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 [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville]

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MessageSujet: [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville]   [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville] Icon_minitime11.07.10 2:28

[Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville] 04071027 [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville] 23kq42w
« C’est une grande preuve de noblesse que l’admiration survive à l’amitié.»

    Dans la psyché qui trônait fièrement dans la chambre, les chandelles disposées à l’envie, se reflétaient et démultipliaient leur doux rayonnement. Les gemmes de pendants d’oreilles qu’Evangéline venaient délicatement d’accrocher à ses oreilles scintillaient de mille feux. Tandis que sa camériste achevait de lasser ses souliers, la courtisane s’observa, l’air satisfait : Versailles avait retrouvé son âme et elle de même! Ses interminables semaines de deuil venaient enfin de se terminer et la joie qui bouillait en elle était difficilement contenable.
    Elle remarque à peine sa domestique qui s’absentait car on avait gratté à la porte. Elle vit arriver dans son dos, reflété par le miroir qu’elle ne quittait pas des yeux, l’homme qu’elle n’attendait plus. Comme elle se retournait sur elle-même, un sourire rutilant, et un brin carnassier, orna ses lèvres carmines :


    -Ah Octave ! Mes surprises sont-elles prêtes ?

    -Elles vous attendent madame.

    Evangéline, survoltée et ravie, battit des mains. Cette soirée promettait d’être la meilleure depuis des années ! D’un signe, elle congédia tout ce petit monde et sortit de sa chambre à leur suite… avant de s’en retourner prestement et de saisir au vol son masque vénitien doré qu’elle fixa à l’aide d’un ruban. Que la fête commence !

    ****

    Le portier jeta un coup d’œil derrière la dame qui se présentait à lui et ouvrit des yeux ronds comme des billes. Il en avait vu des vertes et des pas mûres tout au long de sa carrière mais là…
    Comme tous les invités avant elle, la vicomtesse présenta un petit carton sur lequel était inscrit le nom du personnage qu’elle était censée incarner et lui décocha un sourire malicieux. C’est que, par cette soirée, il ne fallait vexer aucune sensibilité : comment annoncer duc, prince, sans éventer leur identité secrète, tout en ménageant leur ego surdimensionné ?!

    Alors que le couple devant elle s’avançait enfin dans l’arène, Melle de Comborn prit une profonde inspiration, autant que son corset serré à mourir le lui permettait, et se redressa, prête à faire son entrée, tandis que ses « surprises » commençaient à ne plus savoir à quel saint se vouer !


    -Circé, magicienne d’Aéa.

    Ils furent sans doute peu nombreux, ceux qui virent l’entrée de la précieuse, mais ceux qui en furent témoins manquèrent de s’étrangler derrière leur masque. Les bals s’étaient fait rarissimes durant les derniers mois de 1665 du fait de l’agonie de la Reine-mère, et il ne plaisait rien de plus à Evangéline que de pouvoir laisser libre cours à ses instincts d’audace et de spectacle.

    Pour l’occasion, elle s’était fait confectionner une toilette de satin drapé chamoiré aux couleurs changeantes, oscillant entre un beau vert émeraude et un bleu topaze sous de légers reflets dorés. Elle avait également sacrifié sur l’autel de l’anonymat et d’une nouvelle identité, sa chatoyante chevelure brune pour un blond fauve. Son amie, Amy of Leeds, lui avait enseigné un formidable maître perruquier vénitien qui concoctait de petites merveilles, semblant plus vraies que réelles.
    Dans ses boucles repliées en un chignon labyrinthique, elle avait piqué des plumes de paon qui formaient une tiare d’yeux étranges au-dessus de sa tête. Son éventail était fait de même, et lorsqu’elle l’ouvrit, il sembla que le paon gratifiait les invités d’une majestueuse roue.

    Lorsque je parle de l’audace et du goût du spectacle d’Evangéline, je ne parle pas de cette tenue qui était, certes recherchée et étudiée, mais tout à fait dans le ton de ce à quoi elle avait habitué la Cour. Ses « surprises » en revanche…

    Alors qu’elle avançait sur le paquet rempli de courtisans grimés, elle décroisa les mains qu’elle tenait derrière son dos depuis sa chambre et les ramena devant elle. Dans ses mains, des laisses ; et au bout de ces laisses faites de rubans… d’adorables petits pourceaux !

    Mais attention ! Pas des porcs tout droit sortis de la fange, sales et malodorants ! Non ! Des versions miniatures qu’elle avait fait non seulement laver et parfumer, mais en plus revêtir de petits vestons adaptés à leur taille ainsi que de perruques bouclées en rouleaux dont se paraient quotidiennement ces messieurs de la Cour.
    Tout autour d’elle fusèrent alors des hoquets de surprise, des rires, des moues dégoûtées ou des exclamations émues et affectueuses face aux amusantes et touchantes petites bestioles. Dès lors qu’elle avait eu vent du bal et de son thème, et dès lors qu’elle s’était choisi son personnage, Evangéline avait vu cette scène. Elle était sûre de faire son effet. Un sourire autant hilare que satisfait se dessina sous son masque.
    La provocation ne faisait guère de mystère pour les lettrés qui composaient la Cour et qui connaissaient bien leur mythologie élémentaire : les quatre petits cochons étaient vêtus comme leurs contemporains mâles et « Circé » les tenaient en laisse. Que fallait-il en déduire quant à l’estime que la dame portait envers la gente masculine et de ses rapports avec les gentilshommes ?
    Eût-elle agit à visage découvert, la vicomtesse n’eût probablement pas tenté le même coup d’éclat et d’humour cependant… Quoique…

    A une courtisane déguisée en sirène qui se penchait pour câliner un pourceau, Evangéline lui mit gentiment dans les bras en disant :


    - Voici madame ! Circé n’a-t-elle pas raison de faire boire ses breuvages ? Ne sont-ils pas plus attachants sous cette métamorphose ? Et bien plus obéissants, croyez-moi !

    Le petit groupe autour de la « sirène » rit de bon cœur, et les hommes ne se firent pas prier. D’autres courtisans, pas du tout amusés par la mise en scène, se détournèrent, mais la vicomtesse n’en prit pas ombrage. Elle rendrait bientôt ses « surprises » à Octave, et celui-ci au fermier auquel il les avaient loué un bon prix, et finalement les cochons de lait retrouveraient avant l’aube les mamelles de leur mère et ne garderaient sans doute qu’un souvenir un peu effrayant de leur « passage dans le Monde »…

    Pour l’espionne bien au contraire, la soirée ne venait que de commencer. Cette foule masquée et déguisée l’excitait autant qu’elle affolait ses sens. Un soir de divertissement certes, mais jamais elle n’aurait pareille occasion de sonder le véritable baromètre de Versailles. Entres badinages et complots, la frontière est souvent mince, voire floue, voire encore inexistante…
    D’ici quelques semaines, elle devrait laisser le palais non sans inquiétude et s’en remettre à la vigilance de ses compères espions. En matière d’intrigues, Evangéline appliquait religieusement le principe selon lequel on est jamais mieux servi que par soi-même. Le temps jouait contre elle, il lui faudrait donc mettre à profit chaque minute de chaque jour qu’il lui restait à Versailles pour en découvrir le plus possible. Et cela commençait maintenant.




Dernière édition par Evangéline de Comborn le 19.01.11 9:59, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville]   [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville] Icon_minitime08.08.10 19:50

[Désolée, c'est très moyen, j'ai eu une grosse panne d'inspiration ><]

    Alors que les portes s’ouvraient lentement devant elle, Gabrielle de Longueville sentait monter son impatience et son excitation. Dans quelques instants, tous les soucis qui pouvaient l’accabler et toutes les contrariétés s’évanouiraient. Elle abandonnait à l’entrée les deuils, les conseils de sa mère et le sourire mesquin de son frère. La noblesse entière serait là autour d’elle, à rire, à dévorer et à se dévoyer. Et elle serait de la partie. La jeune femme entendait déjà les gloussements stupides des courtisans, sentait déjà les effluves délicats des mets et ceux plus agressifs des parfums. Tout ne serait que frivolités et amusements pendant une simple soirée. Une simple soirée d'oubli, d'alcool et de fête avant qu'elle ne quitte la cour pour plusieurs longs mois. Gabrielle comptait bien profiter de ce temps qui lui avait été accordé pour s'amuser avant qu'elle ne quitte Paris et Versailles dans un exil certes volontaire mais qui serait néanmoins difficile et ennuyeux. A dire vrai, elle n'était même pas censée être présente. Sa famille était en deuil depuis la mort du prince de Conti en février. Gabrielle désobéissait en connaissance de cause à la bienséance et aux ordres de sa mère qui se plaisait à lui dicter sa conduite depuis sa cellule du Carmel. Et cet état de fait l'excitait encore plus.

    Pour qu'on ne puisse soupçonner sa présence au bal de Monsieur, le premier depuis le décès de la reine mère, Gabrielle avait passé quelques jours à Paris plutôt qu'à Versailles. Sa robe noire ne l'avait point empêchée de se rendre au salon de Mlle de Scudéry avec laquelle elle venait de se réconcilier (Madeleine avait promis de ne plus réclamer la présence du frère de la duchesse lors de ses soirées) et à celui de Mme de La Sablière, passionnée de mathématiques. Madeleine de Scudéry avait passé le mot : Gabrielle ne pouvait plus supporter d'entendre encore des paroles de condoléances de la part de ces hypocrites en fanfreluches qui pensaient plaire à la duchesse. Les seuls qui avait été réellement peinés de la mort de Conti, c'est-à-dire ses amis dévots membres du Saint-Sacrement, ne s'étaient pas présentés auprès de mademoiselle de Longueville. Ils ne savaient que trop les différents qui avaient agité la famille lors de ces dernières années et avaient partagé assez de temps avec le prince de Conti pour savoir qu'il priait avec acharnement pour l'âme « noire » de sa nièce. La dite-nièce qui avait royalement ignoré la veuve lors de l'enterrement. Pas question d'adresser un regard à une Martinozzi !

    Mais Gabrielle avait décidé de faire profil bas pour la journée du bal. Il n'était pas question de se faire remarquer. Elle s'était terrée dans l'hôtel Longueville une partie de la matinée avant de se rendre en début de soirée dans l'hôtel désert des Condé. Les allées et venues dans un hôtel prétendument vide de ses propriétaires légitimes étaient moins montrés du doigt. On mettrait cela sur le compte de serviteurs zélés. Enfin, elle chargea Perrine de lui trouver un carrosse anonyme, sans blason avec lequel elle pourrait se rendre incognito jusqu'à St-Cloud. Les détails de sa petite tromperie ayant été réglé, il lui restait le plus important : se costumer de façon à se fondre dans la foule. Adieu les bijoux rutilants et les étoffes soyeuses, personne ne devait simplement soupçonner que se dissimulait une princesse de haut rang sous le masque de la déesse de la sagesse. Le déguisement avait au départ été prévu pour son amie, la marquise de Montespan, qui avait choisi « Athénaïs » comme prénom voilà bien longtemps, lorsqu’elle se rendait encore régulièrement chez les Précieuses et qu'elle avait décrété que « Françoise » était décidément bien trop commun pour une femme comme elle. Mais la marquise s'était ravisée : ce costume était bien trop évident. Elle choisit donc de se dissimuler derrière un autre visage célèbre. Et Gabrielle avait sauté sur l'occasion pour reprendre le thème d'Athéna.

    Alors que les portes s’ouvraient lentement devant elle, Gabrielle échangea un regard avec Perrine, sa meilleure amie et la personne en qui elle avait le plus confiance. Les yeux de la jeune servante brillaient derrière un masque qui dissimulait parfaitement son visage, un masque en tout point identique à celui de sa maîtresse. C'était la dernière trouvaille de la duchesse pour être parfaitement anonyme lors de cette fête. Elle s'était fabriqué un véritable sosie. Si des soupçons commençaient à se faire jour sur son identité, Gabrielle enverrait Perrine troubler le méfiant et le convaincre que non, il ne s'agissait pas de la demoiselle de Longueville. Pour ce faire, la jeune femme avait fait préparer deux costumes parfaitement semblables. De plus, Perrine avait environ sa taille et sa silhouette. Il suffisait à la jeune servante de prendre les manières de parler de sa maîtresse et sa démarche et elle pouvait tout à fait passer pour une grande dame de la cour. Pour cela, Gabrielle lui faisait confiance. Perrine était un véritable caméléon. Personne ne se douterait jamais qu'elle avait osé introduire une simple domestique à un bal princier.

    Alors que les portes s’ouvraient lentement devant elle, Gabrielle adressa un clin d'œil à Perrine, respira profondément puis se lança dans la salle de bal avec un sourire réjoui. Derrière elle, le portier balbutia une présentation, affreusement gêné par la situation :

    - Euh... Athéna, déesse de la Sagesse et de la Guerre...

    Plusieurs courtisans se retournèrent devant l'arrivée de la double Athéna et partirent en exclamations de surprise. Quelles étaient les deux femmes assez proches à la cour pour partager le même costume ? Elles étaient vêtues d'une longue robe écarlate aux reflets sombres qui soulignaient leur taille parfaite et d'un drapé de satin plus clair. Le tissu avait été moucheté de quelques perles brillantes qui donnaient un éclat particulier à leurs parures. Enfin, une abondante chevelure noire, œuvre d'un perruquier italien à la mode, couvrait leur tête. Elle avait été rassemblée en de jolies boucles qui encadraient le visage des jeunes femmes et descendaient jusque sur leurs épaules. La duchesse avait même poussé le vice à se faire créer un parfum spécialement pour l'évènement, une fragrance inédite du parfumeur de la Montespan, à la fois douce et légèrement sucrée. Pour ne pas laisser d'ambiguïté à leur parure, Gabrielle avait opté pour une entrée « en armes », avec les attributs traditionnels de la déesse dont elle avait pris l'apparence. L'entrée ayant été faite, la jeune duchesse fut soulagée de se débarrasser du casque militaire qu'elle avait sous le bras auprès d'un domestique pour se saisir d'un éventail raffiné. Perrine l'avait imitée. Les deux jeunes femmes échangèrent un dernier regard malicieux avant de se fendre dans la foule dans des directions opposées. Que la soirée commence !

    Gabrielle était arrivée tard, la plupart des invités étaient déjà présents et se pressaient dans la pièce que Monsieur avait dévolu à son bal. Le connaissant, mademoiselle de Longueville pouvait bien l'imaginer paradant au centre de l'attention générale pour admirer son œuvre. Mais elle eut beau le chercher du regard et le connaître assez bien, elle ne put le distinguer. Ainsi la famille royale entière avait choisi de ne pas se faire remarquer et de se mêler à ses loyaux sujets. Gabrielle distingua quelques uns des dieux de l'Olympe qui tenaient le rôle de Sa Majesté. Elle regretta de ne pas avoir reçu d'ordres d'Hector. Cette soirée aurait été parfaite pour toucher au roi en secret. Malgré tout, il pouvait être intéressant de reconnaître Louis et de faire de lui son obligé. Gabrielle fixa donc plus longuement l'Eros qui se tenait au fond de la salle et qui parlait avec une jeune demoiselle visiblement déguisée en grecque. Elle était très physionomiste mais elle ne le reconnut pas : une chose était certaine, ce n'était pas Louis XIV. L'attitude du roi était différente et surtout, il aurait été étrange qu'il se trouvât là à parlementer avec une jeune fille qui n'était pas la reine ni la favorite.

    Toute à ses réflexions, Gabrielle continuait d'avancer en fendant la foule. Elle n'avait pas remarqué la jeune femme déguisée en Circé qui tenait de charmantes surprises en laisse jusqu'à ce qu'elle butât contre l'une des surprises en question. Le porcelet poussa un cri de contestation qui affola une partie des courtisans aux alentours.

    - Qui peut bien donc crier ainsi ? S'amusa un jeune César.
    - Mon dieu, une demoiselle en détresse ! Se moqua un autre courtisan endimanché à la manière des turcs.

    Gabrielle se sentit affreusement gênée et reporta sa colère sur la pauvre dame qui ne lui avait rien demandé :

    - Mais enfin, madame, vous pourriez faire attention à ne point laisser ces... Bêtes dans le passage !

    Mais l'effet de gêne passé, alors que Circé se débarrassait des petites créatures roses qui avaient l'air fort aimable loin de leur lieu d'habitation naturel, Gabrielle ne put que reconnaître l'ingéniosité et l'esprit de la dame.

    - Est-ce donc là une manière de traiter les hommes ? Continua-t-elle en laissant échapper un petit rire.
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MessageSujet: Re: [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville]   [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville] Icon_minitime14.12.10 15:20

    Que la Cour était bien plus agréable pleine de frivolités et d’humour ! La lumière seyait mieux au teint des courtisans que le noir du deuil. Versailles n’était pas bâti pour la tristesse, encore moins la tristesse feinte. Evangéline ne se privait pas d’agir comme si rien ne s’était passé, comme si ces derniers mois devaient être chassés d’un simple revers d’éventail. Si elle voulait des mines cireuses autour d’elle, elle se serait enfermée dans un quelconque couvent ! On avait besoin de rire entre ces murs et c’était dans cet esprit que la vicomtesse s’était préparée pour ce Bal des Dieux, d’où la présence de ses petits pourceaux endimanchés. Ils faisaient pour elle le tri de ses compagnons de soirée : ceux qui s’en offensaient, elle les laissait volontiers à leurs grands airs et ne cherchait pas leur compagnie pour ce soir ; ceux qui s’en amusaient devaient être dans les mêmes dispositions qu’elle pour profiter sans retenue du moment et laisser s’exprimer au grand jour une bonne humeur trop longtemps contenue.

    Alors qu’un cri aigu de porc retentit et suscita les rires de l’assemblée, une voix féminine apostropha sèchement Evangéline qui n’avait rien vu de la scène, occupée à plaisanter avec quelques gentilshommes autour d’elle.


    - Mais enfin, madame, vous pourriez faire attention à ne point laisser ces... Bêtes dans le passage !

    En se retournant, Circé se trouva nez à nez avec Athéna. L’accoutrement de la Déesse de la Guerre était si impressionnant, si criant de vérité, que la vicomtesse se trouva un instant saisit d’une crainte respectueuse qui la rendit muette. Pour tout dire, elle songea que la dame qui était dessous devait être fort hardie et gaillarde pour avoir eu les épaules de revêtir l’armure d’Athéna. Evangéline fut également saisi d’étonnement en se souvenant qu’il lui semblait avoir vu passer au loin, quelques minutes auparavant, les chatoyantes couleurs d’un autre avatar de la Déesse, cette fois sous les atours d’allégorie de la Sagesse…
    Au bout de quelques secondes, la Déesse laissa tomber le masque de la guerrière terrible, visiblement touchée par les marionnettes miniatures de Circé, échappa un rire qui plut aux oreilles de la vicomtesse et qui la fit sortir à son tour de sa torpeur.


    - Est-ce donc là une manière de traiter les hommes ?

    Evangéline, toujours ravie de partager l’effet qu’elle aimait produire, répliqua avec humour et audace :

    - Allons, ne semblent-ils pas bien heureux, bien roses et bien vifs ? J’en connais d’autres qui auraient bien tout autant la mine un peu porcine et qui ne sont pourtant pas si adorables !

    Quelques messieurs qui suivaient d’un œil amusé la scène joignirent leurs rires au sien. L’autodérision était bien nécessaire à la Cour si l’on ne voulait pas rajouter plus de ridicule qu’on ne voulait bien nous en prêter. Une fois débarrassée des hilarants, quoiqu’encombrants, pourceaux, la vicomtesse se rapprocha d’Athéna et continua d’avancer avec elle à travers la foule costumée.

    - Nous disposons chacune de nos armes face à ces messieurs… Quoique, j’admire la votre : vous présidez à l’excitation de leurs passions et de leur vanité qui les poussent à s’entretuer, en donnant à leurs chimères des lettres de noblesse ! Nous ne sommes que des novices, nous avons beaucoup à apprendre de vous, chère Athéna.

    En temps normal, Melle de Comborn n’était pas embarrassée par la langue de bois. Plus exactement, elle aimait fort laisser transparaître le fond de sa pensée sous couvert d’humour ou de plaisanterie, de façon a priori inoffensive et courtoise, ne devant ouvertement vexer aucune sensibilité, mais qui était en réalité fort limpide pour qui voulait bien le comprendre. Cette effronterie était décuplée par le port du masque et elle espérait bien qu’il en soit de même avec les amateurs de complot. Jamais leurs bavardages traites ne trouveraient meilleur accueil que dans son oreille si complaisante…

    A un page, également masqué, Circé prit deux coupes de champagne et en tendit une à sa compagne en armure. Il n’y avait rien tant que les énigmes qui amusait la vicomtesse, en quelques poignées de minutes elle avait déjà pu reconnaître un certain nombres de figures de la Cour sous leur nouvelle identité bien que tous les invités aient fait des efforts considérables pour soigner leur déguisement. Pourtant, elle ne réussit pas à mettre un visage et un nom derrière l’apparence de la Déesse… Allons bon, elle y parviendrait bien d’ici à la fin de la soirée ! Tandis qu’elle plongeait ses lèvres dans le liquide ambré et savourait le picotement des bulles sur sa langue, le regard bleu d’Evangéline balaya la foule.


    - Je me suis fait la promesse de venir à bout du leurre pour découvrir Sa Majesté ce soir… Puis-je compter sur la sagesse d’Athéna pour m’aiguiller et pour partager ce jeu? Tenez, ne serait-il pas en Apollon votre frère ?

    Le roi Louis aimait si souvent prendre l’apparence du Dieu des Arts qu’à vrai dire, Evangéline aurait été déçue s’il avait fait preuve de si peu d’originalité pour ce soir…
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MessageSujet: Re: [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville]   [Bal] La chouette et le faucon: rencontre au sommet... de l'Olympe [Gabrielle de Longueville] Icon_minitime22.01.11 22:16

    Gabrielle de Longueville, bien dissimulée derrière son masque de déesse guerrière, jeta un coup d'œil à la foule des courtisans qui se pressait autour d'elle. Certaines dames riaient, rejetant leur tête en arrière pour laisser apercevoir leur gorge blanche aux jeunes hommes à qui elles parlaient. Au centre de la piste de danse, tournoyaient des robes de multiples couleurs au rythme de la musique entraînante que monsieur de Lully avait dû composer spécialement pour l'occasion et pour plaire au duc d'Orléans qui recevait. Des serviteurs se frayaient un passage parmi des César et des Hélène de Troie pour laisser couler à flots ce fameux champagne qui picotait la langue et rendait la compagnie plus joyeuse. La douce lumière émise par les milliers de bougies qui tremblaient au-dessus des têtes laissait des coins d'ombre dans cette grande salle, endroits idéals pour se dissimuler et observer. La cour était friande de ces soirées de faux-semblants où l'on ne savait à qui on engageait la conversation, où petite et grande noblesse se mêlait sans montrer aucun souci des convenances et de la bienséance. Après avoir passé de longs mois à déplorer la mort d'une femme dont beaucoup n'avait que faire, elle était enfin dans son élément naturel, la fête. Elle souffrait et s'amusait en même temps que son roi. Non, corrigea Gabrielle, elle souffrait et s'amusait quand son roi le lui demandait. Et alors que la jeune femme prêtait de nouveau attention à la charmante Circé devant elle, elle s'en voulut de prendre du plaisir à se trouver là.

    Le sourire de la magicienne montrait assez qu'elle était ravie de l'effet qu'elle produisait et, que ce fût le masque qui l'incitât à se montrer si audacieuse ou pas, elle répliqua avec esprit que des hommes partageaient sans nul doute plus de traits communs avec la gente porcine qu'il ne le faudrait. Gabrielle laissa échapper un petit rire charmant qui ne laissait pas de doute sur ce qu'elle pensait de la réplique de sa jeune compagne. Déjà son esprit travaillait à tenter de deviner qui se trouvait devant elle. Avant de se rendre à ce bal, elle se disait que la tâche serait simple. Elle était très bonne physionomiste et très observatrice, aucune de ses connaissances ne pourraient lui échapper. Mais à se trouver parmi la foule, elle se sentait quelque peu dépassée. Aucun des membres de la famille royale n'était visible du premier coup d'œil et cela la déconcertait plus qu'elle n'aurait su le dire. Ils s'étaient plus pris au jeu qu'elle ne l'aurait cru. Même Sa Majesté ne paradait pas dans un costume d'Apollon couvert d'or. Même le duc d'Orléans lui-même, pourtant le premier à tenter de se faire voir à la cour par ses costumes extravagants, était invisible alors qu'il aurait du être la personne la plus fardée et la plus incroyable ! Comment retrouver Marie-Louise de Chevreuse dans une telle pagaille ? Cette dernière, après avoir refusé de lui dévoiler son déguisement, lui avait assuré qu'elle la retrouverait. Gabrielle la maudit en pensée. Cette fille était stupide et surtout parfaitement irresponsable !

    - Quel dommage que Circé ne soit pas capable d'user de son pouvoir à l'inverse et de faire des animaux de la cour des hommes plein de charme et d'esprit ! Hélas, elle aurait bien du travail, je suis bien d'accord avec vous, répondit distraitement Gabrielle à la boutade de Circé.

    Éros venait de réapparaître dans son champ de vision et cette fois-ci, Gabrielle était certaine qu'il ne s'agissait pas du roi. Par contre, la jeune femme à qui il parlait, elle finit par la reconnaître en plissant des yeux. C'était sa cousine, la petite de Noailles qui n'avait pas eu d'autre idée plus originale que de se déguiser en la fidèle Pénélope. Pourtant, elle ne riait pas aux plaisanteries de son époux, cela paraissait évident aux yeux de la duchesse. Mais enfin, elle savait qu'elle le connaissait ! Pourquoi sa langue ne parvenait-elle pas à mettre un nom sur cette silhouette si parfaite ?

    Déjà, Circé entraînait sa nouvelle compagne dans un sens opposé à la scène qu'observait celle-ci et lui fit servir du champagne. Gabrielle plongea ses lèvres dans le liquide ambré et sentit la douceur de la boisson couler dans sa bouche. Malgré elle, elle sursauta aux paroles de la magicienne. Cela ressemblait si peu à Marie-Louise de lui faire un compliment même derrière des masques. Pourtant, elle venait de prononcer le mot de code qu'elles s'étaient donné pour la soirée et pour être certaines de se reconnaître. Il s'agissait de « chimère ». En réalité, la phrase exacte qu'aurait dû prononcer la fatigante duchesse était « ce ne sont que des chimères » mais Marie-Louise était une personne frivole et il ne serait pas étonnant qu'elle se fût trompé. Ce ne serait pas la première fois. Gabrielle sentit son cœur battre un peu plus vite et elle palpa la lettre qu'elle dissimulait dans sa large manche. La duchesse n'avait pas l'occasion de revoir Hector avant son départ de la cour, c'était la raison pour laquelle elle voulait lui faire passer ce pli par le biais de Marie-Louise. Une fois de plus, cette dernière montrait qu'elle était totalement inconséquente et cela ne manquerait pas d'être souligné à son cher frère de cœur qui faisait une confiance tout à fait coupable à cette intrigante de second ordre sous prétexte qu'elle était la fille d'une frondeuse aussi stupide qu'elle.

    - Êtes-vous certaine de vouloir apprendre de moi, chère Circé ? Athéna ne sait qu'éloigner les hommes loin de leur foyer en se jouant de leur aveuglement et de leur désir de surpasser leur voisin. La guerre exile les époux pendant de nombreuses années et laisse nombre de veuves éplorées. Athéna s'est convenue de ne pas connaître l'amour, Circé a, quant à elle, vécu la passion avec Ulysse même s'il est reparti pour Ythaque. Je ne sais ce qui est préférable. L'amour n'est-il qu'une chimère ?

    Cette dernière question n'était qu'une façon d'insister sur ce mot pour voir la réaction de Circé. Gabrielle regardait à présent sa compagne avec un œil tout à fait nouveau. La voix, le regard, la silhouette, tout cela pouvait correspondre à la Chevreuse. Mais cette dernière aurait-elle réellement choisi de se déguiser en un personnage aussi modeste que la magicienne d'Homère ? Si les porcelets étaient une manière de se faire remarquer qui aurait amplement satisfait la jeune femme, aurait-elle eu assez d'esprit pour faire une surprise de cette nature à la cour ? Mais comme l'idée que cette personne puisse être Marie-Louise lui avait été suggérée, Gabrielle avait désormais l'impression que tous les gestes, que les manières de se comporter de cette femme étaient ceux de sa complice même si elle était loin de se douter que ce n'était pas le cas. La réponse qu'apporta Circé à sa réplique la satisfaisait. Et sans s'en rendre compte, Evangéline entraînait la duchesse dans un coin un peu plus sombre que les autres afin de pouvoir observer la foule à son aise. Ce fut cela qui convainquit définitivement Gabrielle qu'il s'agissait bien de Marie-Louise. Elle se promit de la morigéner la prochaine fois qu'elle se trouverait toutes les deux. Elles n'étaient pas là pour faire des jeux de cache-cache, cela était bien trop dangereux. Gabrielle se pencha doucement vers l'oreille de sa compagne comme pour lui faire une confidence et rapprocha sa main de celle de Marie-Louise. Elle laissa glisser la lettre dans sa main avant de la donner à la jeune duchesse qui tressaillit.

    - Donnez-la lui le plus rapidement possible. Tout y est expliqué. Et je vous en prie, pouffez pour ceux qui nous regarderaient. Après tout, vous savez faire cela tellement bien !

    Après cette pique qu'elle venait de lui chuchoter, Gabrielle jeta un regard éloquent à la jolie comploteuse. Elle tenait à ce qu'Hector ait ce pli de main à main car il était d'une importance capitale. Marie-Louise serait sans nul doute profondément vexée de voir que la jeune femme l'avait cacheté pour éloigner les regards curieux de celle-ci. Évidemment, elle n'était pas stupide au point de l'avoir fait avec le sceau familial mais avec celui dont elle se servait lors des échanges de lettres avec Hector. Elle avait même pris la peine de coder ses écrits intégralement. Elle y contait en effet les raisons de son départ précipité en province, la façon dont elle avait appris que la favorite était grosse et le plan qu'elle avait prévu sans entrer dans les détails. Il serait bien temps de tout raconter quand tout cela serait terminé et si elle parvenait à remplir les objectifs qu'elle s'était fixés. Hector serait furieux de n'avoir été prévenu qu'après coup mais il importait que son nom ne fût jamais évoqué à propos de cette affaire. Gabrielle reprit une contenance pour parler d'une voix beaucoup plus forte et à l'amusement forcé :

    - Je ne puis que vous confirmer que le roi n'est pas Apollon, Sa Majesté ne ferait jamais un tel rond de jambe, cette personne est bien ridicule. Hélas, j'ignore derrière quel masque il peut bien se dissimuler, il semble bien qu'il ait décidé de se jouer de sa cour, ce soir. Qui sait ? Peut-être n'est-il pas même l'un de ces douze dieux ?

    La duchesse de Longueville esquissa un léger sourire. Elle aurait tout le temps de repenser aux événements qui l'attendait lors de son voyage. Elle devait dès à présent profiter de cette dernière fête à la cour, fête où elle n'était pas même censée se trouver.

    - Mais dites-moi, ma chère, que comptez-vous faire du roi un fois que vous l'aurez démasqué ? Et s'il-vous-plaît, ne me dites pas que vous voulez le transformer lui aussi, ce serait bien dommage d'avoir un porcelet à la tête du royaume, le pauvre aurait bien du mal à gouverner !
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