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| Mémoires de Victoire de Noailles-Norfolk | |
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| Sujet: Mémoires de Victoire de Noailles-Norfolk 06.02.10 20:18 | |
| "L'amour ne commence ni ne finit comme nous le croyons. L'amour est une bataille, l'amour est une guerre, l'amour grandit. " James BaldwinLe soleil se lève doucement face au palais, éclairant ma chambre de ses doux rayons chauds et rassurants. L’astre est fidèle, il est là, chaque jour, chaque minute, à nous donner la lumière dont nous avons tant besoin. Il est seul à nous accompagner à chaque moment de notre vie. Il est sûrement le plus fidèle de nos compagnons. Malheureusement nous n’avons pas besoin que de lui, et notre vie dépend d’un grand nombre de personnes et de choses. Chaque matin je me lève en espérant le voir. Chaque matin je me lève en priant pour voir son sourire destiné rien qu’à moi. Je prie pour sentir son souffle sur ma peau, pour caresser ses belles boucles brunes. Je prie pour être la seule à avoir ce privilège, à être la seule à détenir son cœur. Mais chaque jour apporte son lot de doutes et de questions. Chaque jour me rend un peu plus jalouse, un peu plus terrifiée à l’idée de le perdre. Il y a des jours où je ne le vois pas, et je déteste ces jours. Il y a des soirs où je vais me coucher, espérant qu’il me fera la surprise de me rejoindre dans ma chambre, mais il ne vient pas. Il y a des jours où je n’ai aucune nouvelle de lui. Et il y a des soirs où je m’endors en me demandant ce qu’il fait. Il y a des nuits où je fais de terribles cauchemars. Des cauchemars où il partage le lit d’une autre femme. Des cauchemars qui me paraissent si réels. Quand je ne le vois pas je doute. Je doute de moi, de lui, de nous. Quand je ne le vois pas, je n’ai confiance en personne. Et je ne le vois pas souvent. J’ai tant besoin de lui. Jamais je n’aurai cru autant dépendre d’un homme. Je me voulais une femme indépendante, mais il n’en est rien. Je n’ai que faire des cadeaux qu’il m’offre pour se faire pardonner de son absence. Je n’ai pas besoin de son argent. Je le veux lui. Rien que lui. Je veux sentir le contact de sa peau sur la mienne. Je veux sentir ses mains me toucher. Je veux sentir ses lèvres sur les miennes. Je veux frissonner en sentant son souffle. Je le veux, rien qu’à moi. Je me fiche de ses obligations politiques, il m’appartient avant tout. Il est à moi. Une femme ne devrait pas parler ainsi. La femme doit se soumettre à son époux. La femme doit attendre sagement son mari. Mais je ne peux pas. Je ne veux pas. Il y a des jours où je ne le vois pas. Et des jours où je le vois. Et si je lui reproche ses absences, tous mes doutes disparaissent quand il me sourit. Ma colère fond comme neige au soleil lorsqu’il me prend la main. Je suis la plus heureuse des femmes lorsque nous sommes ensemble. Il est mon soleil à moi, mon astre qui m’éclaire de ses rayons. J’ai besoin de lui pour vivre. Mais je me rends compte parfois que je ne sais rien de lui. Il ne me parle pas beaucoup de lui. J’aimerai me l’imaginer enfant, en Angleterre, mais je ne peux pas. Je ne sais presque rien de sa famille, ni de ses amis. Mais je suis jalouse de ses amis. Ils doivent sûrement mieux le connaître que moi. Avec eux, il partage des choses que je ne sais pas. Il leur dévoile ses sentiments, alors que je brûle de mieux connaitre son cœur. Je veux tout savoir de lui, ses envies, ses peurs. Je veux connaître ses sentiments, son histoire, ses rêves. Je veux être sa femme, sa maîtresse et sa meilleure amie. Je veux être tout à la fois.
Je suis seule, assise à mon bureau, devant la fenêtre. Ma plume gratte avec frénésie le papier. Mon oreille est à l’affut du moindre bruit, espérant l’entendre arriver. Mais je me fais du mal à espérer ainsi. Je devrais cesser. Je devrais profiter des moments qu’il m’accorde, et trouver mes propres occupations. Mais le palais me parait bien vide sans lui. Je devrais être fière de son statut, et m’en vanter. Je devrais profiter de ses absences pour dépenser son argent en fanfreluches et aux jeux. Mais je ne peux pas. Je ne veux pas. Cela ne soulagerait en rien le manque que je ressens. Ma vie est bien vide sans lui. Parfois, j’aimerai trouver ma voie, mais je n’y arrive pas. Ma voie, c’est lui. Tout simplement. Je lui suis entièrement dévouée, comme je le lui ai promit le jour de notre mariage. Après tout, est-ce simplement cela ma voie, être son épouse. Métier à plein temps diront certaines. Elles ont peut-être raison. Aujourd’hui je vais me demander si je vais le voir. Et ce soir je vais m’endormir en l’attendant.
Je me retourne, ma porte s'ouvre... |
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| Sujet: Re: Mémoires de Victoire de Noailles-Norfolk 12.07.10 21:38 | |
| "La famille des autres, c'est presque toujours amusant. Le problème, c'est la nôtre." Judith Messier Ce journal est resté fermé un long moment. Je ne me reconnais pas dans les mots que j’ai écrits auparavant. J’ai senti le rouge me monter aux joues lorsque je me lisais. Plut au ciel que je fus seule ! Bien des choses ont changées depuis mon arrivée à Versailles, où ma vie semblait se résumer à mon époux. La mort de la Reine Mère, la défunte Anne d’Autriche, m’a paru avoir un point positif, si tant est qu’un décès pu apporter quelque chose de bien. Le deuil m’a rapprochée de Marianne Mancini, duchesse de Bouillon. Ce petit bout de femme, pas beaucoup plus âgée que moi, m’a apporté tant de bonnes choses. Son aide me fut, et m’est toujours, infiniment précieuse. Parfois, je me demande ce que j’aurai fait si elle n’avait pas été à mes côtés, et la réponse à laquelle je suis toujours confrontée, est « rien » . Je peux dire sans hésiter que c’est en partie, (et quelle partie ! plutôt large je dois dire) que j’ai pris confiance en moi. Jamais je n’aurai cru connaitre pareille amitié, surtout ici, où les vipères sont plus nombreuses que les doux agneaux. Oh, j’ai conscience que la duchesse de Bouillon est considérée comme une vipère par bon nombre des courtisans. Mais je dois dire qu’avec moi, elle est douce et sincère, et c’est le plus important à mon cœur. Nos rencontres me remplissent de joie, et c’est un véritable bonheur que de converser avec elle. Esprit vif et perspicacité sont l’atout majeur de cette jeune femme. Pourtant, je lui ai menti, et je lui mens quotidiennement, depuis que j’ai encouragé une correspondance avec le prince de Neufchâtel, son pire ennemi. Je m’en veux, et pourtant c’était une des seules solutions pour me débarrasser de la duchesse de Longueville, sa sœur. Il m’a assuré qu’il allait éloigner Gabrielle de Longueville de la cour. Je ne me suis présentée à lui que dans ce but, et ne comptais pas plus faire sa connaissance, ayant un a priori plutôt négatif sur sa personne. Pourtant, je dois avouer qu’il m’amuse et me fait rire comme personne. Son orgueil et sa fierté lui donnent l’allure d’un jeune coq, mais un coq adorable je dois dire. Les jeunes femmes sont en pamoison devant lui, et je ris discrètement, derrière mon éventail, de cette séduction dont il joue sur la gent féminine. Cependant, les jours, les semaines passent, et sa sœur est toujours dans les parages, à rôder autour de Norfolk. Je ne sais pas ce qu’elle lui veut, ce qu’elle cherche en sa compagnie, mais son attitude me semble suspecte. Par ailleurs, ses manières empruntées en ma compagnie ne me dupent nullement, et mes sourires et paroles mielleuses sont aussi hypocrites que les siennes.
Néanmoins, ces dernières semaines, mes pensées étaient consacrées à la famille. A celle que j’ai toujours connue, évidemment, et à celle que je me découvre. Je me suis enfin présentée à cette audience que je réclamais depuis longtemps à la favorite du roi. Amy of Leeds et moi partageons une demi-sœur. Qui l’aurait cru ? Certainement pas moi ! Cette jeune femme, la douceur incarnée, est le fruit des amours de la mère d’Amy et de mon père. La favorite a très mal pris cette révélation, et m’a quasiment virée du salon dans lequel se tenait notre audience. Qu’y puis-je, moi, si son père n’est pas le père de Mary ? Elle devrait savoir qu’elle n’est point la seule à être ébranlée par cette nouvelle, et que tout fut chamboulé en moi lorsque mon père me l’apprit. Moi, qui m’imaginais être la seule fille, n’est en fait que la seconde Noailles. Toute l’attention de mon père dont j’ai besoin, se tourne maintenant, bien que de loin, encore, vers cette sœur dont jamais je n’avais soupçonné l’existence. Mais c’était surtout difficile de regarder ma mère sans une pointe de compassion, de pitié même. Ma mère, cette femme qui fut trompée pendant de longues années ! Elle n’était pas la seule à avoir porté un enfant de mon père. Il est difficile alors de continuer à faire confiance aux hommes, quand celui que vous admirez depuis que vous êtes une gamine, vous annonce qu’il a menti, trompé. Il est difficile de ne pas regarder son propre mari en se demandant si, lui aussi, a fait un enfant ailleurs. Tant de temps à se poser des questions, à se demander où est réellement ma place. Tant de temps passé, à se demander si celui même qui partage ma couche, ne partage pas celle d’une autre. La jalousie, sentiment dévastateur, s’éprit de moi. Tout n’était plus que soupçon. Tout n’était plus que complot. Vraiment, j’ai honte de mon attitude. L’infidélité de mon père n’était pas une raison pour m’en prendre à Thomas…Thomas…Comme je me sens honteuse de la manière dont je lui ai parlé, lui qui ne méritait pas de telles paroles ! Lui qui méritait, au contraire, des douces paroles d’une épouse bien aimante. Car je l’aime, et il m’aime lui aussi ! Comme je me souviens de sa déclaration, dans ma chambre même. Comme je me souviens de ses mots qui, même en cet instant, font précipiter les battements de mon cœur. Mes mains en tremblent presque, mon écriture est pleine de fioritures ! Ce sentiment, celui de me sentir aimée, d’être aimée, m’emplit de joie. Comme je l’ai découvert à mon arrivée à Versailles, les couples dont les deux membres s’aiment sincèrement son rares. Celui des époux Norfolk en fait partie. J’ai cessé de me conduire comme une idiote. J’ai cessé de soupçonner toutes les femmes qui adressaient la parole à Thomas. Je me suis rendue compte à quel point mon comportement pouvait lui faire honte. J’espère me comporter maintenant comme une parfaite épouse, aimante, et digne de son rang. Le fait que je ne sois plus préoccupée lorsqu’il est loin de moi me permet de vivre ma vie.
Il faut désormais que je me rapproche de ma demi-sœur, Mary. Je l’ai déjà rencontrée, à Maridor, mais à ce moment là, elle ne savait pas que nous partagions le même père. Elle est douce, aimable, et parfaitement accomplie. Une jeune femme admirable. Cependant, je sais que son attachement à la favorite, et le désir de mon père d’en faire une Noailles, nous empêcherons de vraiment nous connaitre. Comme cela est étrange ! Je suis beaucoup plus proche de Marianne, que je considère plus comme une sœur que cette jeune femme avec qui je partage le même sang. Je serai prête à beaucoup de choses pour ma chère amie, et je dois avouer que ce n’est pas le cas pour ma sœur.
Enfin, la petite Victoire a bien grandit, pour laisser la place à une jeune femme, bien décidée à prendre sa vie en main. Je ne sais ce que me réserve l’avenir, mais j’espère qu’il sera placé sous les rayons chauds du soleil. Et si ce n’est pas le cas, je suis bien décidée à trouver ma place sous ces rayons agréables. |
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