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 {Gabrielle de Longueville ~ Terminé

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MessageSujet: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime19.03.09 20:04

Marie Gabrielle Aglaé Charlotte - De LONGUEVILLE
_______ ft. (Ashley Greene)


{Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icgreene02



    ► Gabrielle a une vingtaine d'années. En effet, elle est née en 1646.
    ► Issue d'une famille prestigieuse et très ancienne, la jeune femme a le droit de porter un grand nombre de titres : duchesse de Valois-Longueville de la maison d'Orléans-Longueville, princesse de Neuchâtel et de Valangin, princesse de Châtellaillon, comtesse de Dunois. Elle est souvent appelée "Mademoiselle de Longueville" ou "Mademoiselle de Dunois" depuis le mariage de sa soeur.
    ► Gabrielle est issue de la plus haute noblesse de France, celle de sang. Ses parents étaient en effet tous deux princes de sang. Son père, pair du royaume, Henri II, filleul du roi Henri IV, était gouverneur de Normandie. Sa mère Anne-Geneviève, soeur du Grand Condé, esprit fantasque et romantique, était la fille du duc de Condé, cousin des Bourbons et de Charlotte de Montmorency. La généalogie de la jeune femme remonte donc à plusieurs siècles et elle peut se vanter d'avoir le sang des plus grandes familles de France, les Valois, Bourbons et Montmorency.
    ► Encore jeune, la jeune femme n'est pas encore mariée, ni même promise malgré les efforts de son père en ce sens avant son décès. Elle possède une certaine liberté grâce à la relative compréhension de sa mère, même si celle-ci voudrait la voir mariée avant sa mort. Mais Gabrielle a déjà refusé des demandes de mariage, les prétendants étant d'ailleurs poussés par sa dot alléchante. Elle apportera quelques milliers de livres et un comté en apanage à son futur époux.



    « Plus bas la révérence, plus bas. »

    ► Morgane.
    ► 17 ans.
    ► Présence très régulière.
    Code bon by Alex.
    ► Nada, le forum est superbe !


Dernière édition par Gabrielle de Longueville le 24.05.09 22:37, édité 7 fois
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime19.03.09 20:05

    « Que diable, vous êtes à Versailles ! »

    Un paradis ou un enfer versaillais ?

    COMTESSE : On raconte que Sa Majesté a fait construire un nouveau château pour sa convenance. Elle y emménagera bientôt avec le reste de la Cour.
    MARQUIS : Que dites-vous ? Un château ? Mais non, le roi a bâtit un véritable palais surchargé de luxe, d’or, de marbre. On dit que tous les meubles sont en argent, les marqueteries d’un bois exotique et les soieries venues de la lointaine Chine.
    COMTESSE : Alors que le peuple meurt de faim sous les fenêtres du Louvre à Paris. Quelle étrange folie ! Construire un palais au milieu de marécages, là où il n’y existait qu’une nature sauvage...
    GABRIELLE : Louis veut montrer à tous qu’il commande à la nature et qu’il peut la domestiquer. Tout comme il va domestiquer tous les nobles. La Cour va être rassemblée à Versailles et pendant que nous allons nous battre pour obtenir des places, des honneurs, le premier rang sur le chemin du roi, nous ne songerons plus à nous plaindre de la manière dont on nous traite, nous les princes de sang !
    MARQUIS : Le roi a transformé l’adage. Maintenant, il s’agit de rassembler pour mieux régner...
    GABRIELLE : Les nobles ne songeront qu’à exécuter de jolies pirouettes pour plaire à la famille royale, à tendre la patte comme des chiens à qui l’on donne des ordres. Nous rassembler tous dans un même lieu, c’est le plus sûr moyen de nous diviser. Nous ne pourrons protester contre les mesures que prendra le roi, quand il engagera des guerres ruineuses pour le royaume de France. Nous serons sa petite cour à son service.
    COMTESSE : Hélas... Que faire ?

    En tant qu’enfants de la plus haute noblesse française, Gabrielle et son frère Charles-Paris se doivent d’apparaître le plus souvent à la Cour pour donner à parler. Mais le rapprochement de la jeune femme aux causes d’Hector de Valois l’a incitée à s’y installer et à y avoir des appartements privés. A cause des racontars qu’elle entendait autour d’elle, forcément négatifs puisque la jeune femme ne côtoyait que des personnes opposées au roi ou presque, elle se faisait une image très sombre du château et de la vie de cour où l’on était prêt à se déchirer pour obtenir le droit d’assister aux repas de la famille royale. Une telle débauche de luxe, de folies ne pouvait que dégoûter une fille de bonne famille comme elle, qui avait toujours vécu dans de vieux châteaux de vieilles pierres, construits à l’époque de la Renaissance. Elle craignait donc le pire avant son arrivée même si elle s’y rendait de bon cœur prête à tout pour servir la cause.
    « Grandiose ». Ce fut le premier mot qu’elle prononça à son arrivée. Oubliés l’hôtel de Paris, celui de Bordeaux, les jardins anglais de Normandie, le château somptueux des Condé. Versailles éclipsait tout ce qu’elle avait pu connaître. Les premiers mois de son arrivée, elle ne se lassait pas de parcourir les jardins où l’observaient les statues représentant des scènes mythologiques. Les salons étaient décorés avec goût, les plafonds glorifiaient le roi et la France. « Mademoiselle, vous marchez le nez en l’air », s’amusait une dame. Gabrielle s’amusait à s’égarer dans les labyrinthes du château et tout l’émerveillait. Depuis, elle connaît Versailles de fond en comble, plus aucune pièce n’a de secret pour elle. Elle serait capable de décrire chaque meuble, chaque tableau, statue avec force détail et minutie. Gabrielle s’est habituée au luxe et tout cela ne l’impressionne désormais plus.
    Son éducation de petite princesse, sa grande culture et les salons qu’elle fréquentait étant jeune l’ont excellemment bien préparée à ce qui l’attendait à Versailles. Se retrouver au centre de l’attention, des commérages, rien ne lui paraît plus naturel. Comme les autres dames, elle est élégante, a le sens de la répartie. La vie de Cour lui convient tout à fait et elle en est une figure. Cependant, elle a régulièrement besoin d’aller se reposer à Paris. Du moins officiellement.

    Vérité ou fantasme du complot ?

    COMTE : Quelle est donc cette histoire que l’on chuchote dans les couloirs, mademoiselle de Longueville ? Chercherait-on à déstabiliser le roi ?
    GABRIELLE : Ces racontars ne doivent être que pures fadaises. Je ne conçois pas que l’on puisse en vouloir au trône ou à la vie de Sa Majesté. Des vipères pleines de fiel et engorgées de jalousie mesquine doivent penser que le roi s’en inquiétera. Mais Sa Majesté a le sens des priorités et fort heureusement, il ne semble guère porté à y prêter attention.

    Gabrielle adresse un petit sourire au comte et s’éloigne dans le couloir bondé de courtisans. Sans doute attendent-ils le passage du roi en espérant pouvoir se faire remarquer et gagner ses faveurs. C’est lui qui décide de tout. Comme cette situation la dégoûte. Elle voudrait pouvoir hurler son mécontentement, gifler ces nobles poudrés, dressés pour jouer comme des acteurs sur la scène de théâtre de Versailles. Les véritables comédiens, ce sont donc eux ! Mais parmi cette troupe méprisable, lâche et veule, telle une toile d’araignée qui agrippe ses proies une à une, la Fronde renaît de ses cendres. L’ombre d’un nouveau prétendant au trône se dresse peu à peu, l’ombre d’Hector de Valois qui a promis de redonner le pouvoir aux grandes familles aristocrates françaises. C’est pour lui que Gabrielle est là alors qu’elle pourrait rester à Paris dans son hôtel loin de l’agitation et des gens qu’elle déteste. Et elle sait pertinemment que si elle est découverte, elle peut y laisser sa tête ou tout au moins son honneur. En effet, elle est plongée jusqu’au cou dans le complot de celui qu’elle considère comme un grand frère. Plusieurs fois espionne, elle profite de sa position pour amener des nobles à la cause. La jeune femme se rend aussi à Paris régulièrement pour se procurer en poisons et autres philtres. Elle est totalement convaincue du bien-fondé de sa mission. Par pur orgueil, elle ne peut supporter que sa famille et que les princes de sang soient écartés du pouvoir en France. « Un seul homme décide pour le moment. Ce qui serait souhaitable, c’est un Conseil de princes, les meilleurs esprits du royaume ». Elle ne déteste pas totalement le roi même si elle souhaite sa disparition, ceux qu’elle ne peut supporter sont les ministres de Louis XIV, roturiers et donc valant moins qu’elle selon les principes qu’on lui a inculqués toute jeune.
    Les Longueville fournissent également des pièces d’or sonnantes et trébuchantes au complot afin de permettre à Hector de poursuivre son objectif. Avant sa mort, très attaché au jeune garçon, le vieux duc avait attribué une pension au jeune Valois. Les grandes richesses de la famille conservées dans les châteaux en province dorment donc peu en ce moment.
    La grande force de Gabrielle, c’est qu’elle est insoupçonnable. Personne ne peut seulement imaginer que derrière cet air encore enfantin et malicieux se dissimule un être plus fourbe, calculateur et dissimulateur. De plus en plus, cependant, la jeune femme se pose des questions : elle se sent si bien à Versailles, la paix n’est pas encore en danger, les fréquentations d’Hector ne sont guère appréciables... Contre le roi, envers et contre tout ?
    Sa mission actuelle est de surveiller un certain Guillaume du Perche qui a des activités louches. Gabrielle le soupçonne d’être un espion à la solde du roi. Elle a décidé de mettre en œuvre tout son pouvoir de séduction sur lui car il a l’air d’être homme à femmes. « Laisse toi désirer ». Un jour, elle lui fait des yeux doux, baisse les paupières pudiquement et l’autre, elle se montre glaciale en sa compagnie. Mais elle ressent elle-même des sentiments inconnus à l’égard du jeune homme et s’attache beaucoup trop à lui, à son grand déplaisir. Où s’arrête la feinte ? Où apparaît le sentiment, l’amour pur et idéal ? Ou bien n’est-ce qu’une illusion, qu’un mensonge de plus dans ce monde de dupes ?

    Plutôt colombe ou vipère ?

    MARQUISE : Tiens donc, mademoiselle de Lirignac arbore une nouvelle robe à la mode, d’un pourpre éclatant et qui met en valeur sa taille fine. Elle est splendide ainsi.
    DUCHESSE : Elle ne porte donc plus les vieilles robes que la comtesse, sa sœur, ne souhaite plus, ni même les apprêts du fripier chez qui ces dames revendent leurs vieux atours dont elles ne veulent plus.
    GABRIELLE : Cela serait-il lié à son sourire triomphal et au nouveau bijou autour de son cou gracile ? Ne l’aurait-on pas vu non loin des appartements du vicomte d’Herbay hier soir ?

    Qui pourrait imaginer que derrière ce visage d’ange, ce regard pur et innocent, ce sourire espiègle d’enfant se cache l’une des pires vipères de Versailles ? Si on l’interroge sur les commérages, Gabrielle répondrait qu’ils sont son métier. Elle se doit de tous les connaître, d’écouter les rumeurs même les plus invraisemblables, d’y mettre un terme lorsque cela la concerne, elle ou Hector. Sa place privilégiée au sein de la Cour puisqu’elle a le droit au tabouret et aux courtisans qui se pressent autour d’elle ainsi que sa place aux côtés de la belle Athénaïs de Montespan servent très bien son ambition. Elle est toujours au courant de tout même si elle fait mine du contraire. Un adultère, un vol, un règlement de compte, rien ne lui échappe et elle se fait un plaisir de communiquer les informations les plus importantes à Hector de Valois. Cela peut ensuite lui servir de chantage par exemple. Les disgraciés sont aussi les plus enclins à écouter les arguments des comploteurs. En revanche, Gabrielle est peu souvent à l’origine des rumeurs surtout fausses car cela pourrait desservir sa mission d’information. Il lui arrive cependant de raconter des mensonges sur les personnes qui l’entourent lorsque cela peut l’aider.
    Les ragots, cela peut paraître inutilement méchant, indigne d’une demoiselle de haut lignage comme elle, mais c’est aussi une façon pour la jeune femme de laisser apercevoir à son entourage son esprit brillant. Briser la réputation d’un proche du Roi, mettre en grâce un membre du complot, elle sait très bien que les rumeurs, l’apparence, le paraître, voilà le véritable pouvoir de Versailles. Patiemment, de manière dissimulée, Gabrielle tisse sa toile au château, parle sans être seulement soupçonnée, puis rédige des comptes rendus à Hector. L’œil, l’oreille et la bouche du complot.


Dernière édition par Gabrielle de Longueville le 08.04.09 19:28, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime19.03.09 21:48

    « Il était une fois ... »



    Le carrosse ralentit avant de s’arrêter devant un bâtiment à l’allure sombre, entouré par de hauts murs qui le dissimulaient des regards indiscrets. De l’arrière du véhicule, un domestique en livrée mit pied à terre et se précipita pour ouvrir la porte. L’ouverture dévoila un pied bottiné, une longue robe de cour puis un visage dissimulé sous un grand chapeau à plumes. La jeune femme aux traits fins baissa la tête et avança d’une démarche gracieuse jusqu’à la grande porte en bois. Son domestique frappa deux coups puissants qui résonnèrent dans la rue. Celle-ci était peu fréquentée ce jour-là car une pluie fine tombait dru sur Paris, rendant maussades les habitants de cette ville, transformant la terre des rues en boue qui tache les robes et les chaussures. La demoiselle leva la tête lorsque la porte s’ouvrit sur elle. Une Carmélite à la robe noire de mauvaise qualité l’attendait derrière et la conduisit sans un mot jusqu’au parloir. La jeune femme ne se retourna même pas sur le carrosse aux armes de sa famille. Il attendrait le temps qu’elle lui parle.
    - Sœur Geneviève vous attend, énonça la religieuse d’une voix monocorde.
    La jeune femme songea avec effarement que rien ne devait plus troubler sa compagne, débarrassée par Dieu des passions terrestres, perdant par cela toute la saveur de la vie. Que pouvait donc espérer cette femme ? Simplement de s’éteindre, de quitter le monde des péchés pour aller dans un paradis de douceur et de bonheur simple. Les riches vêtements, la poudre et le maquillage de la demoiselle, rien ne lui faisait envie. Sœur Geneviève était-elle devenue ainsi ? La femme qui était avide de bons mots, d’amour galant, d’aventures romanesques avait quitté le monde quelques mois auparavant après la mort de son mari. Elle avait renoncé à tout ce qui la passionnait pour prier le Seigneur. La demoiselle avait perdu son repère, son modèle. Elle avait désormais peur de la retrouver aussi changée.
    - Je vous en prie, elle est au parloir.
    La jeune femme hocha la tête et pénétra dans la pièce qui avait été conçue pour accueillir les visiteurs prestigieux. Elle n’eut donc même pas à se pencher pour passer avec son immense chapeau. Elle mit quelques instants à récupérer une vision normale et à s’habituer à la noirceur du parloir. Une fine silhouette était là, au centre. Sa mère était assise sur une chaise. Une simple bougie posée sur une table de bois éclairait son visage. Un voile dissimulait le haut de son crâne. La demoiselle eut un frisson en songeant que ses cheveux avaient du être rasés lors de son entrée au couvent. Son visage était encore lisse et décidé. Ses yeux verts déterminés fixaient sa fille qui venait de rentrer. Celle-ci reconnut qu’elle était encore splendide. Intimidée malgré elle, se morigénant, elle ne put faire un pas.
    - Approche Gabrielle, dit doucement Anne-Geneviève.
    La gorge serrée par l’émotion, Gabrielle se sentit envahie par un flot de souvenirs.


    ---


    - Approche Gabrielle...
    Anne-Geneviève de Longueville tendit sa main vers sa petite fille minuscule dans l’espoir de pouvoir l’exhiber devant sa belle-sœur. Ravie que cette grande dame si élégante aux sautes d’humeur imprévisibles l’appelle, Gabrielle galopa jusqu’à elle et s’accrocha avec ses petites mains à la robe de brocart de sa mère. Elle sentit Anne-Geneviève passer ses longs doigts dans ses boucles brunes. Ces marques d’affection étant tellement rares que Gabrielle profita de cet instant comme si c’était le dernier qu’elle pouvait connaître. Sa mère était belle, intelligente, raffinée, elle se sentit débordante d’amour envers elle. Puis Anne-Geneviève, lassée, repoussa la petite fille et se retourna vers ses hôtes. Gabrielle, dans l’espoir qu’on ne la chasse pas, s’assit à terre, ses jupes faisant un cercle autour d’elle et joua avec un petit cheval de bois. Du coin de l’œil, elle observait les invités de sa mère. L’épouse de l’oncle de Gabrielle, celui que Père appelait « Condé », buvait un thé. Condé l’avait un jour prise dans ses bras, l’avait serrée contre lui et les yeux gris de Gabrielle avaient fait face avec défi à ceux verts de son oncle. Condé avait ri, l’avait chatouillée puis reposée. Mais lui n’était pas là ce jour-là, Père non plus. Marie, sa demi-sœur, était installée dans le canapé et avait permis qu’un jeune garçon blond s’installât à ses côtés. Ils parlaient sans enthousiasme, en respectant les règles de politesse. Aux côtés de madame de Condé, était installé un homme, monsieur de Nemours, dont la fine moustache lui donnait un air malicieux. Gabrielle l’aimait d’instinct.
    - Ravissante. Mais dites-moi ma sœur, comment se porte votre Charles-Paris ?
    - C’est un enfant adorable, s’exclama Anne-Geneviève avec emportement.
    La petite fille sentit ses muscles se contracter, instinctivement. Comment sa mère pouvait-elle tant aimer ce petit bébé encore habillé avec des robes de fille ? Il braillait en permanence. Gabrielle le jalousait terriblement sans doute parce que sa mère lui manifestait un attachement qu’elle n’avait jamais montré ni à sa fille, ni à son aîné Jean Louis. Gabrielle se désintéressa de la conversation des adultes quand celle-ci devint trop ennuyeuse et avança à pas de loups pour rejoindre Marie. En demande d’affection, sachant qu’on lui pardonnerait son impolitesse due à son jeune âge, elle grimpa sur le canapé et se serra contre sa demi-sœur. La blonde Marie passa son bras contre la petite et déposa un baiser sur sa joue ronde.
    - Qui est donc ce petit lutin ? s’exclama le garçon à ses côtés, habillé dans un costume élégant.
    Gabrielle posa deux yeux graves sur lui et prononça d’une voix fluette :
    - Je suis Gabrielle de Longueville, monsieur, et je ne suis pas un lutin.
    - Quelques années à peine et déjà un fort caractère, commenta le garçon en souriant.
    - Vous ne vous êtes pas présenté pour votre part, observa Gabrielle.
    Il se pencha vers elle, prit un air de conspirateur et la fixa droit dans les yeux.
    - Je suis Hector et vous êtes chanceuse, mademoiselle Gabrielle, je ne mange pas les lutins.

    ---


    Gabrielle s’assit en face de sa mère mais ne prononça aucune parole. Elle ne tenait pas à engager la conversation car elle ne savait comment la commencer. Elle était quelqu’un d’assuré, de direct, d’intelligent et personne ne lui faisait peur. Pourtant, devant sa mère, elle était une petite fille de dix ans, apeurée de pouvoir provoquer la colère terrible d’Anne-Geneviève. Cette dernière était si exigeante avec les autres qu’il était impossible de la contenter. Gabrielle avait passé toute son enfance à tenter de se concilier sa mère, d’attirer ses regards, son sourire inimitable. Jamais elle n’avait obtenu satisfaction. Mais elle ne pouvait en vouloir à sa mère. C’était de sa faute, elle était inintéressante, sans importance, invisible. Sa mère l’avait tant fait souffrir... Anne-Geneviève interrompit brusquement le cours de ses pensées pour lui demander d’une voix un peu moins assurée que d’ordinaire :
    - Comment va Charles-Paris ?
    Toujours lui, toujours et encore lui ! Amèrement, Gabrielle lui répondit qu’il se portait bien, qu’il était en vue à la cour et surtout en grâce auprès du roi. Il accompagnerait sans doute celui-ci lors d’une prochaine expédition militaire. Le visage d’Anne-Geneviève se radoucit. Elle semblait plus sereine comme si rien ne pouvait désormais l’atteindre. Gabrielle pensait qu’elle n’avait pas tort. Rien ne pouvait plus l’atteindre si Paris était en bonne santé. Le jeune homme avait toujours été le préféré, l’adoré, l’adulé. En grandissant, Gabrielle avait fini par comprendre la raison de cette différence. Pour elle, ses parents formaient un couple parfait, uni. Mais Anne-Geneviève n’avait jamais aimé Père...


    ---


    Gabrielle avait besoin d’une présence rassurante à ses côtés pour la bercer et caresser ses longs cheveux bruns. Sa chambre était plongée dans l’obscurité depuis que sa nourrice avait soufflé les bougies après l’avoir bordée. Le silence était pesant. Depuis des semaines, la nuit était calme. La petite fille fronça son petit nez pointu : en y réfléchissant mieux, c’était depuis qu’ils avaient quitté Paris en pleine nuit que les nuits étaient calmes. Ce jour-là, Catherine, sa nourrice, l’avait tirée du lit et habillée à la va-vite. « Où va-t-on ? », « Ne vous en préoccupez pas, mademoiselle ». Les yeux gonflés de sommeil, la petite fille était montée dans un carrosse avec le reste de sa famille excepté son père qui ne se trouvait pas à Paris. « Fouettez les chevaux », avait ordonné Anne-Geneviève, resplendissante dans une robe rouge qui faisait ressortir la blancheur exquise de sa peau. Le trajet avait duré des jours et des jours et à chaque fois que l’on entendait des bruits de galopade et des cris d’hommes, Gabrielle avait senti Catherine la serrer un peu plus fort contre elle. Les yeux de Marie étaient apeurés. Jean-Louis, le frère aîné, un peu simple d’esprit, dormait la tête tournée vers la fenêtre. Quant à Charles-Paris, il reposait dans les bras ronds d’une domestique. Cette dernière avait le regard dilaté d’un gibier pris au piège. Personne n’avait parlé. Seule Anne-Geneviève avait semblée sereine. Toujours éveillée, elle avait gardé un petit sourire aux lèvres, sans doute ravie d’avoir été chassée de Paris, événement qui devait lui paraître du plus romanesque. Ils étaient enfin tous arrivés dans une énorme ville appelée Bordeaux et s’étaient installés à l’Hôtel de Ville, acclamés par la population. Gabrielle avait alors eu l’impression d’avoir échappé à un grand danger.
    Mais pas d’aventure aujourd’hui. Pas de grand danger, ni de cavalcades, de courses dans l’obscurité. Bordeaux qui enserrait l’Hôtel de Ville de sa muraille d’habitations de bourgeois les protégeait. Et le silence qui régnait dans ses rues empêchait la demoiselle de Longueville de dormir. Gabrielle se redressa dans son lit et repoussa les draps de soie. Elle ne savait trop où se rendre pour voler un peu d’affection. Catherine dormait à poings fermés dans la pièce d’à-côté. Père qui aurait été ravi de la serrer contre lui et de chatouiller ses joues de sa barbe n’était pas présent à Bordeaux avec eux. Alors qu’elle ouvrait la porte qui donnait dans le couloir sombre, Gabrielle ressentit le manque de son père Henri avec violence. Il la comprenait tant ! Mais elle continua à avancer, pieds nus, frissonnante sous sa fine chemise de nuit brodée, les oreilles aux aguets. Il lui sembla entendre des bruits de voix vers les appartements de sa mère. Pas complètement rassurée, elle avança dans cette direction mais au lieu de pénétrer dans la pièce qui tenait lieu de boudoir à Anne-Geneviève, elle plaça son œil droit contre le trou de la serrure pour observer ce que faisait sa mère. Elle se sentit honteuse mais ne recula pas tant sa curiosité était grande. Assise sur sa chaise, Anne-Geneviève faisait face à un homme aux cheveux bruns. Gabrielle le reconnut sans peine : il s’agissait de monsieur de Nemours qui vivait avec eux dans cette grande demeure. Il avait épousé quelques mois auparavant la jolie Marie de Longueville. La petite fille l’adorait. Il la prenait parfois sur ses genoux, lissait sa moustache de son index et lui racontait des histoires fabuleuses de chevaliers, de princesses effarouchées et de dragons qui soufflaient du feu.
    Nemours ne se trouvait pas dans les appartements qu’il partageait avec sa jeune épouse cette nuit-là. Il était dans le boudoir de sa belle-mère à parlementer alors qu’au-dehors les cloches de la cathédrale sonnaient une heure avancée de la nuit. La curiosité que ressentit Gabrielle fut d’autant plus forte. Elle ne songea même pas à entrer dans la pièce pour surprendre sa mère avec cet homme. Elle continua à les observer.
    - Quels vers a donc déclamés le duc pour pouvoir vous épouser, ma chère Anne-Geneviève ?
    - Henri n’a jamais été un précieux. Mais je ne vous demanderais pas de réciter des poèmes ce soir. La carte du Tendre est bien loin de mes pensées en cet instant.
    - Combien Montausier a-t-il mis de temps pour séduire Julie de Vivonne ?
    - Elle ne l’a épousé que treize ans après qu’il eut déclaré son inclination. Mais je vous en prie Henri, laissons-là tendresse, patience, soupirs chastes et apprêtés. La bienséance vous commanderait de me faire la cour encore des semaines avant que je ne cède à vos insistances, mais moquons-nous donc de la bienséance ! Qui peut se soucier de la bienséance dans une relation interdite, scellée, invisible aux yeux du monde ? Tout ce qui se passera ici, entre nous, entre nos corps et nos esprits ne seront que pure fantaisie, la dernière fantaisie que peut se permettre une Précieuse. Mon cœur vous réclame, mes mains désirent des baisers, mes lèvres ne prononcent que votre nom. Henri ! Embrassez-moi !
    Le souffle court, abasourdie, Gabrielle vit monsieur de Nemours se pencher vers sa mère qui s’accrocha au cou de celui-ci. Le baiser dura longtemps, temps pendant lequel les mains de l’homme se promenèrent sur les hanches d’Anne-Geneviève, sur son dos puis sa poitrine. La petite fille sentit une brûlure dans son ventre. Ce qu’elle voyait était secret, interdit. Le cœur battant, elle se coula dans l’obscurité du couloir. Plus aucune parole ne s’était élevée du boudoir.

    ---


    Quelqu’un avait dit un jour à Mademoiselle de Longueville qu’une maison où il y a des enfants est une maison où il ne peut y avoir de secrets. Gabrielle n’avait pas répondu mais avait pensé que cela était parfaitement vrai. Combien de fois avait-elle profité de sa petite taille pour se glisser sous les tables, en haut des escaliers, derrière des bibliothèques à espionner les adultes et leurs conversations sérieuses ? Combien de fois avait-elle échappé à la surveillance de la bonne Catherine pour observer les gestes, les façons de se conduire de sa mère ? Elle aimait particulièrement son rire, lorsque la femme rejetait ses épaules et sa tête en arrière, d’une manière gracieuse, en laissant échapper un son cristallin de sa gorge de nacre. Minuscule encore, Gabrielle cherchait à l’imiter, à devenir un double de sa mère si parfaite. Dire que celle-ci fut descendu dans son estime après que la petite fille eut observé qu’elle trompait son mari aurait été mentir. La seule chose qui changea dans le comportement de Gabrielle, c’est qu’elle refusa à partir de cette nuit-là de grimper sur les genoux de Nemours.
    Le pauvre diable était mort à l’heure actuelle laissant Marie veuve et duchesse de Nemours, condamnée à se battre pour défendre son titre et ses terres de l’ambition de ses puissants voisins. Gabrielle constata avec aigreur que sa mère ne demandait pas de nouvelles de sa belle-fille par ailleurs. Seul comptait Charles-Paris ! La jalousie envers le frère tant détesté envahissait une nouvelle fois son cœur. Par vengeance, elle décida de frapper là où cela faisait le plus mal :
    - Madame ma mère, vous souvenez-vous de monsieur de la Rochefoucauld qui vivait avec nous à Paris lorsque j’étais encore enfant ? Il vient de publier des Maximes qui rencontrent un vif succès dans les milieux littéraires. Mais peut-être étiez-vous au courant ? Le Carmel autorise-t-il ce genre d’ouvrage ?
    Anne-Geneviève baissa les yeux, pâlit comme si elle venait de recevoir une gifle. Elle savait que sa fille savait mais elle se devait de garder une contenance. Elle releva les yeux et plongea son regard dans celui de sa fille, plein de reproches. Ce fut au tour de Gabrielle d’être frappée et de se sentir mal. Être l’objet de désapprobation de sa mère lui déplaisait. Curieux de voir comment un seul nom pouvait déclencher une telle réaction dans l’être le plus cachottier et superficiel que la jeune femme eut jamais connu. Ce secret là aussi, elle l’avait appris par curiosité enfantine.


    ---



Dernière édition par Gabrielle de Longueville le 18.04.09 1:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime10.04.09 1:30

    Gabrielle avait profité d’un moment d’inattention de Catherine pour échapper à sa surveillance. La pauvre nourrice subissait les foudres de madame de Longueville. Sa maîtresse désirait en effet voir son fils Charles-Paris dans les plus brefs délais. On venait donc de réveiller l’enfant qui dormait encore, de l’habiller à toute allure d’un vêtement de mousquetaire et de l’amener à sa mère. La petite fille savait bien qu’Anne-Geneviève se contenterait de déposer un baiser sur les joues rondes de l’enfant avant de le renvoyer dans ses appartements avec pour seul ordre de ne plus descendre de la matinée. C’était un caprice de la duchesse mais comme tout caprice de grande dame, il se devait d’être exaucé le plus rapidement possible. Gabrielle s’était donc dissimulée dans un coin de la pièce, rendue invisible de tous les regards par un rideau serti de fils d’or. Elle jouait avec une poupée de porcelaine que lui avait offert son père quelques mois auparavant. Ah ce cher Père ! Quand pourrait-elle le revoir ? Sa mère ne pouvait pas remplacer l’affection d’Henri, elle était trop égoïste et imbue d’elle-même. Lui la chatouillait, prenait le temps de la border, de discuter avec elle de ses nouveaux jeux et de lui promettre de l’emmener voyager jusqu’à l’endroit où la mer et le ciel ne forme plus qu’une seule ligne d’horizon.
    Les réflexions de la petite fille furent coupées par le bruit d’une cuillère en argent qu’on laissait tomber sur une assiette et le roucoulement agaçant d’Anne-Geneviève. Elle risqua un regard dans la pièce. Sa mère avait reculé sa chaise et ouvert ses bras devant Charles-Paris qui arrivait encore ensommeillé.
    - Mon fils chéri, mon adoré ! Viens au creux des bras de ta mère lui souhaiter le bonjour. Serre-toi tout contre moi et dis-moi si tu as bien dormi.
    Paris jeta un regard du côté de l’endroit où se trouvait Gabrielle et la fixa quelques instants. Celle-ci recula en toute hâte, le cœur battant d’être découverte. Catherine s’en rendrait compte bien assez tôt dès qu’elle remonterait coucher le petit frère. Heureusement, Anne-Geneviève ne s’aperçut de rien et Paris répondit aux questions de sa mère sans faire allusion à sa sœur. L’atmosphère changea brusquement lorsqu’un domestique annonça l’arrivée d’un visiteur impromptu. Encore enfant et sensible, la petite fille sentit que la tension était montée et que l’heure n’était plus aux futilités familiales. La duchesse renvoya son fils et Catherine pour accueillir son hôte. Un épais silence uniquement brisé par la mastication de sa mère précéda l’entrée de celui-ci dans le salon. Protégée par la voilure, Gabrielle regarda à nouveau. Plutôt grand, perruque rousse, yeux fins et rieurs... Cet homme n’était autre que celui qui avait vécu avec eux à Paris avant leur arrivée à Bordeaux. Pourquoi visitait-il sa mère cette journée-là ? La petite ouvrit ses oreilles en priant pour que sa nourrice ne songe pas à venir la chercher à cet endroit.
    - Je ne sais ce que vous espérez en venant me rendre visite d’une manière défiant les convenances. J’ai reçu votre lettre, François, vous m’avez blessée, blessée... Plus que je n’aurais pu l’imaginer...
    La voix d’Anne-Geneviève se brisa. Le prince de Marcillac, duc de la Rochefoucauld profita de cet instant pour prendre la parole à son tour :
    - Vous partagiez vos nuits avec monsieur de Nemours, Anne-Geneviève, ne le niez pas. Sans doute partagez vous toujours vos nuits en sa compagnie.
    La mère de Gabrielle eut un petit rire désabusé plus qu’amusé.
    - Avez-vous souffert des affres de la jalousie, François ? Que pensez-vous que j’ai du ressentir lorsque l’on vous a vu retourner dans les bras de cette putain de Chevreuse ? Pouvez-vous seulement imaginer quelle a été ma blessure, mon incompréhension face à cette nouvelle que mon esprit refusait de comprendre, que mon cœur refusait d’accepter ? Vous m’avez abandonnée voilà des mois. Moi, je n’ai jamais cessé de vous aimer, François, vous êtes la meilleure chose qui me soit arrivé. Mais lorsque j’ai su, lorsque j’ai su votre trahison, j’ai répondu favorablement aux avances de Nemours, l’esprit chagriné, l’âme en peine.
    - Cette lettre que je vous ai envoyée m’a délivré de mes vœux envers vous, madame. J’ai été subjugué par votre beauté, votre esprit brillant et précieux. Mais je ne ressens plus aucun sentiment pour vous. Je suis juste venu saluer une amie lors de mon passage à Bordeaux. Je ne nie pas que la compagnie de la duchesse de Chevreuse soit des plus agréables, mais vous ne semblez pas non plus vous plaindre de celle de Nemours. Nos chemins se sont séparés désormais.
    Un ange passa.
    - J’aurais du m’en douter... J’aurais du me douter que vous vous serviez de moi.
    - Que dites-vous ?
    - J’ai donné mon cœur à l’homme que j’aimais qui, lui, s’est uniquement servi de moi.
    - C’est faux...
    - Vous vouliez vous rapprocher de mon mari et de mon frère pour obtenir des places. Et moi, comme une idiote, j’ai obéi aveuglément. Ah, j’ai renoncé à mon orgueil pour aller voir mon ennemie jurée, la Régente Anne, je lui demandé des titres pour vous, elle vous les a accordés. Maintenant, vous n’avez plus besoin de moi. Et pensez-vous à notre Charles-Paris ? C’est pour cela que je lui ai donné ce prénom. Les mois que j’ai passés à Paris en votre compagnie ont été les plus beaux de toute ma vie. Il est l’enfant de notre union, l’enfant de l’amour que je vous ai porté alors que vous ne pensiez qu’à avoir une misérable influence sur une famille de sang royal.
    - Je ne peux me défendre contre ces accusations perfides, madame. Je ne peux que vous assurer qu’elles sont totalement fausses. Quant à Charles-Paris, votre époux le reconnaîtra, il n’a jamais rien su vous refuser. De cette manière, le nom de Longueville et ses titres ne se perdront pas avec la folie de votre aîné, Jean-Louis. Paris pourra hériter.
    - Je vois donc que nous n’avons plus rien en commun. Quittez mes appartements, quittez cette ville et allez rejoindre les bras de Chevreuse. Je vous souhaite bien du plaisir. Tentez d’éviter son venin. Au sens propre comme au figuré.
    - Adieu Anne-Geneviève. N’oubliez pas que je vous ai aimée.
    François de Marcillac quitta la pièce d’un pas assuré, fermant doucement la porte derrière lui. Gabrielle imaginait qu’il devait déjà être en train de remettre son chapeau et son manteau, prêt à bondir sur son cheval et à partir au grand galop. Laissant là une Anne-Geneviève meurtrie et blessée qui demanda au domestique à ce que personne ne la dérange. Elle ne voulait pas même voir son fils adoré. Gabrielle se fit toute petite, n’osa plus bouger et attendit que l’orage passe, imaginant à peine comment sa mère réagirait si elle savait qu’elle avait tout entendu. Et bientôt, de grands sanglots déchirants se firent entendre.

    ---


    C’était la seule fois que Gabrielle avait vu pleurer sa mère. Pas même « vu », plutôt « entendu ». Elle en avait conclu que celle-ci avait du beaucoup aimer le duc même si elle ne l’avait jamais retrouvé après cette dernière entrevue. Les jours suivants, les mois suivants, même les années, Anne-Geneviève avait été différente. Comme brisée. Si elle restait toujours la dame forte et fière qui avait osé s’opposer à Mazarin, à Anne d’Autriche et au roi Louis, son sourire avait perdu de son honnêteté, ses yeux de sa brillance. Tout cela s’était soldé par le couvent. Mais la duchesse avait profité de la vie, s’en était enivré et elle ne devait rien regretter. Gabrielle pensait bien faire de même. Cette vie était trop courte pour la gâcher en hésitations, prières et remords. Elle voulait pleinement exister.
    Elle fixa le visage de sa mère qui ressemblait tant au sien. Une peau blanche, presque blafarde, des pommettes hautes, un nez fin et pointu. Et puis, elle non plus ne pleurait jamais.
    - Je me consacre désormais à Dieu, la seule lecture qui me soit autorisée est celle de la Bible.
    Ses grands yeux verts en exprimaient cependant bien plus. Un voile de souffrance les avait obscurcis. Gabrielle, honteuse malgré elle, chercha désespérément un nouveau sujet de conversation pour lui ôter à tout prix La Rochefoucauld de l’esprit. Mais elle demeura dans son mutisme alors que le silence s’éternisait. La flamme de la bougie tremblotait, rendant les contours des silhouettes projetées sur les murs incertains. La jeune femme se sentait de plus en plus mal face à toute l’accusation qui lui portait l’amertume de sa mère. Elle détourna le regard, le posa sur la porte en bois dans le fond de la cellule. Imaginer Anne-Geneviève vivre dans une pièce aussi petite que celle-ci avec pour seul meuble une paillasse inconfortable et pour seule décoration un crucifix lui était impossible. Et pourtant, la duchesse et ancienne Frondeuse était réputée être particulièrement sévère dans son engagement religieux.
    Une fois de plus, ce fut Anne-Geneviève qui brisa la quiétude qui s’était installée :
    - Comment se porte mon frère Condé ? Tu ne m’as pas parlé de lui.
    En entendant le nom de son oncle, Gabrielle ne parvint pas à s’empêcher de penser aux rumeurs qui portaient sur celui-ci et qu’elle avait entendues au détour d’une conversation entre deux ravissantes sottes. Jamais auparavant elle n’aurait pu inventer de telles histoires à propos de sa mère et du frère aîné de celle-ci mais maintenant cette malheureuse phrase s’imposait à elle avec violence. « Condé et Anne-Geneviève ? Ils ont partagé le même lit plus d’une fois... ». L’esprit de Gabrielle se cabra. Comment pouvait-on raconter des choses aussi affreuses sur le compte de sa famille ? Un inceste ? C’était faux ! La jeune femme n’avait pour habitude de porter crédit aveuglément à ce genre de racontars mais ne pouvait se contraindre à ne pas y croire.
    - Je me suis rendue à Chantilly la semaine dernière. Mon oncle se porte comme un charme. Bien que tout le monde me dit petite, je l’ai dépassé en taille.
    - Sans doute reviendra-t-il bientôt en grâce auprès du roi. Mon pauvre frère...


    ---


    « Tu te tairas, Gabrielle. Même si on t’adresse la parole, tu n’ouvriras pas la bouche sauf pour saluer. Tu feras la révérence puis tu te tiendras à mes côtés sans bouger un cil ».
    En cet instant, les ordres d’Anne-Geneviève revenaient à la mémoire de la petite fille. Vêtue d’une robe très longue et très lourde qui la serrait atrocement et qui la démangeait, Gabrielle s’efforçait de se comporter de manière convenable comme le lui avait ordonné sa mère. La situation était pourtant particulièrement désagréable pour elle. Entourée par une horde de courtisans curieux, oppressée par la foule et les effluves des parfums à l’odeur forte, elle sentait sa tête lui tourner. De plus, elle percevait sur sa personne les regards de toutes ces dames poudrées et ces seigneurs au costume d’apparat. Être l’objet des attentions ne lui était pas inhabituel mais elle devinait bien que tous attendaient le moindre faux pas de sa part, le moindre geste déplacé pour pouvoir chuchoter en pouffant derrière les éventails. Cette hostilité manifeste qu’elle avait ressentie depuis sa sortie du carrosse aux armes des Longueville, trois fleurs de lys, et que sa mère semblait ignorer, la mettait mal à l’aise. En faisant attention à ne pas trébucher, elle avait couru derrière sa mère qui avançait à grands pas et saluait ses nombreuses connaissances d’un simple signe de tête. Son cœur battait à toute allure. Elle savait qui elles étaient venues voir et cette perspective n’était pas non plus réjouissante. Selon les affirmations hautes et claires que formulait Anne-Geneviève lors des rencontres familiales, il était un être falot, sans intérêt, presque insignifiant. « Lorsque je l’ai rencontré, il m’a fixée de ses deux yeux bleus qui n’avaient aucune expression, signe d’une faiblesse d’esprit certaine ». Certes, la détestation que manifestaient ses parents et ses oncles envers lui n’était pas aussi importante que celle qu’ils avaient contre le cardinal Mazarin, son parrain et ministre de la Régente, « le farceur italien », « sorti comme Arlequin de la Comédie italienne ». Mais Louis de Condé s’était vanté devant ses proches de ne pas arrêter son carrosse devant le sien. « Quel sot ! », disait-il de lui en public.
    Maintenant, Gabrielle de Longueville se trouvait à la vue de celui-ci. Et elle était plutôt déconcertée par son attitude. Le petit Roi, encore un jeune adolescent, ne semblait pas le moins du monde concerné par leur présence. Il demeurait étranger à ce qui l’entourait. Son visage était froid, dur, ses magnifiques yeux bleus semblaient indifférents. Aucune lueur d’intérêt ne les animait. Saisie par son comportement, Gabrielle ne put détacher son regard de lui. Mais pour elle, cela ne signifiait pas qu’il était stupide, au contraire. Elle le ressentait comme un mépris souverain, proprement royal envers la duchesse et elle-même. Comme si elles n’avaient pas la moindre importance. Malgré elle, la petite fille, contrairement à son habitude, était presque intimidée par le Roi pourtant à peine plus âgé qu’elle. A ses côtés, Anne-Geneviève gardait le menton haut, distribuait sourires et moues méprisantes. Gabrielle pensa qu’en la voyant, on aurait pu croire qu’elle venait triomphalement recueillir l’allégeance d’un vassal, comme dans les romans de chevalerie que lisait la petite. Néanmoins, elle exécuta une révérence devant le souverain et devant la femme imposante qu’il avait auprès de lui. Gabrielle l’imita prestement.
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime18.04.09 1:57

    - Quelle grâce pour la petite Longueville ! C’est une enfant adorable, j’espère qu’elle n’a pas hérité de l’âme diabolique de sa mère, entendit-elle derrière elle.
    Qui osait donc critiquer aussi ouvertement sa mère ? Gabrielle avait envie de se retourner mais elle ne pouvait pas. Contrainte, elle se contenta donc d’observer la dame blonde aux rondes joues, assise dans un fauteuil, habillée d’une robe de cour noire, signe de deuil et dans son cas de veuvage, puisqu’elle était visiblement la mère du Roi, la Régente Anne d’Autriche.
    - Madame de Longueville, c’est un plaisir de vous voir au Palais-Royal.
    Son ton était assuré et ferme. En toute vraisemblance, c’était elle qui avait demandé à la duchesse de venir ici devant elle. Le jeune Roi à ses côtés sembla s’animer quelque peu et ses pupilles se posèrent quelques instants sur la petite fille. Elle se sentit glacée mais releva le menton comme pour montrer qu’elle ne se laissait pas impressionner.
    - C’est un plaisir également pour moi de m’incliner en toute humilité devant Vos Majestés, prononça Anne-Geneviève d’une voix claire et chantante.
    - Voici donc mademoiselle de Longueville, votre fille.
    La main de la Régente se leva vers Gabrielle qui s’approcha à petits pas, toute tremblante devant cette si grande dame. Elle tendit ses propres mains minuscules et la dame les saisit dans sa paume et les serra. Son visage sévère s’éclaira d’un fin sourire qui rassura la petite fille. Cette dame ne lui voulait aucun mal et elle était bien aimable.
    - Vous êtes ravissante, mademoiselle.
    Gabrielle remercia et recula quand la Régente le lui fit signe. Anne d’Autriche s’adressa de nouveau à Anne-Geneviève et son expression se referma. La demoiselle comprit alors que les deux femmes se détestaient et que leur entente actuelle n’était qu’apparence.
    - Monsieur de Longueville, votre époux, est arrivé hier à Paris. Il s’est rendu devant les Parlements. Vous pouvez être assurée que nous ferons tout ce qu’il y a en notre pouvoir pour aider monsieur le duc à obtenir le gouvernement de Normandie. Nous connaissons sa valeur et ses compétences et nous ne voulons pas nous priver d’un tel soutien à la couronne.
    Anne-Geneviève courba sa tête élégamment, en réprimant son orgueil démesuré. Gabrielle espéra que cela signifiait qu’elle reverrait bientôt son père adoré. Cela faisait si longtemps !
    - Nous avons néanmoins une fort mauvaise nouvelle à vous annoncer, madame de Longueville. Votre frère, monsieur le Prince de Condé, a été condamné à mort par les Parlements pour crime de lèse-majesté. Les Parisiens ont encore une haine tenace envers monsieur le Prince qui a brûlé l’Hôtel de Ville et a combattu les troupes du Roi.
    La mère de Gabrielle se raidit. Seule la petite fille s’en rendit compte car elle la connaissait très bien. Elle ressentait le désespoir qui émanait de la duchesse. Et d’ailleurs, le ton de celle-ci avait désormais un accent suppliant et une ferveur inaccoutumée.
    - De grâce ! Vos Majestés, je vous en prie, toutes les actions que nous avons entreprises, elles ont été faites dans le seul but de protéger Sa Majesté des mauvaises influences qui n’ont pas manqué de tenter de s’emparer d’elle lorsque le Roi est mort. Vous ne pouvez laisser mourir Monsieur le Prince qui a toujours servi fidèlement Vos Majestés, obtenant la victoire militaire à Rocroi, le jour même du décès de Sa Majesté alors qu’il n’était que duc d’Enghien.
    - Nous sommes conscients de cela, madame, nous pouvons vous l’assurer. C’est pourquoi nous allons tout faire pour commuer cette peine en simple exil de la Cour.
    Etait-il possible que Condé, cet oncle qui ne cessait de la taquiner et qu’elle adorait, puisse être emmené en place publique et que l’on tranche sa tête sans autre forme de procès ? Ne pourrait-elle jamais se blottir contre lui, rire de ses plaisanteries et le taquiner à nouveau ? Certes, il était coupable de tout ce qu’on l’accusait quoi qu’en dise Anne-Geneviève. Gabrielle l’avait autant entendu critiquer le cardinal Mazarin que la Régente ou le Roi Louis. Cela pouvait bien être considéré comme un crime de lèse-majesté. Néanmoins, l’éventualité de la disparition à jamais de cet homme si intelligent et si gentil avec elle la blessait profondément.
    - De plus, votre mère, madame Charlotte de Montmorency a été ma dame de compagnie jusqu’à son décès. Elle était mon amie et mon soutien. C’est pourquoi nous ne permettrons jamais que monsieur le Prince, qui est aussi notre cousin, soit exécuté.
    - J’en serais éternellement reconnaissante à Vos Majestés.
    - Quant à votre frère cadet, monsieur le Prince de Conti, il a accepté de se soumettre à nos volontés. Il épousera mademoiselle Anne-Marie Martinozzi, nièce du cardinal Mazarin, très prochainement. Je sais que vous ne l’avez pas vu depuis bien longtemps. Il vous transmet ses plus sincères amitiés.
    - Je lui souhaite tous mes vœux de bonheur.
    La conversation continua encore quelques instants puis les deux Longueville saluèrent avant de s’éloigner au pas de charge comme à leur arrivée. Anne-Geneviève semblait pressée de partir. Gabrielle, elle, restait songeuse. Elle venait donc ainsi de rencontrer la Régente et son fils, le petit Roi Louis contre lesquels sa famille avait combattu pendant tant d’années. Son avis restait réservé. Elle avait tant entendu de choses sur eux que les voir en chair et en os lui paraissait encore irréel. Quant à Charlotte de Montmorency, celle qui venait de sauver la tête de son oncle, elle se rappelait une très vieille dame blonde avec des petits yeux inquisiteurs qui lui avait caressé les cheveux en murmurant « sois digne de la famille dont tu fais partie, petit ange ».
    Dans le carrosse qui les ramenait à l’hôtel de Condé, tandis que sa mère conservait un visage fermé, visiblement de mauvaise humeur, Gabrielle songeait aux trois fantômes qu’elle venait de voir – ou de revoir dans le cas de sa grand-mère. Derrière ces façades dures, elle devinait en eux des amours, des envies perdues, l’insouciance perdue de la jeunesse fuyante.
    - Descendons, nous sommes arrivées, commanda Anne-Geneviève.

    ---


    Pourquoi Anne-Geneviève de Longueville n’avait-elle pas eu l’ordre officiel de s’exiler comme tout le reste des frondeurs ? Pourquoi celle qui avait été le « mauvais ange » des Frondes n’avait-elle pas été punie comme ses frères, Gondi, Chevreuse et même la Grande Mademoiselle, la propre cousine germaine du Roi ? Si Anne d’Autriche avait clairement écarté la duchesse de la cour, celle-ci n’était pas déshonorée ni disgraciée. Aujourd’hui encore, avec le recul des années, Gabrielle ne comprenait pas. Cette clémence était-elle due à d’obscures alliances faites par sa mère avant la dernière défaite de Condé et le retour du roi à Paris ? C’était possible.
    Gabrielle examina le visage de sa mère devant elle. Cet être avec son visage céleste était l’être le plus manipulateur qu’elle connaissait. Elle réussissait à rendre les autres esclaves de son approbation, de son sourire charmeur, de son intelligence redoutable. Figure dans le monde, elle maniait la langue et se montrait perfide avec une rare virtuosité. La jeune duchesse avait certes hérité de cet esprit brillant qui lui permettait d’être audacieuse dans les salons des Précieuses, qui lui permettait de détruire les réputations des dames trop sottes. Mais Gabrielle demeurait profondément pure au fond d’elle-même et s’il lui arrivait d’en venir à des extrémités peu recommandables, ce n’était que pour servir ses convictions et ses idéaux. Pour beaucoup, Anne-Geneviève, en se retirant des mondanités, en protégeant l’abbaye de Port-Royal, en devant Carmélite, tentait de racheter ses fautes et ses péchés aux yeux de Dieu. Gabrielle était contrainte de s’avouer qu’elle ignorait d’où venait cette soudaine vocation, sa mère ne s’étant jamais montrée croyante auparavant.
    Pourtant, cet être qu’elle adorait et détestait, ce monstre de beauté, d’égoïsme, lui avait tout apporté et l’avait façonnée. C’était une évidence. Elle lui avait appris qu’une femme pouvait mener sa vie comme elle l’entendait, qu’il était possible de faire ses propres choix, et rien que pour cela, Gabrielle lui en serait éternellement reconnaissante.


    ---


    Le sourire de Mlle de Scudéry rassura Gabrielle, assise sur une grande chaise d’adulte au milieu d’un cercle de femmes poudrées et d’hommes qui portent des perruques bouclées. Elle se sentait minuscule et bien insignifiante parmi tous ces gens à l’air important. Elle aurait été aimé pouvoir se réfugier près de la fenêtre, regarder les parisiens passer dans la rue en contrebas tout en écoutant d’une oreille distraite les longues conversations de sa mère avec ses amis. Mais de plus en plus, on l’intégrait au cercle brillant. On lui demandait son avis en tout, on louait son charme et son esprit. Le regard empli de fierté d’Anne-Geneviève n’avait pas échappé à la jeune fille et c’est pourquoi elle suivait avec apparent intérêt les conversations parfois soporifiques de ces nobles personnes.
    Cette journée-là, le ciel était dégagé et un fort soleil éclairait les rues de la ville. L’animation des rues s’entendait même de l’appartement où s’était réunie la compagnie. C’était une vieille dame qui recevait. Le visage sérieux et sévère de Mme de Rambouillet n’était pas de même à impressionner Gabrielle et l’atmosphère était plutôt détendue. Les conversations allaient bon train, chacun dans son coin. La petite entendait la voix lointaine de sa mère se plaindre qu’il lui faudrait aller en Normandie, dans un endroit reculé nommé Pont-de-l’Auche et surtout, se réconcilier avec son mari sur la demande expresse de la Reine-Mère. Son interlocuteur la plaignait avec éloquence, ajoutant à ses paroles d’amples gestes qui attiraient l’attention de ses voisins. Secrètement ravie de bientôt retrouver son père qu’elle n’avait pas revu depuis des mois, Gabrielle se désintéressa de ces plaintes. Elle était entourée d’un poète Vincent Voiture et d’une jeune demoiselle très spirituelle, Mlle de Scudéry. Cette dernière réclama le silence et montra un ouvrage imprimé qu’elle tenait auprès d’elle. Elle l’obtint presque immédiatement parce que les discussions qui tournaient autour du débat du « car » étaient épuisées. Le salon de Mme de Rambouillet défendait en effet ce petit mot qui était « indispensable » à une langue policée mais que ces messieurs de l’Académie française cherchaient à éliminer du vocabulaire. On se tourna donc vers Madeleine de Scudéry qui présenta le livre à Mlle de Longueville. Celle-ci savait évidemment lire comme cela était la règle intangible pour le duc et son épouse. Elle tourna la couverture, sentant les regards braqués sur elle. Les autres devaient savoir de quoi il s’agissait car certains avaient des sourires entendus. Sur la page de garde étaient écrits en énormes lettres d’imprimerie le titre du roman « Clélie ou une histoire romaine », le pseudonyme de son auteur « Georges de Scudéry », Madeleine ayant pris le prénom de son frère, mais surtout cette ligne « histoire dédiée à Mademoiselle de Longueville ». Gabrielle se sentit touchée par cette attention, surtout venant de la part d’une femme qu’elle admirait autant. Elle dévoila un sourire de contentement qui ravit ces dames.
    - Mademoiselle, vous avez désormais un surnom, s’exclama Vincent Voiture, vous serez appelée Clélie.
    - Vous me voyez ravie, monsieur, de porter le prénom d’une si illustre héroïne romaine.
    - Il est en tout cas fort aimable de voir une jeune fille avec un esprit si charmant, s’exclama Mme de Rambouillet, il est certain qu’une demoiselle se doit de savoir lire et écrire le français et le latin avant ses douze ans. Tant d’intelligence laissée en friche chez les filles dans notre royaume !
    Madeleine de Scudéry, ravie de son succès, frappa dans ses mains :
    - Allons, allons, rappelons-nous qu’il n’est point drôle pour une enfant de se retrouver dans notre société. Messieurs, il nous faut distraire Mademoiselle de Longueville !
    Vincent Voiture se leva de son siège en disant qu’il avait évidemment tout prévu à cet effet et que l’on se devait de réserver les meilleures surprises à Gabrielle qui partait bientôt loin de Paris et de toute compagnie brillante. Quelques rires accompagnèrent cette tirade mais l’on se calma bien vite lorsque le poète se mit à déclama quelques vers de sa composition, truffés de métaphores et de périphrases précieuses. Il conclut sur les « miroirs de l’âme » de Gabrielle, ses deux grands yeux innocents où brillaient une lueur, celle de la passion. Oui, la jeune fille était quelqu’un de passionné. Des applaudissements discrets conclurent son poème puis tout le monde se tourna vers la petite Longueville.
    - Êtes-vous distraite ?
    Décidée à taquiner Voiture et à amuser la compagnie, Gabrielle répondit que non, que décidemment ce poème était la chose la plus ennuyeuse qu’elle eût jamais entendu et que les muses avaient abandonné son pauvre auteur. Ce dernier s’inclina de bonne grâce devant la princesse de la réunion et accepta d’être condamné à un gage pour son essai infructueux. Tous ces dames et ces messieurs s’amusaient comme des enfants à inventer toutes sortes de jeux puis des gages pour punir les malchanceux. On riait, on applaudissait et surtout, on écoutait avec grande attention les moindres paroles de Gabrielle qui se permettait de bouder même les prestations les plus réussies. Quant on en vint à ne plus savoir que faire, un jeune homme bondit de son siège et déclara avoir une brillante idée. Il sortit en courant de l’appartement.
    - De quoi s’agit-il à votre avis ? murmura Gabrielle à sa voisine, Mlle de Scudéry.
    - Espérons qu’il ne nous accable pas d’un de ses poèmes. Vous ne paraissez guère sensible à la littérature cet après-midi.
    Il ne s’agissait pas d’un poème, mais d’un visiteur bien plus imposant que ramena le jeune homme. Guidé par un gitan au visage doré, un ours debout sur ses pattes arrière pénétra dans la pièce, déclenchant cris d’effroi et un mouvement général de panique. Seule Gabrielle, même si elle se leva, resta à l’endroit où elle était et regarda approcher l’énorme animal. Son guide lui intima un ordre dans une langue inconnu et l’ours, pataud, exécuta un semblant de révérence devant la demoiselle. La jeune fille demeurait pétrifiée par l’apparition, n’ayant jamais vu un tel mammifère. Malgré son énorme poids et ses gestes hésitants, il lui paraissait plein de grâce. Elle avait envie de caresser sa fourrure rêche mais elle n’osait approcher. Il lui semblait être dans une bulle qui l’isolait du monde extérieur, avec juste cet ours. Mais une voix, celle de l’homme qui avait eu l’idée, brisa cette quiétude :
    - Cela vous a-t-il distrait, mademoiselle ?

    ---


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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime19.04.09 2:05

    Le pauvre animal avait fini par paniquer et par déchirer les boiseries des appartements de Mme de Rambouillet, les rires couvrant les imprécations réjouies de la vieille dame. Gabrielle s’était follement amusée cette journée là. Elle souriait encore à ce souvenir. C’était la première fois qu’elle s’était sentie chez elle dans un salon, dans son univers, et depuis cette sensation ne la quittait pas lorsqu’elle se retrouvait à débattre à propos de la langue française en compagnie de personnes adorables qui possédaient un esprit brillant et prompt à la répartie. Gabrielle adorait ces après-midi et soirées en leur présence et pouvait laisser apercevoir son intelligence par l’intermédiaire de ses répliques aiguisées. C’était le seul véritable endroit où l’on pouvait encore discuter et polémiquer sur des sujets d’importance autre que la mode ou les coucheries du Roi. Si la jeune femme n’exprimait pas ses opinions politiques, on n’était jamais à l’abri d’un délateur qui s’empresserait de tout raconter à des personnes hautes placées, elle pouvait néanmoins laisser deviner certaines de ses désapprobations et parler littérature, culture voire même des sujets sérieux touchant à l’économie ou à la politique du Roi à l’étranger.
    Mais il serait mentir que de dire que la jeune femme ne faisait que parler de choses terriblement graves. Les salons et les rencontres des Précieuses étaient surtout pour elle une occasion de s’amuser et de rire en inventant des jeux toujours plus fous et plus audacieux. Ceux-ci permettaient aux poètes de montrer à leurs amis leurs dernières créations. La jeune duchesse de Longueville était une figure de ses assemblées et son sourire ou son air boudeur attribuait les jugements aux artistes. Elle avait toujours été quelqu’un qui aimait se divertir, et ce depuis toute petite.


    ---


    Un bruit sec fit sursauter Gabrielle de Longueville. Elle venait de laisser tomber le livre qu’elle tenait serré contre sa poitrine. Dans un bruissement de satin, elle se pencha prestement et le ramassa rapidement. Un regard autour d’elle lui confirma que personne ne faisait attention à elle et n’avait vu son geste. Enfin presque personne, car son jeune frère Paris la fixait avec insistance, un demi-sourire aux lèvres. La jeune fille espérait que ses mains gantées cachaient le titre de l’ouvrage mais l’expression de Paris lui confirma qu’il avait deviné qu’elle avait outrepassé les règles. En quelques pas, la duchesse Anne-Geneviève la rejoignit tirant par le bras son plus jeune fils et lui ordonna de la suivre. L’office était terminé et les fidèles quittaient la cathédrale Notre-Dame de Rouen à pas pressés. On s’écartait avec respect devant la famille de Longueville. Le duc Henri, gouverneur de Normandie, avançait à grands pas larges comme s’il se trouvait parmi ses propres sujets. Anne-Geneviève l’escortait. Durant tout le temps de la messe, elle avait gardé un air intéressé que Gabrielle savait factice. Sa mère détestait ce genre de cérémonie et elle n’était pas la seule. La jeune fille avait voulu simuler une perte de connaissance avant le départ de leur château mais la bonne Catherine, sa nourrice, n’avait pas été dupe. Après tout, Gabrielle avait déjà usé de ce subterfuge la semaine précédente. On l’avait donc contrainte à se rendre à Rouen. Prétextant devoir aller chercher sa bible, elle s’était rendue dans le cabinet de travail de son père et avait subtilisé un livre de sa bibliothèque dont la couverture laissait penser à son exemplaire du texte sacré. Henri lui avait formellement interdit de toucher à ses ouvrages mais Gabrielle n’en avait cure. Il ne se rendrait compte de rien. Pendant toute la durée de l’office, Gabrielle avait donc gardé un œil sur son livre entièrement écrit en latin, s’interrompant uniquement lorsqu’il lui fallait se redresser pour clamer quelque chose comme « Amen ». Elle avait d’ailleurs omis de se lever du banc à une occasion. Heureusement, Paris, installé à sa gauche, lui avait donné un grand coup de coude pour lui signifier son manquement.
    Gabrielle comprenait maintenant pourquoi son père ne souhaitait pas qu’elle lise ce genre d’ouvrage. Bien que, comme la Bible, le texte fût écrit en latin, il ne parlait pas du Christ ou d’un saint quelconque. Au contraire, un personnage nommé Epicure foulait à ses pieds le monstre de la religion, libérait les esprits humains de la superstition. « De Rerum Natura » du romain Lucrèce n’était pas facile à lire pour une jeune fille mais elle avait saisi l’essentiel du propos de l’auteur. Son seul regret était de ne pas avoir réussi à le terminer. Elle pourrait toujours le faire la semaine suivante ce qui détournerait les soupçons de Catherine jusqu’à ce qu’elle se décide à se dire malade. Elle nota mentalement quel vocabulaire latin il lui avait manqué pour les demander à son précepteur la prochaine fois qu’elle le verrait.
    - Il est joli ton livre.
    Gabrielle leva les yeux du paysage qui défilait derrière les fenêtres du carrosse. La voiture bringuebalait ce qui était très désagréable. Elle posa ses prunelles vertes sur son frère aîné, Jean-Louis, qui tendait le bras vers elle, espérant qu’elle lui donne son ouvrage.
    - Il s’agit de la Bible. Tu as le même exemplaire.
    - Je le veux. Je le veux !
    La voix de Jean-Louis se faisait suppliante et ses yeux se remplissaient de larmes à la grande horreur de sa sœur. Le pauvre garçon n’avait pas toute sa tête et il ne supportait pas qu’on ose lui refuser quoi que ce soit. Son désespoir serrait toujours le cœur de Gabrielle mais elle ne pouvait pas lui tendre sa pseudo Bible sans être démasquée par ses parents qui observaient la scène. Son père lui fit signe de le lui donner et se désintéressa de la querelle pour parler à son épouse.
    - Et bien qu’attends-tu Gabrielle ? demanda Paris d’un air innocent.
    Un demi-sourire naquit sur ses lèvres. La jeune fille se crut capable de l’étrangler en cet instant. Il souhaitait simplement qu’elle se fasse sermonner pour sa désobéissance. Gabrielle désirait plus que tout au monde lui ôter l’air de supériorité qu’il affichait et elle se promit de se venger. Mais pour le moment, la priorité était d’éviter de passer le livre à Jean-Louis.
    - Regarde, s’exclama-t-elle en faisant mine de regarder par la fenêtre, as-tu vu les écureuils ?
    Comme elle l’espérait, son aîné se désintéressa d’elle pour tenter d’apercevoir les animaux qui étaient sa grande passion. Il ne pensait plus à ce souhait précédent et gémissait de ne pas distinguer les fameux écureuils avant de se faire rabrouer par Henri. Il se tut alors et s’enfonça dans son siège en boudant. Gabrielle adressa un sourire angélique en direction de Paris qui avait perdu quelque peu de sa superbe. Elle avait échappé de justesse à la sanction.
    Arrivée dans le château de Pont-de-l’Auche, Gabrielle s’éclipsa en échappant à l’œil vigilant de ses parents pour aller retrouver sa jeune amie Perrine dès la descente du carrosse. Perrine Harcourt était la fille des cuisiniers, elle avait juste le même âge que la jeune fille. La demoiselle de Longueville l’appréciait beaucoup car elle ne manifestait que mépris vers les convenances et qu’il lui arrivait d’emmener son amie dans les cuisines. Gabrielle y était gâtée par madame Harcourt qui lui offrait gâteaux et sucreries. Au-delà de cette amitié purement intéressée, celle-ci aimait s’amuser en sa compagnie qui était très distrayante. Perrine avait toujours des idées de jeu et sous son impulsion un parc pouvait devenir un royaume enchanté. Mademoiselle de Longueville, en retour, lui proposait des lectures et lui apprenait à déchiffrer des mots en se mordant les lèvres pour ne pas laisser apparaître son désespoir devant l’étendue de l’ignorance de la petite Harcourt. En peu de temps, elles étaient devenues inséparables.
    - Gabie ? Puis-je t’accompagner ?
    Charles-Paris s’était arrêté sur la première marche de l’escalier menant à l’entrée de la demeure. Il fixait sa sœur avec l’espoir que celle-ci accepte mais sans se faire réellement d’illusions. Celle-ci chercherait sans doute à se venger. Gabrielle hésita. Elle aurait voulu répondre un « non » ferme et définitif mais elle se sentait touchée par le regard suppliant que lui lançait Paris. Il semblait doué du même don que leur mère, celui de se faire aimer malgré les traîtrises et autres erreurs qu’il commettait. On ne pouvait rien lui refuser. De plus, lorsqu’il n’était pas décidé à nuire à sa sœur, il était d’une compagnie des plus agréables. Quant à la vengeance, elle n’était pas pressée et pourrait attendre voire serait facilitée par la présence du garçon. La jeune fille manifesta son assentiment d’un signe de tête. Le visage de Paris se métamorphosa et il devint rayonnant de plaisir. Il arriva en courant auprès de son aînée. Gabrielle sentit une vague d’amour l’envahir pour ce jeune frère qu’elle adorait tant détester.

    ---


    - Pourquoi souris-tu ?
    La voix d’Anne-Geneviève la sortit de sa rêverie qui était agréable. Se souvenir de son frère si jeune rendait toujours son cœur plus léger. Paris avait suivi un destin très droit, sans surprises. D’enfant gâté, surprotégé par sa mère et capricieux, il était devenu un jeune homme qui n’avait qu’à adresser un sourire aux demoiselles pour les attirer dans ses filets. Orgueilleux, hautain, il avait bel et bien hérité du don de sa mère. Toujours être aimé, adoré malgré son caractère inconstant, ses méchancetés et ses moqueries. Toujours le préféré face à sa sœur Gabrielle dont on admirait et vantait l’esprit et la beauté mais que l’on voulait côtoyer de loin tant elle semblait glaciale. Imbue d’elle-même ? La jeune femme pensait avoir des raisons de l’être, étant donné son titre, le nom de ses ancêtres et ses propres qualités. Si elle manifestait en permanence une profonde jalousie envers son frère cadet qui les menait en un perpétuel conflit à la grande joie des courtisans, elle ne pouvait se passer de lui. Peut-être cette guerre lui était-elle indispensable ?
    - Je repensais à notre enfance à Pont-de-l’Auche.
    - Ah, les bêtises de Charles-Paris...


    ---


    Gabrielle se mordit les lèvres pour ne pas rire. Le visage du précepteur de Charles-Paris était hilarant. Elle conservait néanmoins son sérieux au contraire de Perrine Harcourt qui, fort peu charitablement s’esclaffait derrière ses paumes. Imperturbable, Paris regardait avec un grand mépris son pauvre professeur qui restait sans voix devant le culot de son élève. Arrivé depuis peu, son prédécesseur étant mort, celui-ci avait été ravi de se présenter à Paris. « Vous arrivez à pic, s’était exclamé le jeune garçon, je suis ravi de pouvoir travailler avec vous. A vrai dire, j’ai une tache à vous confier ». Le professeur s’était incliné. « Je vous en prie, monsieur ». Paris lui avait alors mis sous le nez quelques poignées de noisettes que les trois amis avaient ramassées dans le parc. Lui adressant un sourire ingénu, il lui avait alors demandé avec la plus extrême courtoisie de casser leur coquille. L’air dépité de l’homme resterait longtemps gravé dans la mémoire de la jeune fille. Sentant venir l’orage, Gabrielle décida de quitter la salle en compagnie de Perrine, en laissant Paris seul à assumer ses plaisanteries. Dès qu’elle fût descendue dans la cour, elle constata qu’un carrosse avait été avancé dans la cour. Il n’y avait pas de blason sur les portes mais la jeune fille reconnut néanmoins le véhicule des Valois. Son cœur bondit dans sa poitrine. Son Hector adoré était-il présent dans le domaine ?
    - Je te laisse Perrine.
    Elle courut vers le jardin où sa mère devait sans doute recevoir. En effet, celle-ci, assise près du bosquet de roses, discutait avec animation devant une dame fardée. Aux côtés de la courtisane, un jeune homme aux cheveux blonds patientait. S’il écoutait poliment la duchesse, cette conversation ne le passionnait visiblement pas. Avançant à pas de loup, Gabrielle lui déposa un baiser sur la joue malgré le regard d’avertissement d’Anne-Geneviève. Cette dernière devait trouver cela peu respectueux des convenances pour une demoiselle de son âge de se comporter de cette manière devant un jeune homme d’une vingtaine d’années. Mais Gabrielle avait pris l’habitude toute jeune d’agir de cette manière avec son cher Hector. Il était comme son frère aîné et ce n’était pas les années qui allaient modifier les choses, n’est-ce pas ? D’ailleurs, il ne parut pas le moins du monde gêné par la demoiselle de Longueville.
    - Gabrielle, venez dans mes bras !
    La jeune fille se serra contre lui dans une étreinte fraternelle. Agacée par leurs démonstrations, Anne-Geneviève les chassa d’un geste de la main sans même interrompre sa diatribe. Bien que Gabrielle fût bien moins âgée que lui, Hector n’eut aucun scrupule à quitter la table. Il venait très régulièrement en Normandie saluer les Longueville car leurs parents étaient très proches. Le duc Henri était d’ailleurs de la famille des Valois. Hector avait donc toujours été un visage connu pour la petite demoiselle qui comme le constata le jeune homme avec une nuance d’admiration dans la voix avait bien grandi. De son côté, Gabrielle ne se lassait pas de taquiner ce grand frère, de le bousculer quelque peu, de poser sa fine main sur son bras pour l’arrêter devant des fleurs particulièrement belles, consciente de bousculer les règles du bon comportement mais s’en fichant complètement, ravie de revoir le jeune homme. En vérité, elle ne connaissait rien de sa vie, de ses projets ou de ses envies. Il était un mystère à lui seul et c’était cela qui plaisait à mademoiselle de Longueville. Elle adorait les secrets et pourtant se plaisait à respecter la réserve d’Hector. Sa gentillesse exquise, son sourire éblouissant, cela lui suffisait pour l’aduler comme une idole. Il était un ami, un confident, un frère bienveillant. Cette fascination qu’elle éprouvait pour lui était peut-être mauvaise mais du haut de ses treize ans, elle ne s’en rendait pas compte. Elle avait besoin d’aventure et son intuition lui soufflait que c’était lui qui pourrait la lui procurer.
    - M’aiderez-vous à apprendre à tirer au pistolet ?
    Gabrielle avait prononcé cette question avec un ton de défi mais son regard était malicieux et elle levait son menton d’un air mutin. En face d’elle, Hector était droit comme une statue et le soleil jouait avec le reflet de ses cheveux de miel. Un sourire s’esquissa à ses lèvres mais il ne répondit pas immédiatement. La jeune fille se sentait gênée de ses lourdes robes qui lui faisaient monter le rouge aux joues en cet après-midi d’intense chaleur.
    - Je vous en prie, Hector, Père m’a interdit l’escrime mais cette fois-ci, il n’apprendra rien de mes projets.
    - Qui voulez-vous donc tuer, Gabrielle ? plaisanta-t-il pour toute réponse.
    Son air ténébreux fit bondir le cœur de la jeune fille. Elle se serra contre lui dans un geste d’affection fraternel.
    - Ce n’est point drôle, voyons, grommela-t-elle.
    D’un geste, elle replaça quelques mèches brunes qui s’étaient échappées de son chignon lâche derrière ses oreilles. Ses parents lui auraient sans doute reproché d’être si dépenaillée, même devant celui qui était presque son frère aîné. Une jeune fille respectueuse des convenances ne serait pas sortie sans chaperon avec un jeune homme, simplement vêtue d’une robe d’intérieur aux multiples jupons, les cheveux formant des épis sur le dessus de sa tête. Une jeune fille n’aurait certainement pas demandé ce genre de faveur. Mais lorsque personne ne l’observait, quand elle se trouvait avec ses intimes, Gabrielle se comportait comme quelqu’un de totalement libre.
    - Vous savez, Gabrielle, je vous préfère ainsi, douce et bienveillante. Je ne puis imaginer que vous puissiez savoir vous battre.
    - Méfiez-vous, mon cher Hector, méfiez-vous des personnes douces et bienveillantes. Ce sont souvent elles qui cachent le plus de courage pour la bataille.

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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime30.04.09 22:22


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    Gabrielle de Longueville n’avait jamais appris à se battre et avait rapidement renoncé à toute forme de violence, tout du moins physique. On pouvait bien plus efficacement détruire une personne par les paroles que par l’épée et en plus, vous serez applaudi. D’abord observatrice des succès de sa mère, la jeune femme était devenue virtuose dans ce domaine.
    L’intensité de la lumière que diffusait la bougie diminuait. Le visage d’Anne-Geneviève disparaissait peu à peu dans l’ombre. C’était ainsi que se terminerait sa vie, songeait Gabrielle avec mélancolie. Assise sur une chaise de bois peu confortable, l’esprit abattu par les prières, ses yeux et sa beauté, encore vivace malgré les années, dissimulés par le noir du couvent. Dans la solitude. Non, décidemment, ce choix ne lui convenait pas. Anne-Geneviève et son frère cadet, le prince de Conti, s’étaient tous deux tournés vers la religion. Celle-ci défendait d’ailleurs le jansénisme dans le royaume et au niveau politique.
    - Comment occupes-tu ton temps, Gabrielle ?
    Le regard de sa mère était indifférent. La jeune femme savait que ses occupations ne l’intéressaient pas. Mais elle se demanda tout de même quoi lui répondre. Elle ne pouvait pas, évidemment, lui dire la vérité.


    ---


    - Mon Dieu, qu’est-ce donc que cela ?
    Gabrielle parcourait des yeux l’étrange papier qu’elle tenait à la main. Imprimées à la va-vite, les quelques feuilles étaient visiblement de mauvaise facture et étaient faites pour le vulgaire et la rue. Qu’elles puissent se trouver dans le salon d’une dame de qualité étant dérangeant. Elle eut un hoquet en voyant une nouvelle concernant le roi Louis de France. L’information tenait sans doute plus de la rumeur qu’autre chose. Marie de Nemours prit le temps de terminer son chocolat avant de répondre à sa sœur cadette. Elle posa sa tasse sur la table en bois précieux et fit signe à Gabrielle de faire de même avec le journal. Mais la jeune fille répugnait à déposer la liasse dégoûtante sur un objet aussi délicat. Marie insista et elle se résigna à obéir. En effet, la duchesse de Nemours avait gagné en autorité et avait quitté son indolence et son insignifiance passée pour mettre en œuvre son destin en prenant les rênes de sa vie. Elle s’était révélée être une dame intelligente, fine politicienne, capable de faire face à ses puissants voisins de l’empire germanique et du royaume de France qui s’intéressaient de près à ses terres. Depuis longtemps maintenant, puisque son époux était décédé il y avait quelques années sans enfants, on n’osait plus la contredire ni la défier.
    - Ma sœur, ne regardez pas cela comme la pire des horreurs, je vous prie ! J’ai autorisé et j’encourage la création de gazettes à Nemours.
    - Mais ne trouve-t-on pas des chansons et des pamphlets misérables dans ce genre de... D’ouvrages ?
    - Pas uniquement, il arrive bien souvent que des personnes fort cultivées fassent partager leur savoir dans certaines de ces revues. Mais j’avoue que ces chansons me plaisent et que je prends plaisir à les lire. J’en fais parfois les frais mais moins que les Savoie ou les Bourbons. Cela signifie-t-il que je suis une dirigeante plus aimée du peuple ou qu’ils ont peur de moi ? Cela reste encore sans réponse.
    Et de fait, Marie de Nemours prit la gazette et parcourut quelques lignes, souriant lorsque de mauvais jeux de mots lui apparaissaient. Gabrielle secoua la tête, agacée de cette attitude mais amusée malgré elle. Que sa sœur parvienne à braver l’autorité de Louis XIV de cette manière subtile et détournée la distrayait.
    - Chère Marie, vous avez bien hérité du sang de nos parents contestataires.
    La jeune femme lui répondit d’une voix distraite, sans même lever le regard vers son interlocutrice :
    - Prenez garde, Gabrielle, nous avons la révolte dans le sang, nous autres Longueville. Le vent de la Fronde souffle toujours dans nos cœurs. Mais dites-moi, n’aviez-vous point promis au duc de Valois de le retrouver pour partager une balade en sa compagnie ?
    Rappelée ainsi à ses devoirs, la jeune femme quitta le salon privé de sa sœur et se dirigea vers le lieu où elle avait donné rendez-vous à Hector. Perrine qui l’avait accompagnée dans le duché de Nemours pour être à la fois sa servante et sa demoiselle de compagnie lui emboîta le pas sur le signe de sa maîtresse. Il déplaisait à Gabrielle d’être suivie à la trace par la jeune fille mais il était inconvenant d’être seule en compagnie d’un homme et elle ne se trouvait pas à Pont-de-l’Auche. Il lui fallait se comporter comme une véritable duchesse et en représentante de la grande famille des Orléans-Longueville. De plus, la jeune femme faisait confiance à son amie pour marcher quelques pas derrière le couple et pour être discrète. Son cœur s’emplit de joie en voyant Hector de Valois. C’était toujours un plaisir de voir le frère qu’elle s’était choisie. Lui avait un air inquiet et portait les habits de deuil. Que s’était-il donc passé ?
    - Gabrielle, je n’espérais point que vous fussiez remise. On m’a rapporté que vous vous sentiez mal.
    - Cela va mieux, je vous remercie. Je souffre depuis quelques mois de migraines régulières et je n’ai pas d’autre choix que de garder le lit. Heureusement, je me sens tout à fait remise pour pouvoir faire cette balade dans les jardins de ma sœur avec vous. Mais dites-moi, quels sont donc ces habits de deuil, mon cher Hector ? Quel proche pleurez-vous ?
    Elle faillit ajouter que ces vêtements noirs ne lui allaient pas du tout mais s’abstint car cette remarque pourrait la faire passer pour insensible aux malheurs de ses proches. Elle prit le bras qu’il tendait vers elle et ils marchèrent à pas lents dans les allées désertées, entourées de massifs de fleurs.
    - Hélas, ma chère épouse est décédée sans doute à la suite d’une maladie. Cette nouvelle m’a profondément attristé comme vous pouvez l’imaginer.
    - Quelle annonce épouvantable ! Je ne connaissais pas votre épouse mais je me réjouissais de faire sa rencontre lorsque je serais allée à Paris. Je devais m’y rendre en septembre mais j’ai préféré rester à Chantilly avec mon oncle Condé.
    Ils restèrent silencieux quelques instants tout en continuant à avancer, chacun plongé dans ses pensées. Lorsqu’il fût sûr que Perrine était trop éloignée pour entendre leur conversation, Hector s’arrêta et plongea ses magnifiques yeux dans ceux de sa charmante amie. Celle-ci sentit immédiatement que quelque chose d’important allait se passer. Elle serra le bras du jeune homme et l’implora du regard de ne rien lui cacher. Il paraissait nerveux.
    - Gabrielle, j’ai des choses à vous avouer. Vous êtes ma plus fidèle amie et je sais que vous ne me trahirez jamais, d’autant plus que votre famille n’a jamais été très favorable au roi Louis. Puis-je placer ma confiance dans l’affection que vous me portez ?
    - Vous m’insultez, Hector. Parlez, je vous prie.
    - Gabrielle, je devrais être sur le trône de France. Je suis le véritable roi de France.

    ---


    Tout avait commencé par cette phrase « Je suis le véritable roi de France ». Une simple phrase, un regard décidé de l’homme qu’elle adorait et sa vie s’en trouvait bouleversée. Pendant des heures, elle avait obligé Hector à tout lui raconter, à tout lui avouer. Si les points obscurs de la vie du duc s’étaient éclaircis, paradoxalement, le mystère de son existence ne s’était pas dévoilé. Gabrielle sentait encore cette fascination pour le secret. Il lui dissimulait encore des choses mais c’était cela qui faisait son intérêt. « Mais que comptez-vous faire ? », lui avait-elle répondu. Il lui avait alors expliqué qu’il désirait reprendre sa place, celle à laquelle que sa naissance lui donnait droit. Il ne comptait pas tant sur l’amitié qui les liait que sur l’importance des familles Longueville et Condé qui étaient depuis si longtemps écartées du pouvoir sur la volonté de Sa Majesté. Mais à cette époque là, Gabrielle ignorait encore ce qu’elle pouvait faire pour soutenir Hector dans sa lutte légitime. Car elle ne doutait pas un seul instant de la véracité de son récit. Tout s’enchaînait si parfaitement, la lueur qui s’allumait dans ses yeux lorsqu’il racontait était sincère.
    Au fil du temps, elle avait appris qu’elle pouvait avoir une réelle importance dans la lutte pour détrôner les Bourbons et faire revenir les Valois au pouvoir.
    - Gabrielle, je te prie, ne sois donc pas si rêveuse ! Réponds à ma question.
    - De quelle façon j’occupe mon temps, ma mère ?
    Elle s’arrêta juste avant de bafouiller et d’une voix claire et parfaitement assurée, elle continua :
    - Je vais aux salons des Précieuses.
    Ce qui n’était pas totalement faux.


    ---


    - Mademoiselle, me feriez-vous l’honneur de m’accorder votre main ? Je vous en prie, prenez le temps de la réflexion, ne protestez pas de suite. Je n’ignore pas qu’il m’aurait fallu consulter votre père avant de vous faire ma demande mais je voulais m’assurer que je possédais votre affection sincère.
    Gabrielle haussa un sourcil, profondément troublée par cette proposition. Le charmant jeune homme, un comte du sud du royaume, avait posé un genou à terre et la fixait droit dans les yeux. Il s’était exprimé clairement, le ton empli d’espoir. Tout en lui montrait le courtisan acharné, de sa perruque blonde aux tournures à la mode jusqu’à ses chaussures à talons rouges. Il fréquentait depuis peu les salons précieux et s’était manifestement épris de la jeune fille. Cette dernière se demandait de quelle manière il s’était cru encouragé dans son inclination pour elle. Sans doute lorsqu’il l’avait priée de lire un paragraphe de ce qui était devenu son œuvre fétiche, Clélie de Madeleine de Scudéry, qui présentait la Carte du pays de Tendre, et qu’elle l’avait fait avec bonne grâce. La jeune fille se reprochait de ne pas avoir retiré sa main lorsqu’il l’avait prise quelques semaines auparavant dans sa paume. De nouveau, le comte avait saisi sa main droite et la baisait à intervalles réguliers. Dégoûtée par ce contact avec les lèvres d’un homme inconnu, Gabrielle, avec la plus grande courtoisie, l’ôta. Elle se réprimandait pour être venue ce jour-là au rendez-vous fixé par Madeleine de Scudéry dont elle fréquentait régulièrement le salon depuis son arrivée à Paris.
    Depuis quelques mois, en effet, Gabrielle de Longueville avait emménagé dans la grande ville en compagnie de sa mère et d’une dizaine de domestiques attitrés. Anne-Geneviève avait estimé qu’il était criminel de laisser une jeune fille de l’âge de sa fille si loin de l’agitation bénéfique de Paris, de la laisser s’étioler en compagne, s’épanouir ses plus belles années loin du regard appréciateur de maris potentiels puis faner. Henri, son père, avait bien tenté de protester en arguant que Paris était dangereux pour une jeune fille encore jeune et naïve. Il ne désirait pas qu’elle puisse tomber dans les pièges de la flatterie, des tromperies et des langues de vipère. « Que voulez-vous qu’il lui arrive si je suis avec elle ? », avait demandé la duchesse, impatiente de mettre son plan en œuvre pour pouvoir retourner dans la capitale. Henri avait fini par accepter à la condition qu’elles n’aillent pas à Versailles, là où se trouvaient les plus basses manœuvres et médisances. Gabrielle, ravie de ce déménagement, lui avait promis de faire attention à sa réputation tout en pensant que cela était bien ridicule. Son père la croyait-il donc si ingénue ? Elle savait se défendre et prendre du recul. Plutôt manipuler en secret que d’être manipulé. Elle avait assez de pratique puisqu’elle avait observé le comportement de sa mère durant ses jeunes années. Après avoir juré d’écrire des lettres régulières, elle avait embrassé avec un mélange d’affliction et de joie son père qu’elle adorait tant et était montée dans le carrosse qui devait les mener sur la route de Paris avec Anne-Geneviève et Perrine qui serait sa femme de chambre personnelle ainsi que sa confidente.
    La duchesse de Longueville avait été souffrante et s’était réfugiée chez son frère Condé à Chantilly, rentré depuis peu en grâce avec le mariage de Louis et l’infante Marie-Thérèse, laissant sa fille gérer seule son emploi du temps. Gabrielle avait profité de cette liberté pour se rendre dans les salons des Précieuses où elle s’était fait un cercle d’amis. Perrine Harcourt lui servait de chaperon lorsqu’elle devait se déplacer dans les rues sales de Paris. Sa maîtresse la laissait dans les cuisines en compagnie des autres domestiques lorsqu’elle se rendait dans les appartements de ses hôtesses. Mais elle profitait de chaque instant qu’elle avait de libre pour lui raconter ce qui se disait et se passait durant ces après-midi. Etonnamment, Perrine se montrait avisée et de bon conseil. C’était grâce à son aide que la jeune femme avait réussi à faire taire une dame qui ne désirait pas l’accueillir dans son cercle, nourrissant sans doute une haine envers Anne-Geneviève ou encore de la jalousie envers la demoiselle qui possédait la faculté d’attirer l’attention sur elle quelque soit l’endroit où elle allait. Perrine avait discuté avec la servante de cette fameuse dame qui lui avait apprit que sa maîtresse recevait assez régulièrement son propre beau-frère dans le lit conjugal. Quelques allusions bien placées avaient mouché la rivale de Gabrielle qui s’était tue et depuis lors, évitait de rencontrer la demoiselle de Longueville. Cette dernière avait alors eu l’impression de tout contrôler. Elle avait ressenti un grand plaisir à l’idée d’avoir la réputation d’une personne dans sa poigne et d’être la seule à pouvoir décider de la sauver ou de la détruire. Le pouvoir lui faisait tourner la tête mais aussi se sentir réellement puissante et vivante. Comme si elle parvenait enfin au bout de ses capacités.
    Elle ne cessait de se rendre en bonne compagnie dans les salons où l’on débattait économie, politique étrangère et littérature, en particulier dans ceux de Mlle de Scudéry et de Mme Scarron où elle retrouvait régulièrement Mmes de Sévigné et de la Fayette dont elle avait lu l’excellent Princesse de Clèves. Mais elle avait surtout fait des retrouvailles avec l’ancien amant de sa mère, le duc de la Rochefoucauld. Au début, l’ayant remarqué dans les appartements de Madeleine, assis dans un coin de la pièce et parlant avec animation avec Marie de Rabutin-Chantal, elle ne l’avait pas reconnu. Bientôt, l’incroyable ressemblance qu’il y avait entre lui et Paris de Longueville, le frère cadet de la jeune fille, l’avait frappée. Evidemment, François de Marcillac était plus âgé mais ses traits étaient, excepté les rides, en tout point semblables à ceux de Paris. Mêmes yeux, même regard, même nez, même menton... Cela était profondément troublant. Qui aurait pu douter de la véritable parenté du fils d’Anne-Geneviève, bien qu’il ait été reconnu par Henri de Longueville ? Elle n’avait pas adressé un mot à celui qui avait brisé le cœur de sa mère et celui-ci, sachant visiblement qui elle était, lui avait jeté des regards en coin mais n’avait pas tenté de l’approcher. Gabrielle avait donc déduit que cet homme était un lâche et qu’il ne méritait l’affection qu’Anne-Geneviève lui avait portée. Elle ne penserait donc plus à lui.
    La jeune fille se demandait désormais comment refuser la demande en mariage du comte. Elle ne pouvait évidemment pas épouser quelqu’un qui n’était pas de sa condition. Un simple comte ne méritait pas de s’unir à la fille d’un pair du royaume et d’une princesse de sang royal. Mais de toute manière, cette idée ne lui était pas venue à l’esprit. Le comte la répugnait. Partager sa vie, sa couche, son domaine avec lui, cette simple pensée lui faisait horreur. Elle n’imaginait pas encore le mariage, mais si elle devait prendre époux, ce ne serait certainement pas cet être falot et sans intérêt.
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime10.05.09 1:20

    - Je m’excuse, monsieur, mais je ne puis vous accorder ma main.
    - Vous faites bien, chère Clélie, s’exclama Madeleine de Scudéry, sans égard pour le comte humilié, ce sacrement est tout simplement incompatible avec la tendre amitié. Où se trouvent dans le mariage la tendresse, le respect, la courtoisie, la galanterie, l’amour pur et sincère ?
    Emportée par le débat, Gabrielle ne fit plus attention à son courtisan et se lança elle-même dans un discours enflammé :
    - J’ajouterais, Madeleine, que le mariage contraint les femmes à un rôle futile et asservissant. Les épouses ne doivent s’occuper que de la tenue de la maison et de l’éducation de leurs enfants, si elles ne meurent pas en couches avant, tandis que leurs maris ont le monopole du travail intellectuel et du loisir. Notre société condamne les femmes à la servitude et altère la pureté de l’amour. Quel homme peut se vanter de songer à sa compagne comme son égale ? Pire, lorsqu’il prend une amante, alors qu’il est marié, n’est-ce pas du mépris envers cette femme qui est obligée de lui consacrer sa vie entière ? Nous devrions avoir une certaine forme d’indépendance, ne plus dépendre de notre mari et même de notre père ayant dépassé un certain âge. Nous devrions avoir le droit de divorcer. Mesdames, nous devrions pouvoir être libres !

    ---


    Pourquoi Anne-Geneviève s’était-elle asservie sous le joug de la religion ? Quelles étaient les mystérieuses raisons qui l’avaient poussée dans la puissance de Dieu ? L’approche de la mort la rendait-elle plus craintive avec les choses de l’au-delà ? Gabrielle fut interrompue dans ses réflexions par la voix curieusement ironique de sa mère. Cela faisait bien longtemps qu’elle ne l’avait pas entendue utiliser ce ton bien contraire à la vocation de religieuse.
    - Oui, en effet, tu fais des merveilles dans les salons, ma fille. On vient bien souvent me voir pour me dire que tu as encore prononcé un discours véhément contre le mariage, contre ton frère Paris ou encore contre quelque courtisan à la mode à Versailles qui est immédiatement et fort curieusement entaché d’un scandale qui l’éloigne de la cour. Je ne peux que te pousser à être plus mesurée. Tu épouseras l’homme que te choisiras ta famille et tu auras des enfants quoi que tu puisses penser du mariage. Tu te dois d’être digne de tes ancêtres.
    - Mère !
    Hors d’elle, Gabrielle avait bondi sur les paroles d’Anne-Geneviève. Elle savait que celle-ci avait raison mais elle ne supportait qu’elle puisse le lui reprocher. Les reproches étaient ce que la jeune femme détestait le plus. Une once de culpabilité l’étreignait toujours et elle s’en voulait elle-même. Elle ne pouvait laisser passer ces critiques même si elle devait montrer du respect envers sa mère.
    - Mère ! Vous m’avez inculqué que je devais me montrer fière de ma condition, indépendante d’esprit et libre de mes actes comme une véritable duchesse et femme de tête.
    - Il ne faudrait pas que tu en deviennes butée et capricieuse. Tu sais que tu devrais être promise depuis longtemps et que je recule la date de cet évènement pour ne pas contrarier tes projets. Mais dès qu’un prétendant sérieux se présentera, je te conduirais à l’autel de gré ou de force. Ton pauvre père aurait tant désiré avoir des petits-enfants...


    ---


    Gabrielle venait de quitter la reine douairière Anne d’Autriche qui lui avait fait l’honneur de demander sa compagnie. Elles avaient parlé pendant quelques dizaines de minutes pendant que les demoiselles de compagnie de la vieille dame jouaient de la harpe et chantaient. A vrai dire, Anne avait plutôt monologué car elle n’avait guère posé de questions à la jeune femme et cette dernière n’était pas intervenue car elle sentait que la reine avait besoin de s’épancher. Bien sûr, rien de confidentiel n’avait été dit mais les deux femmes avaient été contentes de la rencontre. Gabrielle aurait désormais plus l’occasion de la voir car elle venait d’aménager à Versailles. Elle faisait partie de la cour et aurait bientôt une charge officielle. Paradoxalement, c’était Henri de Longueville qui en avait fait la demande à la maison du roi alors que c’était lui qui refusait de voir partir sa fille loin de Normandie. Il estimait qu’elle était prête et qu’elle devait représenter le nom des Longueville au château, devant les autres grands noms de France. En vérité, Gabrielle était ravie de cet arrangement car elle pouvait rendre service à son ami Hector de Valois en lui envoyant les nouvelles de Versailles. Elle ne savait pas encore ce que le jeune homme avait en tête mais cela promettait d’être passionnant et excitant.
    C’était grâce à son intermédiaire qu’elle avait fait la rencontre de la duchesse Marie-Louise de Chevreuse, la fille de la frondeuse qui avait été l’ennemie durant la révolte et la rivale en amour d’Anne-Geneviève de Longueville. Marie-Louise fréquentait aussi les salons, était aussi orgueilleuse que Gabrielle. Toutes deux aussi cultivées, belles et audacieuses, elles ne pouvaient pas être indifférentes l’une à l’autre. Avec des caractères si semblables, une telle similarité dans leurs goûts ou leurs choix, elles ne pouvaient qu’être les meilleures amies ou les pires ennemies. Gabrielle était persuadée qu’elle la détestait mais par affection envers Hector, elle la supportait. Mieux, elle trouvait des avantages à sa présence car elle avait enfin une rivale à sa hauteur à la cour où elle n’avait pour le moment rencontré que des êtres pâles et insignifiants. Mais cette prise de conscience n’empêchait pas les crises de jalousie et d’ego qui résultaient de leurs rencontres.
    Gabrielle repensa à l’annonce que venait de lui faire la reine mère. Elle allait prochainement devenir dame de compagnie d’une dame tout juste mariée qui avait passé son enfance en compagnie de la famille royale. Une certaine Montespan, née Rochechouart Mortemart, une grande et vieille famille française. D’abord vexée de devoir servir une femme qui n’avait pas de titre plus haut qu’elle (une simple marquise…), la jeune femme s’était ensuite imaginé qu’elle allait avoir affaire avec une dame pieuse et conformiste, prête à tout pour servir Ses Majestés. Mais elle voyait désormais les avantages de cette condition. Elle pourrait rester au courant de tout ce qui se passait à la cour car la marquise de Montespan serait certainement une personne très en vue du fait de son amitié avec le duc d’Orléans. Avec de la chance, elle connaîtrait toutes les rumeurs et les affaires des courtisans. Quelle place pouvait être mieux que celle-ci pour servir les intérêts de son frère d’adoption ? Certainement pas dame de compagnie de la reine, celle-ci était décidemment trop passive pour être intéressante.
    - Mademoiselle de Longueville ?
    La voix l’interrompit dans ses réflexions. Elle porta un regard méprisant sur le domestique qui avait osé l’interpeller au mépris des convenances et répondit par l’affirmative.
    - Voici un pli urgent qui vous est destiné.
    Il lui remit la lettre qui portait le sceau de la famille Longueville. Brusquement inquiète, elle la décacheta et la lut très rapidement. Elle était très courte et pour cause. Anéantie, Gabrielle ferma les yeux, sentit des larmes se former derrière ses paupières mais se jura de ne pas les laisser passer. Son bras se plia et ses doigts se desserrèrent, laissant tomber à terre la lettre sur laquelle étaient écrites les lignes suivantes :
    « Ma sœur Gabrielle,
    Veuillez me pardonner la brièveté de cette lettre. Je suis moi-même trop bouleversé pour vous exprimer plus. Je vous adresse ces quelques mots pour vous annoncer que Père est tombé gravement malade et que Dieu l’a rappelé à lui la nuit dernière. Monsieur de Longueville crachait du sang et le médecin a diagnostiqué une fluxion de poitrine. Dès lors, il était impossible de le sauver. Madame notre mère l’a veillé pendant des heures et je l’ai relayé régulièrement. Sachez que sa dernière pensée a été pour vous. Il m’a fait promettre de vous dire ceci : vous vous devez de préserver l’honneur de la famille et de vous montrer digne d’elle. Soyez persuadée de son affection sincère et de son amour. Son seul regret est de ne pas avoir connu ses petits-enfants.
    Madame notre mère s’est réfugiée à l’abbaye de Port-Royal. Vous le savez, elle a promis de prendre le voile à la mort du duc. Cela ne devrait donc pas tarder. Notre père a pensé à accorder une pension à monsieur de Valois qu’il a toujours beaucoup aimé. Quant à ses enfants, il a pris les dispositions suivantes : notre frère rentrera dans l’Eglise, vous aurez une dot de plusieurs milliers de livres et recevrez le comté de Dunois en apanage, j’hériterais quant à moi du nom de Longueville et du duché.
    Nous sommes tous effondrés de chagrin et nous savons que vous partagez nos sentiments,
    Votre frère affectionné,
    Charles-Paris d’Orléans-Longueville. »

    ---


    - Je vous obéirais, Mère. J’irais à l’autel avec joie avec l’homme que vous m’aurez choisi.
    Gabrielle courba la nuque devant sa mère. Elle n’avait pas totalement menti. Elle se plierait à la volonté d’Anne-Geneviève. Elle n’avait pas le choix. En revanche, elle ne pensait pas se marier avec joie. Comment pourrait-elle se réjouir de devenir la propriété d’un homme ? D’être contrainte de passer sa vie associée à un homme qu’elle ne désirerait même pas ?
    Anne-Geneviève balaya cette affirmation de bons sentiments d’un revers de main et continua d’une voix sèche sur un tout autre sujet :
    - J’ai appris que des rumeurs de complot circulaient à Versailles. Ma fille, je ne peux que te conseiller de te trouver à l’écart de ce complot s’il est réel. J’ai fait beaucoup d’erreurs dans ma jeunesse et je sais désormais qu’il faut respecter la loi du roi, qui est l’incarnation de la volonté divine.
    Gabrielle se demanda jusqu’où irait la remise en question de la religieuse. Ainsi, elle reniait même la Fronde…


    ---


    La nuit était tombée sur Paris. Les ruelles sombres grouillaient de rats et de personnes qu’il valait mieux, pour préserver sa vie, éviter de croiser. Le lieutenant général de police avait émis l’idée de placer des réverbères le long des rues pour faire de la capitale une ville lumière. En cet instant, Gabrielle ne pouvait que lui donner raison et regretter qu’il ne fût pas plus entendu. Soulevant sa vieille robe, elle avançait à pas lents, derrière Marie-Louise de Chevreuse qui ouvrait le passage. Celle-ci lui avait promis de connaître un raccourci pour atteindre leur destination mais pour l’instant, la duchesse ne voyait guère où Marie-Louise s’apprêtait à les mener. Elle espérait juste que la jeune femme blonde savait où elle allait. Une vague d’excitation monta en elle. Se déplacer en pleine nuit dans Paris sans chaperon ni serviteurs avait la douce saveur de l’aventure. D’autant plus que cela était fait dans le but poursuivi par leur complot. Lorsque Hector de Valois lui avait proposé de le soutenir dans son projet de renverser le roi et de prendre le trône, Gabrielle, lui faisant confiance, avait répondu par l’affirmative immédiatement. Déjà convaincue de la mauvaise gestion des affaires par le roi Louis qui ne cessait de vouloir écarter la noblesse pour gouverner seul et arbitrairement, elle s’était donnée de tout cœur à la cause et profitait de sa position pour s’attirer les sympathies de la noblesse européenne avec laquelle elle correspondait. De plus, Athénaïs de Montespan était une maîtresse parfaite. Loin d’être une vieille harpie pieuse et ennuyeuse, elle s’était révélée plus ambitieuse et plus machiavélique que Gabrielle elle-même. Par elle, la jeune duchesse savait tout de la cour. La marquise voulait gagner le cœur du roi afin de devenir favorite et d’obtenir les privilèges que cela signifiait. Grand bien lui fasse ! Gabrielle serait ravie de l’aider à détacher du roi la favorite en titre. Elle savait que cela briserait le cœur du pauvre et jeune Louis. Cela ne ferait que servir ses intérêts.
    La jeune duchesse de Longueville possédait également son propre réseau de serviteurs et de domestiques qui espionnaient en douce et faisaient passer ses messages. La dernière qu’elle avait employée était Mathilde Even. Une actrice brune extrêmement douée qu’elle avait vue lors de la première de la représentation de Dom Juan, une pièce de Molière. Elle avait d’ailleurs apprécié Dom Juan dont le soupçon d’immoralité l’avait séduite. Done Elvire qui pleurait des larmes de crocodiles était une personne parfaite et bien placée pour lui dire ce qui se passait en coulisse. Une promesse d’argent et d’ascension sociale et cette Mathilde était prête à tout pour servir mademoiselle de Longueville. En effet, les âmes noires se cachaient aussi bien derrière des masques de nobles que de pauvres.
    Gabrielle lui commandait parfois des commissions mais cette journée-là, elle était allée elle-même chercher le paquet de Madame de Montespan chez une vieille suspecte. « La fiole pour la grande dame », avait souri cette dernière dévoilant sa dentition incomplète. La jeune femme savait que Montespan la remercierait grassement d’autant que sa dame de compagnie fermait les yeux sur ses activités louches comme ses achats sur Paris ou ses messages à ses amants. En réalité, Gabrielle observait tout, écoutait tout mais se taisait. Ces informations étaient toujours très intéressantes et passionnerait une personne : Hector de Valois. C’était lui qui mettait Marie-Louise et Gabrielle en duo pour leurs missions. Elles étaient donc complices dans le complot mais se détestaient toujours autant au grand plaisir des médisantes. Leurs relations étaient toujours très tendues. Mais quand ils fallaient agir, leurs ressemblances leur servaient. Elles se comprenaient d’un mot ou d’un geste.
    - Nous sommes arrivées, chuchota Marie-Louise en jetant un coup d’œil à sa compagne.
    Une bouche béante s’ouvrait devant elles. Un frisson parcourut la demoiselle de Longueville. Elles allaient s’enfoncer dans les catacombes pour retrouver Hector ! Elle songea un instant aux messes noires dont elle avait entendu parler et dont l’idée la répugnait mais elle pensait sincèrement qu’Hector n’était pas ainsi.
    - Après vous, murmura Marie-Louise l’œil pétillant comme si elle s’apprêtait à faire une mauvaise plaisanterie.
    Gabrielle haussa un sourcil mais s’enfonça dans hésiter dans les catacombes.

    ---


    - Vous me connaissez, je ne ferais jamais cela…
    - Justement, je te connais.
    Gabrielle se tu. Elle avait la furieuse envie de partir. Elle n’avait plus rien à faire avec sa mère. Elle ne tenait à avoir un censeur moral. Venir la voir tous les mois était déjà une corvée désagréable.
    - Mère, je me dois de partir si je veux quitter Paris avant le couvre feu et la fermeture des portes.
    Anne-Geneviève acquiesça et se leva.
    - Il faut justement que j’aille réciter mes prières. Ma fille, sois juste envers tes amis et envers notre famille. Je te charge de remettre mon bonjour à mon frère de Condé.
    Gabrielle s’inclina et quitta la pièce en promettant de revenir prochainement. Sa mère hocha la tête gravement et prit la petite bougie pour retourner dans sa cellule.



Dernière édition par Gabrielle de Longueville le 26.05.09 20:08, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime24.05.09 12:04

Bonjour ! Very Happy

As-tu terminé ? Si c'est pas le cas il doit pas te rester grand chose à ajouter, je pense. ^^

Très prenante histoire, je crois que la validation pour toi ne sera qu'une formalité ! Wink
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime24.05.09 22:37


    ---


    Ce qu’elle faisait était-il juste ? Gabrielle l’ignorait mais n’avait pas l’intention de se poser la question. Elle avait largement eu le temps d’exprimer ses opinions et ses arguments en écrivant à son correspondant anglais, favori du roi Charles d’Angleterre, le duc de Norfolk. Thomas était devenu plus qu’un correspondant, un véritable ami. Elle n’hésitait pas à lui dire tout ce qu’elle pensait car elle savait qu’il ne la trahirait pas. Au début de leurs échanges de missives, elle était méfiante et craignait de devoir envoyer des lettres à un vieux duc ennuyeux qui ne savait que faire de sa vie sinon écrire pour décrire sa petite existence méprisable. Mais Thomas n’était pas ainsi. Il était intelligent et cultivé et ils pouvaient discuter de tout sans censure. Ses lettres étaient devenu une drogue pour Gabrielle, une véritable addiction. Elle les attendait avec impatience et d’autant plus qu’il partageait ses convictions. Il venait d’arriver en France et les deux jeunes gens s’étaient plusieurs fois croisés mais sans prendre réellement le temps de discuter en tête à tête. Mais Gabrielle comptait bien y remédier le plus rapidement possible.
    Le bal masqué battait son plein. La jeune duchesse salua Thomas qu’elle croisait. Le jeune homme emmenait une jeune fille sur la piste de danse et n’avait pas le temps de s’arrêter. Mais il lui fit promettre de lui réserver une danse. Gabrielle songea avec plaisir qu’ils pourraient encore discuter de l’idéal politique. Comme il était agréable de sentir qu’il se comportait avec elle tel que si elle avait été un homme !
    Ses yeux verts accrochèrent un regard perçant. Son cœur bondit. Ainsi, il était là. Lui. L’homme auquel elle pensait chaque jour et qui ne quittait pas ses pensées. Elle désirait plus que tout le sentir près d’elle. Elle ne devrait pas, elle le savait. Guillaume du Perche n’était qu’une proie. Un message d’Hector qui lui avait été transmis par Marie-Louise lui disant qu’elle devait surveiller le jeune homme car il était sans doute aucun un agent de Sa Majesté. Il devait donc être surveillé. Il était un homme à femme. En conséquence, elle devait le séduire pour lui soutirer des informations. Mais au fur et à mesure de leur jeu du chat et de la souris, elle sentait qu’elle-même était prise dans ses filets. Au début, elle pensait qu’elle tenait juste à sa mission mais maintenant, elle était consciente que ce n’était pas cela. Elle le voulait.
    Il s’approcha d’elle, baisa sa main et s’éloigna mystérieusement dans le couloir, hors du salon où se trouvait la fête. Quelques instants plus tard, Gabrielle sortit à son tour. Il faisait très noir et, derrière son loup, elle ne distinguait rien. Mais tout à coup, elle sentit l’odeur de son parfum, sa peau chaude contre la sienne et Guillaume la colla contre le mur. Son souffle devint court. Elle ne voulait sentir ses mains contre ses hanches, ses lèvres contre son cou. Elle voulait passer ses paumes dans ses cheveux. Il frôla ses lèvres contre celles de Gabrielle puis s’éloigna. Le charme fut rompu. La jeune femme ouvrit les yeux et le vit partir avec un mince sourire alors qu’un groupe de jeunes femmes passaient devant elle en babillant. Mon dieu, que lui arrivait-il donc ? Se pouvait-il qu’il s’agisse… ?

    ---


    Gabrielle de Longueville sortit du couvent, leva les yeux et constata que la pluie avait cessé. Aidée par son domestique, elle posa le pied sur le marchepied du carrosse et grimpa d’un bond dans la voiture. L’épreuve était terminée. Elle s’autorisa à fermer les yeux quelques secondes.
    - Où désirez-vous aller, mademoiselle ?
    Elle rouvrit les paupières. Où se rendre ? L’hôtel particulier de Paris où elle pourrait accueillir des amies et se rendre aux salons des Précieuses ? Son appartement à Versailles où l’attendaient des missions trépidantes, des secrets à découvrir et des complots à fomenter ?
    - Messieurs, nous allons à Versailles.





C'est enfin terminé. Je suis absolument désolée de mon retard ><, j'ai un fois de plus été particulièrement ambitieuse et du coup, c'est trois fois trop long. Désolée d'avance pour les passages ennuyeux et les fautes d'orthographes et pour la nullité de certains passages en particulier la fin car je me suis pas mal dépéchée (et je suis une éternelle insatisfaite, donc...).
Mais bon c'est terminé !! cheers
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Philippe d'Orléans


Philippe d'Orléans

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Côté Coeur: Il a été brisé, piétiné et maintenant celui qui était à mes côtés est devenu mon ennemi. Quelle cruelle destinée !
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime30.05.09 18:40

Si toutes les fiches pouvaient être aussi mauvaises, le monde serait parfait Razz Evidemment qu'on te valide, c'est absolument génial comme fiche ^^
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MessageSujet: Re: {Gabrielle de Longueville ~ Terminé   {Gabrielle de Longueville ~ Terminé Icon_minitime

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