« s i . v e r s a i l l e s » Côté Coeur: Brisé... la vérité est si douloureuse ! Côté Lit: Un vrai défilé... surtout en ce moment. Discours royal:
ATTENTION ∫ Danois séducteur en chasse
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Sujet: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 27.08.12 1:07
Où il est question d'ange gardien...
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Eléonore Sobieska &
Édouard du Danemark
La pluie tombait lourdement sur Versailles. De fines cordes d'eau semblaient joindre le ciel à la terre, comme s'ils étaient toujours unis par un lien sacré que personne ne pouvait comprendre. A chaque goutte d'eau qui tombait, un petit bruit significatif indiquait la présence d'une flaque. Édouard avait été insouciant aujourd'hui. Alors que le matin s'annonçait fade et couvert, en témoignait notamment la masse nuageuse grise qui empêchait le soleil de briller et l'odeur d'humidité, il avait quand même souhaité se promener dans les bois de Versailles, dans cette fameuse forêt domaniale, qui appartenait au Roi de France Louis XIV. Lieu de chasse par excellence, la vaste étendue boisée abritait un gibier que l'on disait solide et particulièrement imposant. De braves bestiaux, disait-on. De quoi ravir la populace de nobles lorsqu'il était l'heure d'attaquer le banquet. Somme toute, la Cour attendait toujours de façon oisive qu'on lui rapporte un bon sanglier, voire du cerf si le monarque ou l'un de ses amis étaient chanceux. Rares étaient ceux qui se rendaient à la traque de ces vaillants animaux. Le Prince du Danemark appréciait les parties de chasse. Il connaissait le bestiaire par coeur et il avait appris à les tuer sans douleur. Après tout, le but premier de la chasse était de se nourrir. Certes, il y avait tout de même un côté sportif et supérieur à dompter une bête sauvage. Les plus grands chasseurs savaient d'ailleurs remercier la terre pour l'offrande qu'elle leur accordait. Par exemple, Édouard faisait toujours le signe de croix sur l'animal tout juste mort. Son père lui avait dit autrefois que ça évitait les indigestions et que la viande était plus tendre, plus nutritive. Il pouvait dire d'expérience en tout cas qu'en appliquant tous ses conseils, il n'avait jamais été malade à cause du gibier, pas même lorsque celui-ci avait manqué de cuisson par la faute d'un cuisinier trop pressé. Enfin, si le jeune homme marchait paisiblement dans la forêt, il ne s'agissait nullement d'une chasse illégale. Jamais il ne se serait permis un tel affront au Roi qui l'avait accepté en ces lieux. Il n'était d'ailleurs pas sorti armé. Un brin trop confiant me direz-vous ? Sans doute, disons aussi qu'il n'y avait pas pensé. En ce moment, il était plutôt dans les nuages. Le fin de l'année s'annonçait, Noël serait célébrée dans quelques jours à peine et l'hiver, particulièrement mordant le rendait nostalgique de ses terres du Nord.
Le Danemark lui manquait. Non pas que la France soit moche, elle avait un charme indiscutable, ses monts et ses vaux, ses prestigieux édifices constituaient un patrimoine qu'il était important de conserver. Quand bien même ce pays aurait-il eu toutes les merveilles du monde, Édouard aurait aspiré à revoir son pays natal. Là-bas, les hivers étaient toujours froids, les bois moins nombreux mais la vie y était paisible. Il l'avait parcouru de long en large, profitant même de la compagnie d'un cartographe pour faire inscrire sur le papier les plus infimes détails. Les gens l'appréciaient. Il était un bon vivant, un prince chaleureux. En même temps, soyons lucides... avec un Roi comme Frédéric III, même le plus coincé des papes aurait l'air de sourire ! Il contrastait avec l'austérité de son demi-frère. Cela le servait bien d'ailleurs, puisque grâce à lui, l'image de la monarchie était redorée et on la voyait d'un meilleur oeil. Il était quand même bien difficile de faire oublier la défaite contre la Suède, celle qui avait scellé le mariage d'Édouard avec Gisela. Une union arrangée pour faire passer la pilule mais qui n'effaça pas grand chose dans les esprits. Le peuple était quand même ravi de savoir que le couple princier avait eu un fils et qu'Édouard s'impliquait dans les affaires diplomatiques à plein temps. Evidemment, ce que le peuple ignore ne peut pas lui nuire, car le jeune homme n'avait strictement que faire des obligations royales. Tous les jours, il priait pour que Frédéric ait un héritier et qu'il n'ait pas à accéder au trône. Dieu semblait en décider autrement ce qui l'inquiétait. Il ne voulait pas du trône, il aimait la vie, il voulait en profiter et ne pas être enchaîné à une fonction et à un pouvoir qui lui étaient accordés à cause d'une décision qu'avait pris son père, autrefois dans un élan de sentiments. Pourquoi lui ? D'avoir son père tout proche était largement suffisant à son bonheur, il n'avait pas besoin de prendre sa place ! Et en même temps, il devrait s'y conformer si son demi-frère venait à mourir sans héritier mâle. Hors de question d'abandonner sa patrie... Quel cauchemar...
Édouard était donc sorti, perdu dans ses inquiétudes sans se dire qu'une averse couvait. Il voulait s'aérer l'esprit, vider sa tête des pensées négatives qui y avaient élu domicile. A force de marcher, il ne s'était pas rendu compte qu'il était loin du château. Les premières gouttes commencèrent à tomber et il fit demi-tour. Il eut un léger sursaut lorsqu'il aperçut une silhouette au loin sur le chemin, visiblement habillée de noir. Quand l'individu se rendit compte qu'il était repéré il s'engouffra sur le côté, dans des buissons. Aussitôt, le souvenir du carrosse lui revint en tête. Ce jour là, il pleuvait aussi. Et tout c'était déroulé très vite. Un homme encapuchonné était entré pour le menacer d'un couteau. Il ne l'avait ni tué ni blessé et il était reparti en proférant des menaces de mort à son encontre. Bien qu'avec Gianluca, il tente de savoir qui était ce sinistre aliéné, il n'avait pas pensé une seule minute qu'il le suivrait. Intérieurement, il était terrorisé... en cela Ulrich, puisqu'il était l'assassin secrètement, avait réussi son coup. Le jeune homme marqua un moment d'hésitation tentant de voir la silhouette à travers les buissons. La pluie constituait un rideau désormais ce qui rendait la visibilité très mauvaise. Un craquement de brindille résonna tout près à son oreille. N'écoutant que son instinct de survie, Édouard se mit à courir à travers un petit chemin sur sa droite. Il ne savait pas où il allait mais il voulait semer son poursuivant et éviter de se faire tuer. Usant de toute sa rapidité, il fit un sprint à travers le bois. Il manqua glisser sur une flaque boueuse à deux reprises. Il jeta un oeil en arrière et s'avisant qu'il n'y avait personne, il se faufila derrière un gros tronc d'arbre, attendant que l'autre ne passe. Son coeur tapait comme un tambour dans ses oreilles alors qu'il tâchait de respirer le plus doucement possible pour ne pas se faire remarquer. Il commença à avoir un point de côté. Il serra les dents et attendit, tous ses sens en alerte. Il s'écoula deux minutes puis voyant que personne n'arrivait, il se tourna pour faire le tour du tronc. Il lança un cri de surprise quand il tomba nez à nez avec l'individu. Il recula, trébucha sur une pierre et tomba en arrière.
- Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Je n'ai pas d'argent sur moi, vous perdez votre temps si vous voulez me détrousser...
Il avait peur, oui. Au fond, il avait de quoi. Il était sans arme, loin de toute civilisation et l'individu qui le suivait semblait déterminé. N'importe qui à sa place aurait été inquiet. Mais Édouard n'était pas le genre d'homme à supplier. Il était combattif même dans la panique. Il se saisit d'un bout de bois et le projeta sur l'individu. Profitant de sa surprise, il se releva à la hâte et se mit à courir à travers bois, suivant le chemin dans une ligne parallèle pour ne pas se perdre. Il revenait sur ses pas mais c'était la seule solution pour ne pas s'éloigner davantage de Versailles. L'homme était toujours sur ses talons... il était incroyablement agile... sa course en était même féminine. Habitué à la chasse à l'homme sans doute. Édouard prit un virage à gauche, tant pis pour le chemin, il allait de toute façon retrouver l'autre plus loin, il fallait qu'il le sème d'abord et qu'il se mette à couvert. S'il était armé d'un mousqueton, il allait le tirer comme un lapin. Le Prince accéléra sa course, ignorant la douleur à son ventre et le feu dans ses poumons. Il était trempé, totalement paniqué et un peu perdu, il devait l'admettre. Il stoppa net sa course, dérapant légèrement. Devant lui, un vide de dix mètres. Il se tourna et avant qu'il ait pu revenir sur ses pas, l'individu était là, essoufflé mais déterminé. Édouard était pris au piège. Il tremblait légèrement, de peur et aussi de froid car l'eau était glaciale. Il mit ses mains devant lui, pour anticiper tout mouvement de son adversaire et il lui lança, les mots saccadés :
- Pourquoi... cherchez-vous... à me tuer ? Qui êtes-vous ? Ayez au moins... le courage de montrer.... votre visage... si vous êtes un homme ! Je ne vais pas... vous supplier... si c'est ce que vous espérez... Vous ne m'intimidez pas.
Difficile de le croire étant donné son regard désespéré. Édouard n'était pas quelqu'un de couard à la base... mais cet homme mystérieux le terrorisait... il savait y faire. Le Prince n'était pas encore mort et il se battrait pour sauver sa vie même si ces chances étaient fort minces...
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Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 03.09.12 18:40
Éléonore Sobieska faillit se prendre le pied dans la souche d'un arbre et se retint juste à temps de pousser un juron. Fort heureusement, la pluie qui tombait sans discontinuer depuis le début de l'après-midi couvrait le bruit de ses pas. Et celui qu'elle traquait cette journée-là n'était pas méfiant. Il continuait à avancer droit devant lui comme s'il avait une destination à atteindre, comme s'il savait où aller. La jeune femme n'était pas à Versailles depuis longtemps mais elle avait assez multiplié les balades dans cette forêt domaniale pour savoir que ce chemin ne conduisait nul part sinon à s'enfoncer encore plus derrière les rideaux de buissons, de troncs et de branchages décharnés par l'hiver qui s'était abattu sur le royaume. Elle poussa un soupir et leva les yeux vers le ciel gris. Elle ne reconnaissait qu'à peine les lieux tant le bois giboyeux avait recouvert des habits sinistres. Un peu plus et Éléonore se serait crue dans les vastes forêts de Transylvanie. Elle s'attendait presque à voir surgir les troupes de cavaliers armés que formaient les Magyars ou les Cosaques, ces barbares du sud qui seraient venus pour l'enlever et venger la mort de l'un de leurs princes. Éléonore ferma les paupières et se traita intérieurement d'idiote. Elle avait l'imagination trop fertile. Et tout laissait à penser qu'elle n'était pas la seule. Pourquoi diable Frédéric III lui avait-il demandé de garder un œil sur son demi-frère ? Néanmoins, elle posa la main sur le renflement que constituait son arme à feu dans son sac et fut immédiatement soulagée.
C'était à cause de ce roi cruel et de sa paranoïa qu'Eléonore se trouvait à arpenter les bois de Versailles sous le plus mauvais temps tout en essayant de ne pas se faire remarquer. Quand elle avait su que le prince de Danemark envisageait d'aller se promener seul (elle avait des informateurs – grassement rémunérés - dans le personnel d’Édouard), elle avait profité de l'après-midi de libre accordé par la reine pour revêtir une robe noire sans apprêts, dont la simplicité se rapprochait plus de ce qu'elle avait pu connaître dans son enfance en Pologne quand elle courrait encore partout dans le domaine familial, et d'une cape toute aussi sombre qui permettait de recouvrir sa longue chevelure flamboyante et de dissimuler les traits de son visage. Si le prince était vraiment en danger comme semblait le penser le roi du Danemark quand il lui avait donné ces ordres, c'était suicidaire de partir sans escorte dans un endroit où le danger pouvait se cacher derrière chaque buisson. Enfin, force était de constater que pour le moment, il ne se passait strictement rien et que la précaution qu'Eléonore avait prise en se munissant de son pistolet allait probablement se révéler inutile puisque les seuls assaillants se trouvaient être des souches d'arbres et des ronces. Ce fut au moment même où Éléonore forma cette pensée que les événements se précipitèrent et donnèrent raison à Frédéric III. La pluise se mit à tomber beaucoup plus fort, une branche craqua fortement dans les bas-côtés à sa droite, indiquant une présence (un animal ?) tandis qu'au même instant, Édouard faisait enfin volte-face et la voyait distinctement. Au lieu de réagir comme toute personne normalement constituée, ce dernier quitta le chemin en courant et disparut entre les arbres. A sa droite, une silhouette tout à fait humaine, appartenant visiblement à un homme lourdement armé, se coula également dans l'obscurité. Cette fois-ci, Éléonore ne se retint pas de jurer. Elle n'était pas la seule à traquer le prince du Danemark sauf qu'il était loin d'être certain que le deuxième poursuivant soit animé des mêmes intentions qu'elle. Sans plus réfléchir, elle se mit à courir sur les traces d’Édouard. Elle devait le retrouver avant l'autre.
Il n'était pas facile de se dépêcher sur un sol aussi glissant et malgré toute l'expérience qu'Eléonore pouvait avoir en terme de fuite, après un sprint de plusieurs centaines de mètres, elle glissa lourdement sur un sol boueux qui l'entraîna sur plusieurs mètres. Le temps qu'elle se remette debout, Édouard de Danemark avait disparu parmi les arbres. Par où était-il passé ? Éléonore s'immobilisa, s'efforçant de retenir son souffle court pour mieux entendre. Mais c'était le doux clapotis de la pluie que ses oreilles perçurent. Sans prêter aucune attention à sa jupe et à ses chaussures pleines de terre, elle avança lentement, toujours à l’affût du moindre signe pouvant lui montrer qu'elle n'était pas seule. Il était temps que son expérience de la chasse serve à quelque chose. Sans comprendre ce qui lui arrivait, elle vit le prince apparaître de derrière un tronc d'arbre et lui faire face. Elle ne put s'empêcher de pousser un cri de surprise tout en se maudissant intérieurement car cela risquait fort d'attirer leur traqueur. Visiblement, lui non plus ne s'attendait pas à cela car il recula et chuta en arrière : - Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Je n'ai pas d'argent sur moi, vous perdez votre temps si vous voulez me détrousser...
Ainsi, il croyait réellement que l'ennemi était Éléonore, que c'était elle qui était là pour lui faire du mal ? Éléonore tenta un malheureux « je ne suis pas là pour vous détrousser » mais avant qu'elle ne puisse s'expliquer et aider le jeune homme à se relever, il lui lança un bout de bois qu'elle évita juste à temps avant de prendre la poudre d'escampette. C'était donc une habitude chez lui d'agresser ceux qui voulaient lui venir en aide ? Pour peu, Éléonore aurait tourné les talons mais la pensée de son fils gardé en otage à la cour du Danemark tout comme la volonté d'en finir la poussèrent sur les traces de la proie. Il ne serait pas dit qu'elle avait failli à sa mission. Et cet imbécile avait beau foncer dans la gueule du loup, elle le sauverait tout de même. Il fonçait au plus mauvais endroit... Vers un petit précipice formé par la pluie des derniers jours, un endroit découvert d'où on pourrait le tirer comme du mauvais gibier. En sortant de l'orée des arbres, la jeune femme sentit son pouls s'accélérer encore alors que sa course se terminait. Édouard semblait avoir renoncé et il levait les mains comme s'il craignait toujours qu'elle lui veuille du mal.
- Pourquoi... cherchez-vous... à me tuer ? Qui êtes-vous ? Ayez au moins... le courage de montrer.... votre visage... si vous êtes un homme ! Je ne vais pas... vous supplier... si c'est ce que vous espérez... Vous ne m'intimidez pas. - Cela tombe bien, je ne suis pas un homme, permettez que je garde ma capuche..., répliqua la jeune femme d'un ton guilleret particulièrement forcé.
Essoufflée, elle n'en dit pas plus immédiatement. A dire vrai, elle mourrait d'envie de se débarrasser de sa cape gorgée d'eau qui la glaçait de froid mais elle ne tenait pas à ce que l'on puisse voir son visage, toujours dans l'ombre. Elle avait bien conscience qu'elle devait fournir des explications mais le temps leur était compté. Dieu seul savait où se trouvait l'individu qu'elle avait vu peu de temps auparavant. Avec un peu de chance, il avait replié bagages en voyant qu’Édouard n'était pas seul mais la jeune femme n'avait pas pour habitude de compter sur la chance pour s'en sortir. Car sinon, elle serait morte depuis bien longtemps. Elle leva le bras pour saisir le poignet d'Edouard et sortit son arme de son autre main. Celui-ci chercha à se débattre mais elle siffla de manière beaucoup moins sympathique :
- Cessez de me prendre pour l'ennemi, il faut vous mettre à cou...
Soudain, ses oreilles saisirent un bruit incongru, comme un bruit de pistolet que l'on arme. Elle ne chercha même pas à savoir d'où cela venait, en un bond, elle sauta sur Édouard et l'entraîna dans sa chute. Le coup de feu lui parut incroyablement proche et l'étourdit un instant tandis que la balle siffla au dessus de leurs têtes. On venait de leur tirer dessus ! On voulait leur mort. Tout en maintenant Édouard allongé d'une poigne ferme, Éléonore se redressa malgré le danger et pointa son pistolet sur la source du bruit. Elle ne connaissait pas l'homme qui se trouvait à quelques dizaines de mètres mais elle ne marqua aucun temps d'hésitation. Sans prendre la peine de se demander si la poudre était toujours sèche, elle tira sans ciller. Elle eut la satisfaction de voir la balle toucher sa cible, à la hauteur du visage, laquelle cible poussa un hurlement de douleur avant de faire demi-tour. Avec des gestes rapides, Éléonore lâcha Édouard et rechargea son pistolet le plus rapidement qu'elle le pût.
- Il ne faut pas le laisser s'échapper, expliqua-t-elle d'un ton pressé, il faut savoir qui en veut à votre peau.
Saisissant de nouveau le prince par le poignet, elle l'entraîna à sa suite. Mais cette fois-ci, les rôles s'étaient inversés. C'était à eux de traquer l'homme. Éléonore avait mal vu les traits de son visage mais les traces de sang qu'il laissait derrière lui étaient assez évidentes. Elle avait les poumons en feu et ses jambes lui faisaient mal. Son mollet tout particulièrement et elle eut juste le temps de se demander si elle ne s'était pas blessée plus gravement que prévu en chutant. Mais toutes ces considérations s'envolèrent quand elle vit le dos de l'assassin. Elle visa et appuya sur la détente. Mais le coup ne partit pas et dans un bruit d'explosion, ce fut le pistolet qui s'enflamma. Les deux jeunes gens tombèrent à la renverse et Éléonore laissa tomber son arme désormais inutilisable qui s'éteint peu à peu sous l'effet de la pluie.
Éléonore était un peu sonnée par les événements. Il était trop tard pour rattraper l'homme et la perte de sa seule arme venait de lui porter un vrai coup au moral. Sans se rendre compte que sa capuche était tombée, dévoilant son visage et sa chevelure ébouriffée, elle s'approcha lentement du pistolet et sentit son cœur se serrer :
- Oh non, souffla-t-elle, je ne vais pas pouvoir la réparer...
Et elle n'aurait probablement pas les moyens de s'en procurer une autre. Bien peu de chose si l'on considérait les événements récents et le fait qu'ils venaient d'échapper à la mort mais Éléonore, après une telle course-poursuite et cet adrénaline qui courrait encore dans ses veines, n'avait guère le sens des priorités.
Édouard du Danemark
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Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 03.09.12 22:35
Non, Édouard n'était pas un couard, il avait été entraîné au combat et même s'il fuyait ses responsabilités de Prince, il n'en restait pas moins un homme courageux à la bataille. Mais là, rien n'aurait servi de faire face à son assaillant. Il n'avait aucune arme et il n'était pas en mesure de sauver sa vie autrement qu'en prenant ses jambes à son cou. Il avait un peu plus l'habitude des terrains escarpées que l'individu, ce qui expliquait qu'il avait détalé avec vivacité et vigueur. Mais dans la panique, il n'avait pas pensé à regarder vers où il se dirigeait, aveuglé par son instinct de survie. Et alors qu'il faisait face à l'individu encapuchonné, il n'en menait pas large du tout. Il ne pouvait s'empêcher de regarder tout autour pour fuir, mais à part se rompre le cou, il n'avait pas d'autre possibilité. Il parla, la voix tremblante, essoufflé par cette course effrénée. Il était persuadé qu'il s'agissait d'un homme. Même le cri de surprise que cette mystérieuse personne avait lancé ne l'avait pas fait réfléchir, ni réagir d'ailleurs. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'une voix féminine s'échappa de sous le capuchon. Il ouvrit grand les yeux et se demanda aussitôt de qui il pouvait s'agir. Une de ses amantes qui n'avait pas apprécié un cadeau ? Voire leur nuit ? Le fait qu'il soit marié ? Elle pouvait très bien avoir été envoyée par l'homme du carrosse... car ça, il en était certain, c'était bien un homme qui l'avait agressé et menacé de mort. Il était perdu par ce revirement de situation. Dans sa tête mûrit l'idée qu'il aurait plus de chances de s'en sortir vivant contre une femme et qu'elle avait pris un gros risque mais il n'eut guère le temps de la mettre en application. Elle lui saisit le poignet avec énergie et sortit son arme, un pistolet remarquable, assez impressionnant, qui ressemblait à une belle pièce d’œuvre. Ce n'était pas du matériel de gueux, elle avait une pièce d'artillerie comme beaucoup de nobles. Ainsi, il s'agissait d'une femme formée aux armes, un fait rare. Édouard déglutit avec difficulté et tenta de se débattre :
- Je vous paie le double de ce qu'on vous a donné pour que vous rangiez cette arme... et lâchez-moi donc...
Elle siffla, excédée et lui répondit, le ton acerbe qu'elle n'était pas son ennemie. Or en cet instant précis pour Édouard, elle avait une arme, elle lui tenait la poignet contre son gré et elle l'avait poursuivi jusqu'à ce précipice... cela faisait beaucoup de détails en sa défaveur. Elle n'eut pas le temps de terminer sa phrase et lui sauta littéralement dessus. Il y eut un coup de feu terrible qui siffla à ses oreilles. Abasourdi, il s'effondra par terre, à plat dos, se heurtant aux rochers durs et humides. La jeune femme lui tomba dessus et il se sentit étouffer. A part à la tête, il n'avait pas vraiment mal mais il savait d'une balle n'était pas douloureuse au départ. Un coup de feu était parti, tout près d'eux. Il pense que la jeune femme l'avait pris pour cible mais elle se redressa, en le maintenant avec force au sol. Un peu sonné, Édouard la regarda faire, la vision troublée. Elle tira en direction des arbres et un hurlement de douleur retentit. Deuxième coup d'éclat, il y avait un homme armé caché ! Le Prince pâlit légèrement, en comprenant qu'elle venait de lui sauver la vie. Elle ne lui laissa pas le temps de réagir, ni de la remercier. Elle le força à se relever et à avancer, le tenant fermement par le poignet. Ils se mirent à courir à la suite de l'homme et elle tira une nouvelle fois. Une détonation les projeta en arrière tandis que le pistolet prit feu. Vu qu’Édouard était derrière, elle lui tomba dessus une seconde fois. Le Prince sentit une douleur le prendre au dos mais elle se releva rapidement. Lui s'assit sur le sol, regardant au loin l'homme qui détalait . Il jeta un regard à la jeune femme dont la capuche était désormais sur les épaules dévoilant un visage radieux, vif. Il se massa légèrement l'arrière de la tête et se leva, encore abasourdi par toute cette histoire. Elle sembla déprimée par la vue de son arme détruite. Édouard l'observa un cour instant et lui dit, la voix un peu rauque :
- J'imagine que je peux vous en avoir une neuve... j'ai... j'ai des relations.
Il continua de la scruter du regard, en se demandant si elle avait conscience qu'il était Prince. Il espérait que non, parce qu'en cet instant, il ne voulait nullement se mettre en position de faiblesse. De toute façon, un peu plus ou un peu moins, désormais, ça n'avait plus la moindre importance. Elle savait probablement qui il était, elle avait eu un accent un peu spécial dans un de ses mots. C'était une touche infime, mais Édouard, qui avait parcouru l'Europe pour affaire diplomatiques avait eu le temps de s'attarder sur les langues locales. Pour sa culture personnelle, mais aussi et surtout parce que connaître la langue ajoutait du charme auprès des dames. Il ne s'y trompait pas, la splendide tireuse qu'il avait sous les yeux était polonaise ou avait vécu en Pologne. Elle était partie de son pays depuis suffisamment longtemps pour perdre cet accent naturel et ne le laisser échapper dans un moment d'émotion. Le Prince était intrigué. Il avait un tas de questions, et comme il n'avait pas coutume ni habitude de les garder pour lui, il reprit la parole :
- J'ai... j'ai l'impression que je vous dois la vie... alors merci... mais permettez-moi tout de même de vous demander pourquoi ? Qui vous êtes et ce que faisiez-vous à ma suite ? Comment avez-vous su pour cet homme ? Comment avez-vous fait pour savoir que je serais ici ? Où avez-vous obtenu cette arme ?
Cela faisait beaucoup d'interrogations mais Édouard avait besoin de réponses. Il avait paniqué à l'idée de frôler la mort. Même si le véritable agresseur était en fuite, il n'oubliait pas que la jeune femme était armée et qu'elle tirait avec une précision et une froideur terrifiante. Au moins, se sentait-il mieux de voir que le pistolet était inutilisable. Si elle voulait le tuer, oui, il pensait quand même encore à cette hypothèse, la paranoïa l'habitait depuis qu'il s'était fait menacer, elle allait devoir s'y prendre avec les mains pour l'étrangler. Ou alors avec un bâton en bois... Il poussa discrètement une branche morte avec son pied pour l'éloigner quelque peu. Méfiance était mère de sûreté même si elle lui avait évité de mourir quelques instants plus tôt.
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Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 07.09.12 18:17
Éléonore Sobieska était restée à terre, encore essoufflée et surtout terriblement attristée par la perte de son arme. Il était rare en effet pour une femme de savoir comment se servir d'un tel objet mais elle n'avait pas reçu une éducation bien conventionnelle. Elle avait grandi livrée à elle-même dans un château polonais avec une belle-mère permissive, des frères qui l'adoraient et un ami que l'on formait aux armes et qui ne pouvait rien lui refuser. Mais à vrai dire, les pistolets, c'était surtout ce qui la reliait aux Stuarts. C'était Morgan Stuart qui lui avait appris à vraiment s'en servir et qui l'avait emmenée pour la première fois chasser le lièvre dans les forêts proches de Saint-Germain (à contrecœur, Éléonore en était sûre... Elle n'était pas particulièrement discrète à l'époque). C'était d'Andrew Stuart dont elle était tombée amoureuse après l'avoir surpris, fusil à la main (et après avoir failli lui tirer dessus). Et dans tous les troubles qu'elle avait vécus par la suite, dans la guerre terrifiante dans laquelle avait plongé la Pologne, dans les intrigues de la cour de Constantinople, dans les complots en Autriche ou dans le Saint-Empire, cette capacité n'avait pas de prix. Éléonore avait appris à toujours se sentir menacée et à toujours se méfier. S'il en était sans aucun doute de même pour l'héritier de la couronne du Danemark, chez elle, cela se traduisait par un attachement démesuré à son pistolet. Ce dernier était même particulièrement moderne avec son déclencheur à silex. Sa perte donnait l'impression à Éléonore d'être dénuée de toute protection. Une fois qu'elle fut sûre qu'il était refroidi, elle chercha à le prendre en main mais dut se rendre à l'évidence. Elle ne pouvait plus faire grand chose pour lui et ses finances ne lui permettraient pas d'en avoir un nouveau de sitôt.
- J'imagine que je peux vous en avoir une neuve... j'ai... j'ai des relations.
Tiens, elle l'avait complètement oublié celui-là. Éléonore releva la tête et se tourna vers Édouard qui la fixait avec, semblait-il, un reste de méfiance. On pouvait le comprendre après tout, elle venait de le poursuivre sur toute une partie de la forêt de Versailles avant de lui sauter dessus alors qu'il ne savait ni son nom ni la teneur de sa mission. Encore une fois, la jeune femme maudit Frédéric III qui croyait tout maîtriser et dont la paranoïa créait ce genre de situation particulièrement gênante. Au lieu de répondre tout de suite, la Polonaise, par acquis de conscience, jeta un œil du côté où l'homme avait disparu mais il devait être bien loin à l'heure qu'il était, sans doute à la rencontre de celui qui l'employait, puis se releva sans prêter attention à la boue qui maculait ses vêtements et l'une de ses joues, le cadet de ses soucis. Quant à dissimuler son identité... Ce n'était même plus la peine d'y songer, ses boucles rousses échappées de la capuche encadraient son visage, clairement visible.
- Je sais qui vous êtes et que vous devez bien avoir des relations, dit-elle en se forçant à avoir une voix joyeuse malgré ce qui venait de se passer, d'ailleurs, je suis navrée de vous avoir traité avec aussi peu de convenance, votre altesse – on dit bien votre altesse ? - mais vous l'aurez remarqué, c'était un cas de force majeure.
Éléonore, habituée à parler avec naturel avec n'importe qui et à s'adresser directement aux rois (il fallait dire qu'ils n'étaient pour la plupart pas bien impressionnants car rien ne les distinguait de la masse des hommes), n'était absolument pas désolée de sa manière de se comporter et cela devait se ressentir dans le son de sa voix aussi choisit-elle de ne pas s'attarder sur la question, sans se douter une seule seconde qu’Édouard aurait préféré qu'elle ne sache pas son nom :
- J'espère que je ne vous ai pas blessé en vous jetant à terre, je m'en voudrais d'avoir abîmé un prince du Danemark en l'utilisant pour amortir ma chute, vous auriez dû rester en forêt, sur la mousse, cela aurait été moins douloureux. Enfin, je suppose qu'étant donné les circonstances, c'est un moindre mal, plaisanta-t-elle en babillant. Un peu plus et on se serait cru dans un couloir de Versailles dans une conversation tout à fait normale entre deux courtisans. Sinon que les deux courtisans en question étaient dans un état lamentable après une course-poursuite dans les bois et que les arbres tenaient encore lieu de décoration. - J'ai... j'ai l'impression que je vous dois la vie... alors merci... mais permettez-moi tout de même de vous demander pourquoi ? Qui vous êtes et ce que faisiez-vous à ma suite ? Comment avez-vous su pour cet homme ? Comment avez-vous fait pour savoir que je serais ici ? Où avez-vous obtenu cette arme ?
Éléonore était donc tombée sur un curieux. Pour la première fois depuis leur rencontre précipitée, la jeune femme examina le jeune homme de haut en bas. Elle ne pensait pas un seul instant qu'il puisse encore la soupçonner de vouloir sa mort. Il était plutôt bel homme, il devait avoir son petit succès, surtout que personne ne crachait sur un titre d'héritier du Danemark. Elle aurait pu le trouver sympathique si elle n'avait pas développé une haine pour tout ce qui ressemblait de près ou de loin à un Danois depuis son séjour à Copenhague. Elle les haïssait tous depuis que Frédéric III avait décidé de la mettre face à un ignoble chantage et de garder son fils. Quand elle avait accepté la mission confiée par le roi (avait-elle seulement le choix en sachant que l'autre proposition était d'être livrée aux mains du bourreau ?), elle n'avait pas imaginé qu'elle serait aussi rapidement mise en danger. Qui pouvait bien en vouloir à Édouard ? Surtout qu'avait-on à gagner à sa mort ? Le nom d'Ulrich de Sola traversa son esprit car elle savait bien qu'il était probablement derrière tout cela – car après tout, Frédéric s'était montré clairvoyant pour le moment – et qu'il se trouvait en France mais elle préféra se taire. Le roi avait demandé de la discrétion.
- Que de questions ! Ne put-elle que s'exclamer, si vous le voulez bien, remettons-nous en route, je ne serais pas fâchée de rentrer au château. A mon avis, l'homme est bien blessé et a renoncé pour aujourd'hui mais sait-on jamais, il a peut-être des complices et je doute que le poignard que j'ai dans mon sac mette en déroute des assassins bien mieux armés. Je vous répondrai en chemin, je vous le promets.
Voyant qu'il semblait marquer un temps d'hésitation avant de lui emboîter le pas, elle lui adressa un sourire rassurant et lui assura qu'elle connaissait un moyen de retrouver le sentier. Après tout, il était temps que les journées passées à la chasse lui servent. La pluie avait cessé mais le terrain était très boueux, aussi Éléonore glissa dès ses premiers pas mais se rattrapa de justesse à Édouard, en s'excusant. Puis à son habitude, elle se remit à parler, pour enfin donner des explications à un jeune homme qui devait être impatient :
- Je vais vous répondre de manière un peu décousue mais c'est de votre faute, vos questions l'étaient. Savoir où vous étiez a été particulièrement simple, vous devriez vous assurer que vos domestiques cessent de parler à tort et à travers, un simple écu suffit à les faire parler... Quand on a des ennemis aussi dangereux que les vôtres, ça peut être dérangeant. Mon arme, je l'ai acquise il y a plusieurs mois, je me déplace souvent et je n'ai pas les moyens d'avoir une escorte, c'est un peu ma garantie de rester en vie. Je ne pensais pas qu'elle exploserait aussi vite, sans doute l'humidité... Oh, mais j'en oublie l'essentiel, je m'appelle Éléonore. Éléonore Sobieska, je suppose qu'il est inutile de vous le cacher plus longtemps, vous aurez fini par l'apprendre au palais. Oui, je suis la sœur du grand Hetman de Pologne mais ma présence ici n'est pas directement reliée à mes origines. Je suis heureuse de vous rencontrer malgré... Tout ça. On m'a demandé de veiller sur vous.
Arrivée à ces paroles, Éléonore s'interrompit en se demandant s'il comprenait l'allusion et s'il devinait que cette mission était tout sauf volontaire. Elle n'avait pas choisi de se trouver au milieu d'un règlement de compte. Elle jeta un regard sur Édouard puis étant donné qu'ils étaient parvenus au bord du chemin, elle l'arrêta d'un geste et lui recommanda le silence. Mais la forêt ne bruissait d'aucun bruit étrange et personne ne se trouvait à l'horizon. De toute façon, le fuyard n'était pas parti dans cette direction.
- Ma présence aujourd'hui était un coup de chance, poursuivit la jeune femme en posant les pieds sur le sentier de terre, je pensais passer un après-midi tranquille à veiller sur vous de loin mais finalement, j'ai été plus utile que prévu. Mais je vous en prie, ne me remerciez pas...
Non, elle faisait cela par pure obligation, elle ne méritait en rien un merci.
- Je ne m'attendais pas à ce que l'on vous attaque aussi directement, il est fort dommage que nous n'ayons pas pu arrêter l'individu, au moins nous avons la satisfaction qu'il a été fort puni de son geste, je ne l'ai pas raté. Connaissez-vous des personnes qui vous en veulent ? Est-ce la première fois que cela vous arrive ? Je parierais que non, vous ne m'avez pas fui sans raison dès que vous m'avez vue, n'est-ce pas ? Votre épouse et votre fils sont-ils aussi en danger ?
Elle se retourna avec brusquerie vers lui et lui saisit le bras. Une lueur inquiétante brillait dans son regard qu'elle planta droit dans celui d’Édouard :
- Vous devez me faire confiance et tout me dire. Ne vous fiez pas à ma faible carrure, au fait que je sois une femme ou que je paraisse être toujours prête à m'amuser... Car si quelqu'un peut vous délivrer de cette menace, c'est bien moi.
Et une fois cela fait, elle espérait retrouver enfin son fils. Et sa liberté.
Édouard du Danemark
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Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 28.10.12 11:24
La scène était assez irréaliste, ubuesque même. Personne n'aurait pu reconnaître en ces deux personnes des nobles de la Cour. Édouard était trempé par la pluie, ses vêtements souillés par la boue lui retiraient toute allure princière ou même royale. Il s'en sentait gêné, lui qui aimait s'afficher bien vêtu et qui accordait beaucoup d'importances aux tissus. Comment allait-il enlever toutes ces tâches ? Cette question, absurde, lui occupait pourtant l'esprit, même s'il essayait de ne pas y penser. Sa raison censurait son émotion première. Après tout, ne venait-on pas d'attenter à sa vie ? Sa sauveteuse, quant à elle, paraissait aussi méconnaissable. Au moins, ils étaient deux et Édouard fut rassuré qu'elle ne puisse le juger comme un gueux mal accoutré. Si l'on excluait sa chevelure d'un roux éclatant, nul n'aurait pu croire à son rang. Le Prince devait néanmoins reconnaître qu'elle avait du talent, tant pour le tir que pour la spontanéité. Elle parlait avec une assurance intrigante, qui contrastait beaucoup avec le petit regard inquiet qu'elle lança en direction de l'homme qui s'était échappé. Il fronça légèrement les sourcils quand elle évoqua son titre. Elle savait qui il était. Lui qui se pensait difficilement reconnaissable ! Cela n'avait rien de bien rassurant, même si elle lui avait sauvé la vie. Un tas de questions fusèrent dans sa tête. Il se demandait comment elle le connaissait. Avait-il glissé à son égard des propos élogieux dans le but de la séduire ? Peut-être... il aimait la séduction, il passait beaucoup de son temps libre à cela. Et il avait bien du mal à compter le nombre de damoiselles (ou de dames tout court), à qui il avait glissé ses compliments. Comme son père, le Prince héritier avait une fâcheuse tendance à aller voir ailleurs que chez sa propre épouse. Il aimait la vie et les petits plaisirs quotidiens, le libertinage en faisait partie. Moralement, on pouvait lui reprocher cette attitude, mais en même temps, s'il rencontrait un tel succès, c'était aussi parce que les femmes aimaient partir à l'aventure et franchir les interdits. Il ne se permettait pas de les juger, chacune était un trésor inestimable. En jetant un coup d'oeil aux cheveux d'Éléonore, il arriva à la conclusion qu'il ne l'avait jamais vu, sinon, il s'en serait souvenu. Mais ça n'avait rien de rassurant, puisque maintenant, il se demandait pourquoi elle l'avait suivi et comment elle savait toutes ces choses à son sujet. Elle évoqua avec ironie le fait qu'il ait pu être abîmé. En apparence, Édouard donnait l'impression d'être un homme de lettres, peu enclin et doué au combat. En réalité, il en était tout autre. Comme son père, il était un homme robuste, bien constitué, qui s'adaptait aussi bien aux hivers rigoureux qu'aux étés étouffants. Il tombait rarement malade, contrairement à son enfance, où il avait souvent cotoyé le lit. Elle conclut alors que leur assaillant n'étant guère loin d'eux, il était préférable de hâter le pas pour rentrer au château.
Après un petit moment d'hésitation, Édouard finit par opiner du chef et ils se mirent en route. Sa curiosité était piqué au vif. S'avisant que la jeune femme pouvait glisser facilement sur le sol boueux et très meuble, il l'attrapa par le bras, d'un geste ferme mais très doux. Édouard était ce que le anglais appelait un gentleman. Il ne pouvait s'empêcher de faire preuve de courtoisie et de galanterie vis à vis des femmes, et ce sans aucune arrière-pensée malsaine. Il n'était pas un prédateur, simplement un séducteur. Il l'aidait donc à marcher et la laissa se cramponner à lui jusqu'à ce qu'ils retrouvent le chemin. Le Prince aurait pu facilement le retrouver, maintenant qu'il était calme et qu'il avait retrouvé ses repères, mais il la laissa faire, très curieux de voir comment elle s'y prenait. Elle était douée, très douée. Il sut qu'elle avait fait des parties de chasse, à la seconde même où elle jeta un rapide coup d'oeil aux arbres et aux petits rochers. Il s'agissait du meilleur moyen pour retrouver son chemin. Il l'écouta répondre à ses questions avec une avidité visible sur son visage. Le jeune homme buvait chacune de ses paroles pour les assimiler et son esprit bouillait tellement qu'il avait encore une multitude de questions. Il ne perçut pas les intonations et les petits gestes qui signifiaient qu'Eléonore ne l'avait pas suivi d'elle-même mais bien parce qu'on le lui avait ordonné. Le Prince était trop absorbé par le mystère qui l'entourait. Ainsi, elle se nommait Eléonore Sobieska, soeur d'Hetman de Pologne. Edouard comprenait donc pourquoi elle était doué au combat, au tir, à l'orientation... et pourquoi elle parlait avec un tel aplomb. C'était une femme de caractère, issue d'une grande famille. Mais alors que faisait-elle ici ? Elle veillait sur lui ? Dans quel but ? Pourquoi elle ? Il existait tellement d'autres personnes dont la protection restait la profession première ? Que faisait-elle à la Cour de France ? Pourquoi être si loin de son pays ? Édouard manqua à trois reprises l'interrompre, tandis qu'elle continuait de lui expliquer. Comme ils étaient arrivés sur le chemin et que le sol était beaucoup plus stable, il lâcha son bras et resta légèrement derrière elle, le visage fermé, en proie à d'intenses réflexions. Il fronça les sourcils quand elle commença à lui poser des questions. Elle retournait la situation avant une telle perfection que le Prince en resta admiratif. Et puis, de façon un peu plus brusque, elle se saisit de son bras et tout en plantant son regard dans le sien, elle lui annonça qu'il pouvait tout lui dire. Édouard, qui n'était pas habitué à ce genre de réaction, déglutit avec difficulté, tout en soutenant ce regard. La paradoxe était là... il voyait en cette femme quelque chose de redoutable et d'inquiétant. Il valait mieux l'avoir dans sa poche. Mais en même temps, malgré le fait qu'elle lui ait sauvé la vie, il avait quand même une certaine réticence à lui expliquer ce qu'il avait découvert. Il détourna le regard mais cela ne l'empêcha pas de sentir les yeux insistants d'Eléonore sur lui. Il se dégagea de son étreinte et après avoir soupiré, il répondit, cédant l'information malgré lui :
- J'ai déjà été agressé oui... plusieurs fois avant aujourd'hui. C'est la première fois que la menace a failli être mise à exécution. Je ne sais pas qui cela peut être. A vrai dire, je mène une enquête avec un ami, mais elle n'avance pas vraiment. Je ne vois pas qui pourrait m'en vouloir au point de désirer me tuer. Cette personne ne m'extorque rien, elle ne cherche pas d'argent et ne semble s'en prendre qu'à moi et non à ma femme ou à mon fils. Je me dis qu'il s'agit peut-être d'un mari... enfin vous comprenez...
Pas sûr que ça soit le cas. Édouard penchait en effet pour une histoire de jalousie. Il avait des attitudes tellement volages qu'il était fort possible qu'une de ses amantes ait été découverte par son mari légitime et que celui-ci ait décidé de se venger. Il ignorait s'il avait bon ou pas, mais hormis cela il ne voyait pas qui pourrait lui en vouloir. Contrairement à Frédéric, son demi-frère, il était apprécié par les nobles du Danemark et par le peuple en général. Et le Roi n'était pas du genre à vouloir sa mort, même s'ils avaient deux caractères différents, ils se faisaient mutuellement confiance. A part le litige amoureux, rien ne lui venait à l'esprit, pas même Ulrich qui avait disparu et qu'il n'avait pas croisé depuis. On le disait mort, Édouard l'avait oublié. De toute façon, Sola ne l'avait jamais apprécié et n'aurait jamais accepté des retrouvailles. Le Prince voulait changer de sujet. Il était sur la défensive, l'attitude de Sobieska était un peu trop intrusive à son goût. Et puis il y avait encore tellement de mystères autour d'elle qu'il aurait été irresponsable de lui accorder le bon Dieu sans aucune confession. Ils continuaient à marcher sur le chemin. La pluie avait cessé et l'humidité rendait le climat plutôt doux désormais. Le ciel n'était pas dégagé à cause de l'absence de vent mais s'était légèrement éclairci. Le jeune héritier avait une multitude de questions à poser et il enchaîna donc, la curiosité se lisant sur son visage attentif :
- Vous avez dit tout à l'heure que vous étiez chargée de veiller sur moi... j'en déduis que vous en savez probablement plus que moi sur ce potentiel ennemi, n'est-ce pas ? Est-ce que vous savez de qui il s'agit ? Vous avez une piste ? Depuis combien de temps êtes-vous à ma suite ? Je ne vous avais jamais croisé à la Cour, je m'en serais souvenu. Vous m'évitiez par peur que je vous repère ? Vous soudoyez mon personnel depuis longtemps ? Pourquoi ne pas vous êtes dévoilée plus tôt ? Comment une grande Dame comme vous a-t-elle fait pour se retrouver en France chargée de me suivre ? Votre place n'était-elle pas auprès de tous ces diplomates ? Qui vous a chargé de me protéger ? Pourquoi la Pologne s'évertuerait-elle à me sauver la vie à moi ? Je ne comprends pas... Comment avez-vous su que je serais ici à la Cour de France, que j'étais en danger ? J'aimerais savoir... ça me concerne tout de même... je sens que vous savez beaucoup de choses de votre côté et je veux les connaître moi aussi.
On pouvait lire dans son regard un certain désarroi. Il n'aurait jamais suspecté son demi-frère d'avoir envoyé Eléonore pour le protéger. Il pensait plutôt que ça pouvait être une personne influente en Pologne, un membre de la famille Sobieska. Dans quel but ? S'il s'agissait de lui sauver la vie, il y avait forcément une raison. Sa curiosté était piquée au vif, et à poser toutes ces questions, Édouard ressemblait davantage à un enfant qu'à un adulte.
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Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 06.12.12 18:59
Difficile de gagner la confiance d'un homme auquel on ne pouvait rien confier parce qu'on avait promis de garder le silence à un roi qui vous tenait de la plus cruelle des façons et pourtant c'était la mission que l'on avait confiée à Éléonore Sobieska et le défi qu'elle s'apprêtait à relever. Dire qu'elle avait pensé, en se mettant en chemin quelques heures plus tôt, que cet après-midi s'annonçait tranquille... ! Si tout s'était passé comme prévu, le prince du Danemark n'aurait même pas dû s'apercevoir de sa présence dans ces bois et en lui suivant à la trace, elle aurait tout comme lui fait une bonne promenade avant que le froid de l'hiver ne s'installât vraiment sur Versailles et qu'il ne fût plus possible de partir en exploration seul dans la forêt, endroit où paradoxalement Éléonore avait passé les meilleurs moments de sa vie dans sa jeunesse, loin de la pression de la cour. Et après tout, c'était bien ce que souhaitait Frédéric III quand il lui avait parlé de « discrétion » au moment de lui donner ses instructions avant le départ de la jeune femme en France. Au fur et à mesure qu’Édouard du Danemark s'interrogeait et lui posait des questions pressantes auxquelles elle ne pouvait donner de réponse, Éléonore songeait que tout ceci n'était pas sa guerre et qu'elle aurait volontiers brûlé les lettres récurrentes de Frédéric III sans même les ouvrir si elle avait eu le choix. Mais dans ces missives qu'elle lisait bon gré mal gré, il lui rappelait bien qu’Édouard ne devait rien soupçonner de la surveillance qu'elle exerçait sur lui. Puisqu'elle venait de rompre avec fracas cette promesse – mais c'était pour la bonne cause, elle se devait au moins de garder le secret sur les pistes qu'avait lancées le roi. Un instant, elle se demanda comment réagirait Frédéric s'il apprenait les événements du jour : nul doute qu'elle n'aurait pas le droit à un remerciement pour avoir poussé Édouard hors de la trajectoire de la balle... Frédéric n'était pas de ces hommes qui s'attardaient sur des réussites, au contraire sans doute occulterait-il facilement le fait qu'elle se soit mise en danger pour lui rappeler qu'Ulrich de Sola n'avait pas été retrouvé et donc qu'il n'avait toujours pas récupéré sa tête car c'était bien cela qu'il voulait. Se retrouver sa prisonnière, car c'était bien cela, était la pire chose qui lui soit arrivée au cours de son existence. Son pistolet venait déjà d'en faire les frais. Et si elle venait presque d'y laisser sa peau, elle ne se doutait pas encore qu'elle approcherait la mort d'encore plus près dans les mois à venir.
Pour recueillir des informations, elle n'avait trouvé que cette solution. Le regarder droit dans les yeux et se livrer – un peu. Elle croyait sincèrement à ce qu'elle disait. Elle était capable d'arriver à ses fins car malgré les échecs, malgré les fuites et les exils successifs, elle ne lâchait jamais prise et persuadée d'avoir raison, elle continuait à avancer et à chercher à remplir les objectifs qu'elle s'était fixés. Certes, c'était la première fois qu'elle ne visait pas directement à la mort de quelqu'un ou à sa déchéance, au contraire, elle devait cette fois-ci protéger le prince et la famille de celui-ci, jouer le rôle d'une sorte d'ange gardien qui veillerait sur eux à travers les épreuves et les dangers quitte à souffrir à leur place. Sa grande force était de paraître futile et bavarde, comme si les êtres les plus spontanés et joyeux en apparence ne pouvaient pas dissimuler les plus noirs secrets. Édouard n'en avait certainement pas conscience mais il savait déjà plus d'informations sur elle que bien de ses amis, les plus proches et les plus aimés y compris. Sa course-poursuite parmi les arbres, son adresse au tir, son assurance après avoir blessé un homme et l'avoir peut-être condamné à mort, cette lueur inquiétante qui s'allumait dans ses iris quand on venait à parler de menaces et de complots... Tout cela montrait assez qu'elle n'était pas cette dame de la cour, certes un peu trop intéressée par les jeux de plein-air et les exercices physiques mais guère plus dangereuse que toutes ces naïves venues de leur province. Non, Éléonore n'appartenait pas à ce groupe-là. Sans doute, Édouard aurait apprécié ne pas être mis au courant de ce fait – combien même il ignorait encore les intrigues qu'elle avait fomentées à Copenhague. La manière dont il déglutit puis détourna le regard le démontrait. Mais la jeune femme n'avait pas l'intention de le lâcher jusque ce qu'elle ait obtenu ce qu'elle voulait.
- J'ai déjà été agressé oui... plusieurs fois avant aujourd'hui. C'est la première fois que la menace a failli être mise à exécution. Je ne sais pas qui cela peut être. A vrai dire, je mène une enquête avec un ami, mais elle n'avance pas vraiment. Je ne vois pas qui pourrait m'en vouloir au point de désirer me tuer. Cette personne ne m'extorque rien, elle ne cherche pas d'argent et ne semble s'en prendre qu'à moi et non à ma femme ou à mon fils. Je me dis qu'il s'agit peut-être d'un mari... enfin vous comprenez...
Il s'était dégagé de sa poigne, permettant aux deux jeunes gens de se remettre en route. Le chemin était désert et leur mystérieux poursuivant semblait bien avoir renoncé. Fort heureusement car l'attention d’Éléonore était focalisée sur les paroles qu'il venait de prononcer. Ce n'était pas la première fois qu'on s'en prenait à lui, voilà qui n'était pas une surprise, elle l'avait deviné depuis bien longtemps. En revanche, les manières de celui qui s'en prenait à lui étaient bien plus étranges. Si c'était bien Ulrich de Sola, pourquoi ne pas s'en prendre directement à l'épouse du prince ou à son fils ? Pourquoi surtout ne pas voulu mettre la menace de tuer le jeune homme à exécution avant cette journée-là où par miracle, elle s'était trouvée là ? Elle lança un coup d’œil à son compagnon qui menait désormais la marche, les menant directement vers Versailles. Elle le connaissait assez mal, n'ayant pas eu le temps de vraiment se renseigner sur lui entre sa charge chez la reine et sa propre enquête sur Sola – après tout, elle devait juste le protéger, pas découvrir ses faiblesses – mais les rumeurs le disaient en effet séducteur et admirateur des belles femmes. Selon ce qu'elle avait vaguement deviné en laissant traîner ses oreilles, il lui semblait même qu'il s'était rapproché de son amie Sofia di Parma. Elle devait bien avouer qu'il n'était pas désagréable d'ailleurs avec ses yeux d'un bleu étincelant et sa haute stature qui seyait à quelqu'un de son rang, il en fallait moins à la plupart des femmes pour tomber dans les filets des séducteurs. Mais avait-il raison pour autant ? Un mari jaloux en viendrait-il à de telles extrémités ? Éléonore, au vu de sa vie personnelle, ne pouvait pas vraiment répondre à cette question – ses deux époux n'avaient jamais montré des signes de possessivité à son égard ou peut-être n'avaient pas eu le temps d'en montrer. Mais si Édouard y songeait sérieusement, c'était que cette hypothèse pouvait paraître crédible.
- Déjà plusieurs fois ? Répliqua-t-elle d'un ton songeur, vous devriez songer à prendre des mesures de sécurité plus grandes, partir seul dans la forêt de Versailles était peut-être un peu inconscient, si je puis me permettre, monsieur... Du moins jusqu'à ce que nous ayons trouvé (elle avait employé la première personne du pluriel sans même y songer) ce que cette personne vous veut. Et il faudrait faire de même envers votre épouse et votre enfant, par mesure de précaution... On n'est jamais trop prudent, croyez-moi... Je sais que cela est délicat, poursuivit-elle d'un ton gêné non feint car elle ne souhaitait pas donner l'impression de chercher à fouiller dans les histoires de cœur du prince et encore moins celle de le juger, mais avez-vous déjà songé à faire une liste... De ces maris qui auraient des raisons de se montrer... Froids à votre égard ? Ou même des femmes qui se sentent délaissées ?... Quelque part, il vaut mieux cette situation que l'inverse où vous n'auriez eu que des ennemis, j'aurais moins apprécié de devoir départager celui qui vous aurait détesté le plus !
Sa tentative d'humour tomba un peu à plat et un silence s'installa entre eux pour la première fois depuis leur rencontre officielle. La jeune femme continuait à réfléchir à ce qu'elle venait d'apprendre et à chercher ce qui pouvait motiver Sola si c'était bien lui qui était derrière cela. Mais alors que le ciel se dégageait peu à peu et que la pluie cessait – c'était par contre trop tard pour sauver leur apparence -, le Danois montra qu'il n'en avait pas terminé. Éléonore laissa échapper une grimace en entendant toutes les questions que laissait échapper Édouard. Il n'avait visiblement pas l'intention de la laisser s'échapper sans obtenir des réponses et même la tentative d’Éléonore de retourner la situation n'avait eu aucun effet. Elle préférait mille fois se retrouver au cœur de l'action – et devoir échapper à des balles plutôt que de devoir s'expliquer. Mais elle lui devait bien ça. Et elle devait surtout éviter que cet incident ne vienne aux oreilles de Frédéric en trouvant une excuse plausible à tout cela.
- Je ne suis pas en France depuis bien longtemps, moi non plus, cela explique sans doute que nous nous soyons peu croisés même si moi, je vous avais déjà aperçu. Il faut croire que j'ai changé car on m'a toujours reproché de ne pas être discrète ! Je suis au service de la reine à vrai dire et mes fonctions font que je vais souvent à Paris. Vous me flattez, monsieur, je n'oserais pas penser que l'on ne peut m'oublier, au contraire... En conséquence, c'est bien la première fois que je soudoyais l'un de vos domestiques et que je me lançais sur vos traces. Je suis d'ailleurs désolée que vous ayez pensé que c'était moi qui vous voulais du mal... Maintenant que vous êtes au courant de tout, je n'aurais plus besoin de faire appel à cette supercherie. Et je suis désolée de vous décevoir mais je n'ai pas plus de pistes que vous, malheureusement... Vous me voyez moi aussi dans le flou et je regrette fort d'avoir laissé s'échapper cet individu, il aurait pu nous livrer des informations intéressantes.
N'était-ce pas hypocrite de lui demander de lui faire confiance alors qu'elle lui mentait aussi ouvertement ? En croisant le regard empli de désarroi de son interlocuteur, pour la première fois, Éléonore eut honte de dissimuler ce qu'elle savait et baissa la tête pour faire mine d'éviter un endroit plus glissant du chemin avant de lâcher ce qui, à défaut d'être une vérité, sous-entendait bien plus qu'il ne le laissait paraître :
- Il me semblait toutefois qu'un prince héritier a toujours des rivaux et bien nombreux sont les complots qui se forment autour de lui. C'est bien la raison pour laquelle... Non la Pologne mais ma famille m'envoie. J'étais chargée de savoir si tel était le cas.
Elle avait renoncé à l’honnêteté et elle leva un visage fermé, sans expression particulière vers Édouard, dissimulant toutes ses émotions derrière ce masque de sévérité. Après tout, à défaut d'être réel, tout ce qu'elle disait était parfaitement crédible... N'était-ce pas ce qu'elle faisait depuis qu'elle avait exilée de Pologne en 1661 ?
- Je vais vous dire les choses en face, vous n'êtes pas sans ignorer que le trône de Pologne est électif. Mon frère Jan, le grand Hetman, est le mieux placé pour y accéder mais nous avons besoin de soutiens étrangers. En tant qu'héritier, vous êtes le mieux placé... Je suis désolée... Vraiment désolée de vous paraître si peu désintéressée... Sachez, je vous prie, que je n'attends rien de concret de votre part, pas même un remerciement et que j'aurais préféré rester dans l'ombre, juste à m'assurer que vous alliez bien...
La jeune femme marqua une pause et parut trouver les bosquets qui entouraient le chemin proprement fascinants. Elle savait que l'orée de la forêt était désormais toute proche et qu'arrivait donc rapidement la fin de cette conversation. L'excuse qu'elle avait choisi n'était pas la meilleure pour gagner sa confiance mais elle n'avait pas trouvé mieux en si peu de temps. Elle poursuivit, même si désormais elle devait arracher les paroles de sa bouche pour que cela sorte :
- Votre frère Frédéric vous apprécie et pense que vous allez lui être un bon successeur. Il n'est peut-être pas la personne la plus agréable que je connaisse mais il a bon jugement... Et... Il... Il est le parrain de mon fils qui se trouve à Copenhague sous sa garde. Ne lui dites rien, je vous en prie, je n'aimerais pas qu'il s'inquiète.
C'en était terminé, à la fois des mensonges et de leur promenade de la forêt. Ils étaient désormais sortis du couvert des arbres et pouvaient observer le château et toute son agitation dans le lointain. Éléonore s'était arrêtée, hésitante sur la marche à suivre, consciente qu'elle n'était guère présentable à la cour dans cet état, cheveux ébouriffés et vêtements couverts de boue, conséquences de sa chute. Édouard, à ses côtés, n'était pas dans un meilleur état. Qu'allaient penser les courtisans en les voyant débarquer ainsi ? Elle n'en avait pas tout à fait terminé, néanmoins :
- Et je suis loin d'être une grande dame même si mon frère Jan occupe une fonction prestigieuse au sein de notre pays, lâcha-t-elle d'un ton abrupt, cette question avait en effet été la plus grande souffrance de son enfance, je ne suis même pas une vraie Sobieska... Ou alors que par mon père... Je ne suis pas grand chose à vrai dire.
La bâtarde et le prince, en voilà un spectacle des plus étranges pour un quelconque observateur extérieur ! Avant de réfléchir à une solution pour éviter de se donner en spectacle, Éléonore se tourna une dernière fois vers le Danois et lui adressa un mince sourire :
- Je vous jure que nous allons trouver qui fait cela et que nous nous en débarrasserons ! En attendant... Ne vous laissez pas effrayer, c'est bien ce qu'il souhaite, garder votre sang-froid, votre calme et votre impassibilité sera le meilleur pied de nez à lui faire ! Et maintenant que nous sommes alliés, il a bien du souci à se faire, c'est moi qui vous le dit !
Elle retrouvait à vue d’œil son entrain habituel et ses traits s'éclairaient enfin :
- Alliés, n'est-ce pas ? A défaut d'être complices ou amis... Maintenant, nous devons trouver une solution pour rentrer dans nos appartements respectifs sans lancer la rumeur que nous nous détestons assez pour faire des combats de boue dans la forêt de Versailles ! Ce serait amusant bien sûr mais je ne suis pas sûre que ça serve nos réputations !
Spoiler:
Cette réponse est un mystère à mes yeux, elle est longue mais pas très utile On conclut bientôt de toute façon ? Et promis, Edouard apprendra la vérité un jour
Édouard du Danemark
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► Date d'inscription : 22/07/2012
Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 03.01.13 2:28
Édouard était sincère... il ne voyait pas qui pouvait tenter de s'en prendre à lui hormis un mari jaloux. Pourtant, il restait très prudent en la matière, malgré ce que pouvait en penser son interlocutrice. Il faisait la cour à ces dames sans vraiment savoir si elles étaient esseulées ou comblées. Mais avant que la relation n'aille plus loin que quelques phrases romantiques, il s'assurait de ne pas tomber sur un autre homme pendant ces petits apartés secrets. Il ne voyait pas laquelle de ses amantes avait pu être assez folle pour avouer son péché d'adultère, surtout que c'était très mal vu, à la fois par l'Eglise et par la Cour. Un femme qui reconnaissait avoir été infidèle risquait beaucoup plus qu'un homme, ils n'étaient guère égaux. Pour le Prince, la thèse la plus plausible devait être un témoin inattendu, spectateur de la scène, qui en aurait parlé au mari. C'était basé sur de nombreuses hypothèses, assez farfelues, mais le jeune homme faisait avec les éléments à sa disposition. Quand Éléonore lui conseilla de lister ses conquêtes et leurs maris, le rouge lui monta légèrement aux joues. Il n'osa pas lui dire que jamais il n'aurait assez de papier... et qu'il ne demandait pas à la personne si oui ou non, elle était libre de tout contrat de mariage. Elle tenta un peu d'humour, alors qu'Édouard fut absorbé par ses pensées. Oui, il était imprudent de partir dans la forêt tout seul. Tout comme il était imprudent de laisser sa femme et son fils sans protection. L'héritier du trône du Danemark avait tellement pris l'habitude de fuir ses responsabilités qu'il vivait dans l'insouciance. Il ne voulait en aucun cas accéder au trône et de devenir Roi. Éléonore entreprit ensuite de répondre à la multitude de questions qu'il venait de lui poser. Il se promit de mettre dehors ce félon de domestique qui l'avait trahi sans état d'âme et peut-être même de le sanctionner avant. Il fallait qu'il y réfléchisse même s'il se savait incapable de faire mal à une mouche volontairement ou sans raison notable. En guise de réponse, la jeune femme croisa son regard décontenancé. Il avait peine à croire qu'une femme comme elle ait pris la liberté de s'entraîner et de le suivre, juste parce qu'elle était au service de la Reine... Il nota qu'elle détournait les yeux, visiblement gêné et alors qu'il allait répliquer, elle poursuivit. Elle évoqua avec un calme olympien les complots pouvant se tramer autour de lui. Édouard blêmit... non content il ne voulait pas être Roi mais en plus, à cause de son statut sa vie pouvait être en danger. Bien sûr, il n'était pas stupide, il savait que certains débordaient de convoitises, mais de là à tenter de le faire tuer... Et puis, Éléonore en vint aux aveux. Le jeune homme fronça les sourcils quand elle lui parla du trône de Pologne et des soutiens qu'elle devait engranger. Il répliqua, sur la défensive :
- Vous êtes sur le point de m'expliquer que si vous avez soudoyé mon domestique, si vous avez bravé tous ces dangers, ce n'était que pour gagner mon soutien au trône de Pologne, en faveur de votre frère ? Je ne peux pas ignorer votre manoeuvre... elle est vénale ! J'ai peine à vous croire, pour tout vous dire, cet aveu m'apporte une certaine déception... je ne sais qu'en penser...
La jeune femme eut le malheur de poursuivre sur l'estime que lui portait son frère et d'insister sur son statut d'héritier. Le visage d'Édouard se rembrunit alors que la colère semblait l'envahir. Il était un homme calme et posé, sauf quand on parlait de ses futures responsabilités. Très sèchement, sur un ton réprobateur, il répliqua :
- Allons donc ! Mon frère le Roi n'est point à l'agonie ! Il est toujours le Roi et vous devriez davantage chercher à gagner son soutien et sa bénédiction qu'à planifier sa mort et mon accession au trône. Je ne suis prince héritier qu'en attendant qu'il enfante un véritable héritier ! Ce titre me sera retiré lorsqu'il adviendra un fils fort et vigoureux ! Et c'est pour bientôt ! Qu'il est triste qu'une grande Dame comme vous n'y croit guère !
Il l'espérait en tout cas... Édouard ne voulait pas être Roi, il vivait cela comme une malédiction, une punition... s'il avait été plus soucieux de son âme, peut-être aurait-il tout fait pour rester fidèle et résister aux tentations de la vie qui l'attiraient au quotidien. Éléonore le saurait pour la fois suivante, surtout ne pas parler du trône du Danemark. Ne pouvant rester en colère très longtemps, il se calma quand elle évoqua son fils. Il ignorait que son frère en était le parrain et qu'ils se connaissaient. Tout comme il ignorait que le titre de Grande Dame semblait l'avoir blessée. Mais par cet aveu, Édouard comprit qu'il s'était fourvoyé sur sa véritable nature. Elle n'avait rien à gagner à l'accession de son frère au trône de Pologne, elle agissait avec en quelque sorte, altruisme, par souci de bien faire. Le Prince baissa les yeux et ne pouvant retenir ses mots plus longtemps, il concéda :
- Je vous prie de pardonner mon emportement et mes propos. Ils ont été hâtifs et éloignés de la réalité. Je ne savais pas pour vos liens de parenté... Je me suis entièrement fourvoyé. Je peux comprendre votre tristesse de ne pas appartenir à une famille. Il est difficile de trouver sa place dans ce type de situation. Je sais de quoi je parle, même si nos histoires diffèrent probablement. Vous venez de sauver un Prince aujourd'hui, c'est beaucoup pour quelqu'un qui n'est pas grand chose !
Alors que le climat était devenu plus détendu et plus amical, Éléonore se laisse emporter par son entrain. Le Prince lui adressa un regard pétillant. Elle avait une détermination à tout épreuve, une personnalité forte mais qui savait disparaître aux instants les plus propices. A cet instant, Édouard n'était pas insensible à son charme. S'il n'avait pas une dette de vie à lui rendre et s'il n'avait pas cette mystérieuse barrière qui le séparait d'elle en lui disant qu'elle avait l'esprit suffisamment affûté pour le protéger et qu'en lui laissant l'esprit libre à la réflexion, elle serait bien plus efficace, il aurait sans doute joué son séducteur.
- Alliés, oui. Mais seulement à la condition que vous ne soudoyiez plus mes domestiques ! A ce rythme, je n'aurais plus personne pour s'occuper de mes habits et mon repas !
Et bien que l'idée qu'une rumeur circule à son sujet, quant à un éventuel combat de boue ne lui déplaise pas vraiment, il devait admettre qu'elle risquait de faire jaser les commères... Il avait bien l'intention de se faire petit, histoire d'éviter de perdre la vie bêtement.
- Peut-être serait-il judicieux de parler d'agression ? L'histoire pourrait être qu'un bandit vous a suivi dans la forêt pour vous voler vos bijoux et qu'il a tenté de vous égorger. Et comme je passais moi-même par là, je me suis battu avec ce sinistre individu pour le mettre en fuite. Et nous revoilà sains et saufs. Ce sera l'occasion d'envoyer les gardes à la recherche de cet assassin et peut-être le retrouveront-ils ? Loin de moi l'idée de vous voler la vedette mais sans vouloir vous manquer de respect, inverser les rôles pour ce mensonge ne serait guère plausible... Qu'en dites-vous ?
Spoiler:
Effectivement, on ne va pas tarder à le clore. Pour l'instant, Edouard croit le vilain mensonge d'Eleonore. ^^
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Sujet: Re: Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore) 08.01.13 16:17
Éléonore Sobieska subit sans broncher les reproches et l'évidente déception d’Édouard du Danemark. L'explication qu'elle lui avait offert n'était certes pas la plus flatteuse pour elle qui ne passait que pour un simple agent d'une politique vénale et ambitieuse de sa famille – même si Éléonore était persuadée qu'il était du destin de son frère de prendre le pouvoir en Pologne, sa couronne de lauriers qui ne cessait de s'agrandir au fur et à mesure de ses victoires en était un signe certain et même si elle faisait également cela pour son pays à qui les rois fantoches ou indignes qui s'étaient succédés sur le trône avaient fait plus de mal que de bien. Mais c'était encore préférable à la stricte vérité qui aurait nécessité qu'elle explique à demi-mots comment elle s'était retrouvée dans cette situation absolument intenable et pourquoi Frédéric III pouvait la faire chanter. Passer pour une personne intéressée, ce qu'elle était vraiment après tout, était un moindre problème. Il n'était pas sûr qu’Édouard aurait pu lui faire plus confiance s'il avait su qu'elle avait comploté dans une bonne partie de l'Europe avant d'atterrir à Versailles. De toute façon, à quoi s'attendait-il vraiment ? Qu'elle lui raconte qu'elle se promenait dans la forêt domaniale sous la pluie avec un pistolet pour son bon plaisir et qu'elle l'avait pris en chasse puis aidé par erreur ? Ce n'était guère crédible et Éléonore, en excellente menteuse qu'elle était – si bonne menteuse qu'elle réussissait à paraître joyeuse en permanence et à se dissimuler à la réalité à elle-même, en avait bien conscience. Elle garda donc le silence le temps que le jeune homme engrange la multitude d'informations qu'elle venait de lui livrer. Il n'était pas facile pour un prince de prendre conscience que se tramaient des conspirations autour de lui – même si la Polonaise le jugea un peu naïf mais il fallait bien dire qu'elle avait une familiarité avec le complot supérieure à la moyenne –, qu'il pouvait être en danger tout comme son épouse et son enfant et que des puissances étrangères pariaient sur son avenir. Mais c'était le lot commun, cruel certes, des grands de ce monde. Ne se murmurait-il pas que le roi de France et l'empereur avaient déjà réglé entre eux le sort de la succession d'Espagne, pariant sur la mort prochaine de Charles II, cet enfant débile et malingre auquel la couronne seyait si mal ?
Pour espérer se concilier les faveurs d’Édouard, Éléonore évoqua Frédéric lui-même mais eut la désagréable surprise de voir le visage du prince s'assombrir encore et lui répondre d'un ton sec des paroles amères : - Allons donc ! Mon frère le Roi n'est point à l'agonie ! Il est toujours le Roi et vous devriez davantage chercher à gagner son soutien et sa bénédiction qu'à planifier sa mort et mon accession au trône. Je ne suis prince héritier qu'en attendant qu'il enfante un véritable héritier ! Ce titre me sera retiré lorsqu'il adviendra un fils fort et vigoureux ! Et c'est pour bientôt ! Qu'il est triste qu'une grande Dame comme vous n'y croie guère ! Éléonore avait bien conscience de manquer de tact mais pour le coup, elle ignorait pourquoi Édouard avait pris la mouche. Pour quelqu'un qui se battait avec autant d'acharnement pour apporter des soutiens à un frère qui lorgnait sur un trône, il était difficile de comprendre que d'autres voulaient échapper à ce sort. Le prince héritier du Danemark se considérait-il comme incapable de faire un bon roi ? Était-ce donc que par mésestime personnelle ? Ou accepter de renoncer à sa liberté était un sacrifice trop douloureux pour lui ? C'était peut-être la raison pour laquelle il jouait les ambassadeurs en France. Éléonore aurait pu compatir, elle avait détesté Copenhague et la perspective d'y être bloqué devait être bien déprimante. Mais son esprit était accaparé par d'autres pensées et elle fit une petite moue. Si elle était parvenue à son but, Frédéric aurait eu une nouvelle épouse et peut-être des enfants. Finalement, Édouard et elle n'avaient peut-être que le même souhait. Quant à la mort de Frédéric... Elle ne l'avait jamais imaginé mais cela l'aurait rendu libre. La jeune femme chercha néanmoins ses mots pour présenter ses excuses et prononça d'un ton conciliateur mais un peu hésitant : - Bien entendu, votre frère gouverne toujours et il aura sans nul doute, par la grâce divine, bien d'enfants de son sang, je suis navrée d'avoir pu vous paraître souhaiter sa disparition et donc de vous avoir blessé, telle n'était pas mon intention. Mais vous êtes un prince important au Danemark, nous avions pensé que vous pourriez nous être essentiel... Elle baissa la voix et la tête pour poursuivre sur le sujet de son fils. Si cela n'avait tenu qu'à elle, elle ne l'aurait jamais laissé dans les griffes de son « parrain » même s'il n'était pas de son sang et même si elle ne l'avait pas élevé. Mais ne plus penser à lui, s'en désintéresser sous prétexte qu'il n'était qu'un mensonge de plus dans son existence était au-dessus de ses forces. Elle était responsable de lui depuis qu'elle l'avait arraché à sa véritable famille. Et elle pouvait nier autant qu'elle voulait, elle s'était attachée à lui, à sa bonne bouille et à son courage, pendant leurs années d'errance au sein de l'Europe centrale. Édouard dut sentir qu'on abordait un sujet difficile car il la laissa parler sans rien ajouter. A vrai dire, Éléonore s'était fermée dès qu'il avait suggéré l'idée qu'elle était une grande dame. Chacun ses mots qui fâchent. Avec les années, cela aurait dû lui être indifférent. Combien de fois avait-elle entendu sa demi-sœur, la légitime Katarzyna, lui jeter des insultes à la figure, allant jusqu'à refuser de marcher auprès d'elle derrière le cercueil de leur père commun lors des funérailles ? Mais elle ne pouvait faire autrement, toute son existence avait été passée à prouver qu'elle était digne d'être une Sobieska et de porter ce nom.
Alors qu'ils arrivaient à la lisière de la forêt, la jeune femme rousse jeta un coup d’œil à son compagnon de balade improvisé et le vit baisser le regard à son tour avant de lui demander de lui pardonner son emportement. Elle en resta saisie. Il n'était pas habituel pour elle qu'on chercher à s'excuser de l'avoir blessée, surtout de la part d'un homme aussi titré, lesquels avaient fortement tendance à considérer qu'ils ne devaient rien à personne. Mais Édouard paraissait différent. Elle aurait dû le détester pour tout ce qu'il était, pour son sang danois, l'amitié qu'il avait pour Frédéric, la cause de tous ses malheurs, pour la mettre en danger alors qu'elle n'avait que faire des éventuelles querelles de succession au Danemark et des disputes entre frères dignes des Atrides. Mais elle comprit en un éclair qu'elle ne pourrait pas. Il y avait quelque chose de touchant chez lui, malgré une forme de crédulité, sa volonté de ne pas blesser les autres peut-être, sa gentillesse envers elle car il cherchait à lui remonter le moral malgré tout qu'elle avait pu dire. Il était un homme bon tout simplement et cette qualité était assez rare dans le genre humain pour être notée. Malgré sa curiosité parfois dérangeante, il était charmant et la Polonaise sentit qu'à son corps défendant, elle était bien partie pour l'apprécier. Dommage, il était plus facile de haïr que d'aimer, surtout quelqu'un qu'on s'amusait à prendre pour cible. Elle lui adressa un sourire compréhensif mais ne fit pas de remarque sur son propos. L'entrain qu'elle éprouvait à nouveau laissait assez voir qu'elle lui avait largement tout pardonné. De toute façon, c'était plutôt elle qui lui cachait des informations et aurait du se montrer navrée.
Resurgissait de nouveau la Éléonore Sobieska taquine et souriante comme on la connaissait à Versailles, toujours positive et optimiste, prête à s'amuser. Après tout, on venait de lui offrir une distraction digne de ce nom et même si elle aurait préféré ne pas y être mêlée, une enquête à mener pour son esprit toujours à l'affût d'occupations – autre que la broderie ou les sermons des duègnes de la reine qui avaient tendance à la faire souhaiter que Dieu la frappe d'un coup de foudre pour ne pas subir cela. Ses yeux pétillaient de nouveau et son visage serein et éclairé ne laissait guère voir ce qu'ils venaient de subit. Offrant par la même occasion un contraste saisissant avec la boue qui lui maculait encore une partie de la joue et ses cheveux dénoués et entremêlés. - Alliés, oui. Mais seulement à la condition que vous ne soudoyiez plus mes domestiques ! A ce rythme, je n'aurais plus personne pour s'occuper de mes habits et mon repas ! Ravie de le voir enfin accepter son aide, elle eut un petit rire, le premier depuis le début de la journée et répliqua sur le même ton : - Je m'en voudrais de vous priver de vos serviteurs, cela serait en effet de plus mauvais effet... Quoique si vous comptiez apparaître aux yeux de la cour tel que vous êtes actuellement, je pense que vos domestiques auraient de toute façon fort mauvaise réputation. A vrai dire, il n'est pas totalement inutile que vous ne gardiez autour de vous que les plus fidèles, la facilité avec laquelle j'ai pu avoir mes informations prouvent assez que certains ne vous sont pas dévoués. Mais rassurez-vous, je serais bien aise d'économiser un peu d'argent, vous n'aurez qu'à me prévenir de vos sorties les plus dangereuses, je serai là. Peut-être d'ailleurs pourrions-nous organiser à nouveau une petite promenade dans la forêt pour que nous puissions attraper celui qui s'amuse à prendre les princes pour des proies de chasse ? S'apercevant qu’Édouard ne semblait guère motivé par la perspective de servir d'appât dans une chasse à l'homme, elle eut un geste de la main pour signifier qu'ils pourraient en reparler et enchaîna sur leur souci primordial. Retourner chez eux en toute discrétion sans devoir attendre que la nuit tombe avec son lot de dangers. Fort heureusement, Édouard avait une proposition : - Peut-être serait-il judicieux de parler d'agression ? L'histoire pourrait être qu'un bandit vous a suivi dans la forêt pour vous voler vos bijoux et qu'il a tenté de vous égorger. Et comme je passais moi-même par là, je me suis battu avec ce sinistre individu pour le mettre en fuite. Et nous revoilà sains et saufs. Ce sera l'occasion d'envoyer les gardes à la recherche de cet assassin et peut-être le retrouveront-ils ? Loin de moi l'idée de vous voler la vedette mais sans vouloir vous manquer de respect, inverser les rôles pour ce mensonge ne serait guère plausible... Qu'en dites-vous ? Elle ne portait pas de bijoux et n'avait plus son pistolet, l'histoire se tenait. Néanmoins, elle ne put s'empêcher de jeter un coup d’œil ironique à son compagnon d'infortune et tout en lui ôtant une feuille fort disgracieuse dans sa chevelure puis frottant sa propre joue, elle lui répondit un brin moqueuse : - Hélas, vous avez raison, les gardes du roi ont du mal à imaginer que les femmes ne manquent pas de ressources. Les laisser sur les pas de ce bandit n'est pas une mauvaise idée même s'ils risquent de rapidement conclure à un gueux venu voler quelques nobles sans défense, peut-être trouveront-ils quelques indices. Mais pour éviter de mettre la puce à l'oreille d'un éventuel commanditaire de cet assassinat qui se trouveraient dans le château, je vous proposerais de nous dépêcher. Au vu du peu de monde qui se trouve dans les jardins, il doit être l'heure d'une mise en scène de la vie de notre bon roi, nous éviterions de croiser trop de monde et nous pourrions nous contenter d'en parler à la cavalerie. Je crois que des mousquetaires sont de faction à une entrée est, généralement réservée à des domestiques. Ayant terminé de se rendre plus présentable – ou du moins le croyait-elle car quiconque l'aurait vu entrer dans une pièce du château ainsi aurait poussé de hauts cris à l'image du bourreau de sa jeunesse Eleanor de Richmond qu'elle avait plusieurs fois tenté de tuer par crise cardiaque de cette façon –, elle se tourna vers Édouard du Danemark et eut un sourire plein de malice, comme si elle s'amusait follement : - Êtes-vous prêt ? J'ai en tout cas été ravie de faire votre connaissance, votre Altesse, désolée de m'être montrée si empressée mais j'aime les rapprochements un peu brusques. Elle lui fit un clin d’œil pour lui faire comprendre la plaisanterie puis prit son bras pour faire mine qu'il la soutenait. - Quant à moi, je me sens bien faible à cause de cette tentative d'assassinat à mon encontre. Auriez-vous la gentillesse de me conduire jusqu'à mes appartements du château ? Et la dernière preuve de la présence des deux nouveaux alliés que purent obtenir les hauts arbres qui bordaient la lisière de la forêt, formant comme une sorte de rempart devant les grands jardins à la française, si carrés et maîtrisés, qui s'étendaient devant eux, ce fut le rire cristallin d’Éléonore Sobieska qui ne leur fut bientôt plus qu'emporté par le vent.
Spoiler:
Je pense qu'on peut s'arrêter là, à toi de me dire si tu veux rajouter quelque chose et conclure ou si mon post est la conclusion
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Où il est question d'ange gardien (ft. Eléonore)
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