" Il en va de la réputation d'un prince !"

Un matin, de bonne heure, une jeune femme retrouva une amie dans les jardins de Versailles. Les courtisans attendaient l’apparition du Roi-Soleil, qui devait en être au grand lever. Les malheureux qui n’avaient pas le plaisir d’y assister se délectaient du plaisir de se promener dans les magnifiques parcs. La jeune demoiselle tenait son amie par le bras tandis qu’elles avançaient à petits pas. Notre demoiselle se mit alors à chuchoter précipitamment, comme si elle avait pesé le pour et le contre avant de prendre la parole :

-Ma chère amie, je vais vous dire quelque chose, mais surtout, ne dîtes rien à personne. Ma réputation en dépend, disait la pauvre jeune fille qui accordait un peu trop vite sa confiance.

-Vous pouvez me faire confiance ! répondit une comtesse quelconque, étonnée mais avide de connaitre la suite de ce qui apparaissait comme être un…ragot !

-Hier soir, je devais retrouver un certain prince, au bassin de Neptune…

-Un prince ! la coupa-t-on ! Mais quel est-il ?

-Là n’est pas la question…

-Mais si ! Comment pourrais-je m’intéresser à vos paroles si je ne sais qui elles concernent ?

-Bien. Le prince de Longueville. Je devais le retrouver et… il était avec un autre homme…

-Le Longueville ? Avec un homme ? Vous me faîtes rire, très chère. Ce jeune prince a tout d’un coq orgueilleux, il n’irait jamais compromettre sa réputation avec un homme. Peut-être comptait-il à son ami ses futurs exploits…répondit la comtesse avec un clin d’œil appuyé.

-Non…non je ne crois pas. Il…Ils s’embrassaient, vous savez, comme deux amants peuvent s’embrasser…

-Comment ?! Que dîtes-vous ? S’embrasser…sur la bouche ?

-Puisque je vous le dis, mon amie !

-Je ne puis le croire…la comtesse semblait effarée.

-Ecoutez, je ne vous l’aurais pas dit si c’était faux ! Comment pourrais-je inventer une chose pareille ! Paris de Longueville, un homme qui a les mêmes mœurs que le frère du roi. Je ne l’aurais jamais cru.

-Et moi donc ! Mais puisque vous le dîtes…

-Promettez-moi de ne le dire à personne.

-Je vous le promets »

La promenade des jeunes femmes prit fin. En fin d’après-midi, la comtesse retrouvait son hôtel particulier à Paris. Elle y fit venir une amie qui avait ses entrées à la cour.

« Vous ne savez pas ce que j’ai appris ce matin même ! Les femmes ne suffisent plus au prince de Longueville ! Il s'attaque maintenant aux hommes! J'ai même entendu dire qu'il s'entendait très bien avec le frère de notre roi ! "