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 Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers

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MessageSujet: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime27.02.12 18:46





Arthur


de ROBERVAL




(CHRISTIAN BALE)


Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Tumblr12

« Je suis un vieux loup de mers, j'ai appris à naviguer en eau trouble »

    ► Né le 13 août 1628, Arthur a 38 ans.
    ► Baron de Roberval par la grâce du roi, corsaire au service de Sa Majesté Louis XIV, capitaine de L'Orientale.
    ► Issu de la toute petite noblesse bretonne, il a quelques ancêtres irlandais par sa mère.
    ► Célibataire, il tient trop à sa liberté.
    ► Son père, protestant converti avant sa naissance par un missionnaire catholique, l'a élevé dans la stricte orthodoxie romaine. Mais sur les navires, il est bien connu qu'on trouve beaucoup de gens de mauvaise vie pour lesquels la foi est quelque chose de personnel ou qui sont des incroyants notoires. Arthur ne fait pas exception à la règle, il est croyant mais n'est guère démonstratif.
    ► Hétérosexuel.



♕ PROTOCOLE ♕
VERSAILLES : PARADIS OU ENFER ?

A sa première venue à Versailles, Roberval a eu l'impression d'être un animal exotique que tous voulaient voir et à qui tous voulaient parler. Il faut dire qu'il est arrivé avec des caisses remplies d'or et des trésors venus d'Amérique en présent pour le roi. Sa première vision du château, c'est donc une foule de courtisans excités, aux yeux ronds, qui le suivaient partout. Aujourd'hui, il a toujours la sensation d'être un peu décalé dans cet univers qu'il ne connaissait pas et dont il ne maîtrise guère tous les codes. Si le château est une splendeur, il ne contient qu'une foule de gens qui s'ennuient terriblement et qui, pour animer leurs journées, travaillent leur langue de vipères et leur méchanceté. Bien des courtisans sont insipides et inintéressants mais hélas, Arthur ne peut les fuir, ils viennent tous le voir pour entendre conter ses merveilleuses aventures si bien que le corsaire en rajoute parfois, rien que pour entendre les « oh » de stupéfaction qui lui arrachent des sourires moqueurs. Être en permanence observé, être contraint de rester dans un même lieu, devoir se plier aux règles strictes de l'étiquette, voilà qui a de quoi étouffer Arthur qui regrette la liberté que lui accorde l'océan. A priori, Versailles a tout lieu de l'enfer pour lui. Mais il doit bien avouer qu'il existe quelques plaisirs dans ce château ce qui rend son séjour plutôt agréable. Et lorsqu'il ne peut en supporter davantage, il s'enfuit à bride abattue loin de cette cour pour respirer l'air pur de la campagne d’Île-de-France. Pour le moment, il reste car il est au service de Sa Majesté et attend donc qu'elle lui confie une nouvelle expédition, sans compter qu'il a une vengeance à accomplir. Mais ça ne pourra pas durer trop longtemps !

COMPLOT : VÉRITÉ OU FANTASME PUR ?

Roberval ignore totalement l'existence ou non d'un complot contre le roi de France mais à plus de trente-huit ans, il n'est pas naïf et sait bien que ces nobles de cour ne savent se contenter de qu'ils ont. Au besoin, le roi sait qu'il peut compter sur son corsaire car la fidélité est une chose qui ne se monnaye pas et Arthur a été élevé en parfait gentilhomme. S'il n'est pas bien doué pour récolter des informations, il peut se battre et maîtrise l'art de l'épée à la perfection, il a eu le temps de s'entraîner pendant plus de vingt ans sur les mers, au cours des prises des bateaux ennemis ! D'ailleurs, il l'ignore mais il aide précieusement un espion de Sa Majesté, le prince de la Palissade, en lui apprenant à se défendre.
Pour Arthur, de toute façon, la vraie menace vient de ces puissances étrangères qui ont toujours lorgné sur le royaume et qui contreviennent aux intérêts français dans ses colonies et sur les mers. Voir ceux qu'il a combattu sur les mers, ces ennemis de la France, se pavaner à la cour est toujours désagréable. Alors il garde un œil sur ces traîtres en puissance qui font des ronds de jambe mais n'ont jamais hésité à faire tirer les canons contre un navire arborant les armes du roi Louis XIV.

COLOMBE OU VIPÈRE ?
Arthur de Roberval ne se définirait pas comme une colombe ou comme une vipère. Certes il apprécie d'être mis au courant des rumeurs surtout si elles concernent ses nombreux ennemis mais il déteste tous ces serpents frivoles qui ne savent s'occuper autrement qu'à mordre et à rire des autres. Ne connaissant pas tous les usages de la cour, il en a parfois fait les frais mais sa réputation de loup des mers et de capitaine émérite circule assez dans le château pour que le venin ne puisse l'atteindre. Et pour tout dire, il n'a que faire de ce qu'on pense de lui. Il a toujours agi pour son roi et selon son honneur, personne ne peut lui enlever ça. De plus, il sait se montrer ironique et cynique à souhait, ses petites phrases assassines arrachent souvent des sourires aux courtisans les plus rompus qui ne dédaignent pas de venir écouter ses mésaventures mais elles ne touchent que ceux qui le méritent comme ce fat espagnol, Palma ou cette famille de traîtres, les Bar. Lui aussi peut pourchasser ses proies.

DES LOISIRS, DES ENVIES A CONFIER ?

* Les bateaux, la guerre de course et les océans : Sans aucun doute, les plus amours de sa vie. Naviguer est ce qui lui manque le plus lorsqu'il se retrouve à Versailles car pendant plus de vingt ans, il n'a vécu que sur les ponts en bois de ses navires, Le Téméraire puis L'Orientale. Il ne peut rester longtemps en place, il doit voyager, découvrir de nouveaux pays toujours plus exotiques, prendre en chasse les galions espagnols, les filous anglais et les bateaux pirates. C'est sa raison de vivre, la seule chose qu'il sait vraiment faire.
* L'épée et les batailles : Si Arthur n'a jamais été véritablement formé à l'épée dans son enfance puisqu'il était destiné à être moine, il s'est toujours entraîné en compagnie du fils d'un grand seigneur de la région. Et lorsqu'il est arrivé sur son bateau, il n'eut guère le choix, apprit sur le tas comme le reste de ses camarades. Sauf que le bougre était doué et avait soif d'apprendre ce que le capitaine du navire eût tôt fait de remarquer. Jan Baert choisit de le faire travailler sans relâche si bien qu'aujourd'hui, après plus de vingt ans d'expérience d'abordage, Arthur est une fine lame qui n'a encore jamais vraiment trouvé son égal. Capable de se battre dans toutes les circonstances, il n'aime pas spécialement les batailles et le sang mais surtout cette traque du bateau ennemi, décider du moment opportun pour aborder, sentir l'indécision du combat au moment critique puis parvenir à désarmer son ennemi. Une sensation de fierté qu'il n'a encore jamais ressentie ailleurs qu'en mer.
* Les échecs et les jeux de carte : Il faut bien s'occuper sur un bateau lorsque la mer est calme et qu'il n'y nul navire à l'horizon. Arthur a donc appris à jouer aux échecs, sur un jeu qu'il a dérobé à un capitaine espagnol dans sa jeunesse. Il aime élaborer des stratégies, essayer de faire tomber son adversaire dans ses pièges. Les échecs sont donc un jeu qui lui correspond tout à fait. Quant aux jeux de cartes, c'est surtout lorsqu'il se mêle à ses hommes. Ce n'est pas tant les jeux eux-mêmes qu'il apprécie que la bonne humeur et l'ambiance qui règne aux tables.
* Le rhum : C'est son péché mignon. Arthur a toujours prêté grande attention à l'alcool car il ne tient pas à finir comme aux capitaines qui boivent comme des barriques et qui sont incapables de tenir leur épée tant ils tremblent. Mais jamais il ne peut refuser un verre de bon rhum. Il a l'alcool joyeux et il n'est pas rare de le voir entonner des chansons paillardes sur le pont de son navire en compagnie de ses marins après une victoire conséquente.
* La danse et la chasse : Qui aurait pu croire que deux des loisirs les plus emblématiques de la cour allaient plaire à notre corsaire ? Et bien contre toute attente, après quelques leçons, Arthur s'est révélé être un excellent danseur car il est souple et a une excellente mémoire ce qui lui permet d'enchaîner les pas sans se fatiguer. Il faut dire que la danse se fait généralement en bonne compagnie ce à quoi il ne peut résister. Quant à la chasse, cela lui permet d'échapper quelques instants à la cour. Il aime faire galoper son cheval dans les bois et les taillis, les proies n'étant que des prétextes.
* Le jeu de la séduction : Arthur est loin d'être un coureur de jupons mais il aime les jolies femmes même s'il se contente généralement de les regarder de loin. Il sait être charmeur, mettre en avant ses atouts bien qu'il soit plutôt maladroit et qu'il ne sache pas bien les codes de la séduction à Versailles. On ne peut badiner avec une princesse luxembourgeoise comme avec une prostituée des Antilles ! Généralement, il ne cherche pas à les mettre dans son lit, un simple marivaudage lui suffit pour l'amuser mais en ce moment-même, il sent bien qu'il attire Elsa et elle est l'une des seules femmes qu'il aimerait vraiment posséder. A lui d'agir d'autant qu'il a de la concurrence et pas n'importe laquelle !

♕ HOP, RÉVÉRENCE ! ♕
► Héhé. Tout le monde doit savoir maintenant, je l'ai raconté à tout le monde ^^.
► La vingtaine maintenant.
► Je ne peux plus m'en passer désormais Rolling Eyes
Cpde bon (by Steph)
► Bonne question !
► /



Dernière édition par Arthur de Roberval le 05.03.12 21:58, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime29.02.12 12:45

Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Nhzdqj10
Ψ PROLOGUE Ψ

_________________________________________________




Arthur de Roberval prit une profonde inspiration. Il avait oublié à quel point l'air était mêlé de sel et d'embruns dans le domaine paternel. Du plus profond de son être, il ressentait l'appel du large, à tel point que s'en devenait douloureux. Il s'appuya sur le muret à côté de lui et ferma les yeux quelques instants. Les rouleaux de vagues se jetaient contre les rochers en produisant toujours ce bruit digne du tonnerre. Jamais la houle ne se calmait, jamais le silence n'était complet. Quand il était enfant et qu'il partageait son lit avec ses trois frères et sa sœur, il se forçait à rester éveillé le plus longtemps possible jusqu'à ce qu'il n'entende plus que des souffles légers autour de lui, lui confirmant que les autres s'étaient endormis. Il pensait que peut-être la mer cessait son bruissement pendant la nuit, après tout elle aussi avait besoin de se reposer. Mais non, le murmure était continuel. Et Arthur avait l'impression que la mer s'adressait à lui en ces moments-là puisqu'il était le seul à l'écouter. Qu'elle lui chuchotait de venir la rejoindre.

Il rouvrit les yeux pour voir les éclaboussures blanches qui se formaient au pied du piton rocheux sur lequel il s'était tant de fois rendu dans ses jeunes années. Il aimait regarder l'infini horizon qui s'ouvrait à ses pieds, sentir le vent venu de l'ouest lui caresser le visage, humer cet air venu d'endroits inconnus que personne ne connaissait autour de lui. Arthur ébaucha un sourire à ce souvenir puis détourna le regard : qui aurait pu croire que tant d'images remonteraient ainsi à son esprit par le simple fait de retourner sur les lieux où il avait passé les quinze premières années de son existence ? Il croyait avoir oublié l'enfant qu'il avait été. Il en avait vécu des choses depuis le temps où le paysage qui s'offrait à sa vue se limitait à une campagne désertique, seulement parsemée de quelques chaumières aux cheminées fumantes, à une forteresse médiévale en ruine, à une chapelle et à l'océan sans limite !

- C'est le château dans lequel vous avez grandi ?

Arthur reprit conscience de la présence du jeune garçon auprès de lui. C'était un jeune moussaillon de son équipage qui l'accompagnait partout pour l'aider dans ses tâches quotidiennes. Le baron de Roberval appréciait sa vivacité et son esprit. Il avait pris sous son aile cet orphelin pour le former à la navigation et pour le moment, il ne lui avait donné que satisfaction. Il éprouvait du plaisir à avoir quelqu'un auprès de lui qui avait vécu les mêmes aventures que lui, au moins ces derniers mois. Chassant ces pensées, il s'obligea à contempler le vieux château médiéval qui leur faisait face. Le mur d'enceinte de la façade était encore à terre, les pierres avaient été recouvertes par une herbe folle que personne ne s'acharnait plus à tailler. C'était saugrenu de voir ces grandes pierres de taille brisées, à moitié enfoncées dans la boue, comme des dolmens qui ne seraient pas parvenus à se dresser convenablement. Mais Arthur les avait toujours connues ainsi, à cet emplacement. Son père n'avait jamais pris la peine de faire raser ces vestiges des guerres de la Ligue pendant lesquelles son propre père, le sire de Roberval, resté protestant et royaliste, avait trouvé la mort lors du siège de la forteresse. En revanche, le donjon principal avait mal vieilli et paraissait très délabré. Des fenêtres s'étaient brisées et grinçaient sur leurs gonds, donnant un air assez sinistre à l'ensemble.

- C'est ici, en effet. Ce n'était guère plus joyeux à l'époque, ma famille n'a jamais eu beaucoup de revenus pour entretenir les lieux.

Et encore, son frère aîné Jean avait dû mourir dans la misère. Le nombre de paysans s'était encore amenuisé depuis son enfance. Roberval était un domaine petit, sans intérêt, encastré entre la vaste seigneurie du Pont, celle de Kergoz, l'océan et la ville de Tréoultré.

- Mais votre famille a une magnifique chapelle, s'exclama le jeune garçon.
- Construite et dédiée à saint Trémeur l'année de la naissance du premier fils de mes parents, Alain. Alain a aussi été le premier à en rejoindre le cimetière.

Le petit enclos sacré s'était lui considérablement agrandi. Même de là où il était, Arthur pouvait distinguer l'énorme pierre tombale sous laquelle reposait sa mère et sans doute aussi son père depuis sa disparition. Les alignements étaient encore récents, les pierres blanches, les inscriptions lisibles. La famille Le Quilvinec était bien présente là, alignée sous cette succession de croix. Trente-cinq ans auparavant, Arthur écoutait leurs respirations sifflantes dans la calme d'une nuit bretonne.

- Viens, moussaillon. Je ne tiens pas plus à m'attarder ici. Remplissons nos devoirs et partons.
- Étonnant parcours pour un enfant de petite noblesse que d'abandonner sa famille et sa terre pour aller courir les océans, observa le jeune garçon, en trottinant derrière lui.
Les yeux bleus de l'ancien croisèrent ceux verts de son petit protégé :
- Et encore, moussaillon, tu n'as même pas idée.




Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Coast10
Ψ LA LIBERTÉ ?

ELLE SE SAISIT...

_________________________________________________




Ma première sensation, c'est celle de l'étouffement. Je suis comme un animal en cage, que l'on prive de ses mouvements, obligé de rester cloîtré dans une pièce noire seulement éclairée par des chandelles presque entièrement consumées. Dehors le ciel est d'un bleu éclatant, les roulis au loin m'invitent à les rejoindre. Mais je ne le peux pas. Puis tout devient noir car la vieille servante est parvenue à se lever du lit où ma sœur Anne, en sueur, gémit pour clopiner jusqu'à la fenêtre, fermer les épais rideaux poussiéreux. L'air est lourd, l'atmosphère suinte d'humidité et de miasmes. Là est mon plus vieux souvenir. Je sais que je me débats dans les bras de ma mère. Elle a déjà les yeux vitreux de la morte qu'elle sera dans peu de temps. Et moi, je ne veux pas rester dans l'étreinte de la Faucheuse, je veux courir dans les herbes folles, distancer les plaintes de mes frères et sœurs pour aller jusqu'au sommet du piton rocheux être balancé par les vents. Je veux pouvoir m'enfuir avec des romans de chevalerie et d'aventure que j'ai volé à mon frère aîné Jean pour me terrer dans l'un des recoins de notre seigneurie, respirer le doux parfum de la liberté. Au lieu de cela, je hurle, je me libère de la poigne de ma mère et je cours contre la porte pour cogner, cogner jusqu'à ce que j'en ai mal aux paumes.
Si c'est un rêve ? Je l'ignore, en vérité. Sans doute, mon esprit exagère-t-il l'horreur de ces journées que nous avons tous passés dans le donjon familial, proies faciles pour la maladie mais l'on croyait alors qu'en nous enfermant dans notre forteresse, la peste ne franchirait pas ces remparts et reculerait pour retourner s'attaquer aux gueux. L'épidémie était déjà parmi nous mais nous restions dans cette prison à étouffer et à mourir. Quand nous nous en sommes aperçus, il était trop tard. Anne avait été la première à partir. Comme mon père avait décidé de séparer les malades de ceux qui semblaient bien portants, je n'ai pu dire au revoir à ma propre mère qui succomba quelques jours plus tard, me laissant à jamais l'image de cette possédée aux yeux fixes qui voulait me priver de ma liberté et m'emporter avec elle. Puis la peste est repartie en riant, aussi brutalement qu'elle était arrivée, ne laissant derrière elle que costumes noirs et linceuls blancs. J'ai compris que la mort avait beaucoup d'ironie lorsque nous sommes allés enterrer ceux qui étaient morts terrés dans une prison dans le cimetière de la chapelle pour les laisser reposer sous les nuages blancs, dans l'air vif venu du large. Et dès que j'ai été en âge de comprendre, je me suis juré de ne jamais mourir de cette façon-là. J'irai au jugement de Notre Seigneur avec dignité, épée à la main et mon dernier souffle ne s'exhalera pas dans la puanteur d'une chambre lourdement tapissée mais dans le vent de la liberté.

- Prenez garde, je ne ferais montre d'aucune pitié à votre égard !
- Ce n'est point avec ce mauvais coup que vous m'aurez ! Et je frappe d'estoc, qu'en dites-vous à présent ?
- Vil espagnol, vous avez failli m'embrocher !
Je jetai mon arme en bois à terre, en fronçant brusquement les sourcils et en me mettant à taper du pied. Le garçon brun de mon âge contre lequel je faisais mine de ferrailler, Armand de Vignerot, dévia son coup au dernier moment et laissa échapper un éclat de rire devant mes bras croisés et ma mine courroucée.
- Vous ne jouez plus, Arthur ?
- Pourquoi serais-je une fois de plus un méchant espagnol ? Moi aussi, je veux me battre pour notre bon roi. Après tout, quand je serai grand, je vous accompagnerai à la guerre et nous vaincrons les Espagnols dans le sud et les Impériaux dans l'est. Et lorsque le roi Louis aura remarqué votre courage, il vous nommera à la tête de ses armées et moi, je serai votre bras droit.
- Apprends déjà qu'un Roberval ne lâche jamais son arme au beau milieu d'un combat.
Je me retournai, excédé. C'était François qui me regardait d'un air moqueur, appuyé sur un muret qui délimitait un jardin dans lequel nos serviteurs cultivaient quelques légumes. Il venait de prononcer ses vœux et de recevoir la tonsure et s'était revêtu d'une robe de clerc. Il aurait pu passer pour le parfait curaillon s'il n'avait pas le nez rouge d'avoir passé trop de temps dans la taverne de Tréoultré. J'appris plus tard qu'il se disait à l'époque que mon frère rentrait plus souvent dans un bordel que dans une église. Je n'aimais guère ses plaisanteries cruelles à mon égard et son ton condescendant mais avec le recul, je me dis que je peux le comprendre. Lui non plus n'avait pas choisi la destinée que notre père lui avait imposé et il profitait des avantages de sa position d'aîné.
- Comment pouvez-vous me donner des conseils ? Vous n'avez jamais appris le métier des armes.
- Grâce soit rendue au Seigneur, répliqua François en levant les yeux au ciel, je sais tenir une épée. Fais donc à un peu honneur à ton nom, petit frère, ramasse ton arme et défie donc ton seigneur tant que tu le peux encore.
Ces paroles étaient à double sens, je le compris quelques années après lorsque l'on m'apprit que je n'irai jamais combattre au nom du roi, que ma vie avait été tracée depuis longtemps. Je pensais pourtant pouvoir servir mon nom de Roberval à ma manière. Ah, l'honneur ! Nous n'avions bien que cela dans notre famille désargentée qui vivotait sur un coin de terre de Bretagne. Et c'est tout ce qui te reste quand tu ne possèdes plus rien. L'honneur et l'amitié. J'ignorais dans mon jeune âge à quel point cela me serait utile dans ma vie future.

- Dépêche-toi Arthur ! L'oncle Jean vient d'arriver !
L'appel de ma sœur déchira le silence pesant de la chapelle Saint-Trémeur où je m'étais réfugié pour échapper à la chaleur. Je m'y rendais souvent non pour prier mais pour échapper à la chaleur et aux remontrances de mon père qui maniait plus facilement le bâton contre ses enfants que l'épée contre ses ennemis. J'observais les splendides couleurs qui paressaient dans le chœur grâce aux petits carreaux bleus, jaunes, verts et rouges qui formaient les vitraux. Il n'y avait bien que l'azur de la mer qui était aussi vif. Et puis quand l'ennui était trop fort, j'ouvrais mon exemplaire de la geste du roi Arthur qui avait appartenu à mon père dans sa jeunesse. Je savais que c'était lui qui avait choisi de me prénommer comme le roi de la Table ronde mais il me paraissait si déplacé qu'un tel homme violent et cruel puisse lire et éprouver assez d'affection pour des personnages de papier que j'avais réussi à chiper l'ouvrage pour chercher à comprendre. A cette époque, j'éprouvais encore une sincère affection pour lui, je recherchais son affection. Et je me disais qu'ainsi, je pourrais mieux saisir qui était mon père pour mieux lui ressembler. Je suppose que pour chaque enfant, son père est un invincible soldat sans reproche. La déception est d'autant plus grande lorsque l'on finit par constater qu'il n'en est rien, que votre père est un être méprisable et qu'il aurait suffi que vous ouvriez les yeux pour vous en rendre compte. En attendant, j'adorais les aventures des chevaliers du roi Arthur. Moi aussi, je rêvais de quêtes, de demoiselles en détresse, de batailles héroïques, de lutte contre les soldats du démon. Un jour, me répétais-je, un jour, j'irais sur les routes pour combattre à mon tour et me couvrir de gloire.
Je refermai mon livre pour rejoindre ma sœur Hélène qui m'attendait à la porte de la chapelle. C'était ma sœur préférée. Elle n'était plus jeune que d'une année environ et nous partagions notre lit et beaucoup de nos jeux. Elle avait de grands yeux marrons qui lui donnaient perpétuellement l'air étonné mais un sourire malicieux qui faisait tout son charme. Elle me saisit la main, pleine d'autorité puis me fit courir pour parvenir jusqu'au château. Nous recevions peu de visites sinon de nos voisins les Kergoz, les Vignerot, seigneurs du Pont ou des Rieux-d'Assérac qui avaient accordé une cure à François. Alors l'arrivée de mon oncle armateur qui habitait si loin, à Brest, avait tout lieu d'un événement. Il rapportait toujours avec lui de fabuleux cadeaux venus des pays lointains. Ce jour-là, il nous accueillit en nous soulevant tour à tour en nous adressant des compliments de son ton bourru. J'étais fasciné par son teint buriné, ses traits taillés par le vent qui poussait son bateau jusqu'en Amérique. Il me rapportait une petite boussole dont l'aiguille tournait follement avant de stabiliser. Je promis d'en prendre soin.
- Alors, mon petit Arthur, n'as-tu point envie d'entendre par tous les lieux où je suis passé ?
Et il entreprit de tout me conter, ses fabuleuses aventures sur les mers, sa rencontre avec de féroces pirates, la manière dont il avait échappé à un navire espagnol, dont il avait sauvé une princesse indienne des mains des Anglais qui la retenaient prisonnière. J'ignorais que la plupart de ces anecdotes étaient fausses mais les yeux brillants, je l'écoutais en retenant mon souffle. Et je me voyais combattre auprès de lui sur le bastingage, hurler des ordres à un équipage composé d'hommes tatoués qui mettraient le sabre aux dents et sauteraient sans hésiter sur le pont ennemi.
Ce n'est pas la seule fois que mon oncle est venu nous voir jusqu'au Guilvinec. Mais ce fut ce jour-là, ce jour où je lisais Chrétien de Troyes et où je reçus ma boussole dorée à la folle flèche que je décidais de servir notre roi sur les mers. L'océan continuait à m'appeler, je me devais de l'écouter. Finalement, toutes ces aventures que mon oncle n'a jamais connues, c'est moi qui les ai vécues.

Tous mes projets, tous mes rêves s'effondrèrent lorsque j'atteins mes quinze ans. Certes, je me doutais de ce que mon père allait m'annoncer mais j'avais choisi de ne pas savoir.
- Moine ?
- Vous partirez dès la semaine prochaine pour Saint-Guénolé de Landévennec. Vous prononcerez vos vœux dès votre arrivée et vous consacrerez le reste de votre existence à prier pour votre famille.
Lâche ! Il me tournait le dos, préférait regarder par la fenêtre plutôt que de faire l'annonce droit dans les yeux. Oui, bien sûr, en tant que troisième fils d'une famille pauvre, je me devais de me faire moine. Mais l'échéance me semblait si lointaine, je pensais avoir le temps de vivre avant et peut-être de faire plier la fortune en ma faveur.
- Père, je ne pourrais en aucune façon vous obéir. Je ne pourrais pas devenir moine, passer des jours entiers à méditer la Bible et à rendre des offices. Je veux devenir soldat !
Il se retourna brusquement et je reculai de quelques pas, malgré moi, devant son visage furibond et rouge. Il asséna un coup de poing si violent sur la table que je sursautai.
- Je ne vous demande pas votre avis, Arthur. Que pensiez-vous ? Que vous pourrez vivoter ici aux frais de votre frère alors qu'il n'aura presque rien pour tenir son propre rang ?
- Non mon père, répondis-je d'une voix ferme en puisant dans tout mon courage, je pensais partir au combat et...
- Et qui paierait votre équipement ? Où pourrez-vous trouver un cheval quand le seul destrier que nous ayons est si vieux qu'il ne tiendrait pas plus d'une lieue ? Vous serez une charge pour toute la famille !
- Et bien je m'engagerai comme un simple soldat !
Il fit le tour de la table pour m'asséner une claque retentissante. Je sentis les larmes me monter aux yeux mais elles ne coulèrent pas à mon grand soulagement. Je tremblais de peur et de colère, ma joue me brûlait mais je ne voulais plier.
- Souhaitez-vous donc déshonorer votre nom ? Vous n'avez pas le choix, fils indigne, honte de la famille, vous n'êtes qu'un ingrat qui me faites regretter toutes les bontés que nous avons eu pour vous. Votre propre mère s'est sacrifiée pour vous laisser la vie sauve. Entendez-vous, petit imbécile ? Dans ses derniers instants, elle priait pour vous en promettant au Seigneur que s'il vous laissait la vie sauve, il aurait le droit de disposer de vous. Elle vous aimait plus que vous ne l'avez jamais mérité. Et vous ne serez jamais digne d'elle et de sa bonté.
Rien ne pouvait me faire plus mal car il n'y avait plus rien à répliquer. En passant ce pacte, ma mère m'avait enchaîné à jamais à cette abbaye que je n'avais jamais vu. Était-il donc la peine de m'épargner pour me garder en prison tout le reste de mon existence ? Mes larmes ne coulaient toujours pas mais j'avais baissé la tête devant ces paroles si dures. Je me surpris à détester l'homme qui me faisait face. Car en vérité, je ne pouvais rien contre lui.

Je continuais à étouffer. Je faisais des cauchemars épouvantables où des morts venaient me rendre visite. J'avais les mains toutes égratignées à force de taper contre les murs de ma cellule. La robe de bure avait ouvert des plaies sur mes épaules. Les larmes qui n'avaient pas coulé au Guilvinec ne cessaient d'inonder mes joues ici. C'était la troisième fois que j'avais été mis en pénitence mais j'avais le plus grand mal à garder mon calme et ma réserve. Je maigrissais. Je devenais vide à l'intérieur. Quand le silence se faisait, il n'y avait plus le bruit des vagues rugissantes. Je devais fermer les yeux pour qu'elles reviennent à mon esprit. Ma place n'était pas ici et je résolus de partir. Briser les vœux que j'avais prêté était un crime mais je ne pourrais continuer ainsi. Et j'étais certain que le Seigneur tout-puissant comprendrait.
Un soir où tout était calme, je fis un nœud à l'un des barreaux de ma prison et accrochai l'échelle de fortune que j'avais fabriquée avec les quelques draps que l'on nous fournissait. J'étais encore petit pour mon âge et plutôt maigre mais ma tête faillit bien rester coincée. Avec mon élan, je faillis lâcher ma corde mais heureusement, j'arrivai à me rattraper au dernier moment. Un rire caractéristique monta jusqu'à mes oreilles :
- Ai-je trop bu où un moine cherche-t-il à faire le mur et a failli se rompre le cou ?
Cet idiot allait nous faire prendre ! Mais avant que j'ai pu répliquer, un de mes nœuds se détacha et je chutais jusqu'à terre dans une secousse qui aurait pu réveiller une ville entière, aux pieds d'Armand de Vignerot qui riait à gorge déployé.
- Mon vieux, il faudra que vous travailliez vos nœuds si vous voulez devenir marin !
En me relevant précautionneusement pour vérifier que je n'avais rien de cassé, je lui adressa un regard furieux :
- Mais allez-y, continuez à hurler, dites bien aussi dans quelle ville je souhaite embarquer afin que tous ceux que vous avez réveillés par votre rire puissent nous poursuivre et me rattraper.
Cette remarque pleine de bon sens ajouta encore à son hilarité mais mon ami me saisit la main pour m'aider à me redresser et me désigna un étalon noir déjà sellé :
- Et bien, ne traînez pas, Roberval, si vous saviez comme j'ai hâte de voir tous ces moines gras à la mine bien sérieuse en train de chevaucher, tonsures au vent pour tenter de vous arrêter ! Voilà qui promet de faire parler la région pendant des années.
Je montai sur le cheval que m'avait fourni Vignerot et au moment de partir, mon cœur se serra. Je me retournai vers mon camarade de jeux d'enfance en lui chuchotant :
- Je vous revaudrai ça, monseigneur. Ou un Roberval n'a plus d'honneur.
- Allons, ne dites pas de bêtises. Prenez bien soin de rompre tous vos vœux, surtout.
Il avait les larmes aux yeux.
- Richesse, libertinage, désobéissance et liberté, me voilà, conclus-je, en lançant ma monture.


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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime05.03.12 19:18

Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers 88709-11
Ψ IL Y A

TOUJOURS


DES COMBATS

A MENER

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Oui, tu as raison, Vignerot n'est autre que l'actuel duc de Richelieu et de Fronsac. C'est un pauvre bougre aujourd'hui, il entretient un nombre incalculable de maîtresses et a une série de dettes plus profonde que l'océan. Il a même du vendre sa charge de maître des galères il y a quelques années pour pouvoir continuer à mener son train de vie. J'ai bien fini par payer ma dette lorsque j'ai combattu auprès de lui en 1647 au large de Capri contre l'espagnol Don Juan. Je lui ai sauvé la vie lors d'un assaut en le tirant de la trajectoire d'un boulet de canon. Mais s'il prétend que j'ai payé ce que lui devais au centuple, je me sens toujours reconnaissant envers lui. Ceci dit, de mon expérience en Méditerranée, je n'ai retenu qu'une seule chose : que je ne voudrais jamais y retourner. Les galères, ce n'est pas pour moi. Un navire empli de forçats qui rament comme des esclaves toute la journée ? Je préfère la liberté et l'aventure de l'océan Atlantique où les marins ne sont certes pas des enfants de chœur et ont souvent une vie antérieure à dissimuler, comme moi à l'époque mais où ils ne sont pas entravés et sont libres de leurs mouvements.
Depuis mon embarquement à Brest, j'avais atterri comme mousse sur le navire d'un capitaine-corsaire Jan Baert, Le Téméraire. D'origine hollandaise, Baert, un homme déjà âgé, aux longs cheveux gris et aux rides creusés par le sel marin, combattait au nom du roi de France, le petit Louis XIV alors gouverné par son ministre Mazarin. Nous avions fort à faire à cette époque où le royaume était en guerre contre l'Espagne. Je me souviendrai toujours de ma première prise de bateau : c'était un galion espagnol empli d'épices et de soldats armés de mousquets et d'épée de première qualité. En nous voyant nous glisser derrière eux, ce fut une sorte de panique qui s'empara de leur équipage, peur qui s'amplifia lorsque Le Téméraire lança le premier boulet :
- Pourtant leur navire est beaucoup plus puissant que le notre, fis-je observer au capitaine.
Ce devait être la première fois que Baert me regardait. Il me jaugea un instant de sa haute stature, sembla penser que je n'étais guère qu'un avorton et répliqua :
- C'est l'effet de la surprise. Et nous n'avons guère meilleure réputation que les pirates malgré nos lettres de marque. Et pour cause.
Je n'oublierai jamais non plus le premier abordage auquel j'ai assisté. C'était beaucoup plus horrible que ce qu'il y a écrit dans les romans ou de ce dont me parlait mon oncle armateur. Les morts étaient réels, les crânes de ceux qui chutaient se brisaient contre les coques, le sang coulait en abondance sur le pont du galion espagnol. Mais moi, contraint de rester sur Le Téméraire, je bouillonnais d'impatience, je voulais aller combattre, défendre mon capitaine et mon navire. N'écoutant que mon impulsivité, je me saisis d'une épée d'un mort pour accourir au secours de mon équipage, de mes frères de la mer. Je mis en œuvre tout ce que j'avais bien pu apprendre, ce qui s'apparentait à pas grand-chose mais par miracle, je parvins à survivre. J'étais blessé au bras mais bien vivant quand la reddition des espagnols fut sonnée. Mon épaule était en sang mais pas un gémissement ne franchissait mes lèvres. Je voulais me montrer courageux. Pendant le pillage, Baert vint vers moi :
- Petit, tu as désobéi à mes ordres et on n'apprécie pas trop les têtes brûlées sur les navires. Ça pose toujours des problèmes.
Je gardai la tête en répliquant, les deux armes que j'avais entre les mains prouvaient assez que j'avais combattu en brave :
- Capitaine, je ne pouvais rester en sécurité alors que mon équipage se battait sans moi.
Il eut un sourire à cette réplique :
- Tu es déjà un pas trop mauvais bretteur, il faudra voir ce que ça donne face à des marins un tant soit peut capables. C'est bien ce que tu souhaites, petit gars ?
- Capitaine, je suis né pour naviguer.
- Quel est ton nom ?
- Roberval, capitaine.
- Et bien, Roberval, je te promets que si tu m'obéis à partir de maintenant, ton nom sera un jour connu sur tout l'Atlantique et même sur toutes les mers.
Baert fut tellement impressionné de la force de ma volonté qu'il garda dès lors l’œil sur moi. Il remarquait que je ne me plaignais jamais en lavant le pont comme toutes les autres corvées dont les mousses sont chargés. Et de temps à autre, il m'apprenait l'art de l'épée. Je grandissais, gagnais en musculature et en charisme. Je compris l'attachement que me vouait Baert lorsque lors d'une étape, il choisit de nouveaux mousses pour son bateau puis m'apprit quelques-unes de ses bottes secrètes. J'avais gagné ma place dans l'équipage.
En effet, si je suis une fine lame aujourd'hui, je le dois autant à mon expérience qu'à Jan Baert, le meilleur et le plus juste capitaine qu'il était possible. Je m'efforce de lui ressembler mais je crois bien que c'est peine perdue. Nous avons écumé les mers ensemble jusqu'à ce que je devienne un homme et son principal bras droit. Je n'avais que vingt-trois ans et des dizaines et des dizaines de prises à mon actif tout comme des voyages innombrables. Mais il y a de ces voyages qui laissent des souvenirs impérissables.

Nous venions de débarquer en Acadie sur la côte américaine et je profitais de ma position de second du capitaine pour aller sur la terre ferme et échapper aux corvées les plus repoussantes. Je n'avais pas le droit de le faire en France où je devais éviter de mettre un pied dans le royaume pour ne pas me retrouver contraint de retourner au monastère et me faire châtier d'avoir rompu mes vœux. J'avais entendu dire que mon père et l’Église étaient furieux et s'étaient juré de me rattraper un jour. Il suffisait donc de ne plus jamais réapparaître. Malgré tout l'amour que je vouais à la nouvelle vie que je m'étais choisi, parfois je me surprenais à vouloir savoir si ma sœur Hélène s'était trouvé un époux ou si Armand de Vignerot avait réussi à racheter sa conduite du temps de la Fronde. Mais ça ne durait jamais, je me contentais des rumeurs. En réalité, aucun lien vraiment solide ne me rattachait nul part et c'était d'autant mieux car les élans du cœur est une chose dont il faut se méfier. Ils font de toi un mauvais marin. Et pire que tout, ils blessent et nous laissent sans espoir de guérison.
Jan Baert détestant nous voir inactifs, je m'étais porté volontaire avec une petite troupe d'hommes pour aller revendre notre dernière prise dans la région encore sauvage et habitée par quelques français qui avaient espéré faire fortune en Acadie avant de se rendre compte que la terre y était pauvre et les hivers rigoureux. Notre pillage avait été plutôt infructueux. Mis à part quelques barriques de rhum toujours bienvenus, nous n'avions trouvé que des colifichets que les Portugais allaient échanger contre quelques centaines d'esclaves en Afrique. Il était habituel de croiser des navires négriers sur ces mers et la recette était généralement bonne tant les planteurs des îles à sucre appréciaient cette main d’œuvre. Mais nous étions arrivés avant l'échange et nous nous étions retrouvés avec des bijoux sans guère de valeur et quelques armes à feu à l'efficacité douteuse. Comme les côtes africaines étaient infestées de pirates et d'Espagnols, Baert avait eu l'idée de chercher à s'en débarrasser grâce aux autochtones des Amériques. Sur une ville côtière, on m'avait conseillé de chercher à négocier avec une tribu micmac dans laquelle vivait un « coureur des bois ».
Si j'ignorais ce qu'était un coureur des bois, je fus rapidement fixé. Arrivés avec nos sacs chargés en vue d'individus à moitié dévêtus qui se dissimulaient dans les ombres des arbres d'une forêt dense, nous nous arrêtâmes brusquement en voyant que les hommes, tous coiffés à l'iroquoise, nous visaient avec leurs arcs. Fort heureusement pour nous, l'un d'eux baissa son arme et s'approcha de nous en levant les mains pour nous rassurer :
- Vous êtes français ? Je m'appelle Pierre Cordelier, je suis le chef de cette tribu.
Nous poussèrent en chœur une exclamation de surprise. L'homme devant nous qui avait revêtu une peau de loup sur ses épaules avait bien la peau blanche derrière ses peintures de guerre et s'exprimait en un français parfait quoique mâtiné de l'accent du sud-ouest. C'était le coureur des bois dont on nous avait parlé. Il était venu s'installer aux Amériques avant de faire la connaissance des micmacs et de quitter la civilisation pour devenir l'un d'eux. Il nous introduisit au sein des campements dans lesquels vivaient les Indiens et accepta de s'intéresser à notre butin. J'étais fasciné par ces êtres humains si étranges qui communiquaient dans une langue que je n'avais jamais entendue et qui parlaient aux esprits. Les hommes étaient des féroces guerriers qui combattaient auprès des Français dans les guerres contre les puritains installés plus au sud. Je devins immédiatement un objet de curiosité à cause de ma barbe, de mes yeux bleus et de ma peau si pâle malgré les heures passés au soleil pour les micmacs, étonnés de notre venue et de la déférence avec laquelle nous traitait Cordelier.
Je crois que j'aurais pu devenir coureur des bois pour elle. Elle, c'était la plus jolie jeune femme de la tribu, elle ne cessait de s'accrocher à moi pour poser sa paume droite contre ma joue et me fixer droit dans les yeux. Au début, je restais immobile, elle ne parlait pas. Puis elle saisit ma main pour me faire visiter l'endroit où elle vivait, me montrer les animaux de la forêt et ses endroits les plus incroyables. Je m'étais mis à la toucher à mon tour, elle avait une peau si brune et si douce qui m'obsédait, une chevelure sombre aux milles reflets que j'aimais caresser, des gestes pleins d'une grâce naturelle.
- Ciel, fut le premier mot qu'elle me dit en mettant ses doigts devant mes yeux.
- Non, répondis-je avec calme, mer.
Elle sourit.
- Moi, je suis Arthur, continuais-je en pointant mon index contre ma poitrine, et toi, quel est ton nom ?
- Moi, Militaw.
Je compris bien plus tard que cela signifiait colibri. Je l'ai aimée, mon colibri des Amériques, je l'ai aimée plus que tout autre femme à ce jour. Elle était unique, fière, libre. Je savais que je ne pourrais jamais la posséder mais c'était ainsi que je la désirais. Au moment où je fus contraint de repartir, elle me demanda, des étoiles brillant dans ses pupilles sombres :
- Toi revenir ?
- Peut-être.
Nous nous tûmes quelques instants, mes doigts couraient sur son épaule puis dessinaient sa clavicule, laissant une traînée de chair de poule derrière eux. J'avais envie de rester mais l'appel de la mer était le plus fort. Mais ne plus voir Militaw était un déchirement.
- Et si je reviens, tu seras toujours là ?
En se dégageant de mon étreinte, elle m'adressa un sourire vrai et sincère :
- Peut-être.

Je ne fis pas immédiatement le rapprochement entre le coup de pistolet et la chute de Baert qui s'effondra à mes côtés comme une marionnette dont on aurait soudain lâché les fils. J'ai essayé de retenir son bras mais son poids était trop important pour moi et il m'entraîna avec lui. Mes mains se posèrent sur sa large poitrine et je compris. Elles étaient rouges de sang. Fou de rage, je me redressai sans prêter attention aux balles qui sifflaient et aux coups d'épée que l'on envoyait dans ma direction et que je parais sans même m'en rendre compte. Du regard, je cherchais le lâche qui avait osé tirer sur le capitaine. Le canon encore fumant, le capitaine du navire hollandais me fixait, l'air stupéfait d'avoir réussi son coup. Je voulus courir pour lui faire payer la vie qu'il venait de prendre mais je fus bousculé par l'un de nos hommes, brusquement repoussé par un soldat ennemi. Par peur que l'on s'aperçoive de la mort de Baert, je me mis à hurler de continuer les combats. J'avais assez d'autorité pour que l'on m'obéisse sans discuter. Tuant d'un coup bien placé l'homme qui menaçait mon frère d'armes, je me retournai vers l'endroit où le capitaine, un prince de la maison de Bar, se trouvait quelques instants plus tôt. Mais il avait disparu ! En quelques enjambées, je fus près du bastingage, essayant de distinguer s'il s'était lancé dans la mêlée. Un bruit suspect me poussa à faire volte-face vers les flots. Ma stupeur me coupa le souffle. Bien installé au milieu d'un canot, au milieu de deux officiers qui ramaient, Bar fuyait son navire, abandonnant ses hommes à leur triste sort, sans même avoir l'honneur d'être vaincu dans la dignité.
- Lâche, hurlai-je, lâche ! Traître qui préfère fuir que te battre ! Je te tuerai de mes propres mains, Bar, même si c'est la dernière chose que je ferai !
Mon garçon, apprend qu'un Roberval n'a qu'une parole. Il est mort comme il avait vécu, en traître, mon couteau dans le dos pour avoir tenté de fuir l'un de ses navires qui prenait encore l'eau. Cette famille est la lie de l'Europe, son oncle déjà, le duc de Lorraine ne cessait de trahir le roi de France. Et dire que l'on accueille l'un d'eux à Versailles même, et avec les honneurs ! Le bougre n'a pas supporté que je dise la vérité sur son oncle et son cousin, il se persuade qu'il lui reste de l'honneur à défendre. Tu sais bien que je ne refuse jamais un duel et très franchement, ce n'est pas son épée qui me fait peur, il doit trembler comme son cousin au moment de chercher à fuir ses responsabilités.

Devenir capitaine ne fut pas aussi facile que je le pensais. J'avais eu la présence d'esprit de reprendre les lettres de marque au nom de Jan Baert dans la veste de mon protecteur, elles étaient un peu tâchées de sang mais encore utilisables, il n'était pas question de nous faire accuser de piraterie même si concrètement, rien ne nous différenciait des pirates sinon ces quelques lignes écrites dans un château de la région parisienne. Baert n'avait pris aucune vraie disposition pour sa succession et on profita de sa disparition pour me disputer le titre de capitaine. On nous départagea dans un duel et ma victoire fut éclatante. Et après la mutinerie qui éclata quelques jours plus tard, je pendis tous les récalcitrants à mon pouvoir. Il ne fut plus jamais contesté.
Être chef à bord avait ses avantages. C'était désormais moi qui décidait de la direction que prenait Le Téméraire, des bateaux à attaquer et des pauses à effectuer. Mes fréquentes visites en Acadie n'étaient pas le moindre d'entre eux. Après mes quelques aventures dans l'océan Indien dans lequel les Français étaient bien minoritaires face aux Portugais, aux Espagnols et aux Hollandais et mes faits d'armes dans l'Atlantique où je commençais à me faire connaître, j'appréciais de retrouver la belle Indienne, toujours aussi désirable, sauvage et gracieuse. Elle ne me demandait jamais si je revenais et en échange, ne me faisait aucune promesse.
Des rumeurs commençaient à circuler sur les mers. Il se disait que les Anglais voulaient profiter de la faiblesse française pour mettre la main sur ses colonies. Mazarin s'était totalement désintéressé de la marine, nous n'avions plus de flotte digne de ce nom et même nous autres, corsaires, si nous travaillions de temps à autre ensemble, nous n'étions pas assez nombreux pour faire face à la Royal Navy. Je mis immédiatement les voiles pour l'Acadie dans l'espoir que Militaw accepterait de repartir avec moi ou de s'installer en Nouvelle-France où le danger était moindre. Je savais qu'elle ne m'écouterait pas et ne voudrait quitter sa tribu mais je voulais tout tenter pour la sauver.
- Pourquoi sommes-nous en train de ralentir l'allure ? Il faut en contraire se dépêcher !
- Capitaine, la vigie vient de nous informer que le port est empli de bateaux aux pavillons anglais. Quelques autres se promènent au large de la baie pour repousser d'éventuelles attaques.
- Il faut néanmoins que nous puissions accoster.
- Je crains que ce ne soit impossible, capitaine. Nous n'avons aucune chance face à tant d'Anglais.
Nous décidâmes finalement d'envoyer un canot pendant la nuit avec pour mission de retrouver Cordelier et sa tribu. Je voulus embarquer mais mon équipage me contraignit à rester dans le navire car on ne voulait prendre le risque de me perdre. J'ai bien fait de ne pas y aller finalement. Je crois que je n'aurais pu supporter les scènes que nous ont décrit les hommes une fois revenus. Les micmacs avaient choisi de se battre aux côtés des Français, ils avaient été massacrés.
- Tu es sûr de ce que tu avances ?
- Cordelier a été égorgé, capt'aine.
- Et Militaw, tu l'as vu ? Tu es certain que c'était elle ?
- Oui, capt'aine, je l'ai reconnue malgré ses peintures sur le visage. Elle... Je sais pas si j'dois vous l'dire...
- Et bien ?
- Elle avait un bébé mort dans les bras. Il était blanc, l'bébé.

- Roberval ? Jamais entendu parler, vous n'êtes pas bien connu dans les mers du Sud !
Affreusement vexé par le ton moqueur du pirate qui me faisait face en me baragouinant quelques mots d'anglais, je lançai une nouvelle attaque mais il para avec une certaine facilité. Je résolus de lui faire perdre son sourire à celui-là, foi de Roberval. Mais le bonhomme, un pirate d'une quarantaine d'années à la barbe noire bien fournie, connaissait quelques tours que j'ignorais. Une botte faillit me perdre l'équilibre mais je me rattrapai au dernier moment.
- Joli coup, saluai-je mon adversaire, permettez-moi de le réutiliser lors d'un prochain duel.
- Pas sûr que tu restes en vie jusque-là !
Sa morgue joua en ma faveur, j'étais parvenu à le déconcentrer. En le prenant par surprise, je parvins à glisser mon épée jusqu'à son cou mais arrêta le mouvement au dernier moment pour ne pas le tuer. Il perdit immédiatement son sourire.
- Hum... Je ne sais pas encore ce que je vais faire de toi, pirate, ce qui est certain, c'est qu'il vaut mieux que je ne m'adresse pas à toi pour faire des prédictions.
Courir derrière les pirates n'est pas la partie la plus drôle du rôle d'un corsaire mais ce sont les ordres donnés par nos souverains qui les considèrent comme des plaies. Le problème, c'est qu'il n'y a souvent pas grand-chose sur leurs navires sinon un peu de rhum et quelques armes. Ils sont plus de pauvres types que de fiers brigands. Rien d'intéressant sur leurs bateaux... Sauf dans le cas que je suis en train de te relater puisque ces pirates s'étaient payés le luxe d'attaquer un navire de la marine royale française et d'enlever la propre fille du gouverneur de la Nouvelle-France, une certaine Andréa de Bellevue. Je connaissais plutôt bien le père en question qui appréciait le travail que je fournissais pour assurer la sécurité sur les côtes et faire parvenir des denrées dans la colonie. J'avais fini par mettre la main sur ce bateau pirate et à retrouver la donzelle qu'ils avaient fait honteusement travailler, les deux autres otages ayant disparu, sans doute assassinés. Je devais la ramener en France, à présent.
- Que fait-on des pirates, capitaine ?
- Débarrassez-moi de ces voyous, pendez-les et abandonnez leurs corps que l'on voie bien que la justice de Sa Majesté Louis XIV s'exerce aussi sur les mers.
Juste avant de me diriger vers la jeune fille que je voyais à quelques mètres pour la faire rembarquer sur mon navire, je me retournai vers le chef des pirates qui n'avait plus rien du fier brigand que j'avais combattu :
- Sauf lui. Donnez-lui un canot et des rames, je veux qu'il aille jusque dans les mers du Sud raconter comme il a été vaincu par le corsaire Roberval.





Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers The_ba10
Ψ LA FORTUNE

SOURIT


AUX

AUDACIEUX

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Tu poses une bonne question, moussaillon. Comment moi, le fier capitaine du Téméraire dont le nom terrifiait toutes les crapules de l'océan, ai-je perdu mon navire pour finir par commander L'Orientale ? La chance tourne, la fortune tout comme la mer est capricieuse. Voir s'enfoncer dans l'eau le bateau sur lequel j'avais passé dix-huit de ma vie fut un déchirement. Je ne pourrais jamais me pardonner d'avoir lancé l'attaque contre ce vaisseau qui arborait un pavillon aux couleurs de la couronne d'Angleterre comme je ne pourrais jamais pardonner à notre vigie de ne pas avoir vu que le vaisseau en question était accompagné d'une vraie escadre et à ces maudits Anglais d'avoir causé notre pur et simple anéantissement. Ils auraient pu se contenter de viser le mât pour immobiliser Le Téméraire et pour nous cueillir par la suite. Au lieu de cela, ils tirèrent boulet de canon sur boulet de canon sur notre coque qui craqua en un bruit épouvantable. Un feu se déclencha dans les cales et une épaisse fumée noire nous brouilla la vue. Nous étions face à un choix terrible : sauter à la mer en espérant ne pas être emporté par les vagues déferlantes qui allaient accompagner le naufrage ou courir dans les bras de ces Anglais. J'ai tout d'abord choisi de jeter toutes les denrées qui se trouvaient encore sur Le Téméraire pour qu'ils ne puissent rien saisir puis je me suis battu jusqu'au bout, jusqu'à être entouré par une foule de soldats en uniforme à qui je me suis rendu. J'espérais être traité comme un prisonnier de guerre avec l'honneur que cela supposait mais lorsqu'ils décidèrent de me lier les mains, je compris que ce ne serait pas le cas. Certes, on ne m'avait encore tué comme le reste de mon équipage qui n'était pas parvenu à fuir et qui avait fini pendu mais ce n'était que grâce aux lettres de marques que je gardais toujours près de mon cœur comme Jan Baert avant moi.
On se moqua de moi sur le bateau anglais. Mais moi, je gardais la tête haute et un air de défi sur le visage. J'étais peut-être vaincu, je venais de voir mourir mes compagnons et couler mon bateau, ce qui m'avait brisé le cœur mais je ne pleurais pas, je ne gémissais pas, je ne me mettais pas en colère. Et mon calme absolu, ma dignité préservée finirent par impression mes vainqueurs qui conçurent du respect pour leur adversaire. Ce qu'ils ne savaient pas, c'est que moi je les méprisais derrière mon visage serein. Oh, à chaque endroit où je tournais le regard, des bouffées de haine m'emplissaient par saccades, comme des vagues mais sans reflux. Je les détestais, je les haïssais, j'aurais voulu pouvoir les tenir en mon pouvoir en cet instant et commander leur mort. Au lieu de cela, on me mena jusqu'à la cabine de leur capitaine, un certain Richmond qui faisait partie de la famille royale anglaise. C'était plutôt un homme jeune, empli de l'orgueil de son rang qui devait faire des merveilles à Londres. Lorsque je le vis pour la première fois, il était entouré de ses officiers qui échangeaient des plaisanteries sur mon statut. Oh oui, ils venaient de capturer un des plus célèbres corsaires français et avaient entièrement détruit son bateau, ils avaient de quoi triompher. En face d'eux, je n'étais plus rien, plus rien qu'une coquille vide qui cachait sa douleur derrière ses phrases ironiques. Comme je te le disais, mon petit, quand tu n'as plus rien, il te reste l'honneur.
- Une chose que je ne comprends pas... Pourquoi nous avoir pris en chasse, capitaine Roberval ?
Un jeune officier tout poudré fit une remarque sur le fait que je n'avais plus grand-chose d'un capitaine ce qui fit rire grassement ceux qui l'entouraient. Je répliquai en gardant mon sang-froid :
- Nous manquions de vivres et les navires anglais sont réputés pour leurs cales profondes.
- Pas forcément très malin de votre part de vous attaquer à un navire de guerre...
- Ce sont eux qui ont le plus de rhum, répondis-je au tac au tac.
Les rires s'étaient éteints malgré mon ton ironique. Ils sentaient que je n'étais pas du genre à supplier ou à me laisser faire. L'un d'entre eux se risqua toutefois :
- Ah ces Français... Ils se battent pour l'argent alors que nous autres, Anglais, nous ne combattons que pour l'honneur...
Je ripostai avant que quiconque puisse réagir :
- Vous avez raison, monsieur, on ne combat jamais que pour ce qui nous manque le plus.
- Cela suffit, intervint Richmond, une lueur mauvaise dans le regard, qu'on l'enferme en fond de cale, nous déciderons de son sort à notre arrivée.
Sans le moindre ménagement, je fus jeté dans une prison humide et noire dans laquelle je passai quelques semaines. J'eus d'abord l'impression d'étouffer à nouveau mais l'odeur de la mer et le bruit des vagues contre la coque du bateau m'empêchèrent de devenir fou. Et je rongeais mon frein...
J'ignore ce qu'on comptait faire de moi. Peut-être me mener devant le roi d'Angleterre et me désigner comme la cause de tous leurs malheurs sur les océans. Il faut dire que depuis la prise de l'Acadie, j'avais un grand plaisir à harceler les bâtiments anglais. Mais fort heureusement pour moi, j'avais plus d'un tour dans mon sac. J'avais si bien réussi à endormir leur confiance (ou alors étaient-ils simplement idiots) qu'ils ne vérifièrent pas mes liens en me faisant débarquer sur un quai de Londres. En un coup de poing et une lutte de quelques secondes, je me débarrassai des hommes qui me retenaient et sans réfléchir, m'élançai dans la foule des docks. La population y était si bagarrée qu'ils n'allaient pas tarder à me perdre de vue. Avant de tourner dans une rue attenante, malgré les bruits de pas qui montraient qu'ils n'avaient pas encore renoncé à me poursuivre, je me retournai un tout petit instant mais assez pour croiser le regard de Richmond. Il était loin, trop loin pour m'atteindre ce dont il semblait s'être aperçu car il n'avait pas bougé d'un pas. Intérieurement, je lui souhaitai de nous recroiser bientôt, lorsque j'aurais récupéré un navire et toutes mes forces puis je fis volte-face. Ma course pour perdre mes poursuivants dura plusieurs dizaines de minutes mais je parvins enfin à m'en débarrasser non sans avoir semé une sacrée pagaille sur mon passage. Une fois sûr qu'ils avaient abandonné, à bout de souffle, je rentrai dans une taverne et je me décidai à mettre au point un plan pour traverser la Manche et quitter ce pays de sauvages.

- Ma sœur, ma sœur, aillez pitié d'un pauvre malheureux qui n'a plus rien pour vivre...
J'avais saisi la manche de la nonne, vêtue de la robe de la communauté de Sainte-Anne d'Auray qui passait devant moi. Elle avait un panier empli de petits pains et de vin qu'elle portait sur sa hanche. Lentement, comme dans un rêve, je la vis se retourner puis se pencher vers le misérable qui se trouvait à genoux devant elle dans l'espoir d'obtenir quelque-chose à manger. Ce fut un choc terrible pour moi. Je savais, en revenant à Tréoultré que j'allais revoir des têtes que je connaissais mais je ne m'attendais vraiment pas à devoir faire face à ce doux visage aux grand yeux marrons si vite et surtout dissimulé derrière un voile de moniale.
- Ma sœur, ma sœur, balbutiai-je la gorge serrée par l'émotion.
Hélène ne me reconnut pas. Il faut dire que nous ne nous étions pas revus depuis plus de dix-huit ans et qu'il était difficile de reconnaître mes traits derrière mes longs cheveux crasseux et ma barbe qui me dévorait les joues. Elle me tendit un petit pain que je saisis avec précaution. Il était encore chaud.
- Prenez mon frère, dit-elle d'une voix ferme et caressante.
- Soyez louée, ma sœur.
Elle allait s'éloigner mais je m'étais redressé. J'étais saisi de la brusque envie de savoir, de connaître ce qui s'était passé pendant ma longue absence comme si j'étais attendu, comme si c'était toujours chez moi. J'aurais aimé la prendre dans mes bras, la serrer comme je le faisais lorsque nous étions enfants mais je n'osais pas. Il valait mieux pour elle ne pas savoir qui j'étais, elle aurait trop mal et serait contrainte de dénoncer ma présence.
- Attendez, ma sœur, connaissez-vous la famille qui vit sur le domaine de Roberval, les Le Guilvinec ?
- Oui, dit-elle la voix emplie d'une certaine défiance tout en me considérant avec plus d'attention. Oui, je les connais.
- Que sont-ils devenus ? Comme se porte l'aîné, Jean ? Demandai-je avec précipitation.
Ses yeux se voilèrent de larmes pendant un instant et je crus qu'elle allait échapper à ma poigne pour ne pas avoir à me répondre mais elle le fit tout de même :
- Jean est malade depuis des mois désormais. C'est son père, Charles, qui veille sur lui.
- Le sire de Roberval est toujours en vie ?

- Il est très vieux, désormais et sa goutte l'empêche de se déplacer mais il est toujours bien portant même si Dieu lui envoie des épreuves toujours plus difficiles. Le Seigneur a des voies impénétrables, c'est lui qui a choisi de renverser l'ordre des choses et de rappeler à lui tous les enfants du sire avant le sire lui-même.
J'avais l'impression que nous parlions de parfaits étrangers. La seule vision que je gardais de mon père, c'était celle d'un homme ivre de colère qui me donnait une claque pour me punir de mon effronterie.
- Et le deuxième frère, François ? Est-il toujours curé à Rieux ?
Une fois de plus, Hélène eut un mouvement de douleur qu'elle ne parvint pas à dissimuler :
- François est mort désormais. Il a été assassiné par le fils de la famille des Rieux-d'Assérac.
Je n'avais jamais été proche de François et je n'avais pas éprouvé de sentiments fraternels depuis des années mais je ne pus m'empêcher de m'exclamer :
- Son nom a-t-il été vengé ? Qui peut oser porter la main sur un Roberval sans le payer de sa vie ?
- Son agresseur s'est enfui et le père est trop vieux pour le poursuivre. Quant à Jean, son agonie dure depuis des mois.
Comment cela était-il possible ? Où se trouvaient toutes les notions d'honneur, toutes les valeurs que nous avait transmises notre père ? A l'époque, je n'avais même plus une épée à moi et il devenait urgent que je quitte le sol du royaume, je ne pouvais pas moi-même porter vengeance. Mais en cet instant, au moment où Hélène m'expliqua l'affaire, je me jurai de faire justice et de punir. Aujourd'hui, j'en ai les moyens et c'est pourquoi je suis à la recherche de cet Arnaud d'Assérac pour lui planter mon épée dans le cœur comme il l'a lâchement fait avec mon frère.
Hélène se tut et me contempla un instant. Puis, elle leva une main hésitante et la posa sur ma joue. Je fermai les yeux malgré moi :
- Vous ne pouvez pas rester là. Que Dieu vous garde, mon frère.
Elle savait. Un doux sourire éclaira ses traits fatigués puis elle détacha son regard du mien pour remettre son panier sur sa hanche et s'éloigner à grands pas. Tant que mon père serait en vie, je ne serais accueilli qu'à coups de bâton à Roberval. Je pris donc la direction de Brest.

- Roberval, c'est un plaisir de vous revoir !
- Allons, inutile de me mentir, je sais bien que vous êtes tous déçus de me savoir en vie et vous en particulier, Du Plessis, grommelai-je en laissant échapper un sourire moqueur.
Je me laissai glisser sur le pont du navire du chevalier et je fus accueilli par de nombreuses accolades et des bourrades.
- Je dois avouer que nous espérions que vous étiez allés retrouver les monstres des fonds marins mais maintenant que vous êtes là, autant nous réjouir de ce qui est.
- Il n'y a pas une bonne bouteille de rhum pour fêter le retour parmi les vivants de ce bon vieux Roberval ?
- Et puis, ça ajoute un peu de mystère d'ignorer où vous êtes passé pendant tous ces mois.
- C'est bien cela, je travaillais à ma légende, renchéris-je en levant les yeux au ciel.
- Avez-vous croisé le diable lors d'une tempête ? C'est la seule raison logique qui expliquerait pourquoi vous vous êtes débarrassé du Téméraire pour revenir avec... (le corsaire plissa les yeux pour déchiffrer le nom de mon bateau) L'Orientale.
- A votre place, je ne chercherais même pas à savoir.
En réalité, je n'avais pas retrouvé le diable à Brest mais mon oncle armateur. Il était désormais trop âgé pour travailler et avait laissé son bateau à l'abandon. Mon retour fut pour lui une bénédiction, il retrouva assez de vigueur pour remettre en état son bâtiment, recruter un équipage, convaincre les financiers d'investir dans l'entreprise, demander des lettres de marque à l'administration. Il n'avait pas d'enfants, j'avais l'impression qu'il profitait de mon passage chez lui pour me donner son héritage. Je n'allais pas m'en plaindre, d'autant plus que L'Orientale était un magnifique navire, encore plus impressionnant que Le Téméraire.
Se retrouver au milieu de mes frères des mers, c'était comme se retrouver dans sa famille. La marine royale avait lancé un appel sur tout l'océan pour rassembler les corsaires afin de lui venir en aide lors d'une attaque contre les Espagnols. Nous nous connaissions tous pour avoir accompli des pillages ensemble ou avoir été en compétition pendant un certain temps. Ils étaient à la fois des rivaux et des amis. Si l'un d'entre nous avait besoin d'aide, la règle voulait que l'on n'hésite pas à se porter à son secours. Du Plessis, l'un des plus anciens, avec lequel j'avais effectué un raid sur Hispaniola quelques années auparavant, reprit la parole :
- En tout cas, c'est dommage, je commençais à me plaire à l'idée qu'il y aurait plus de butin pour nous.
- Vous ? Du Plessis faire du butin ? Il paraît que nous n'arrivez même pas à mettre la main sur un malheureux pirate !
- Ah oui... Stradi.. Stradarius, Stradivarius... Y'a pas idée de prendre des noms pareils quand on est pirate !
- Oh, oui, où sont passés les terreurs des mers, les barbes noires, oreilles percées et bras cassés ? Ironisai-je en échappant à une tape amicale que me destinait Du Plessis, pourquoi sommes-nous rassemblés aujourd'hui ?
Du Plessis se pencha et me désigna un énorme vaisseau de guerre non loin de là.
- Le commandant des forces royales est dans ce bateau. Il veut parler à un représentant des corsaires pour expliquer sa stratégie.
Les débats furent finalement assez courts pour décider qui envoyer. J'étais le plus vieux, j'avais le plus d'expérience et j'étais certainement le plus respecté d'entre nous. La menace d'un duel calma les plus récalcitrants.
- Et ce commandant, c'est quoi son nom ?
- Un noble de la famille de Mortemart, un certain Vivonne, je crois bien.
- Espérons qu'il soit aussi habile à la barre qu'à obtenir des faveurs du roi, conclus-je en m'apprêtant à retourner dans mon canot.

En ouvrant les caisses, je n'en crus pas mes yeux. C'était la première fois que je voyais un tel trésor, on était bien loin des colifichets, des esclaves et des barriques de rhum ! La fortune avait enfin tourné en notre faveur ! Le galion espagnol avait été d'une facilité étonnante à prendre. Il avait suffi de l'attaquer en pleine nuit pendant qu'ils dormaient tous comme des enfants insouciants, comme si les monstres ne pouvaient pas surgir dans le noir sur les océans. Oh oui, devant les tasses, les sous énormes et les bijoux tous de l'or le plus pur, je fus vraiment impressionné, sans doute pour la première fois de ma vie. Nous savions tous que des galions espagnols faisaient le voyage jusqu'en Europe pour rapporter ceux qu'ils dénichaient en Amérique du Sud mais généralement, c'était des convois très protégés et généralement impossible à prendre par surprise. Mais là, nous nous étions mis sur la piste de l'Espada de Neptuno sur la base d'une information de première main, celle de la petite Bellevue que nous avions repêchée dans l'océan, oui, celle-là même que j'avais sauvé il y avait de cela des années. Te raconter ce qu'elle faisait là serait trop long, je vais me contenter d'aller à l'essentiel.
Le capitaine de ce bateau était Felipe de Palma, un jeune homme aux cheveux bouclés qui se sentait particulièrement humilié de sa défaite. Il grimaçait et rejeta toutes les paroles amicales que je tentais de lui adresser. Après tout, je n'avais rien contre lui, je n'avais jamais rien eu contre les Espagnols.
- Je ne vois rien de noble dans votre geste ni même dans l'homme qui se tient devant mes yeux. Vous n'avez pas plus de valeur qu'un misérable pirate. Vous me payerez cet affront.
Un brin moqueur mais aussi vexé que l'on ose m'attaquer sur mon honneur, je fis une révérence un brin théâtrale :
- Monsieur, vous êtes un mauvais joueur : il n'y a bien que les mauvais joueurs qui se plaignent des règles du jeu lorsqu'ils perdent. Au plaisir de vous revoir.
Sans lui laisser le temps de répliquer, je fis volte-face pour lancer quelques ordres à mes hommes afin de faciliter le transport du trésor jusque dans nos cales.
- Que faire d'eux ? Me demanda mon second.
- Rendez les canons inutilisables, brisez le mât et le gouvernail et laissez-les à la dérive. Le capitaine est un prince dans son pays, je ne souhaite pas le voir mort.
- Et pour la fille ? Celle qui nous a donné la position de Palma ?
- Si je la raccompagne en France, je devrais la remettre au couvent, n'est-ce pas ?
- Si je puis me permettre, capitaine, elle a l'air de vouloir préparer un mauvais coup pour reprendre le trésor...
- Vous avez raison, nous l'abandonnerons sur la prochaine île. Avec toutes nos excuses.
Une fois retourné sur le pont de L'Orientale, je restai là à fixer L'Espada de Neptuno qui s'éloignait au fur et à mesure que nous progressions. Je savais très bien que quoique j'ai pu prétendre, le jeu n'était pas terminé entre Palma et moi. Enfin, j'avais un adversaire à ma hauteur ! La prochaine fois où je serais face à lui, je n'aurais pas de pitié. Quel n'a pas été mon étonnement à le voyant à Versailles !



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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 1:33

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Ψ COMMENT

NAVIGUER


EN EAU

TROUBLE

_________________________________________________



Je ne sais pas qui observait qui avec le plus de surprise. Si c'était moi devant cette foule de dentelles et de perruques qui se bousculait entre les dorures et les marbres ou eux devant mon allure si étrange, « sauvage » entendis-je certains murmurer (tout cela parce que je n'avais ni perruque ni vêtement coloré), les cages pleines d'animaux exotiques dont un perroquet qui pour une raison totalement inconnu ne connaissait que le mot « en garde » qu'il ne cessait de crier au grand ravissement de ces dames ou les caisses transportées avec force halètements et gémissements. Je m'autorisais enfin à les perdre quelques instants de vue ces caisses ce qui n'avait pas été le cas pendant ces derniers mois. Je craignais tant que certaines disparaissent, que des pirates malintentionnés nous prennent en chasse ou que nous soyons volés en remontant la Seine mais rien ne s'était produit. Au début mon équipage m'avait traité de fou lorsque j'avais décidé de livrer le trésor au roi jusqu'à Versailles mais confusément, je savais que c'était là mon devoir. Que faire d'une telle richesse ? Elle n'apportait rien sinon un mauvais sommeil car il était impossible de dormir sur ses deux oreilles lorsqu'elle était à proximité. Et puis un tel coup d'éclat m'assurait l'avenir. On allait raconter cette ambassade dans tous les pays voisins et j'allais gagner à jamais la confiance de Sa Majesté. N'était-ce pas ce dont je rêvais depuis mon enfance ? Mes hommes avaient fini par être enthousiastes à l'idée d'aller à Versailles, ce château dont tout le monde parlait avec émerveillement. Et un tel butin méritait récompense.
Je parvins, en me dégageant des curieux, au bout de la galerie des Glaces dans laquelle Louis XIV avait décidé de me recevoir. Je connaissais mal les codes de la cour, je connaissais mal les us et coutumes de la cour de manière générale mais on m'avait rapidement dit ce que je devais faire pour ne pas blesser la bienséance. J'ôtai mon chapeau à plumes et outrepassant ce qu'on m'avait demandé, posa un genou à terre.
- Qui êtes-vous ? Me demanda le souverain avec, me semblait-il une certaine curiosité.
- Je suis Arthur de Roberval, capitaine-corsaire de L'Orientale à votre service, Votre Majesté.
- Et bien ? Qu'avez-vous pour nous ?
- Le permettez-vous ?
Je levais enfin les yeux pour voir le roi, un jeune homme d'environ vingt-cinq ans à l'air impassible me faire un petit geste d'acquiescement. A mon tour, je fis un signe de la main et dans un bel ensemble, les serviteurs ouvrirent les caisses. Ce fut un « oh » général.
- Permettez-moi, Votre Majesté, de vous offrir mon dernier butin.
Louis XIV se leva et lentement, alla voir ce que je lui apportais non sans jeter un coup d’œil intéressé aux animaux (fort heureusement, le perroquet, comme s'il comprenait la gravité de l'instant, garda le silence). Quand ce fut fait, le roi m'adressa un maigre sourire qui emplit néanmoins mon cœur de fierté et de joie et me posa quelques questions sur mes activités et mon passé.
- Monsieur de Roberval, face à de tels présents, je ne peux que vous accorder une faveur en échange. Que souhaitez-vous ?
- Sire, je ne désire rien sinon ma liberté.
Il eut une brève expression de surprise :
- Votre liberté ?
- J'aimerais que soient officiellement rompus les vœux monastiques que j'ai du prononcer sous la contrainte à l'âge de seize ans, s'il l'est possible.
- Cela sera fait. Je sais que votre terre familiale est en déshérence, vous en hériterez et j'en fais une baronnie.
C'était un tel honneur que je ne pus bredouiller que quelques phrases de remerciement. Puis l'audience était terminée. Stupéfait, je restait planté là, dans la galerie des Glaces, au milieu d'un attroupement de personnes avides de détail. Je venais de gagner ma place à la cour.

J'avais déjà trente-six ans, je savais que ce n'était pas une petite vie tranquille qui m'attendait à Versailles. Non la cour tout comme Paris sont plutôt des océans agités, secoués par des tempêtes, des eaux troubles dans lesquels on ignore comment naviguer en sécurité. Mais j'avais l'habitude de louvoyer et ma personnalité, malgré mes erreurs dans la bienséance, plut. Je suis à l'aise en toute circonstance, je ne me trouble jamais. Il faut dire que je manie l'ironie avec un certain brio tout comme l'épée ce qui est bien plus utile dans un palais qu'on ne pourrait le croire. Ce jour-là, j'étais sorti dans une taverne parisienne mais j'étais reparti déçu de la qualité du rhum. J'avais hâte de reprendre la mer rien que pour cela. Le soir tombait rapidement sur la ville et je déambulais un peu dans les rues, peu pressé de rentrer. Toutefois, un bruit de bagarre attira mon attention. Je me précipitai sur les lieux où elle avait lieu peut-être par réflexe de capitaine. Je suis chargé de séparer les marins qui se frappent dessus lorsque ça tourne mal. Mais la scène n'avait rien à voir avec une bagarre de pirates. Un tout jeune homme blond, maigre et à l'air plutôt fragile était en train d'être battu à mort par deux types baraqués, armés de gourdin. Sans hésiter, je sortis mon épée et lançai :
- N'est-ce point lâche de s'acharner à deux sur un seul homme ?
Ils sursautèrent et l'un d'entre eux grommela :
- ça ne te regarde pas, étranger.
Je levai les yeux au ciel :
- Désolé, j'oubliais que les brigands n'ont pas d'honneur à défendre.
Et je me jetai dans le combat. Il était de nouveau inégal mais en faveur cette fois-ci. Je suis excellent en escrime et ce n'était pas des gourdins qui allaient me faire peur. Ils prirent rapidement la fuite devant ma virtuosité et j'en profitai pour relever le jeune garçon un peu amoché qui se confondit en remerciements.
- Il faudrait que vous appreniez à vous défendre par vous-même, je ne serai pas là à chaque fois.
Que n'avais-je pas dit ! En moins de temps qu'il fallait pour le dire, je m'étais retrouvé professeur désigné d'un prince italien, Luigi Colonna. Et si au début, ses idées me faisaient hausser les sourcils, j'apprécie sa force de caractère et sa bonne volonté. On arrivera bien à en faire quelque-chose de ce petit ! Enfin, en tout cas, un digne combattant.

Lorsqu'on organisa la délégation qui devait accompagner les ambassadeurs siamois jusqu'à Versailles, je fus désigné d'office en tant que marin d'expérience et homme de confiance de Sa Majesté. J'étais fort heureux de reprendre la mer après tout ce temps même si le voyage promettait d'être particulièrement ennuyeux sans guerre de course et bateaux à piller. Non, c'était une mission ronds-de-jambe comme j'aime les appeler. Pire, c'était L'Orientale qui devait accueillir la porte-parole de la délégation asiatique, une certaine Haydée de Lopburi. Je pensais sincèrement que c'était une jeune femme futile et sans intérêt qui vouait sa vie à essayer de plaire aux autres en soignant ses atours, je compris vite qu'elle n'était en rien cela. Au début, malgré notre cohabitation assez étroite, il y a peu de place sur un navire, nous nous croisions peu et échangions peu de paroles. Puis nous fûmes pris au cœur d'une tempête. Nous ne risquions rien mais Haydée était terrifiée et n'osait quitter sa cabine. Je suis allé la voir, j'ai tenté de la rassurer puis pour la distraire, je lui ai parlé de tout et de rien. La glace était brisée. J'ai négocié sa sortie contre des parties d'échecs quotidiennes, jeu que je devais lui apprendre.
Elle jouait particulièrement mal mais les règles étaient bien éloignées de tout ce qu'elle avait connu jusque-là :
- Et cette pièce ? Vaut-il mieux que je la mette ici ou là ?
- De toute façon, vous ne pouvez pas la placer là, c'est interdit, lui expliquais-je patiemment tout en tentant de la laisser gagner de temps en temps.
Un jour, juste après avoir posé sa tour après un déplacement interdit, elle suspendit son geste et eut une réflexion qui me surprit :
- J'aimerais savoir ce que cela fait d'être libre.
- Vous ne l'êtes pas dans votre pays d'origine ? Vous y êtes pourtant reine.
- La reine n'est autre que la première des esclaves du royaume. Vous imaginez-vous, enfermé dans une prison sans avoir le droit de sortir sans autorisation, sans pouvoir parler avec qui vous voulez ?
- Je crois que je comprends en effet.
J'entrepris de lui expliquer ce qu'était un monastère en France et pourquoi mon père avait voulu m'y envoyer.
- Mais alors comment avez-vous fait pour saisir votre liberté ? Demanda-t-elle d'une voix songeuse.
- J'ai fui.
Tout a débuté par ces simples mots. Puis notre plan fut mis en œuvre. Haydée voulait fuir sa condition, j'étais d'accord pour aider celle que je considérais comme une fille. Elle remplit son devoir auprès du roi puis s'enfuit. Je la dissimule dans ma maison et pour le moment, ceux qui la recherchent ne sont pas allés fouiller jusque-là. Mais pour la saisir, il faudra me vaincre avant ! Il n'est pas question de la laisser repartir ! C'est qu'il m'a bien changé ce petit voyage en terre de Siam...

Voilà, tu sais tout de ma vie. N'est-elle pas marquée par des aventures extraordinaires, des périls immenses et des trésors fabuleux ? Ah, cela te donne envie de repartir sur les mers. Moi aussi. Mais j'ai encore des choses à accomplir à Versailles comme mettre la main sur cette pourriture d'Assérac ou veiller à ce que Palma ou Richmond ne tentent pas un mauvais coup en douce. Oui, d'accord, je t'avoue qu'Elsa du Luxembourg y est peut-être pour quelque chose. Il faut dire qu'elle est si jolie et si prude. Même les gifles et les insultes qu'elle me lance ne me font pas fuir. Je suis sûr que je lui plais un peu et qu'elle finira par céder. C'est pour cela que j'insiste et que je continue à la courtiser. C'est d'autant plus drôle que Richmond la convoite également. Que dis-tu ? Qu'il faudrait que j'apprenne à séduire les princesses ? Tu n'as peut-être pas tort, je n'ai pas l'habitude, il y en a peu sur les mers. Est-ce que je l'aime ? C'est un grand mot. Je te rappelle que donner son cœur, c'est toujours prendre le risque de souffrir. Est-ce que ça en vaut la peine ? Je laisse chacun juge.
Bien, mon petit, nous avons perdu pas mal de temps à discuter. Je dois encore vérifier les tenures de mes paysans avant de pouvoir quitter ma baronnie. Avec l'argent que j'ai mis de côté, je pourrais peut-être réparer un peu le château. Ensuite, il nous faudra retourner à Versailles.





Dernière édition par Arthur de Roberval le 08.03.12 2:19, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 2:18

Et voilà, ma fiche est terminée Clin d'Oeil . Bonne lecture What a Face
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Philippe d'Orléans


Philippe d'Orléans

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Il a été brisé, piétiné et maintenant celui qui était à mes côtés est devenu mon ennemi. Quelle cruelle destinée !
Côté Lit: Le lit de mon palais est si confortable et accueillant !
Discours royal:



ADMIN TRAVESTIE
Monsieur fait très Madame

Âge : 27 ans
Titre : Prince de France, Monsieur le frère du Roi, Duc d'Orléans, de Chartres, d'Anjou, seigneur de Montargis
Missives : 10014
Date d'inscription : 03/01/2007


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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 2:37

TU ES VALIDÉE !
(RE)BIENVENUE A VERSAILLES

La seule chose que j'ai à dire se traduit en un smiley : **

Ta fiche est magique, magnifique, vraiment superbe, j'en suis vraiment fan, je l'ai dévorée au fur et à mesure en me disant dans ma tête "la suite ! la suite ! la suite !" comme ces feuilletons en plusieurs parties où tu te demandes ce que la suite va réserver comme surprises. Tu as super bien saisi l'histoire de Roberval, j'adore complètement ce que tu en as fait, mais bon, j'adore ton écriture et tes idées, je suis une vendue d'avance. Morgan refuse que je te valide, il s'est senti insulté dans la fiche, mais ce petit est susceptible. Dommage que vous ne vous entendiez pas, vous auriez pu boire ensemble (faut arrêter d'aller tous traîner dans les tavernes, les mecs PTDR ). Mais ce que j'adore, c'est que vous 4 personnes des mers inscrits dans le même temps et la plupart, vous pouvez pas vous saquer PTDR J'ai pensé que vous pourriez faire une bataille navale sur le Grand Canal *ZBAAF*

Mais que d'aventures, vraiment bravo, c'est une fiche superbe. La preuve, je te valide à la vitesse de l'éclair à une heure totalement improbable. Rebienvenue chez les fous avec ce personnage à part et qui va détonner à Versailles ! Tu connais la maison à force Razz
Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Versai11
PENSE PAS BÊTE ; Qui est qui ? Petit topo des personnages sur le forum.Fiches de liensFiche de rpsDemandes de rangs et de logementsProposer un scénario.

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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 10:35




Ca déchire du début à la fin .
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Amy of Leeds


Amy of Leeds

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Mère enfin apaisée et femme comblée mais pour combien de temps encore ?
Côté Lit: Le Soleil s'y couche à ses côtés.
Discours royal:



♠ ADMIRÉE ADMIN ♠
Here comes the Royal Mistress

Âge : A l'aube de sa vingt septième année
Titre : Favorite royale, comtesse of Leeds et duchesse de Guyenne
Missives : 7252
Date d'inscription : 10/09/2006


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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 12:10

MON ARTHUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUR ! What a Face cheers UN DE MES CHOUCHOUS ! I love you Oki pour le coup je suis partiale, c'est un des miens. Razz

Dire que je l'avais crée pour qu'il y ait quelques gens de la mer sur le fofo ! Bah ça a été bien rattrapé depuis Razz Du coup tu auras des coupains - coupines ! Pas le temps de t'ennuyer Razz héhéhéhé !!!

Toi et moi il faut qu'on cause d'un lien en béton bétonnant donc ! Y'a pas moyen ! What a Face

Quelle belle fiche ! What a Face

Bienvenuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuu parmi nous ! Banane
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 12:14

Bienvenue !

Je n'ai lu que le début, mais ça donne envie de monter sur un bateau pour aller faire le tour du monde avec lui ...

Ah oui, Alaina avait un message à faire passer à Arthur:

"Arthu....blup blup blup"

voilà voilà !
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 12:45

Vous savez ce qu'elle vous dit la petite Bellevue ? Boude
Andréa ne vous souhaite absolument pas la bienvenue, le canon de son pistolet, si !PTDR

Mais sinon quelle belle fiche, j'aime beaucoup on dirait un roman d'aventures ** Dommage qu'on ai décidé qu'Arthur abandonne Andréa sur une île, on aurait pu bien s'entendre PTDR

Et je suis d'accord avec Steph, bataille navale sur le Grand Canal Héros (Ferdigi) PTDR
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 14:15

Oh merci beaucoup à vous tous Heuuu . Je suis contente que ça plaise car vous me connaissez à force, je suis une éternelle insatisfaite et en relisant, je me dis que ça pourrait être franchement mieux. Mais j'avais hâte de retrouver mes camarades marins What a Face . Et je suis d'accord pour la bataille sur le Grand Canal Héros (Ferdigi) PTDR !

Steph : Merci pour tous ces compliments, venant de ta part, ça me touche vraiment Embarassed . Et aussi pour la validation éclair Razz
Amy : Je suis toujours partante pour un lien proposé si gentiment What a Face . Par contre je proteste, c'est MON Arthur maintenant (ouais, c'est grave, je suis I love you de mon personnage ^^).
Alaina : J'arriiive Héros (Ferdigi)
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Paris de Longueville


Paris de Longueville

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Une servante de ma connaissance...
Côté Lit: la servante sus-citée l'a déserté, profitez-en!
Discours royal:



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Phoebus
ৎ Prince des plaisirs

Âge : 20ans
Titre : Prince de Neuchâtel
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Date d'inscription : 12/01/2010


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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 18:08

** Han cette fiche!!

Je l'ai dévoré et j'ai voyagé en même temps....superbe!!! Very Happy

En tant que future général des galères, Vivi accepte d'être l'arbitre de la bataille des corsaires Razz
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 19:53

Bienvenuuue ! cheers (bon j'ai déjà souhaité la bienvenue à Arthur dans le flood, mais c'est pas grave ^^)

Je vais être originale : superbe fiche ! J'adore **

Amuse-toi bien avec ce personnage Very Happy
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Silvestre de Lévis


Silvestre de Lévis

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Volé par une jolie pirate
Côté Lit: Ca dépend de vous
Discours royal:



    Miaou ☀
    Mais oui! Mais oui!
    J'ai bien vu un Gros Minet!!


Âge : 27 ans
Titre : Vicomte de Vauvert, Seigneur de La Voulte et Beauchastel, Commandant du Soleil Royal (marine royale)
Missives : 232
Date d'inscription : 28/02/2012


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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 20:08

Bienvenuuuue \o/ va falloir qu'on réfléchisse à un lien *.*

Amuse toi bien avec ton nouveau perso =D
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime08.03.12 22:18

Andréa : en tant que "vieux" du forum (mais pas doyen, n'est-ce pas Léandre What a Face ?), j'ai le droit de qualifier de "petit" qui je veux, nan mais Monsieur pas content .

Merci beaucoup à tous les trois. Et c'est sûr, j'exige des liens avec Maryse et Silvestre Siffle
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Luigi Colonna


Luigi Colonna

« s i . v e r s a i l l e s »
Côté Coeur: Tant qu'il bat encore, il battra fort pour son italien, le seul.
Côté Lit: Un certain florentin le partage la plupart du temps. D'autres aussi, moins souvent ...
Discours royal:



    CASSE-COU
    1000 vies,
    un corps


Âge : 27 ans
Titre : Prince di Paliano (de la Palissade), membre de la famille Colonna
Missives : 602
Date d'inscription : 18/09/2011


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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime09.03.12 13:21

Han Roberval **

Ta fiche est juste magique, j'ai adoré vraiment **
Luigi est content, il a son maître d'armes Escrime Faudra trouver un moyen d'animer nos séances d'escrime Razz
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime09.03.12 14:40

Haaaan cette fiche quoi ** ** **
SUBLIME. C'est un beau voyage que de se plonger dans cette lecture, en plus **

Je vais encore plus me creuser la cervelle pour des liens **
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MessageSujet: Re: Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers   Arthur de R. Ψ Vieux loup de mers Icon_minitime

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