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 Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]

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Elisabeth d'Alençon


Elisabeth d'Alençon

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: seul Dieu peut m'indiquer qui aimer
Côté Lit: Je me réserve pour mon futur époux, je ne suis pas de celles qui se donnent!
Discours royal:



When your faith is strong, you dont need a proof


Âge : 20
Titre : duchesse d'Alençon, abbesse de Remiremont
Missives : 414
Date d'inscription : 17/07/2012


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MessageSujet: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime25.10.12 2:39

Spoiler:

Depuis la déclaration de guerre, la duchesse d’Alençon avait décidé, en tant que grande dame de la Cour, d’aller saluer les grands princes de sa connaissance qui s’apprêtaient à partir pour le front.

- Il est de mon devoir, disait-elle à qui voulait – ou non – l’entendre, en tant que petite-fille de notre bon roi Henri le quatrième, de donner ma bénédiction à tous ces grands hommes qui vont risquer leur vie pour l’honneur du royaume.

Bien qu’elle sache pertinemment, pour l’avoir assidument étudier dans la Bible, que la guerre est une activité barbare, elle jubilait de savoir la France en guerre contre la Lorraine : voilà qui éloignait enfin ce diable de chevalier de son cousin. Elle ne cachait pas sa joie et cachait encore moins qu’avant sa haine pour le chevalier de Lorraine :

- Je savais que cet homme était le Diable lui-même ! Et mon pauvre cousin qui est resté aussi longtemps sous sa néfaste influence. Dieu merci, aujourd’hui, l’ordre des choses est rétablit et il ne fera plus de mal à qui que ce soit en cette Cour.

Elisabeth rayonnait telle une jeune mariée le jour où on la conduirait à l’autel. Elle souriait à tout le monde, poussait le vice jusqu’à distribuer des paroles aimables aux gens, même de basse extraction. Les personnes qui avaient l’habitude de la fréquenter ne la reconnaissaient plus mais la jeune duchesse s’en fichait : alors qu’elle avait cru que la cause de son cousin d’Orléans définitivement perdue, voilà que Dieu trouvait le moyen de séparer les deux amants. Si la haine qu’elle vouait à monsieur de Lorraine était connue de tous, personne ne savait à quel point celle-ci était tenace. Aujourd’hui, plus personne n’avait le moindre doute sur l’affaire, Elisabeth ne faisait même plus mine de se cacher pour faire savoir aux gens qu’elle serait finalement personnellement intervenue si son cousin ne s’était pas décidé à être raisonnable.

[color=red]- Madame vous devriez prendre garde, vous allez finir par provoquer la colère de monsieur le duc ! [/color
]- Oh Catheau, cesse donc de dire des sottises par pitié, mon cousin le prince de France ignore encore certainement les bienfaits que cette déclaration de guerre lui ont rendu car il est encore sous le charme de ce démon ! Mais sitôt qu’il aura repris ses esprits, il se rangera à mon avis, il ne peut en être autrement !

En cette belle matinée de début février, malgré les recommandations de sa suivante, Elisabeth n’avait toujours pas changé d’avis sur la question du maudit chevalier et elle s’apprêtait à rendre visite à son cousin pour prendre de ses nouvelles et lui assurer son soutien : il est difficile d’admettre que le Malin nous a abusé ! Mais bientôt, il partirait en guerre et la duchesse voulait lui donner sa bénédiction avant son départ. Elle était heureuse : Dieu n’avait pas abandonné la France et petit à petit, il libérerait son pauvre cousin.

Néanmoins Catheau restait inquiète et ne cessait de mettre en garde sa maitresse sur le fait qu’elle devrait tenir sa langue et cesser de dire aux gens qu’il ne pouvait rien arriver de mieux à Monsieur que de perdre un être aussi vil ! Mais Elisabeth s’en moquait éperdument et elle ne se préoccupait même pas de se munir d’un visage de circonstance : son bonheur éclatait à la figure de quiconque la regardait. Elle fit sortir son plus beau carrosse, s’installa confortablement en compagnie de ses petits chiens et demanda au cocher d’aller au petit trot jusqu’à la demeure de son cousin.

Enfin, si le mot : « demeure » évoque quelque chose de douillet et familial, il en était tout autrement du palais de Saint-Cloud ou résidait Monsieur le frère du roi ! Un luxe aussi outrageusement tapageur semblait à Elisabeth une véritable provocation envers Dieu. Une de plus pour son cousin.


- Avez-vous vu cela mes chéris ? demanda-t-elle à Ferdinand et le Lorrain. Voilà précisément ce qui peut attirer la colère divine sur son foyer.

Ferdinand se contenta de donner quelques coups de pattes à sa maitresse pour qu’elle le caresse et le Lorrain bailla à s’en décrocher la mâchoire avant de se rendormir sur les genoux de la duchesse. Mais maintenant que le chevalier avait été déclaré ennemi de la nation – Elisabeth ne perdait jamais une occasion de s’en souvenir – la duchesse était sûre de pouvoir sauver l’âme du prince. L’avenir souriait à Elisabeth : elle allait pouvoir faire de Versailles ce modèle de vertu dont elle avait tant rêvé !

Elle descendit du carrosse suivie de ses épagneuls et se fit accompagnée par un laquais jusqu’au salon où se trouvait le duc d’Orléans, sans oublier au passage de critiquer l’étalage de richesse qui – selon le goût délicat et sobre de la duchesse – frisait par moment le mauvais goût.


- La duchesse d’Alençon ! annonça l’huissier qui l’introduisit dans le salon.

Elisabeth découvrit plusieurs courtisans rassemblés autour de Monsieur. Elle n’en connaissait pas la moitié mais, après tout, c’était normal : elle connaissait que trop le type d’amitiés recherchées par son cousin et il était plus que probable qu’elle n’ait rien à dire à la plupart des gens de cette assemblée.

- Mon cousin, quelle joie de vous voir !

Elle s’inclina respectueusement face au prince de France, pris tout de même le temps de lancer un regard désapprobateur à l’assemblée, ne fut-ce que pour le principe, fit signe à ses chiens de cesser d’aboyer après les courtisans, puis, au signal du prince, s’approcha pour l’embrasser comme une cousine aimante.

- Je suis venue vous présenter mes respects ainsi que mes plus sincères encouragements pour cette campagne qui s’annonce !

Elle n’ajouta rien sur l’ancien amant de son cousin, inutile d’humilier celui-ci en public, le fait d’être enfin débarrassé de cette tentation démoniaque suffisait à son bonheur - elle ne se lasserait décidément jamais de s’en faire la réflexion.
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Philippe d'Orléans


Philippe d'Orléans

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Il a été brisé, piétiné et maintenant celui qui était à mes côtés est devenu mon ennemi. Quelle cruelle destinée !
Côté Lit: Le lit de mon palais est si confortable et accueillant !
Discours royal:



ADMIN TRAVESTIE
Monsieur fait très Madame

Âge : 27 ans
Titre : Prince de France, Monsieur le frère du Roi, Duc d'Orléans, de Chartres, d'Anjou, seigneur de Montargis
Missives : 10014
Date d'inscription : 03/01/2007


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MessageSujet: Re: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime28.10.12 19:25

Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] 2py2n1s
« La diplomatie : l'art de plonger dans des eaux troubles sans faire de "plouf". »
Saint-Cloud était une demeure qui avait besoin de vie, de monde dans les salons. Cette délicieuse demeure avait besoin de ne jamais être vide, au péril de paraître morne et en deuil. C'est comme si on vidait Versailles de ses occupants, ce serait bien triste. Bien sûr, on ne parle pas de faire des fêtes à profusion, tous les jours jusqu'à pas d'heure, mais de recevoir des personnes que l'on apprécie (ou pas) pour mettre un peu d'animation. Sinon il n'y aurait que les disputes Philippe-Henriette pour cela, et même les époux s'étaient calmés depuis la mort de leur fils, ayant trouvé un terrain d'entente provisoire. Puis Henriette devait être ravie que son mari parte sous peu à la guerre, cela lui fera un peu de repos.

Mais avant de s'en aller vers les champs de bataille, Philippe voulait profiter de la beauté de son château et multipliait les invitations, les soupers et les petites réceptions. Rien de bien grandiose, juste histoire de mettre un peu l'ambiance dans la maison et en savourer les derniers instants. Mais pourquoi avoir envoyé une invitation à sa cousine, la duchesse d'Alençon ? Il détestait ce bout de femme qui était de sa famille, qui avait tendance à sortir son arbre généalogique à qui voulait l'entendre. Mais Philippe était aussi un petit-fils d'Henri IV, ils étaient à la même hauteur, lui peut être un peu plus pour avoir un grand-père roi, mais aussi un père et un frère. Non, finalement, il lui était supérieur ! A cette pensée, il s'en réjouit alors qu'il s'habillait dans sa tenue du jour, un magnifique rouge flamboyant avec dentelle et rubans bien voyants. Ce sourire, ses mignons le connaissaient bien – un peu trop même – et savaient que leur maître avait une mauvaise idée derrière la tête. Déjà pour qu'il invite sa cousine de son plein gré, c'est qu'il y avait quelque chose de pas net là-dessous. Mais personne n'en dit mot, il ne fallait pas gâcher un moment où le prince était de bonne humeur ! Le seul qui ouvrait la bouche, c'était celui qui parlait pour ne rien dire, pour flatter Philippe comme sa vie en dépendait.

Oh Monsieur, vous allez une nouvelle fois éblouir vos invités avec pareille tenue. Cela met de la gaieté en cet hiver rude, et comment ne pas remarquer à quel point vous êtes resplendissant. Ce rouge vous rehausse le teint, on se croirait presque en été lorsque vous êtes dans une pièce. Voyez vous, j'ai déjà chaud et … le Prince le coupa.
Adolphe Casimir ? demanda le prince d'une voix mielleuse.
Oui, Monsieur ?
Taisez vous. le ton était plus sec. Et si vous avez chaud, c'est que votre derrière n'est qu'à quelques centimètres de la cheminée.

Oui, ce flatteur en herbe à la verve presque poétique s'appelait bel et bien Adolphe-Casimir ! Quel nom affreux, n'est ce pas ? A croire que tous faisaient un concours du nom le plus laid ou qui aurait la plus grande source de moqueries ! Mais revenons à nos moutons avec Élisabeth d'Alençon (qui, par ailleurs, n'avait jamais du voir un mouton de sa vie).

Pourquoi l'avoir invitée ? Oh ce n'était guère par politesse, Philippe pouvait se permettre d' « oublier » sa cousine ou que l'invitation se soit égarée pour être plus poli. Non là, il avait besoin que la jeune femme vienne jusque dans sa demeure et puisse tomber dans le piège qu'il lui avait tendu. Non point d'oubliettes où il la jetterait – même si l'idée était à retenir – mais plutôt la placer dans les griffes diaboliques de Perrine d'Harcourt. Depuis qu'ils avaient monté leur plan machiavélique, Monsieur, Paris et Perrine n'avaient pas vraiment eu le temps de le mettre en place. Mais avec le retour de mademoiselle d'Harcourt, la machine pouvait être relancée. D'ailleurs, Perrine faisait aussi partie des invités, bien évidemment, tout était prêt !

En piste ! Philippe d'Orléans fit son apparition dans la galerie d'Apollon, magnifique galerie à presque faire pâlir la Galerie des Glaces tant elle était lumineuse ! Il y avait environ une cinquantaine de personnes de présentes, des ami(e)s et connaissances du prince qui avaient répondu présents à l'invitation avec grande joie. Au milieu de tout ce monde, légèrement à l'écart se trouvait Perrine d'Harcourt qui ne se mêlait pas vraiment à la population, attendant sans aucun doute que leur proie arrive enfin. Philippe se rendit jusqu'à elle pour la saluer, un large sourire presque démoniaque sur son visage.

Mademoiselle d'Harcourt, quel plaisir que vous soyez ici ! Il était évident que vous n'alliez pas rater l'occasion de vous faire une nouvelle amie. Le ton était enjoué, il était si content ! Ma cousine ne devrait tarder à arriver, il est temps que vous fassiez sa connaissance, vous verrez, elle vous plaira !

Elle pourrait surtout bien la tromper ! Mais après quelques mots échangés, le prince s'en alla vers d'autres groupes pour papillonner, échanger quelques paroles, rire à quelques plaisanteries et recevoir quelques compliments par-ci par-là. Tout d'un coup, un nom se fit annoncer par l'huissier :

La duchesse d'Alençon !

Ah, la voilà enfin ! Monsieur la vit arriver avec ses deux affreux chiens, quel mauvais goût de les emmener ici ! Enfin, elle n'avait qu'eux pour compagnie amicale, autant les exhiber. Mais il n'était pas question de pique mais de grands sourires et politesses. Philippe prit son sourire le plus hypocrite, faisant semblant d'être ravi de voir Élisabeth dans ses lieux. Tant de faussetés pourraient paraître ridicule mais il fallait bien jouer le jeu de la famille unie et chaleureuse. D'ailleurs, il alla à sa rencontrer.

Ma cousine ! Je suis tellement ravi de vous voir en ma demeure ! s'exclama t'il d'un ton peut être un peu trop enjoué pour être naturel.
Mon cousin, quelle joie de vous voir !

Il la salua d'un signe de tête tandis qu'elle faisait la révérence. C'était toujours un petit plaisir que de voir cette bigote si fière de son haut statut s'abaisser devant lui. Il y avait quelques plaisir qui n'avaient pas de prix comme celui-ci. On pouvait d'ailleurs voir la satisfaction dans son regard, suivi du dégoût lorsqu'elle s'approcher pour l'embrasser comme une cousine attendrissante mais il conserva son sourire, qui se crispa légèrement. Comment dire ? Monsieur n'aimait pas quand une femme le touche, alors quand il s'agit de sa cousine, c'est encore pire !

Je suis venue vous présenter mes respects ainsi que mes plus sincères encouragements pour cette campagne qui s’annonce !
Vous êtes tellement aimable, votre bonté me touche. il allia ses paroles en posant une main contre son cœur. Je suis certain que vos prières et votre dévotion nous conduiront à la victoire. continua t'il d'un ton mielleux.

Pouah, plutôt crever que de savoir sa cousine prier pour son salut. Il savait très bien que sa cousine devait jubiler du départ de Lorraine, il mettrait sa main au feu qu'elle espérait que le chevalier ne reviendrait pas de cette guerre, mais là encore, il continua de sourire et ne fit rien qui pourrait paraître trop méchant, comme donner un coup de pied à un de ses clébards qui continuait d'aboyer, sale bête ! Mais faisant comme si de rien n'était, la conversation continua, la menant là où le prince avait placé son piège.

Ma très chère cousine, connaissez vous les d'Harcourt ? Cette famille se multiplie plus vite que leur ombre et parmi cette énorme famille, je pense qu'une demoiselle vous plaira particulièrement. Je vais vous présenter, suivez moi.

Les quelques pas qui séparèrent le point de départ jusqu'à Perrine provoquèrent un sentiment d'exaltation. Il n'y avait rien de mieux que les complots de Cour pour se divertir un petit peu, de s'amuser de la déchéance d'autrui et pouvoir s'en moquer à gorge déployé. Lui, méchant ? Oui tout à fait, il l'assumait dans ce genre de moment, c'était tout à fait son genre. Puis, il fallait bien s'amuser un petit peu avant la guerre, ce n'est pas au campement qu'il allait ruiner des vies sociales. Enfin il le pourrait mais seul, cela n'était pas du meilleur goût. Alors autant mettre à profit son temps à la Cour pour comploter contre sa propre cousine avec mademoiselle d'Harcourt dont il arrivait à la hauteur.

Ma chère cousine, je vous présente mademoiselle Perrine d'Harcourt. Mademoiselle, je vous présente ma cousine dont je vous ai tant parlé, la duchesse d'Alençon, Élisabeth. Comme je vous le disais, ma cousine est un véritable modèle de vertu chrétien. Vous qui cherchez à remettre le monde dans le droit chemin, avoir une alliée est profitable à mon sens.

Tout était dit avec un large sourire et avec un ton inspiré. Si Molière avait entendu le Prince, sans doute aurait-il pu mesurer le talent de comédien de son protecteur. Mais s'il se montrait adorable, il ricanait intérieurement, tellement fier d'avoir fait rencontrer sa cousine avec Perrine qui allait se faire passer pour son amie. Mademoiselle d'Harcourt jouait parfaitement bien son rôle d'ailleurs, on croirait presque voir une pièce de théâtre près de cette fenêtre de la galerie. Il jubilait et tapa dans ses mains avec une large sourire, non feint.

Oh je suis tellement heureux que vous vous entendiez si bien. Je vous laisse quelques instants, j'ai d'autres invités. Ne faites pas trop de bêtises mesdemoiselles !

Il eut un rire tellement féminin et fit un large sourire entendu à Perrine avant de s'éloigner. Mais il allait passer son temps à regarder en leur direction pour surveiller ce qu'il se passait et peut être intervenir en cas de besoin !
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MessageSujet: Re: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime04.11.12 22:42

De deux choses l’une : ou Perrine faisait à cet instant précis la plus grosse et dangereuse erreur qui fût, ou elle saisissait la plus grande chance qui lui serait jamais offerte par la vie. Là, adossée non loin d’une fenêtre dans la magnifique galerie d’Apollon du château de Saint-Cloud, un verre de vin à la main et un petit canapé dans l’autre, elle tenta d’aborder la question avec toute l’objectivité possible. Certes, elle courait le risque - non sans conséquence - qu’on découvre qu’elle dupait allègrement le frère du roi, et sa cousine doublement, mais elle n’avait qu’à baisser les yeux sur ce qu’elle avait en main pour perdre toute impression de prendre un trop grand risque. Enfin, même en illusion, elle semblait faire partie de cette cour dans l’ombre de laquelle elle évoluait sans pouvoir y paraître. Enfin, elle prenait par autrement que dans les renfoncements des alcôves versaillaises aux intrigues vicieuses qui animaient la vie des courtisans. Enfin, elle n’était plus la camériste qui jouait la petite main. Ce soir, elle s’octroyait une particule, et c’était bien elle qu’attendait le premier Prince de France pour comploter contre son éminente cousine. Et même si tout cela ne devait durer que le temps d’une soirée, Perrine, qui s’était déjà maintes fois posé la question, en conclut une fois encore qu’il serait idiot de laisser passer une occasion pareille de s’essayer aux jeux de la cour. Visiblement.

Vêtue d’une robe empruntée à Gabrielle, la fausse demoiselle d’Harcourt observait toutes ces merveilles dont elle connaissait en détail la face cachée, d’un oeil ironique. Elle ne connaissait évidemment personne, mais c’était moins une timidité (connaissait-elle seulement le sens de ce mot ?) mal venue qui retenait Perrine que l’attente de son heure. La duchesse d’Alençon n’était pas encore arrivée, et c’était bien elle que la jeune femme était venue rencontrer. Cette bigote insupportable qui n’avait de cesse de réciter son arbre généalogique à quiconque se permettait de la contredire n’était certes pas de celles que la camériste pourrait apprécier. Mais lorsqu’il s’agissait de cabales et d’intrigues, alors elle était capable de se faire passer pour bien des personnes qu’elle n’était pas. Il n’y avait qu’à écouter ce que pensaient d’elle les domestiques la fréquentant : un ange, une demoiselle adorable... Quiconque connaissant réellement Perrine ne pouvait que s’étonner d’une telle description. Mais là était tout le talent de ce faux ange qui, pour les besoins du complots, se ferait une joie de jouer les bigotes. Il y avait plus amusant comme rôle, mais après tout, le jeu et les inévitables affres dans lesquels cette petite plaisanterie jetterait la cousine du roi en valaient largement la chandelle - et l’effort.

Elle en était là de ses songes lorsque Monsieur fit son entrée dans la galerie. Tout de rubans vêtus, et visiblement d’excellente humeur, son arrivée tira un sourire à Perrine, bien consciente qu’il avait d’autres invités, se contenta de porter son verre de vin à ses lèvres. Elle échangea quelques mots avec un marquis curieux de la découvrir à Saint-Cloud alors qu’il ne l’y avait jamais vue avant, adressa un sourire mielleux à une baronne qui la détaillait des pieds à la tête et eut également le temps de s’approprier un macaron au chocolat (décidément, elle pourrait très vite se faire à cette vie) avant que le Prince ne se dirige vers elle. Une moue entendue aux lèvres, elle s’inclina gracieusement devant lui.
« Mademoiselle d'Harcourt, quel plaisir que vous soyez ici ! Il était évident que vous n'alliez pas rater l'occasion de vous faire une nouvelle amie. Ma cousine ne devrait tarder à arriver, il est temps que vous fassiez sa connaissance, vous verrez, elle vous plaira !
- Je n’en doute pas, Monsieur, répondit-elle, avec un sourire tout sauf angélique. Vous ne sauriez imaginer ma hâte à la rencontrer ! »
Oh elle avait hâte, oui. Hâte de s’enfoncer un peu plus avant dans les risques innombrables qu’elle prenait, mais après tout, que craignait-elle de plus que lorsqu’elle se faisait passer pour la duchesse de Longueville, quelques semaines plus tôt à peine ?
C’est sur cette certitude qu’elle se mêla un peu plus à la foule, à l’aise comme si là était réellement sa place, tout en guettant les arrivées des uns et des autres. La soirée n’était encore que peu avancée, si la duchesse devait venir, nul doute qu’elle ne tarderait plus. Il ne serait pas de bon ton pour une bigote de s’éterniser trop longtemps dans une demeure telle que le château de Saint-Cloud...

« La duchesse d’Alençon ! »
La voix de l’huissier tira un instant Perrine d’une conversation futile avec l’un de ce qui semblait êtres les mignons de Monsieur et qui cherchait visiblement à se faire une amie de la nouvelle amie du Prince. Elle leva vaguement la tête vers l’entrée, et réprima un sourire machiavélique en y voyant la fameuse duchesse, avant de revenir à sa discussion, quoi que sont esprit fût désormais ailleurs.
« Veuillez m’excuser, mais j’aperçois là-bas un ami que je dois absolument aller saluer, lança-t-elle au détour d’un court silence pour s’éclipser. »
Son interlocuteur hocha la tête à regret et la laissa s’éloigner. Habile, Perrine se fondit dans la foule pour aller observer de plus près et sans en avoir l’air le tête à tête du Prince et de sa cousine. Afin de faire bonne impression, elle déposa son verre sur le premier plateau venu - autant pousser les apparences jusqu’au bout ! - et attendit sagement non loin d’une fenêtre vers laquelle elle fit mine de rêvasser que l’on vint la trouver. Elle fit si bien que l’arrivée de Monsieur et de la duchesse la surprit presque réellement. Perdue dans ses pensées, elle tourna vivement la tête à leur approche, et afficha un sourire qui passait sans mal pour sincèrement avenant. La comédie pouvait commencer.

« Ma chère cousine, lança le Prince, je vous présente mademoiselle Perrine d'Harcourt. Mademoiselle, je vous présente ma cousine dont je vous ai tant parlé, la duchesse d'Alençon, Élisabeth.
- Madame la duchesse, s’inclina respectueusement Perrine.
- Comme je vous le disais, ma cousine est un véritable modèle de vertu chrétien. Vous qui cherchez à remettre le monde dans le droit chemin, avoir une alliée est profitable à mon sens.
- Je suis touchée de vous voir prendre mes ambitions pour ce monde au sérieux, Monsieur, répondit-elle en feignant l’étonnement. Mais je connais la réputation immaculée de madame la duchesse, et je suis honorée et réellement ravie que vous nous présentiez ! »
Elle assortit ces paroles d’un regard brillant et d’un sourire comblé en direction de la royale cousine, le tout avec un naturel déconcertant. Un jappement attira son attention, et elle dut se mordre la joue pour ne pas rire à la vue des deux chiens.
« Ils sont adorable ! lança-t-elle se baissa un instant sur eux.
- Oh je suis tellement heureux que vous vous entendiez si bien. Je vous laisse quelques instants, j'ai d'autres invités. Ne faites pas trop de bêtises mesdemoiselles ! »
La fausse demoiselle d’Harcourt inclina légèrement la tête sans répondre et suivit des yeux le départ du Prince. Il était temps de passer à de plus sérieux arguments.

Perdant soudain son air joyeux (presque niais selon elle), elle tourna vers la duchesse un regard profondément soulagé.
« Comme je suis heureuse de trouver quelqu’un tel que vous en ces lieux ! s'exclama-t-elle comme si l’on venait d’ôter un poids de sa poitrine. Je commençais à me demander quelle idée folle idée m’avait conduite jusque ici ! C’est le seigneur qui vous envoie, duchesse ! »
Elle darda un regard peu amène sur un mignon qui semblait chercher des yeux Monsieur dans la foule, et s’apprêtait à venir leur adresser la parole. Il fit volte face sans oser aller plus loin, et Perrine laissa échapper un sourire, assorti d’une moue de dégoût.
« Comment peut-on vivre ainsi ? Pardonnez ma franchise, je sais qu’il s’agit de votre cousin mais... je crains réellement pour l’âme de Monsieur le Prince. »
Et derrière son air contrit, la jeune femme jubilait. Cette soirée l’amusait décidément follement !
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Elisabeth d'Alençon


Elisabeth d'Alençon

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MessageSujet: Re: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime15.11.12 4:03

Décidément rien ne pourrait ruiner cette journée. Pourtant, Elisabeth était entourée par tout ce qui l’entourait et qui évoquait à ses yeux l’image même de la damnation éternelle. Mais un jour comme aujourd’hui, elle était bien décidée à faire preuve de clémence, certaine que son cousin se tournerait bientôt à nouveau vers Dieu. En l’observant mieux, il est vrai qu’on pouvait le trouver plus féminin que viril mais la duchesse refusait de penser qu’un membre de sa famille pouvait avoir eu envie de goûter au vice de son propre chef. Le responsable de cette débauche était en disgrâce et les manières de son cousin devaient plus relever de la simple provocation que d’un réel attrait pour la bougrerie. Elle déambula donc dans ce rassemblement de mauvais goût au bras de son cousin, les deux chiens sur les talons.

- Ma très chère cousine, connaissez vous les d'Harcourt ?
- Oui il s’agit de ces comtes normands il me semble. J’ai entendu parler de plusieurs de leurs membres
- Cette famille se multiplie plus vite que leur ombre et parmi cette énorme famille, je pense qu'une demoiselle vous plaira particulièrement. Je vais vous présenter, suivez moi.
- Avec grand plaisir mon cousin !

Elisabeth eut quand même une petite moue réprobatrice : le duc d’Orléans avait l’art de s’entourer de gens de basse qualité, à qui comptait-il donc la présenter. Elle aurait été ravie de s’adresser à un comte, titre presque équivalent à celui de duc après tout, mais une petite demoiselle de rien du tout ? Était-elle seulement digne d’intérêt ? Car Elisabeth voulait bien avoir l’esprit légèrement ouvert et s’adresser à – soyons fous – des marquis ou autre, mais est-ce que mademoiselle d’Harcourt était seulement titrée ?

Son cousin la mena à une jolie jeune femme brune, drapée dans une robe très élégante. Elisabeth fut rassurée par cet élément, la famille devait posséder quelques ressources pour que leur fille soit mise de la sorte.


- Ma chère cousine, je vous présente mademoiselle Perrine d'Harcourt. Mademoiselle, je vous présente ma cousine dont je vous ai tant parlé, la duchesse d'Alençon, Élisabeth.

Elisabeth ne put s’empêcher de marquer son étonnement : son cousin avait assidument parlé d’elle à l’une de ses connaissances ? Elle en fut incroyablement touchée, elle qui croyait qu’il lui en voulait pour la kabbale qu’elle montait contre son ancien amant. Elle eut un sursaut d’espoir quant à la guérison du prince et cela illumina encore plus sa journée.


- Madame la duchesse, s’inclina respectueusement la demoiselle d’Harcourt.
- Mademoiselle, répondit poliment Elisabeth.
- Comme je vous le disais, poursuivit le prince, ma cousine est un véritable modèle de vertu chrétien. Vous qui cherchez à remettre le monde dans le droit chemin, avoir une alliée est profitable à mon sens.
- Je suis touchée de vous voir prendre mes ambitions pour ce monde au sérieux, Monsieur. Mais je connais la réputation immaculée de madame la duchesse, et je suis honorée et réellement ravie que vous nous présentiez !
- Eh bien madame, répondit Elisabeth sincèrement émue, c’est un plaisir partagé.

Oui, Elisabeth ne pouvait croire à son bonheur : toutes les discordes avec son cousin semblaient effacées et voilà qu’on lui présentait une jeune femme vertueuse. Elles étaient si peu nombreuses à Versailles – la duchesse ne comptait que ses deux amies la princesse de Calenberg et la comtesse de Castelon, parmi elles – une rencontre de ce genre était toujours un véritable cadeau du Ciel. La jeune femme en était là dans ses considérations lorsqu’elle entendit un jappement. Elle se retourna juste à temps pour voir Lorrain finir de se soulager sur une tenture tandis que Ferdinand courait joyeusement autour. Elisabeth retint au bord des lèvres la plaisanterie que lui inspirait l’ironie de la situation.

- Ils sont adorables, reconnut mademoiselle d’Harcourt en se penchant sur eux.
- Oui, approuva la duchesse, ils sont encore très jeunes donc ils ne sont pas encore bien élevés mais ils feraient fondre le cœur de n’importe quelle créature en ce monde.

Décidément, si cette demoiselle aimait autant la vertu et les animaux qu’elle le disait, elles avaient effectivement tout pour devenir amies.

- Oh je suis tellement heureux que vous vous entendiez si bien, dit le duc d’Orléans. Je vous laisse quelques instants, j'ai d'autres invités. Ne faites pas trop de bêtises mesdemoiselles !
- Je vous en prie mon cousin, répondit Elisabeth avec un sourire forcé.

Cette dernière remarque l’avait légèrement irritée : il savait qu’elle ne commettrait jamais la moindre sottise et en plaisanter relevait du mauvais goût. Surtout lorsque l’on voyait ses autres invités, tous ces hommes encore plus précieux que leurs épouse - quand ils en avaient – n’avaient rien pour forcer l’admiration. Mais son cousin était prince royal et par-là même l’une des très rares personnes à être d’un rang supérieur au sien. Aussi elle s’empêcha-t-elle de relever mais en lui jurant mentalement qu’elle lui ferait connaître son point de vue sur la question d’une façon ou d’une autre.

- Mon cousin a parfois un humour…bien à lui, dit-elle sur le ton de la confidence à sa nouvelle compagne.
- Comme je suis heureuse de trouver quelqu’un tel que vous en ces lieux ! Je commençais à me demander quelle idée folle idée m’avait conduite jusque-ici ! C’est le seigneur qui vous envoie, duchesse !
- Allons mon enfant, si vous avez été invitée, il aurait été parfaitement inconvenant de refuser. Sans compter qu’il est bon de montrer un peu de bienséance, particulièrement dans un endroit comme celui-ci.

Le regard d’Elisabeth fut attiré par un homme qui riait si fort et si aigu que ses oreilles en sifflaient. Avait-on idée de se donner ainsi en spectacle ? C’en était presque trop pour la duchesse d’Alençon. Heureusement qu’elle avait trouvé une interlocutrice parfaitement charmante. Cela lui paraissait d’ailleurs étrange de l’appeler « mon enfant », elles devaient avoir sensiblement le même âge.

- Comment peut-on vivre ainsi ? Pardonnez ma franchise, je sais qu’il s’agit de votre cousin mais... je crains réellement pour l’âme de Monsieur le Prince.

Elisabeth en resta interdite : ces mots auraient tout aussi bien pu sortir de sa propre bouche. Ainsi d’autres personnes voulaient ramener le prince dans le droit chemin.

- Vous êtes toute pardonnée mademoiselle ! Au contraire, de telles pensées vous honorent. Je ne conçois même pas que l’on puisse encourager mon malheureux cousin dans de tels vices. Je suis certaine que naturellement, c’est un homme bon, mais il fréquente un peu trop le démon à mon goût et cela lui jouera des tours, dans cette vie ou dans l’autre.

Elisabeth tâcha de ne pas trop hausser le ton : médire du vulgaire chevalier de Lorraine en public était une chose, critiquer les mœurs d’un prince royal, c’était autre chose. Maintenant qu’elle était en position de sauver l’âme de son cousin, ce n’était pas le moment de tomber en disgrâce. Elle entraina mademoiselle d’Harcourt vers des sièges de l’autre côté de la salle, Ferdinand et le Lorrain jappant joyeusement derrière elles. Une fois assises, elle prit Ferdinand sur ses genoux et proposa à mademoiselle d’Harcourt de faire de même avec le Lorrain – malgré la mesquinerie du geste, elle ne voulait pas avoir sur elle le chien qui venait d’uriner sans que les serviteurs ne viennent éponger ses poils ensuite.

- Je dois vous avouer mademoiselle que je pense également que c’est le Ciel qui vous envoie à moi en ces lieux, je me devais de saluer mon cousin, mais je craignais un peu la compagnie que l’on croise autour de lui. Je suis aussi surprise que ravie de savoir qu’il fréquente une personne de votre qualité, cela prouve qu’il veut renouer avec Dieu et rien ne pouvait me faire plus plaisir. Par quel miracle êtes-vous devenue l’une de ses connaissances ?

Elisabeth n’avait pas l’intention de s’appesantir sur la question, à ses yeux, seul le fabuleux résultat comptait.

- Quoi qu’il en soit, reprit-elle en caressant son chien qui se mit à lécher affectueusement les doigts de sa maitresse, je vous avoue que je serai ravie de vous compter dans mes amis. Les courtisans qui cherchent le salut se comptent sur les doigts d’une main.

Elle sourit à mademoiselle d’Harcourt en priant pour qu’elle ne passe pas à côté de l’honneur qu’elle venait de lui faire.

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MessageSujet: Re: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime30.12.12 16:55

Dans le rôle de la jeune fille en fleurs, perdue dans le vice qui étouffait la cour, Perrine ne se serait jamais crue si douée. Et pourtant, il lui suffit d’un regard sur la duchesse d’Alençon pour savoir qu’elle avait retenu son attention, et qu’elle avait réussi à se donner l’image d’une demoiselle d’Harcourt à son exact opposé. Le jeu en était presque trop facile, mais elle ne ménagea pas pour autant ses efforts : facile ou non, pour rien au monde elle n’aurait cessé de jouer. Il y avait dans cette douce tromperie à visage découvert quelque chose de grisant qui lui était encore inconnu - elle qui savait tout de l’intrigue. Jamais, sinon dans les bras de Paris, elle n’avait plus goûté la saveur de l’interdit. Elisabeth d’Alençon, toute duchesse qu’elle fut, était bien malheureuse de se trouver ainsi dans ses filets, car pour ce petit jeu qui lui ouvrait plus de portes qu’elle n’en pourrait ouvrir, Perrine avait bien l’intention de mener la partie avec tout le sournois talent dont elle était capable.

C’est donc en veillant à ce que l’on pût songer à donner le bon Dieu sans confession à mademoiselle d’Harcourt qu’elle s’adressa à l’illustre duchesse. La terrible demoiselle en s’épargna aucun moyen, elle qui la veille encore, imaginait quelles misères pourraient bien subir les deux chiens en compagnie d’une autre servantes - ces deux mêmes chiens sur lesquels elle prit quelques secondes pour se pencher, un immense sourire niais aux lèvres. Ces deux stupides créatures qui faisaient parfois autant parler d’elles que de leur maîtresse à la cour n’avaient rien à ses yeux qui fût «adorable» mais pour séduire Alençon, et mener à bien la petite farce des deux princes, elle alla même jusqu’à gratifier l’un deux d’une caresse sur le haut du crâne. Que ne ferait-elle pas pour les besoins de l’intrigue ?

C’est sur ces stupidités que les abandonna Monsieur, et de charmante mais respectueuse demoiselle, Perrine put devenir bigote et pleine de mépris pour cette vicieuse cour, quitte à en écorcher quelque peu le cousin de la duchesse.
« Vous êtes toute pardonnée mademoiselle ! Au contraire, de telles pensées vous honorent, répondit celle-ci lorsque la jeune femme s’en excusa, avec dans le regard quelque chose qui indiqua assez bien à celle-ci qu’elle venait de marquer un nombre considérables de points. Je ne conçois même pas que l’on puisse encourager mon malheureux cousin dans de tels vices. Je suis certaine que naturellement, c’est un homme bon, mais il fréquente un peu trop le démon à mon goût et cela lui jouera des tours, dans cette vie ou dans l’autre.
- Hélas, soupira Perrine en laissant un instant s’attarder un regard plein de pitié toute chrétienne sur le Prince. Mais je suis convaincue que tout n’est pas encore perdu pour son âme ! »
Elle adressa un sourire plein d’espoir à sa compagne, et accepta de la suivre jusqu’à deux fauteuils installés à l’autre bout de la salle, loin de oreilles indiscrètes. Elle resta toute aussi souriante lorsque la duchesse l’invita à prendre ses ses genoux l’un des deux chiens - celui qui avait eu le mauvais goût d’uriner derrière une tenture - mais cette fois, n’en pensait pas moins. Sale bête.

« Je dois vous avouer mademoiselle que je pense également que c’est le Ciel qui vous envoie à moi en ces lieux, reprit Elisabeth d’Alençon, je me devais de saluer mon cousin, mais je craignais un peu la compagnie que l’on croise autour de lui.
- Nous étions destinées à nous rencontrer ici, je crois, répondit-elle les yeux brillants.
- Je suis aussi surprise que ravie de savoir qu’il fréquente une personne de votre qualité, cela prouve qu’il veut renouer avec Dieu et rien ne pouvait me faire plus plaisir. Par quel miracle êtes-vous devenue l’une de ses connaissances ? »
Perrine réprima à merveille une moue mesquine. La question, apparemment innocente, avait toute son importance.
« C’est un ami commun qui nous a présentés, il y a quelques temps... commença la camériste, mais aussitôt, la duchesse reprit :
- Quoi qu’il en soit, je vous avoue que je serai ravie de vous compter dans mes amis. Les courtisans qui cherchent le salut se comptent sur les doigts d’une main. »
Mademoiselle d’Harcourt, frustrée de n’avoir pu en venir au troisième protagoniste de l’histoire, n’en saisit pas moins l’occasion inestimable qui se présenta alors à elle. Laissant le chien sauter (enfin) par terre pour aller tourner aux pieds de sa maîtresse, elle laissa un sourire comblé étirer ses lèvres.
« Oh, duchesse, je serais réellement honorée de pouvoir me dire l’une de vos amis ! s'exclama-t-elle. J’estime peu de gens comme je vous estime, même si je n’avais jamais osé me présenter à vous... Finalement, monsieur votre cousin a peut-être plus fait qu’il ne le pense pour son propre salut en nous réunissant ! »
Elle adressa à Elisabeth une moue complice comme pour sceller leur nouvelle amitié. Si elle était sincèrement réjouie par ce qui venait de se produire, elle l’était au vu et su de la duchesse et intérieurement pour deux raisons bien différentes. Et derrière le masque angélique de mademoiselle d’Harcourt, Perrine jubilait.

Elle observa un court instant les deux chiens qui jouaient plus loin puis leva les yeux vers le reste de la foule, suivant d’un regard peu amène deux mignons au loin.
« Quelle pitié, soupira-t-elle. Vous savez, parfois je me demande ce que seraient devenus ces jeunes gens s’ils ne s’étaient pas laissés prendre au vice. Ce sont ses fréquentations qui font du Prince ce qu’il est aujourd’hui. Même si l’on y trouve parfois quelques surprises ! »
Elle se saisit d’une douceur sur un plateau avant de reprendre la parole.
« Par exemple, cet ami qui m’a présentée à Monsieur. Il s’agit de Paris de Longueville. Vous connaissez comme moi sa triste réputation, duchesse, mais il est jeune. Je le connais fort bien et sais que derrière cette réputation se cache un prince généreux, et d’une grandeur d’âme insoupçonnée. Elle croqua dans la pâtisserie, avec sur le visage une telle expression que l’on ne saurait remettre en doute sa sincérité. Au fond de lui, je le sais enclin à la vertu, mais voyez dans quelle famille il est né... »
Elle esquissa une moue méprisante et se pencha vers sa nouvelle amie pour poursuivre sur le ton de la confidence :
« Entre nous je crois que sa soeur, la duchesse de Longueville, a une fort mauvaise influence sur lui. »
La situation avait quelque chose de profondément ironique qui fit rire intérieurement la jeune femme. S’entendre parler ainsi de Gabrielle en prétendant faire de Paris un homme vertueux - elle qui savait pertinemment bien qu’il ne l’était pas - valait toutes les intrigues. Il faudrait absolument qu’elle raconte cette histoire-là à la duchesse. Elles en riraient ensemble.
« Je m’escrime à l’aider à changer depuis que je le connais. Elle termina le macaron, et soudain son visage s’illumina, comme si une idée lui été subitement venue. Si vous le souhaitez, vous pourriez le rencontrer ? A l’écart de la cour et de ses vices, vous verrez ce qu’il est vraiment, je vous en fais la promesse ! »

La cabale était lancée.
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Elisabeth d'Alençon


Elisabeth d'Alençon

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: seul Dieu peut m'indiquer qui aimer
Côté Lit: Je me réserve pour mon futur époux, je ne suis pas de celles qui se donnent!
Discours royal:



When your faith is strong, you dont need a proof


Âge : 20
Titre : duchesse d'Alençon, abbesse de Remiremont
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MessageSujet: Re: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime05.02.13 22:58

Est-ce qu’Elisabeth aurait pu se rendre compte de la supercherie dont elle était victime ? La chose n’était pas impossible mais pour l’heure, elle ne pensait qu’à goûter au bonheur d’une nouvelle rencontre. Après tout, malgré ses nombreuses qualités – selon son propre avis – elle avait très peu d’amis et parmi ceux-ci, tous ne partageaient pas intégralement ses convictions. Il était rafraîchissant de simplement savourer le fait de faire la connaissance de quelqu’un avec qui on avait tant en commun sans se poser la moindre question. De toute façon, même si elle était parfaitement capable d’en faire, la duchesse détestait les remises en question. En plus, son amie de cœur, la princesse de Calenberg, allait partir de l’autre côté du front pendant cette guerre. La duchesse n’aurait donc plus sa confidente auprès d’elle. Elle y songeait tout en caressant distraitement Ferdinand qui jappait à ses pieds tandis que le Lorrain était en train de grogner après l’un des « mignons » de son cousin. Son frère huma l’air un court instant avant de se précipiter à sa suite, terrorisant la pauvre âme – pourtant déjà perdue – de l’ami de Monsieur.

- Oh, duchesse, je serais réellement honorée de pouvoir me dire l’une de vos amis ! J’estime peu de gens comme je vous estime, même si je n’avais jamais osé me présenter à vous... Finalement, monsieur votre cousin a peut-être plus fait qu’il ne le pense pour son propre salut en nous réunissant !

Pour un peu, Elisabeth aurait rougit face à un tel compliment mais elle parvint à se contenir, se contentant simplement de se relever un peu en prenant un air modeste.

- Même si je suis flattée de votre estime mademoiselle, ce n’est pas là mon dessein : la vanité est un sentiment si vil. Mais je suis sincèrement heureuse que nous nous comprenions, surtout en ce qui concerne mon pauvre cousin.

Les deux jeunes femmes restèrent un moment silencieuses. Ferdinand et le Lorrain s’attaquaient désormais un peu plus férocement au compagnon de Monsieur : tandis que le Lorrain continuait à lui grogner dessus, Ferdinand avait attrapé un ruban de soie et ne prétendait pas le lâcher. Elisabeth sourit : si innocentes que soient ces créatures, elles savaient où se trouvaient le vice et le combattaient instinctivement. Elle rit de bon cœur sans un geste de secours pour le malheureux.

- Quelle pitié. Vous savez, parfois je me demande ce que seraient devenus ces jeunes gens s’ils ne s’étaient pas laisser prendre au vice. Ce sont ses fréquentations qui font du Prince ce qu’il est aujourd’hui. Même si l’on y trouve parfois quelques surprises !
- Vous m’ôtez les mots de la bouche mademoiselle, approuva Elisabeth, si ces hommes n’étaient pas si fats, j’aurai cru qu’ils avaient été amenés directement par le Malin afin de pervertir le prince de France. Mais il n’y a décidément rien de malin en eux. Voici donc une preuve de plus que Dieu récompense d’un esprit bien fait ceux qui suivent Sa voie. Mais dites m’en plus mademoiselle, de quel genre de surprise parlez-vous ?
- Par exemple, cet ami qui m’a présentée à Monsieur. Il s’agit de Paris de Longueville.
- Ah, monsieur de Longueville,
répondit Elisabeth avec une moue de désapprobation.

Elle ne connaissait pas personnellement ce monsieur mais elle l’avait déjà aperçu à la Cour et avait bien entendu ouïe sa réputation plus que sulfureuse. Elle observa la demoiselle d’Harcourt en se demandant si elle ne souffrait pas de naïveté pour s’être laissée prendre au jeu de ce séducteur.

- Vous connaissez comme moi sa triste réputation, duchesse, reprit la demoiselle, mais il est jeune. Je le connais fort bien et sais que derrière cette réputation se cache un prince généreux, et d’une grandeur d’âme insoupçonnée.
- Pardonnez ma franchise mais en effet, cette grandeur d’âme est parfaitement insoupçonnée. Je suis toute disposée à vous croire néanmoins.
- Au fond de lui, je le sais enclin à la vertu, mais voyez dans quelle famille il est né...


Elisabeth répondit par un petit rire discret – mais toutefois distingué – en songeant à la famille Longueville. Elle détestait viscéralement cette engeance. Si elle avait été une fille loyale, ça n’aurait pas été le cas puisque leurs parents avaient été dans le même camp durant la Fronde, mais elle ne pouvait s’empêcher de haïr les petits. Le mâle pour sa réputation, la femelle pour sa manie de lui voler la préséance dès que l’occasion lui en était donnée.

- Entre nous je crois que sa sœur, la duchesse de Longueville, reprit la demoiselle d’Harcourt, a une fort mauvaise influence sur lui.

Avec toute la mauvaise foi (sans mauvais jeu de mots) qui la caractérisait, la duchesse ne put résister à cette dernière remarque de la demoiselle. Si quelqu’un avait une vue aussi exacte de mademoiselle Gabrielle, elle devait avoir un avis assez avisé sur les gens.

- Oui mademoiselle, vous avez raison ! Cette femme est diabolique et s’il a autant de vertus que vous me le dites, il doit être loyal envers sa famille. Mais cette mademoiselle de Longueville ne peut avoir qu’une influence néfaste sur une âme pure. Peut-être son pauvre frère a-t-il simplement besoin d’un meilleur modèle !
- Je m’escrime à l’aider à changer depuis que je le connais. Si vous le souhaitez, vous pourriez le rencontrer ? A l’écart de la cour et de ses vices, vous verrez ce qu’il est vraiment, je vous en fais la promesse !


Elisabeth fronça les sourcils, la question méritait réflexion. Elle ne doutait pas de pouvoir faire quelque chose pour une âme torturée, Dieu était avec elle, Il devait très certainement lui envoyer des âmes à ramener sur le droit chemin. Elle suivait Sa voie sans faillir, il était normal qu’elle en aide d’autres à pouvoir atteindre ce merveilleux but. Mais elle craignait par contre pour son image en étant vue avec un homme aux mœurs aussi légères. Mais ne devait-elle pas prendre le risque au nom du Seigneur ?

Au loin, elle entendit le mignon agressé par ses chiens protester un peu plus violemment, en effet, Ferdinand lui avait taquiné légèrement le mollet et on pouvait voir le sang perlé. Le Lorrain s’avançait de façon menaçante en grognant plus que jamais vers lui, prêt à donner un coup de patte à Ferdinand. Bien, la duchesse se sentait d’humeur charitable. Elle siffla et baissa la main vers le bas de sa robe. Aussitôt les deux chiens se précipitèrent vers leur maitresse et se couchèrent à ses pieds. Sans un regard pour la victime de ses fauves, Elisabeth se tourna vers la demoiselle d’Harcourt :


- Pourquoi pas ? Après tout, qui suis-je pour ignorer une âme égarée recherchant son chemin ? Et puis, si vos observations sont aussi exactes que celles que vous avez faites sur tout ce beau monde cet après-midi, je suis toute disposée à vous faire confiance !

Elle attrapa trois macarons, en découpa deux pour ses chiens et se réserva le troisième.

- Mais mademoiselle, en tant que cousine de Sa Majesté, je ne puis me permettre toutes les imprudences : nous nous rencontrerons en privé. Tant que nous n’avons pas délivré ce pauvre garçon de l’influence néfaste de sa sœur, il est primordial que nous ne soyons pas vues en sa compagnie.

Elle ajouta en se penchant vers sa nouvelle amie :

- Vous devriez vous méfier des courtisans, ces gens sont toujours prêts à colporter les pires infamies sans le moindre égard pour la vertu d’une demoiselle. Préservez-vous de ces gens et pour cela, nous ne devrons pas rencontrer monsieur de Longueville en public. Si je vous dis cela, rajouta-t-elle avec un sourire bienveillant, c’est parce que j’ai de l’amitié pour vous et je ne veux pas que vous soyez en disgrâce !

N’importe qui aurait pu dire que la duchesse ne manquait pas d’air : la plupart des rumeurs les plus viles venaient d’elle. Aussi médire sur le fait que le commérage soit monnaie courante à la Cour était plutôt osé de sa part en aurait fait rire plus d’un. Seulement il ne fallait pas sous-estimer le talent de la duchesse quand il s’agissait de ne PAS admettre ses erreurs.

- Si cela vous va, nous pourrions peut-être nous rencontrer chez ma mère, au palais d’Orléans. C’est suffisamment éloigné de Versailles, ainsi nous pourrions aider ce jeune homme sans nous compromettre, qu’en pensez-vous ?

Elle lui lança son sourire le plus confiant, telle une belle promesse d’amitié.

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MessageSujet: Re: Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine]   Voilà comment sont récompensées les bonnes intentions [Eli-Mister-Perrine] Icon_minitime04.06.13 19:42

Ce soir-là, Perrine n’aurait pas échangé sa place pour tout l’or du monde. Si elle s’appliquait à chasser de ses traits toute expression malvenue, et ce avec un talent qu’il était bien frustrant de ne pouvoir faire reconnaître, intérieurement, elle jubilait. Elle jubilait car elle sentait qu’en quelques minutes, elle avait réussi à gagner la confiance de la duchesse, et il n’y avait à ses yeux rien de plus délicieux que de voir les fils d’une intrigue se nouer, juste là, sous le nez même de celle qui allait en être la seule victime. Tout semblait si parfaitement s’engager que même le rôle de mademoiselle d’Harcourt, qui représentait pourtant tout ce dont elle ricanait en temps normal, lui paraissait plaisant à jouer - assez plaisant pour en oublier tout ce à quoi elle s’exposait. Si l’éventualité qu’Elisabeth d’Alençon puisse découvrir la supercherie avant que l’intrigue ait été menée à son terme lui effleura l’esprit ? Peut-être. Mais Perrine était trop joueuse pour reculer devant cette hypothèse, et savait du reste que le risque n’était pas grand : il suffisait de voir le ravissement qui se peignait sur le visage de sa nouvelle meilleure amie chaque fois ou presque qu’elle ouvrait la bouche. Il faut dire que la rusée camériste avait bien plus de cartes en main que la duchesse, elle qui connaissait tout le monde sans l’être de quiconque. Elle savait où et comment lancer ses flèches pour être sûre qu’elles atteignent leur cible. Monsieur, ses mignons, le vice qui hantait cette cour et pour finir, Gabrielle.
« Oui mademoiselle, vous avez raison ! Cette femme est diabolique et s’il a autant de vertus que vous me le dites, il doit être loyal envers sa famille. Mais cette mademoiselle de Longueville ne peut avoir qu’une influence néfaste sur une âme pure. Peut-être son pauvre frère a-t-il simplement besoin d’un meilleur modèle ! »
Si Perrine se retint de ricaner, elle ne sut de quoi elle devait rire. De ce qui la conduisait à médire de Gabrielle avec laquelle elle se moquerait bien de la duchesse quand elle lui raconterait cette histoire ? D’avoir réussi, d’un mot, à dédouaner Paris de tous les vices qu’on lui prêtait et qu’il portait si bien ? L’un ou l’autre se valaient bien, et une chose était certaine, elle savourait pleinement l’ironie de la situation.

C’est toutefois avec toute la sincérité du monde qu’elle s’illumina soudain, pour proposer à Elisabeth de l’aider dans son entreprise et de rencontrer, elle aussi, le jeune duc de Longueville à la réputation si fausse. Si dans les yeux de la demoiselle d’Harcourt brillait une bonne foi dont le diable même ne pourrait douter, Perrine n’en guettait pas moins avec acuité la moindre des réactions de sa compagne. Elle semblait, certes, avoir gagné sa confiance mais tout le piquant et tout l’intérêt de cette délicieuse cabale se jouait maintenant, car elle n’avait que faire d’une amie telle que la médisante et trop chrétienne Elisabeth d’Alençon si celle-ci refusait de rencontrer Paris.
« Nous ne serons jamais trop de deux pour lui ouvrir les yeux et le tirer des griffes de sa soeur, insista-t-elle voyant que la duchesse hésitait. »
Elle laissa un sourire plein d’espoir fleurir sur ses lèvres, mais leur attention fut un instant attirée par les grognements des insupportables - pardon, adorables - bestioles qui s’en prenaient de plus en plus violemment à l’un des garçons qui formaient la cour de Monsieur. Perrine se prit à songer que le malheureux allait finir dévoré, mais avant que l’on s’attaquât de nouveau à sa jambe, Alençon siffla et les deux chiens, dociles, revinrent se coucher à ses pieds. La camériste, quant à elle, se retint d’hausser un sourcil pour n’esquisser qu’un rictus amusé avant de revenir à ce qui la préoccupait, c’est-à-dire la décision de la duchesse.
« Pourquoi pas ? lança enfin celle-ci. Après tout, qui suis-je pour ignorer une âme égarée recherchant son chemin ? Et puis, si vos observations sont aussi exactes que celles que vous avez faites sur tout ce beau monde cet après-midi, je suis toute disposée à vous faire confiance !
- Oh duchesse, vous ne serez pas déçue, je vous le promets ! s'exclamèrent à la fois la demoiselle d’Harcourt et son vil double, toutes deux ravies, mais pour des raisons bien différentes.
- Mais mademoiselle, en tant que cousine de Sa Majesté, je ne puis me permettre toutes les imprudences : nous nous rencontrerons en privé. Tant que nous n’avons pas délivré ce pauvre garçon de l’influence néfaste de sa sœur, il est primordial que nous ne soyons pas vues en sa compagnie. Perrine hocha la tête, alors que la duchesse poursuivait. Vous devriez vous méfier des courtisans, ces gens sont toujours prêts à colporter les pires infamies sans le moindre égard pour la vertu d’une demoiselle. Préservez-vous de ces gens et pour cela, nous ne devrons pas rencontrer monsieur de Longueville en public. Si je vous dis cela, c’est parce que j’ai de l’amitié pour vous et je ne veux pas que vous soyez en disgrâce ! »

L’espace d’un instant, la jeune femme resta muette devant tant de mauvaise foi. S’il y avait bien une chose pour laquelle Elisabeth d’Alençon était connue en dehors de sa bigoterie à toute épreuve, c’était son talent extraordinaire lorsqu’il s’agissait de colporter voire de lancer les pires rumeurs, parfois même sans fondement. Mais comme il y avait un certain délice à s’entendre être prévenue contre la cruauté des courtisans alors qu’elle la trompait allègrement elle-même, Perrine garda pour elle ces quelques pensées pleines d’ironie et se contenta de la remercier de sa prévenance.
« Si cela vous va, nous pourrions peut-être nous rencontrer chez ma mère, au palais d’Orléans. C’est suffisamment éloigné de Versailles, ainsi nous pourrions aider ce jeune homme sans nous compromettre, qu’en pensez-vous ?
- Vous avez raison ! Et cela éloignera le duc de l’influence néfaste de la cour, nous n’en serons que plus efficaces. »
Un palais éloigné de la cour, sans quiconque pour venir les distraire de cette intrigue... Que demander de mieux ? La vile camériste y gagnait en plus l’assurance que personne ne pourrait la reconnaître. Elle allait reprendre la parole quand les deux chiens grognèrent à nouveau, et se levèrent sur le passage du jeune homme qu’ils avaient houspillé un peu plus tôt, et qui n’avait visiblement pas eu la présence d’esprit de s’en tenir éloignés. Surpris par les grognements, il s’arrêta et s’assombrit avant de pâlir légèrement en les voyant s’approcher, sous l’oeil goguenard d’une Perrine qui s’amusait définitivement beaucoup. Sans un mot, il s’enfuit et alla retrouver quelques mètres plus loin l’un de ses compagnons, avec lequel il s’éloigna, attirant une moue méprisante sur les lèvres de la demoiselle d’Harcourt.
« Hélas, il y a du mal de fait... soupira-t-elle. J’ignorais que ce monsieur (elle désigna celui avec lequel s’était éloigné le mignon) souffrait aussi du vice italien. Il n’épargne donc personne. Savez-vous que l’on dit que même les grands seigneurs du Moyen Âge en étaient atteint ? J’ai eu une conversation effrayante sur le sujet avec l’une de mes soeurs, qui parlait des amours d’Henri II d'Angleterre et de son cousin le comte Thibaud de Blois. ( What a Face ) C’est effarant. Ces gens ont bien de la chance d’être tolérés à Versailles. Dans certains pays, on les pend sans procès, c’est plus court. »

Perrine ne se souvenait plus dans quel livre, pour combler quel moment d’ennui elle avait pu lire une chose pareille, mais l’anecdote lui sembla de circonstance. Comme pour se remettre de ce terrible constat, elle s’offrit un macaron rose tout en songeant à ce qui allait se passer maintenant. Elle aurait pu rester là bien longtemps, à nouer et renouer les rets de la cabale autour de la duchesse, mais il aurait été étonnant et suspect que la demoiselle d’Harcourt trouvât du plaisir à rester en cette compagnie, aussi lâcha-t-elle soudain un soupir las.
« Je vais devoir vous quitter, duchesse. Il commence à se faire tard et je ne peux me permettre de rester trop longtemps en ces murs... Mais nous nous reverrons bientôt, n’est-ce pas ? Je ferai en sorte que nous puissions rencontrer le duc de Longueville quand bon vous semblera. Elle lui offrit le sourire le plus sincère possible. Je suis heureuse d’avoir pu faire votre connaissance ! »
Là-dessus, elle prit respectueusement congé, en annonçant qu’elle allait saluer Monsieur pour le remercier de son invitation et de lui avoir permis de faire la rencontre de la duchesse. Elle se dirigeait vers le duc d’Orléans quand un des jeunes hommes qui avait également été victime des chiens d’Elisabeth l’arrêta.
« Pardonnez-moi, mademoiselle... Je ne doute pas que vous et votre amie soyez de charmantes jeunes femmes mais...
- Mais quelle surprise de vous entendre parler de ce sexe, qui n'est pas le vôtre, j'ignorais que vous en connaissiez l'existence, l’interrompit Perrine sur un ton hautement méprisant, consciente que le regard de la duchesse était encore posé sur elle. Laissez-moi, je vous prie. »
Elle lui asséna un regard assorti au ton puis le contourna pour aller saluer Monsieur. À demi-mot, elle l’informa qu’elle ne doutait plus un instant du succès de leur intrigue, puis sur un sourire proprement maléfique, prit congé et sortit du palais. Voilà qui promettait d’être piquant.
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