ce que rapportait Aliénor et le sourire qu'elle arborait ce qui attira une expression ravie sur son visage. - J'ai de quoi éradiquer le pigeon ! Et de fait, l'archiduchesse brandissait un arc et un carquois empli de flèches qui fit sautiller Éléonore qui se mit à battre des mains comme un enfant auquel on aurait promis un beau spectacle. Sans prêter aucunement attention à Olympe Mancini qui protestait, à son habitude, comme si elle tentait de se persuader qu'elle n'avait pas perdu tout contrôle et en l'occurrence de sauver les plafonds, la Polonaise suivit Aliénor pour la regarder faire, tout en regrettant de ne pas avoir sa propre arme et qu'on ne puisse pas réellement tuer cet insupportable pigeon. Ce dernier, inconscient du danger, continuait ses tours de manière invariable si bien qu'on pouvait légitimement se demander comment il faisait pour ne pas être encore sonné. D'un geste assuré, sous l’œil admiratif de la jeune femme rousse, la blonde visa l'oiseau et décocha une flèche qui s'encastra dans le plafond, passant à peu du pigeon qui commença enfin à dévier de trajectoire. Bientôt, il choisit de sauver sa vie et d'abandonner son ami le lustre mais dans un bruissement d'ailes s'écrasa sur la côté de la fenêtre qui était encore fermé, tandis que la flèche tirée par l'arc trouvait, quant à elle, le chemin de la sortie et dans un mouvement gracieux, tomba à l'extérieur. Il y eu un instant de silence dans la pièce pendant lequel Éléonore échangea un regard avec son amie puis elles se précipitèrent vers l'ouverture pour vérifier que personne n'était mort. Cela aurait été difficile à expliquer – et surtout bien idiot comme mort, que de se faire tuer comme un pigeon en plein milieu des jardins de Versailles ! Fort heureusement pour la crédibilité du château, aucune victime humaine ne fut à déplorer et on voyait juste au loin quelques jardiniers se retourner pour commenter d'un air perplexe qui se venait d'atterrir dans l'allée. Éléonore laissa échapper un rire pendant qu'Aliénor, qui ne perdait pas le nord, ramassait le pigeon et le libérait enfin. Il eut au départ un peu de mal à battre des ailes mais il ne rejoignit pas la flèche et finit par s'éloigner à tire d'ailes. La Polonaise poussa un soupir de soulagement car ils avaient bien eu du mal à se débarrasser de cet hôte indésirable !
- On pourra dire que nous avons eu une après-midi mouvementée ! S'écria Aliénor à ses côtés, je ne m'étais pas amusée de la sorte depuis longtemps ! Je suis contente d'avoir fait équipe avec vous, Éléonore. - Le plaisir fut partagé, répliqua son amie sans ajouter qu'elles formaient un bon duo car au vu de leur passé commun, c'était de fort mauvais goût, il est dommage que nous n'ayons pas été envoyées à la guerre, à nous deux, nous aurions pu la gagner ! Elle ponctua sa plaisanterie d'un rire et se détourna à son tour pour observer l’état désastreux de la pièce. Sa comparaison n'était pas si idiote, on avait vraiment l'impression qu'une bataille acharnée venait d'avoir lieu et qu'il n'en restait plus que les dépouilles, un ouvrage de broderie par là, des miettes de gâteau sur la table, une chaussure non loin du meuble sous lequel s'était réfugié Big Moustache, le plus beau rat de la livraison. Et au centre de cette pagaille, le petit Clodulf avait repris ses cages en main et hésitait sur la conduite à tenir. Aliénor lui jeta quelques ordres avant de conclure : - La reine saura vous remercier. - Vous avez défendu ces dames de manière tout à fait héroïque, approuva Éléonore en lui lançant un clin d’œil, quel chevalier, n'est-ce pas madame ? Termina-t-elle en avisant Olympe Mancini qui sortait enfin de sa léthargie et qui marmonnait dans sa barbe. Les suivantes de la reine entraient à nouveau dans le salon en poussant des cris de surprise alors que déjà des domestiques, prévenus sans doute par les multiples hurlements, débarquaient pour tout remettre en ordre. Parmi eux, Sofia Farnèse arrivait, les yeux arrondis de surprise. - Oh mademoiselle Farnèse, vous avez raté quelque chose de follement amusant ! Madame Sobieska vous racontera tout cela en détail, il me faut retourner dans mes appartements, l'avisa Aliénor, il faudra que nous envoyons une lettre à monsieur Beaufort, le remercier de ce divertissement ! - Je suis tout à fait d'accord, approuva Éléonore, s'il est encore à la Bastille, nous devrions facilement le trouver ! Après quoi, la Wittelsbach disparut à son tour et la jeune Sobieska entreprit de raconter tout ce qui s'était passé à une princesse Farnèse de plus en plus horrifiée. Elle fut persuadée de voir une lueur de déception dans le regard de l'Italienne quand elle lui présenta ses excuses de ne pas avoir pu garder Big Moustache pour lui offrir puis Sofia parvint à se débarrasser d'elle en l'envoyant se changer sous prétexte qu'elle était dans un état déplorable. En effet, dans les couloirs du château, tout le monde se retournait pour observer passer la jeune femme totalement dépenaillée et décoiffée mais le plus étrange était sans doute sa bonne humeur manifeste qui la poussait à siffloter et à sautiller comme une gamine. Dieu, qu'elle s'était amusée ! Et elle espérait bien recommencer !